Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par Simbabbad (27 juin 2021) Il est des adages que l'on entend distraitement tout au long de sa vie, sans trop y faire attention, jusqu'à ce que leur bien-fondé vous tombe dessus, et notamment celui-ci : "plus on vieillit, plus on se rend compte de l'importance de ses origines". Arrivé à un âge respectable, je réalise que c'est très vrai, sur de nombreux plans : culturel, social, psychologique... dernièrement, c'est sur le plan ludique que cette vérité s'impose à moi, puisque je néglige des jeux modernes pourtant très tentants pour me replonger (de façon presque littérale, comme on va le voir) dans la machine qui, pourrait-on dire, m'aura façonné : l'Amstrad CPC. L'Amstrad CPC, comme sans doute les autres ordinateurs 8-bits, n'était pas juste une machine de jeux, c'était une expérience. Tout d'abord, même si l'on croyait avoir berné ses parents en prétendant vouloir un ordinateur pour apprendre l'informatique et non pour jouer, le fait est que ces machines sensibilisaient de gré ou de force au fonctionnement d'un ordinateur, à la programmation, et à l'informatique en général : lignes de commandes, BASIC, hexadécimal, bugs, cracks, copies (ah, les jeux incompréhensibles sans manuel), magazines spécialisés, différences entre les versions ZX Spectrum, Amstrad CPC et Commodore 64 d'un même logiciel... même si on n'avait eu que le jeu comme but initial, on se retrouvait forcément en avance au collège lors des premiers cours du fameux plan Informatique pour tous. Ensuite, et c'est lié au point précédent, les jeux sur ordinateurs 8-bit n'étaient pas, comme les jeux sur consoles de salon, l'œuvre de game designers japonais s'inspirant des règles de l'arcade, mais celle d'informaticiens occidentaux ressemblant beaucoup à une partie du public de ces machines. Et donc, leurs jeux cherchaient davantage à tester des concepts parfois bizarres ou à concrétiser de vastes environnements abstraits plutôt qu'à reposer sur des bases de gameplay éprouvées : souvent, le codeur sur micro ne se souciait pas de son public, il explorait librement les possibilités offertes par son ordinateur, il jouait avec sa curiosité, son inventivité, son univers personnel, ses astuces de programmation et ses délires, et cela donnait parfois des choses merveilleuses. Sepulcri, de l'écossais Chris Sawyer (auteur de RollerCoaster Tycoon, tout de même), est emblématique de mon vécu avec l'Amstrad. D'abord, comme l'essentiel de la ludothèque CPC, le jeu est un portage, cette fois-ci ne venant pas du ZX Spectrum, du Commodore 64 ou de l'arcade, mais du MTX de Memotech, un obscur et éphémère cousin du MSX, non compatible avec ce dernier, et ayant coulé sa compagnie à cause d'une transaction ratée avec l'URSS (ah, la guerre froide, toute une époque)... le portage a été amélioré visuellement par un graphiste, mais il est autrement presque identique à l'original (Sepulcri Scelerati sorti en 1985, Sepulcri sort l'année suivante). Comme on le voit sur les captures d'écran (MTX à gauche, CPC à droite), Sepulcri est un jeu d'action/aventure en 3D isométrique, genre très populaire à l'époque et typique de l'Amstrad CPC et du ZX Spectrum depuis Knight Lore (1984). On y joue un robot miniaturisé devant explorer les entrailles du SDIS, l'ordinateur en charge de la défense mondiale (la guerre froide, toujours), avec comme objectif le test de chacun des 50 microprocesseurs de la machine (pour tester une puce, il suffit de sauter dessus). Une fois son travail effectué, le robot doit ensuite valider un protocole de sécurité, puis il peut enfin quitter les lieux. C'était une erreur : Sepulcri est bien plus qu'un simple clone de Knight Lore ou Alien 8. Une famille plus diversifiée qu'il n'y paraîtQuand on a connu le contexte de l'époque, on peut comprendre la lassitude d'avoir à tester un nouveau jeu en 3D isométrique : la révolution apportée par Knight Lore avait causé une avalanche de titres d'un intérêt parfois discutable, la critique ludique d'alors manquait de repères, et les jeux étaient très difficiles d'accès (dur de se faire une opinion si l'éditeur d'un jeu ne vous fournit aucun élément explicatif, si vous n'arrivez pas