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Super Mario RPG: Legend of the Seven Stars
Année : 1996
Système : SNES
Développeur : Squaresoft
Éditeur : Nintendo
Genre : RPG / Plate-forme
Par MTF (30 mai 2011)

Il y a des jeux qui affichent la couleur, directement. À peine les premières minutes sont-elles passées que l'on sait que tel jeu Kirby sera une promenade de santé, que Final Fantasy VI sera épique, qu'Another World sera d'une difficulté honteuse. Et il y en a d'autres qui se terrent, qui se dissimulent, qui s'ignorent, pourrait-on même dire. Super Mario RPG est de ceux-ci. D'apparence enfantine, au challenge que l'on peut juger, de façon hâtive, inexistant, il est comme silène et dissimule des trésors à qui aura la patience, et le goût, de l'éprouver.
C'est un jeu à la fois étrange et jouissif, perturbant et stimulant : et si on enlevait ceci et cela, ajoutait ceci et cela, on aurait, comme vous le verrez, un véritable chef-d'œuvre.

À marquer d'une pierre blanche

Si ce jeu est d'ores et déjà exceptionnel, c'est qu'il est la conjonction de nombreuses « dernières » et « premières » fois, notamment :

  • Il s'agit du dernier jeu de la Super Famicom et de la Super Nintendo (version américaine) à mettre en scène comme héros le personnage de Mario.
  • Il s'agit du dernier jeu réalisé par Squaresoft pour Nintendo jusqu'en 2002 (avec Chocobo Land: A Game of Dice sur Game Boy Advance).
  • Il s'agit de la première fois que l'univers des jeux Mario est utilisé pour un jeu de rôle.
  • C'est la première fois que Mario prend une douche.

Première fois aussi que l'on voit la maison de Mario, à gauche, et qu'on fait équipe avec Peach ou Bowser...

Etc., etc. La liste pourrait continuer longtemps encore. D'un point de vue « historique » pourrait-on dire, Super Mario RPG fait figure de Napoléon dans la fresque des jeux vidéo sur console ; il n'a l'air de rien, il est assez petit mais sans lui, rien n'aurait été fait. Je dis cela en connaissance de cause : car comme vous vous en apercevrez, le jeu introduit un certain nombre d'éléments maintes fois repris dans les épigones de Super Mario RPG, que ce soit la série des Paper Mario ou des Superstar Saga.
On ne peut cependant s'empêcher de penser que ce titre fait également office de « chant du cygne » pour la console. Sortie en 1996, à quelques mois à peine de l'arrivée de la Nintendo 64, il me semble clair que Nintendo n'a pas voulu exporter le jeu en Europe pour ne pas se gêner lui-même. Jusqu'en 2008, il fallait donc passer des moyens plus ou moins légaux pour s'y essayer ; mais à présent, il se trouve être disponible sur la Console Virtuelle de la Wii à « un prix qui fait rire » comme dirait Vincent Poursan, l'occasion rêvée de franchir le pas. Le jeu est identique à la version originale, si ce n'est quelques modifications graphiques occasionnelles portant sur des effets pouvant créer des crises d'épilepsie et qu'il se joue, bien évidemment, à la manette « classique ». Sachez cependant que si vous êtes un anglophobe primaire, il existe un excellent patch de traduction sur Internet, trouvable ici. Je vous laisse vous renseigner sur les manipulations à faire, mais vous verrez, il n'y a rien de bien complexe.

Ces lits m'ont toujours semblé douillets, et la forêt regorge de secrets (et ça rime !)

Un air de déjà-vu...

L'histoire commence paisiblement. Non loin de la maisonnée de Mario, la princesse Toadstool se repose en cueillant des fleurs. Soudain, le ciel s'assombrit et une mystérieuse figure fend le ciel pour l'enlever... Il s'agit de Bowser, dans son ULM à face de clown ! Ni une ni deux, Mario laisse sur le feu sa soupe de champignons et se rend immédiatement dans le château du susnommé. Après avoir affronté quelques tortues guère résistantes, le plombier s'engage dans un combat épique. Ce dernier se déroule dans les hauteurs de la salle du trône : tandis que la princesse est ligotée au plafond, les adversaires se toisent, chacun sur un chandelier.
Mario, comprenant que la situation nécessite du tact, concentre ses forces sur la chaîne qui suspend celui où Bowser le défie. Rapidement bien sûr, l'attache se brise emportant le reptile dans une chute sans fin et Mario s'apprête, une fois de plus, à sauver la Princesse de son coeur...

Une introduction hilarante.

