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Pitfall!
Année : 1982
Système : Atari VCS
Développeur : Activision
Éditeur : Activision
Genre : Plate-forme
Par Lyle (26 juin 2008)

Cet article a été écrit dans le cadre de la rubrique des "jeudi découvertes", d'où un format un peu particulier. La découverte de la semaine est dédiée au jeu le plus vendu de l'Atari 2600 : Pitfall!, véritable ancêtre de presque tous les jeux de plates-formes aux côtés du vénérable Donkey Kong (1981) de Nintendo.

On peut voir Pitfall! comme l'ancêtre de Prince of Persia ou Rick Dangerous Les séquences plates-formes sont encore rudimentaires, mais les pièges, les possibilités de chutes et la place du timing sont suffisamment importants pour confirmer la filiation. Le jeu se déroule sur deux niveaux, le sol et les souterrains. Les deux sont parfois reliés par des échelles. Vous ne perdez aucune de vos trois vies si vous tombez dans un trou (franchissable avec un simple saut) mais il faudra alors sortir des souterrains infestés de scorpions et encombrés de portes infranchissables.

La progression se fait écran par écran, et dès le début du jeu on peut progresser par la gauche ou pour la droite. Vous devez éviter des serpents, des torches, sauter par dessus des marais en utilisant une liane ou en sautant sur des crocodiles (seulement quand ils ont la gueule fermée) et surtout sauter par dessus les troncs d'arbres qui traversent l'écran de droite à gauche. Dans un souci de variété, David Crane, l'unique concepteur du jeu, a essayé de réagencer de toutes les façons possibles l'ensemble des difficultés. A eux seuls, les troncs d'arbres modifient complètement le timing requis pour les sauts.

David Crane dédicaçant une cartouche de Pitfall! (merci au site http://secretfunspot.blogspot.com/).

David : En fait, les premiers essais de Crane sur Pitfall! remontent à 1979. C'est cette année-là qu'il a créé son petit personnage courant et sautillant partout, en réaction aux autres jeux de l'époque qui mettaient très souvent en scène des engins de guerre. Ce n'est qu'en 81 (l'année où sortit au cinéma Les Aventuriers de l'Arche Perdue) qu'il a commencé à fabriquer l'univers dans lequel Harry, aventurier intrépide, allait évoluer. On peut donc réellement parler de Pitfall! comme étant le premier jeu de plates-formes jamais conçu. David Crane, dans une interview au magazine Retrogamer : "Even early on in development, it was clear that this was a milestone in videogames - the first 'platform' game. It opened complete new worlds of exploration-style games. Pitfall! did spawn an entire genre of games: there were more than 600 'platform' games released to the market following Pitfall! - a clear example that imitation is the sincerest form of flattery".

Autre obstacle, les marais qui disparaissent et réapparaissent régulièrement. Dans un esprit très Indiana Jones, le premier que l'on rencontre est placé juste devant un trésor. La route semble sûre, on avance, confiant, pour voir le sol se dérober sous les pieds du héros. Sûrement l'une des premières occurences de pièges "sadiques" dans l'histoire du jeu vidéo. La collecte des trésors permet d'augmenter son score (de plusieurs milliers de points à chaque fois), mais tout contact avec un tronc d'arbre diminue légèrement ce dernier. Enfin, la partie est limitée à 20 minutes. Pitfall!, c'est donc du "score attaque", comme on dirait en shoot'em up.

NdT : Pitfall! a été adapté sur presque tous les supports de l'époque : ici les pochettes des versions Colecovision, MSX, Commodore 64 et une étrangeté trouvée sur le net qui semble être une version "alternative" d'une pochette VCS (à moins qu'il ne s'agisse d'un fake amusant).

Atari_Frog : Je pense que David voulait dire le premier jeu de plates-formes qui soit aussi dynamique. Pouvoir jouer sur autant d'écrans (plus de 200) dans un cadre où on a vraiment l'impression d'être le héros (merci à Indiana Jones au passage), c'était unique à l'époque !

La plus grande qualité de Pitfall!, et qui a forcément contribué à son succès à l'époque, c'est son indiscutable précision. Les collisions sont logiques, le mouvement des lianes est réaliste, leur utilisation aussi, la courbe et l'amplitude de saut sont justes, l'action va à la bonne vitesse. Bref, le gameplay ne pouvait être mieux huilé. On le sait, un bon jeu d'action c'est d'abord une "physique" cohérente. Evidemment, la variété est très relative, et beaucoup d'écrans reviennent régulièrement, mais le fait que l'on puisse trouver la jouabilité aussi propre et plaisante en 2007 permet de comprendre sans trop de difficultés pourquoi tant de joueurs ont pu être séduits par Pitfall! au début des années 80.

Devant le succès, plus de quatre millions de cartouches vendues sur la seule VCS, Pitfall! connut une suite en 1984. Sega acquit les droits pour une conversion arcade tandis qu'Activision porta le jeu sur tous les supports de l'époque (de gauche à droite : VCS, Apple II et ZX Spectrum).
D'autres suites virent le jour sans plus jamais arriver à marquer les esprits comme le jeu original de David Crane : Super Pitfall sur NES et TRS-80 en 1987, Pitfall : The Mayan Adventure en 1994 sur la plupart des supports de l'époque, Pitfall 3D : Beyond the Jungle sur Playstation en 1998, Pitfall : The Lost Expedition sur tous les supports de l'époque en 2004 et Pitfall : The Big Adventure sur Wii en 2008.

Sodom : Un hit incontestable (et d'ailleurs incontesté) de la VCS. La précision de son gameplay est vraiment ce qui surprend le plus quand on aborde ce jeu pour la première fois : certains pièges ont beau lui donner un petit cachet Die & Retry, Pitfall! laisse avant tout le joueur prendre ses responsabilités dans la manière d'aborder les différents obstacles et ennemis, et c'est ce qui le rend si bon ! Une citation illustrant l'impact de Pitfall! avant même sa sortie et que l'on peut retrouver parmi les anciennes "phrases du jour" : « J’avais fait apparaître une image à l’écran. C’est alors que le type qui avait conçu le chipset de l’Atari 2600 entra dans mon bureau. Il fixa l’écran pendant un moment, puis il laissa tomber. Après que je lui eus expliqué ce que j’étais en train de faire, il secoua la tête et dit : ‘J’ai conçu le processeur, et je découvre seulement maintenant ce qu'il est capable de faire !’ » (David Crane, pendant le développement de Pitfall!)

Lyle
(26 juin 2008)