Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par LVD (03 mai 2018)
La Super Famicom, on l’oublie trop souvent en Occident, a connu pour ainsi dire deux périodes d’existence. La première, commune au monde entier, durant laquelle sont sortis la plupart des hits que tout le monde connaît (Super Mario World, Zelda 3, Street Fighter 2, etc.), en gros de 1991 à 1994. Et puis, les consoles 32 bits sont arrivées, et de manière très rapide ont quasiment balayé les 16 bits du devant de la scène, même si sporadiquement quelques très rares jeux sont sortis du Japon comme Street Fighter Alpha 2 ou Terranigma fin 96. Bref, ce fut une ère courte mais très intense. Au Japon, les choses se sont passées différemment.
Mais alors que la plupart des titres que j’ai cités sont généralement au moins connus de nom des gamers occidentaux, Energy Breaker, lui, fait plutôt figure d’illustre inconnu. Je vous rassure, au Japon également. Et c’est bien dommage. Même s’il n’atteint pas le niveau des ténors du genre, il n’en reste pas moins un très bon jeu que l’histoire a scandaleusement oublié. Il était une fois...L’histoire se déroule intégralement sur l’île de Zamuria ; le monde a autrefois été détruit lors d’une guerre entre deux divinités. L’héroïne, Maira (ou Myra, je ne sais pas comment retranscrire), se réveille alors qu’elle a tout oublié de son passé... Première surprise : Maira a 21 ans. Pour un RPG japonais, c’est vieux ! Elle est limite bonne pour l’hospice. Si on met de côté une gamine d’une dizaine d’années, il n’y a aura aucun personnage de moins de 20 ans parmi le groupe de héros. Non que cela changera grand chose, mais cela fait plaisir pour une fois de diriger autre chose qu’une troupe d’ados qui part sauver le monde. À propos de sauver le monde d’ailleurs, on ne peut pas dire que cela transparaisse vraiment dans le scénario, car le terrain de jeu est ridiculement réduit. Comme je vous l’ai dit juste avant, toute l’histoire se déroule sur une seule île, qui contient en tout et pour tout DEUX villages, et moins d’une dizaine de donjons : vous allez donc devoir faire de très fréquents aller-retours. Notons par ailleurs que bien que restant une rumeur, il se pourrait que Zamuria se situe dans le monde de la série de jeux Estopolis/Lufia (dont on voit carrément deux persos en caméo !). À l’origine, le titre devait proposer huit personnages, chacun d’eux pouvant jouer le rôle principal, le soft devenant donc multi-ending. Ce projet sera finalement annulé pour quelque chose de plus conventionnel. Pourquoi ? Alors attention, il s’agit d’une simple hypothèse, mais il est possible que la date de sortie du jeu y soit pour quelque chose. Energy Breaker est arrivé dans les échoppes fin Juillet 96. Alors oui, comme j’en parlais dans l’introduction, la Super Famicom se portait encore très bien, mais tout de même. Faire un jeu plus long aurait encore repoussé sa sortie, peut-être à 97. Développé par Neverland (surtout connu pour les Estepolis ; la série se poursuivra jusque sur DS puis la société fait faillite en 2014) mais édité par Taito, ce dernier a peut-être préféré se concentrer sur la Playstation et la Saturn, et a donc peut-être un peu mis la pression pour sortir le jeu rapidement. Mes quelques recherches sur le Net japonais semblent aller dans ce sens bien que, encore une fois, rien ne soit confirmé. Une réalisation de rêve, un gameplay... particulierS’il y a un point sur lequel Energy Breaker est inattaquable, c’est bien sa qualité de réalisation. Tout en 3D isométrique, avec des sprites souvent assez gros et bien animés et des graphismes très fins, c’est un régal visuel. Sorti de ceux de Squaresoft, peu de titres sur la console peuvent se vanter d’atteindre un tel niveau. On appréciera également tout un tas de petits détails comme des effets de lumière ou aquatiques. Concernant la bande-son, c’est plutôt réussi également. Si on n’a pas la grâce d’un Nobuo Uematsu (au hasard), les musiques sont très agréables et collent bien à l’ambiance, particulièrement durant les moments calmes ou mélancoliques. Le soft est un Simulation-RPG/Tactical-RPG (prenez l’appellation que vous voulez), mais pas que. Les combats sont du Tactical pur et dur, mais le reste s’en éloigne. Alors que dans la plupart des titres du genre, on se contente d’enchaîner les batailles entre deux séquences de scénario à base d’écrans fixes, ici, à l’instar d’un RPG standard, on est totalement libre de ses mouvements, on peut visiter les villages, retourner dans des lieux déjà visités, etc., exactement comme dans l’excellentissime Shining Force 2 de la Megadrive. Il est également possible de TOUT fouiller, à un point où cela en devient parfois presque ridicule. Sans la notice, ou au pire une FAQ, il