à y dépasser le cinquième écran, et si vous avez sept autres jeux à tester dans la pile). La tentation de juger un livre par sa couverture était grande, d'autant que les jeux étaient souvent très répétitifs. Par exemple, beaucoup de ces jeux n'avaient pas du tout la composante d'aventure ou de réflexion de Knight Lore, et étaient des jeux d'action utilisant peu ou pas l'axe vertical. On peut citer parmi eux (ci-dessous et dans l'ordre) Nightshade et Gunfright (tous deux de Ultimate), puis l'excellent Highway Encounter et Amaurote. Ces jeux auraient pu aussi bien se jouer en 2D vue du dessus, et dans certains cas leur gameplay en aurait grandement profité (gain de lisibilité, de fluidité, de ressources techniques et donc de possibilités ludiques)... la 3D isométrique était là un moyen d'être beau, spectaculaire, moderne. Qui dit atmosphère dit jeux d'aventure, et nous avions là une autre branche distincte de la formule ludique de Knight Lore : après tout, le moteur graphique conçu par Ultimate s'appelait Filmation, il est donc logique qu'il ait été utilisé pour des adaptations de film comme The Great Escape, Nosferatu, La Abadía del Crimen (tiré du Nom de la Rose), ou des jeux comme Fairlight, MOVIE, ou L'Ange de Cristal (suite de Crafton & Xunk). En fait, ces titres résultaient de l'ambition alors typiquement européenne de s'affranchir des contraintes du jeu vidéo de l'époque, des graphismes stylisés, du gameplay stéréotypé, des alibis et des univers clichés... la 3D isométrique était un moyen de placer "physiquement" le joueur au cœur d'un monde détaillé, crédible et vivant, d'attirer l'attention et de gagner le respect du grand public en cassant l'image qu'il pouvait avoir du jeu vidéo, et de profiter, sur le plan des mécaniques ludiques, d'une palette très large à disposition (exploration, usage d'objets, labyrinthe, interaction avec des personnages non-joueurs, puzzles, action, etc.) avec, grâce à un rythme plus lent, l'usage potentiel du clavier, et donc, des dizaines de fonctions à disposition, voire un interpréteur de texte. Cette volonté de "casser le moule" et de se rapprocher du cinéma, de la bande dessinée ou de la littérature se retrouvait beaucoup chez ERE Informatique (L'Arche du Captain Blood) par exemple, ou, plus tard, à une époque où la puissance graphique des ordinateurs a permis de s'affranchir de la 3D isométrique, chez l'américain Cinemaware (Wings, It Came from the Desert). Et au final, il faut bien admettre que dans le paysage vidéoludique moderne, peu de jeux s'écartent des sentiers battus comme l'avaient fait The Great Escape ou La Abadía del Crimen... Nous avons évoqué les jeux d'action puis les jeux d'aventure en 3D isométrique, restent ceux qui avaient une position intermédiaire entre l'un et l'autre genre. Inutile de dire que là, l'amalgame était total chez les critiques, avec des sentences comme : "si vous avez aimé Knight Lore, Pentagram est fait pour vous", ce qui est encore plus bête que de dire : "si vous avez aimé Super Mario World, Sonic the Hedgehog est fait pour vous". En réalité, Knight Lore ne s'est pas contenté d'inventer un rendu graphique et de se positionner à un croisement de genres, il est né d'une formule que Ultimate a fait mûrir au cours de son histoire, notamment par le biais de l'excellent Atic Atac - la voici :
Il faut noter que cette formule ne s'applique pas qu'aux jeux en 3D isométrique, on la retrouve dans d'autres chefs-d'œuvre 8-bit comme Impossible Mission sur Commodore 64. L'idée centrale est d'avoir deux niveaux de lecture : un niveau "arcade", premier degré, instinctif, excitant (voler un objet malgré un piège à la Indiana Jones, accéder à une plateforme élevée malgré la menace d'une mort certaine, un petit puzzle logique) ; et un niveau supérieur, plus lent et prémédité, qui joue sur la liberté d'exploration et d'initiative, et qui inscrit chacun des défis ponctuels dans un tout d'envergure (la gestion des objets nécessaires à la recette de Melkhior dans Knight Lore, la construction de la carte dans Spindizzy, les codes arrachés aux scientifiques à l'aide des sérums de vérité dans Crafton & Xunk, la reconstitution des cartes perforées dans Impossible