Tout à coup, un tremblement de terre ébranle le château. Une épée aussi géante que mystérieuse fend le ciel, ne manquant pas de disperser à des kilomètres d'elle sept étoiles colorées. Le choc rapatrie Mario dans sa maisonnée, mais il repart immédiatement à l'attaque. Et tandis qu'il se retrouve au-devant de la porte du donjon, l'épée lui parle... Elle clame l'appartenance de ce domaine au nom du « Smithy Gang » et d'un clignement de cil, détruit le pont de pierre, seul chemin d'accès. Contraint de reculer, Mario va devoir trouver le moyen de revenir au château et de délivrer la Princesse.

'va falloir faire le tour.

L'aventure menée par Mario sera riche en rebondissements. S'avançant tout d'abord vers le Royaume Champignon, il y fait la connaissance d'un curieux personnage qui ressemble à un nuage, Mallow, qui lui affirme être un têtard et qui l'accompagnera dans son épopée. D'autres héros les rejoindront : Geno, une poupée à qui la vie fut miraculeusement donnée, la Princesse elle-même et le roi des Koopas en personne, bien décidé à dégager cette épée de son beau château.
Qui sont ces sbires aux ordres de « Smithy », et que veulent-ils ? Que signifient ces sept étoiles dispersées aux quatre vents ? Mallow est-il vraiment une grenouille ? D'où vient Geno ? Autant de questions auxquelles il vous faudra répondre dans une aventure riche, y comprises en surprises...

Un air de déjà-vu (de trois-quarts)...

Commençons par ce qui frappe immédiatement en jouant à Super Mario RPG, et ce qui lui confère cette patte si particulière, à savoir ses graphismes. La vue choisie par les développeurs est une perspective cavalière que connaissent bien les habitués de Solstice ou de Landstalker. Si j'en vois sourire, les autres sans doute serrent les dents, et avec raison. Il faut un temps d'adaptation certain pour naviguer dans les nombreuses zones du jeu, et s'habituer à la correspondance entre le pad et l'écran. Encore, les choses sont plus agréables qu'ailleurs, car les directions enregistrées correspondent à la direction prise par Mario : la touche haut le fait monter verticalement, la touche droite horizontalement etc. ; il faudra ainsi s'habituer à utiliser énormément les diagonales. Si le coup est pris assez rapidement, cela peut en revanche être un calvaire dans les phases de plates-formes...
Eh oui, il y a des phases de plates-formes dans ce jeu. Je dirai même que le jeu se décompose en deux univers distincts : il y a d'une part les phases de combat, sur lesquelles je reviendrai, où les codes du jeu de rôle, et notamment de Final Fantasy s'appliquent, et les phases d'exploration des mondes, dans lesquelles la plate-forme tient une place prépondérante. On aura donc droit à des sauts millimétrés, à des plates-formes mobiles ou temporaires, à des passages secrets même. Vous apprendrez rapidement à haïr certains passages obligés du jeu, comme cette phase où il faut escalader une falaise en bondissant de plates-formes minuscules en plates-formes minuscules, ou encore, vers la fin du jeu, rebondir sur des écrous pour les faire avancer (comme dans les forteresses volantes de Super Mario Bros. 3). Ces phases sont limitées, fort heureusement, car cela aurait pu aisément taper sur les nerfs ; mais on les appréhende lourdement. Sans cela malgré tout, il peut être difficile de jauger un saut, ou de savoir exactement si une plate-forme est accessible ou non, si elle se situe au même plan que nous ou non. On progresse par l'erreur, cela se traduisant souvent par une chute dans un précipice et le droit de recommencer la séquence plus ou moins depuis le début. Ce sera là, je crois, l'unique et véritable défaut que j'imputerai au jeu.

Vous allez détester ces phases, je vous le garantis.