n’est pas vraiment évident à comprendre. Chaque personnage dispose de points à repartir dans les quatre éléments (terre, feu, eau, vent), chacun d’eux étant lui-même séparé en deux sous-catégories (lumières ou ténèbres). Leur nombre est très réduit au début, il faudra atteindre 56 points pour le maximum. Dans la pratique, les persos les plus forts comme Maira ou Leon y parviendront dès les deux-tiers du jeu, les autres vers la fin. Ce sont de ces points (nommés « Balance Points ») que dépendront directement vos possibilités d’action. Qu’il s’agisse de se déplacer, d'attaquer, d'utiliser un objet ou une magie, chaque action vaut tant de points par tour. En début de partie, ce sera plutôt du genre 1 déplacement + 1 attaque de base ; à la fin vous pourrez espérer 1 déplacement + 3 attaques de base (voire 4 attaques si vous n’avez pas besoin de bouger). À propos du déplacement, la 3D isométrique fait que lorsque vous devez grimper une côte, cela vous coûtera davantage de points. Et si un ennemi vous fait face en hauteur, inutile de dire qu’il sera avantagé. Le déplacement/positionnement est donc un élément clé du gameplay, sachant qu’il existe un sort de téléportation souvent bien pratique. Cependant, Energy Breaker propose une idée que j’ai trouvée très appréciable pour son réalisme : les Balance Points dépendent de vos points de vie. Si, par exemple, il ne vous reste plus que 5 HP sur 50, votre perso sera juste inutilisable ! Trop épuisé/blessé, il sera incapable de bouger ou d’attaquer, au mieux pourra-t-il utiliser un objet de soin, mais le résultat ne sera effectif qu’au tour suivant.
Une fois un combat terminé, on récupère tous ses points de vie, les éventuels morts sont ressuscités, et les altérations d’état sont annulées. À propos des attaques, si vous prenez un ennemi de côté ou mieux, par derrière, les dommages augmenteront. Par ailleurs, il y a contre-attaque automatique si on attaque de face sur une case adjacente. Lorsque votre tour se termine, tâchez donc de faire face aux adversaires les plus proches. Venons-en au système d’équipement qui est à mon sens le défaut majeur du titre. Pas de mise en commun ici, chaque protagoniste possède son propre sac, qui dans un premier temps peut contenir jusqu'à... 8 malheureux objets, armes et armures incluses ! Un autre item permet de passer à 15, mais même là, cela reste faible... Sachant que l’équipement occupe déjà 4 cases, vous rajoutez 3 objets de soin, un ou deux parchemins, les objets trouvés dans des coffres, et c’est tout de suite rempli. Il est ensuite possible de transférer les objets d’un personnage à l’autre (sauf en combat, là où évidemment on en a le plus besoin), mais c’est assez pénible. Franchement, à part pour l’équipement, on aurait aimé un écran unique pour tous les persos. Je vais prendre un peu de ceci, un peu de celaQuand on connaît un tant soit peu la ludothèque RPG de la console, on est frappé par un aspect d’Energy Breaker : ce dernier mange un peu à tous les râteliers et repique des trucs à droite à gauche, que ce soit au niveau du système de jeu ou de l’histoire. Par exemple :
... et je suis sûr qu’on pourrait en trouver d’autres, comme le système d’alignement qui rappellera certains Langrisser). En reprenant ainsi divers éléments, le jeu donne un peu l’impression de créer sa propre tambouille, de qualité certes, mais qui manque un peu d’originalité. Hélas, si Energy Breaker est un bon jeu, il souffre aussi de certains points noirs qui l’empêchent de figurer sur le podium des meilleurs titres du genre de la SFC. Concernant l’histoire, d’abord : comme je suis grand amateur de paradoxes temporels et autres uchronies, l’idée de voyages temporels à la Chrono Trigger m’alléchait au plus haut point. Or, cet aspect sera très peu, trop peu exploité, tant dans la trame principale qu’au plan des mini-quêtes... vu qu’il n’y en a quasiment pas ! Ensuite, comme je le disais plus haut, les persos sont sympas mais pas transcendants non plus. La fin, qui est assez triste (le jeu dans son ensemble n’est pas très gai d’ailleurs), relève un peu le niveau mais cela ne suffit pas. Je pense là encore que les programmeurs ont été pris par le temps et n’ont pas pu développer autant qu’ils l’auraient voulu. Le titre n’en reste pas moins de très bonne facture, avec une réalisation somptueuse, et vous y passerez un bon moment. Une traduction amateure est disponible depuis quelques temps, donc pas d’excuse. Bien entendu, on lui préférera des softs comme Bahamut Lagoon, mais si vous avez torché tous les classiques de la console et que vous êtes en manque, alors Energy Breaker saura répondre à vos attentes. Un avis sur l'article ? Une expérience à partager ? Cliquez ici pour réagir sur le forum (11 réactions) |