Mission). Or, non seulement cette formule ne correspondait pas à tous les jeux d'action/aventure exploitant Filmation, mais le cas était en fait rarissime. Beaucoup de jeux, comme Hydrofool (que j'aime bien par ailleurs, superbe musique), proposaient certes un immense labyrinthe, mais de pièces à peu près vides ; et inversement, Batman et Head Over Heels avaient certes une densité de défis correcte, mais étaient très guidés (voire linéaires) sans beaucoup de liberté d'action... Au final, en plus de Sepulcri, je dirais que les seuls jeux 8-bit en 3D isométrique qui suivaient la formule de Knight Lore étaient (dans l'ordre, ci-dessus) lui-même, Alien 8, Spindizzy et Crafton & Xunk. Bien sûr, chacun avait ses particularités : Alien 8 était une version "plus" de Knight Lore, plus riche, plus inventive, plus complexe, plus dure, le jeu était à Knight Lore ce qu'a été Banjo-Tooie à Banjo-Kazooie ; Spindizzy a substitué aux mécaniques de jeu de plateformes celles de Marble Madness et a remplacé les puzzles environnementaux par des jeux d'interrupteurs ; Crafton & Xunk était plus dense et mettait davantage en avant l'usage des objets afin de neutraliser les ennemis, ouvrir des portes, construire des barricades et marchepieds... Mais tous, quoi qu'il en soit, trouvaient le même formidable équilibre entre le bonheur de l'action immédiate - quasi comparable avec celui d'un jeu à tableaux - et le souffle d'une grande aventure, que l'on pouvait de surcroît orienter différemment à chaque partie. Pas étonnant que ces quatre jeux aient eu autant de succès. Ce ne fut pas le cas de Sepulcri. Plus proche de Spindizzy que de Knight LorePlus haut, je me suis indigné que l'on ait traité Sepulcri comme un banal clone de Knight Lore, puis je me suis aussitôt ingénié à démontrer qu'il faisait partie des rares jeux qui suivaient de près la même formule ludique. Qu'est-ce qui différencie donc Sepulcri de Knight Lore ? Déjà, joystick/gamepad/clavier en mains, on remarque vite que les défis proposés par les salles de l'un et de l'autre n'ont pas tout à fait le même style : les défis de Sepulcri sont plus "premier degré" que ceux de Knight Lore, reposant plus sur des mécaniques basiques de jeu de plateformes 8-bit (sauts millimétrés, esquive des ennemis) que sur des pièges ou des puzzles. Dans Sepulcri, on ne peut pas porter d'objet, il n'y a pas de plateformes mouvantes ou qui disparaissent (il y a par contre des "tapis roulants", des blocs d'apparence normale mais qui nous poussent dans une direction), et les éléments interactifs se limitent à des sortes de tables que l'on peut pousser au sol. Sepulcri est différent ; il suit une logique de jeu de plateformes old school, comme Pitfall ou Donkey Kong, avec une courbe de saut unique (Knight Lore permet deux puissances de saut) et rigide : ici, le moindre obstacle contrariant la trajectoire de notre héros entraîne immédiatement une chute à la verticale. Cela implique que l'on ne peut pas sauter sur un bloc si on est collé contre lui au moment du saut - on a, si l'on veut, "besoin d'élan". Bien sûr, le level design du jeu en tient parfaitement compte, ce qui rend son platforming plus difficile, plus exigeant, mais aussi plus "carré", faisant de Sepulcri une sorte de Jet Set Willy en 3D, avec des sauts devant parfois être exécutés littéralement au pixel près. Les salles complexes mais d'apparence simple sont légion. Mais cette caractéristique crée également des contraintes dans notre liberté de mouvements. Notre robot mesure pile un bloc de côté, s'il tombe entre quatre blocs, il ne disposera donc d'aucun élan, et ne pourra ainsi en sortir qu'en se suicidant (touche "TAB"), et, plus important, son exploration est du coup sans cesse entravée par des obstacles franchissables dans un seul sens. C'est là l'autre particularité de Sepulcri : sa logique de labyrinthe est nettement distincte de celle de Knight Lore. Le labyrinthe de ce dernier est en pratique strictement plat, constitué uniquement de salles carrées et de couloirs droits, avec des portes toujours placées bien au milieu de ses murs ; il est ultra lisible, et de plus organisé de façon très libre et ouverte, on pourrait s'y repérer avec un plan stylisé