La vue de trois-quarts possède en revanche un charme indéniable et participe à la création d'un monde très plastique, comme j'ai pu l'évoquer pour Little Big Adventure. On retrouve là cette impression étrange de « pâte à modeler » et de « faux », de maisons de « playmobil » que j'aime plus que tout. Les univers sont clos, fermés sur eux-mêmes : impossible d'aller au-delà des limites proposées par le jeu. Le reste est rempli d'une couleur unie, bleue ou noire le plus souvent, donnant l'impression que l'ensemble « flotte » dans les airs. Déstabilisant, mais judicieux, je pense, pour épargner la console qui sans cela aurait surchauffé. Faisant partie des derniers grands jeux d'envergure de la Super Nintendo, rien n'a été laissé au hasard : effets de distorsions, mode 7, magies qui remplissent l'écran, musiques de très bonne qualité... La dame grise crache ses tripes en un dernier baroud d'honneur et presque quinze ans plus tard, n'a rien perdu de sa beauté.
Cette perspective cavalière est aussi l'occasion pour les développeurs de jouer avec nos sens. Il ne faut pas hésiter à tout explorer, à aller derrière les maisons ou les buissons, à faire attention au moindre élément du décor : de nombreuses portes dérobées et de blocs cachés attendent celui qui saura prendre son temps. On ne parcourt pas Super Mario RPG à toute vitesse, mais nonchalamment, comme tranquillement bercé par le rythme de l'aventure. Si certains jeux de Square sont volontiers épiques, ce qui se traduit par une grande nervosité de notre part souvent, celui-ci est paisible, pastoral même par moment : c'est une promenade dans un jardin, et non la conquête de l'univers.

J'adore ce style graphique pour les environnements.

Du classique et du baroque

Parlons à présent des combats. Le système est classique, il s'agit d'affrontements au « tour par tour » : la statistique de vitesse détermine dans quel ordre les personnages agiront. Lorsque c'est à un des héros de jouer, il a le choix entre quatre menus, correspondant chacun à une touche de la manette :

  • Le bouton A lance la commande « Attaque ». Le personnage attaquera un ennemi avec l'arme équipée.
  • Le bouton Y ouvre le menu « Magie ». Le personnage utilise alors un sort de magie, qui peut être d'attaque, de soutien ou de soin, n'être dirigé que contre un ennemi ou plusieurs, etc.
  • Le bouton X ouvre l'inventaire. Le personnage peut utiliser un objet sur lui ou un de ses compagnons, ou encore une arme sur ses adversaires.
  • Le bouton B permet de se défendre ou de fuir.

Cette répartition intelligente permet de ne pas se perdre dans d'interminables menus, et même d'agir en se concentrant uniquement sur les « commandes actions ». Élément à présent récurrent dans les RPG Mario, lorsque le joueur effectue une action quelconque lors d'un combat, que ce soit une attaque physique, un sort ou l'utilisation d'un objet, il doit appuyer de nouveau sur la touche correspondante à un moment précis pour augmenter l'effet prévu : augmentation des dégâts physiques ou magiques, obtention d'un freebie (l'objet utilisé n'est pas supprimé de l'inventaire) ou meilleure chance de fuite. Les attaques physiques des adversaires répondent de la même logique, pour se défendre cette fois-ci (à l'exception des attaques magiques qui ne peuvent être bloquées). Connaître ses timings est une nécessité, car cela permet de progresser bien plus agréablement dans le jeu : et c'est même parfois la seule façon de vaincre un boss. Si les combats se font donc au tour par tour, il ne suffit pas d'appuyer négligemment sur les boutons sans regarder son écran pour remporter la victoire, mais être toujours attentif à ce que l'on fait.
Au niveau des statistiques, rien d'extravagant : on retrouve des éléments de force, de défense, de force magique, de défense magique, de chance, de vitesse, des points de vie et des points de magie. Ceux-ci sont symbolisés par des « points fleurs ». Il est à noter que contrairement aux autres statistiques qui augmentent avec la montée en niveau, on ne peut augmenter son capital de « points fleurs », que du reste tout le groupe partage, qu'en récupérant des objets « fleurs » de par le monde : Flower Tab (incrémentation de 1), Flower Jar (incrémentation de 3) ou Flower Box (incrémentation de 5). Comme on en remporte certains par l'intermédiaire de mini-jeux, pas deux joueurs ont le même nombre de « points fleurs » à un stade précis de la partie, même si leur nombre maximal est fixé à 99. Autre chose qui peut surprendre, mais le niveau des personnage est bloqué arbitrairement à 30. Une fois le seuil atteint, le personnage ne progressera plus ; mais encore une fois, de partie en partie, les statistiques diffèrent selon les joueurs. En effet, à chaque niveau gagné, le jeu nous propose de « booster » ou bien les points de vie, ou bien les statistiques d'attaque/défense physique, ou d'attaque/défense magique. Si au début du jeu on opte souvent pour l'augmentation la plus forte (cela va généralement de 1 à 5 points pour une statistique donnée), il faudra par la suite faire preuve de subtilité : il faudra bien entendu que Peach, qui jette des sorts, ait de grandes caractéristiques magiques tandis que Bowser, le mastodonte du groupe, ait les points de vie les plus importants. Bref, sur un canevas qui semblait gravé dans le marbre, il y a suffisamment de libertés pour personnaliser un minimum son équipe.