qui n'indiquerait pas ses issues. Le labyrinthe de Sepulcri est très imbriqué, avec des salles de tailles et de formes variées, de multiples emplacements possibles pour ses portes, un réel usage de la 3D avec plusieurs (sept) niveaux superposés, des pièces occupant deux étages en hauteur (voire trois, dans un cas), des trous, et, donc, des passages à sens unique, énormément de passages à sens unique... alors que le tracé du labyrinthe de Knight Lore est bizarrement déconnecté du contenu de ses salles, ses défis étant comme des sculptures posées au hasard dans le dédale d'une exposition, Sepulcri a lui une vraie architecture ludique devant être pensée comme un tout organique, avec une logique de "flot" qu'il faut savoir apprivoiser, comme pour un circuit intégré. À ce propos, il faut bien comprendre le caractère titanesque de la mission du héros de Sepulcri. Knight Lore est un jeu très, très difficile mais encore accessible, Alien 8 est bien plus dur, Spindizzy est encore un net cran au-dessus au point que le vaincre paraît hors sujet, et Sepulcri est quant à lui dans un autre plan d'existence, entre R'lyeh et Kadath. Ami lecteur, c'est un joueur qui a vécu, grand amateur de labyrinthes, qui te l'assure : je n'ai jamais vu de dédale aussi complexe que celui de Sepulcri, dans toute ma vie de joueur. Un jeu de fou, par un fou, pour les fousSepulcri est à part, mais à l'époque on ne pouvait pas le savoir, car on n'avait tout simplement pas les outils pour l'appréhender. À l'ère des ordinateurs 8-bits, sa difficulté ahurissante se fondait dans le paysage : que ce soit en 3D isométrique ou en 2D, les jeux qui vous abandonnaient au milieu d'un labyrinthe de plus d'une centaine d'écrans avec un nombre de vies dérisoire, un objectif flou, un manque de repères flagrant, une maniabilité parfois discutable et un gameplay souvent injuste (façon "je t'ai bien eu") étaient légion (et le tout sans sauvegarde, bien entendu). On parle souvent de la difficulté des jeux sur console NES, mais sur ordinateurs 8-bits, la difficulté était délirante. Je me souviens de mon état de nerf pathétique après avoir fini Cauldron avec des vies infinies (pour être récompensé par une ligne de texte), sans parler de la maniabilité démente de la citrouille de Cauldron II, que personne n'aurait osée sur consoles. Je me souviens de jeux comme Jet Set Willy ou Jack the Nipper 2, où l'on jugeait qu'une session de jeu était un grand succès si l'on y découvrait un écran jusque-là inconnu. Je me souviens de Thanatos, qui exigeait énormément de patience et de méthode tout au long d'un début que l'on connaissait par cœur, pour ensuite nous confronter à des passages pouvant nous tuer en quelques secondes sans que l'on ait eu le temps de comprendre le pourquoi du comment. Alors, bien sûr, il y avait des jeux où l'on pouvait gagner sans tricher, ou dans lesquels sa persévérance permettait au moins de progresser de façon visible, et c'était en général les grands classiques de chaque machine - ce qui n'est pas une coïncidence. J'ai fini Sorcery assez souvent, ainsi que Crafton & Xunk à force d'obstination, j'ai même terminé Knight Lore (le jeu, qui faisait partie d'une compilation U.S. Gold, a planté précisément à ce moment-là, j'étais assez contrarié)... mais dans l'ensemble, le joueur sur micro-ordinateur 8-bit se sentait comme une mouche écrasée par une enclume, et il s'en accommodait : jouer était alors une promenade dans un monde abstrait, fascinant, où tout était possible, et moins une activité ludique - ce que le film TRON restitue magnifiquement, et, comme on l'a souligné plus haut, ce qu'aura compris Paul Shirley en concevant Spindizzy. Sepulcri incarne tout cela à la perfection, parce qu'on y explore littéralement l'intérieur d'un ordinateur (j'ai compris 25 ans après pourquoi on y était confronté à des têtes de béliers : bélier se dit ram en Anglais), et parce que la disproportion entre ce que l'on a à y faire et les moyens que l'on a pour le faire est tout bonnement cyclopéenne. Adolescent, je trouvais que le jeu dégageait une ambiance profondément effrayante, m'y sentant comme les héros de Cube, le film canadien de 1997 : complètement perdu dans un labyrinthe