Au cours de l'aventure, vous serez amené à diriger cinq héros. Voici une petite fiche descriptive de leurs caractéristiques, et des magies gagnées en cours de jeu : celles-ci sont obtenues à des niveaux précis, plus ou moins similaires pour tous.

Mario

Mario, le seul, l'unique, le véritable héros de cette aventure ! Ses armes de prédilection oscillent entre le coup de poing pur et dur, le marteau ou encore la carapace de tortue. Personnage plutôt polyvalent, il est bon à la fois en attaque physique et en attaque magique. L'orientation de ses statistiques se fera donc selon votre style de jeu. Je préfère personnellement ses attaques physiques, qui font des dégâts convenables à tous, sauf contre les ennemis immunisés à celles-ci évidemment.
Ses pouvoirs magiques sont de deux catégories : les sauts fonctionnent surtout contre les ennemis volants, tandis que ses autres sorts sont d'élément feu.

  • Jump (niv. 1), Super Jump (niv. 6), Ultra Jump (niv. 14) : les sauts « super » et « ultra » peuvent être répétés jusqu'à 100 fois chacun avec le bon timing des commandes actions. Difficile, mais pas impossible, votre persévérance sera récompensée.
  • Fire Orb (niv. 3), Super Flame (niv. 10), Ultra Flame (niv. 18) : des sorts de feu particulièrement destructeurs. Un incontournable, même en fin de jeu.

Mallow

Un curieux personnage qui ressemble à un nuage et pense être un grenouille. Premier compagnon de route de votre aventure, Mallow est très faible physiquement. Il est en revanche un mage accompli, qui maîtrise trois éléments : la foudre, la glace et les étoiles (qui fonctionnent contre toutes les affinités). Indispensable en début de partie, je l'ai cependant rapidement délaissé en faveur de Peach.

  • Thunderbolt (niv. 1), Shocker (niv. 10) : des sorts de foudre. Le premier frappe tous les ennemis à la fois, le second un seul mais est bien plus puissant. Un must contre les fantômes et les créatures aquatiques.
  • Hp Rain (niv. 3), Psychopath (niv. 6) : sorts « annexes ». Le premier redonne de la vie à un personnage, le second permet de lire les statistiques de l'adversaire... et ses pensées ! Pratique parfois pour trouver sa faille.
  • Snowy (niv. 14) : seul sort de glace du jeu, il sera très utile à la fin de l'aventure où nombre d'ennemis ont cet élément comme seule faiblesse.
  • Star Rain (niv. 18) : sort passe-partout, cher à la dépense mais très pratique contre les hordes d'ennemis.

Geno

Une poupée devenue vivante grâce à un sort magique. Personnage également très porté sur les sorts d'attaque, je ne l'ai pourtant jamais réellement trouvé utile... Mais il faut dire que j'ai un style de jeu plutôt « rentre-dedans ». Si vous êtes fanatique des sorts magiques, c'est le personnage à utiliser plutôt que Mallow. Ses sorts, sauf Geno Whirl (élément vent) n'ont pas d'affinités élémentaires.

  • Geno Beam (niv. 1), Geno Blast (niv. 14), Geno Flash (niv. 17) : des sorts d'attaque qui touchent un ou plusieurs ennemis.
  • Geno Boost (niv. 8) : un des sorts de soutien les plus utiles du jeu, il augmente les caractéristiques d'attaque et de défense si vous utilisez la « commande action » de façon permanente.
  • Geno Whirl (niv. 11) : un sort vent. Si la « commande action » est correctement rentrée (ce qui n'est pas une mince affaire...), le sort peut faire 9999 points de dommage, ce qui équivaut à la mort immédiate de tous les ennemis.

Bowser

Le roi des Koopas est le « tank » de cette aventure. Pas la peine d'utiliser ses sorts magiques (il n'en a que quatre du reste), il faut qu'il ait un maximum de vie et de force. Il se battra à la force de ses poings, avec des boules à piques... ou en jetant Mario sur ses adversaires !

  • Terrorize (niv. 1) : un boo géant apparaît et réduit la force et la défense de l'adversaire.
  • Poison Gas (niv. 12) : empoisonne l'ennemi.
  • Crusher (niv. 15), Bowser Crush (niv. 18) : des sorts d'affinité terre. Le premier ne touche qu'un ennemi, le second tous les ennemis présents.