immense, stylisé, coloré et incompréhensible, et menacé de mort à chaque pas. Plus de deux décennies plus tard, Internet et l'émulation ont changé la donne. On peut maintenant faire autant de sauvegardes que l'on veut, on a à notre disposition toutes les versions pirates d'un jeu avec vies ou temps illimités, les manuels et les plans sont à quelques clics de portée, des outils intégrés permettent de bidouiller en direct la mémoire vive de la machine, et surtout, les joueurs communiquent plus facilement entre eux, s'entraidant avec des guides, des captures d'écran et même des vidéos montrant parfois l'intégralité d'un jeu, scène de victoire comprise. Avec Sepulcri, c'est le contraire. D'abord, parce que jusqu'à ce que j'en fasse l'analyse, le plan, et des vidéos, Sepulcri était pour ainsi dire absent d'Internet, avec pour seuls contenus des fichiers pour l'émulation (dont la moitié sont bugués et injouables), des fiches techniques, et des critiques sommaires dans des listes - virginité que je prends pour un signe patent de son aridité. (Cliquez sur chaque image pour l'afficher en grand format) Une version de ce plan en une seule image est disponible sur CPC-POWER (dézoomé à 50% il est très lisible) avec le fichier de la disquette source (un autre dump sans bug et avec vies et batterie infinies se trouve sur Planet Emulation). Je m'excuse des petites distorsions opérées sur certaines salles ; bien que le jeu soit dans l'ensemble remarquablement précis malgré son invraisemblable complexité, il n'est pas totalement cohérent spatialement, et de petits compromis ont dû être effectués. Exhibé ainsi dans son entièreté, je trouve le jeu magnifique, très proche de l'esthétique de TRON. Afin de se rendre compte de la grande variété de son platforming, de la finesse de ses puzzles, de la précision de son level design, et surtout du soin diabolique apporté à son tracé, je vous encourage bien sûr à y jouer sous WinAPE par exemple, ou, à défaut, à suivre mon parcours dans cette vidéo, mais toujours tout en se référant au plan, indispensable à la bonne compréhension du jeu. Quelques remarques et anecdotes :
Ce qui frappe, dans cette horlogerie d'une richesse ahurissante, c'est l'état d'esprit de Chris Sawyer. Voici quelqu'un qui conçoit l'architecture la plus complexe que j'ai jamais vue dans un jeu 8-bits (et de très loin), et il le fait pour un jeu publié sur... le MTX de Memotech, une machine fantôme dont à peu près personne n'a entendu parler. Et quand il effectue un portage de son jeu sur un ordinateur raisonnablement populaire, il rend plus dure et plus longue son œuvre déjà absurdement inaccessible. S'il y a bien un logiciel qui illustre le fait que les concepteurs de l'époque ne tenaient aucun compte de leur public, c'est Sepulcri. Sepulcri est ingérable si on ne peut pas en consulter un plan, mais si on en a un, l'analyser pour y planifier son parcours est un vrai régal. Devenu enfin abordable, on peut alors agréablement jouer au jeu pour le gagner à l'aide des sauvegardes et des vies et batterie infinies, et même joué à la régulière, il se révèle être un jeu à scores très motivant : Sepulcri accorde 250 points pour chaque puce testée, 20 points pour chaque salle découverte, et un gros bonus en cas de victoire ; en optimisant ses déplacements grâce au plan, en tenant compte de la durée de vie de sa batterie et en apprenant à dompter les dangers du SDIS (on n'a que cinq vies et aucun moyen d'en gagner d'autres), on peut aller assez loin et réaliser des progrès réguliers. J'espère avoir contribué à casser l'anonymat d'un jeu remarquable, symbole d'une époque dans son esprit, sa représentation, son esthétique, et l'absurdité de son inaccessibilité originelle (à quoi bon créer plus de 250 pièces si on ne donne pas au joueur les outils pour les visiter) ; et, qui plus est, tournant sur une machine pour laquelle j'ai toujours énormément d'affection, plusieurs décennies après avoir découvert les jeux vidéo. À vous de jouer ! Simbabbad (27 juin 2021) Sources, remerciements, liens supplémentaires : Cet article a été publié initialement sur le blog de Simbabbad, à cette adresse. Envie de réagir ? Cliquez ici pour accéder au forum |