Toadstool

La princesse champignon se joindra à vous rapidement dans l'aventure, et elle est le personnage de soutien de l'équipe, aux nombreux sorts de soin. Il est possible de l'équiper pour la rendre quasiment insensible à tous les dégâts, et elle vous sauvera la mise plus d'une fois.

  • Therapy (niv. 1), Group Hug (niv. 1), Come Back (niv. 13) : des sorts de soin. Le premier n'agit que sur un personnage, le second sur tous, le troisième fait revivre un personnage (avec la moitié de ses points de vie, ou leur intégralité si la « commande action » est réussie). À noter que les sorts de soin guérissent également les altérations d'état.
  • Sleepy Time (niv.11), Mute (niv. 15) : des sorts de soutien. Le premier endort, le second empêche d'utiliser des sorts magiques. Ils ne marchent qu'une fois sur trente, je déconseille de les utiliser...
  • Psych Bomb (niv. 18) : un sort d'attaque particulièrement faible, à n'utiliser qu'en dernier recours.

Étant donné que Mario fera constamment partie de votre groupe, vous aurez, en fin de partie, deux combinaisons réellement viables : Mario, Bowser et Peach, mon équipe de prédilection, orientée vers les coups physiques ; ou alors Mario, Geno et Peach, orientée vers les sorts magiques. Mallow, hélas ! fait rapidement pâle figure et reste à mon sens le personnage le plus faible du jeu, que ce soit en attaque ou en soutien. Comme on peut le voir, le titre nous encourage réellement à choisir entre deux styles de jeu, et l'on ne retrouve donc pas dans la personnalisation des équipes la liberté que j'évoquais à l'échelle du personnage.
Il faut noter cependant qu'il est facile à tout moment de permuter entre les compositions, sans craindre les affres bien connues de la différence de niveaux : en effet, après un combat, tous les personnages, y compris ceux n'ayant donc pas participé, gagnent de l'expérience. Si Mario, toujours présent, aura sempiternellement un niveau ou deux d'avance, le reste de l'équipe sera d'un niveau homogène, ce qui soulage pour moi d'un défaut souvent rencontré dans les jeux de rôle japonais.

Le « Bowser Crush » de Bowser, et, à droite, des bestioles qui donnent beaucoup d'expérience.

L'art d'être mal à l'aise...

Après ce long point sur les héros, venons-en au bestiaire que composent nos ennemis. Ceux-ci, comme on peut s'en douter, proviennent d'une large part du monde du plombier : on ne s'étonnera donc pas de rencontrer des goombas, des tortues volantes ou des frères marteaux. Mais Square a su incorporer des créatures étranges, en nombre suffisant pour éviter d'avoir trop souvent à recourir aux changements de palette (même si le jeu n'est pas exempt de cela) mais qui impressionnent. D'une part, la majorité ne feront ici qu'une seule et unique apparition, et ne seront plus jamais revues ailleurs à ma connaissance ; d'autre part, je trouve leur design plutôt... malsain. Je ne sais pas si c'est le rendu « plastique » dont je parlais plus tôt, ou ma sensibilité qui se fait des idées, mais j'ai toujours trouvé les ennemis « inventés » pour l'occasion très perturbants.
Je vous laisse juge : j'ai fait une petite sélection de trois des créatures les plus... disons, « improbables » que l'on peut rencontrer. Chacun se fera son idée.

Les noms de ces ennemis commencent tous par la lettre « B », et ils ont des yeux... brrr...

On ne peut arguer en revanche qu'ils sont nombreux et divers, et chacun possède son point faible et sa force. Les uns sont des brutes, les autres utilisent la magie. Il y a même des boss cachés, souvent même plus solides que le boss de fin, qui demandent une patience angélique pour pouvoir les surmonter. Globalement pourtant, et si l'on écarte ces challenges finalement anecdotiques (car la victoire nous procure un objet... inutile, puisqu'on est à présent capable de surmonter toutes les épreuves du jeu), on ne sera jamais parfaitement inquiété, et l'on jouera toujours de façon tranquille, à condition bien sûr de ne pas être, comme moi, décontenancé par la « bizarrerie » de certains de ces monstres.

Plus facile à dire qu'à faire

Deux éléments, selon moi, participent grandement à ce caractère paisible. Le premier, c'est le fait que l'on distingue les ennemis dans l'aire de jeu, ce qui nous affranchit de ces stressantes rencontres aléatoires. Oh ! Les développeurs ne se sont pas gênés pour jouer de ce travers, notamment en faisant surgir du néant des ennemis dès que l'on passe à un certain endroit, ou en accélérant leur mouvement à notre approche ; mais globalement, libre à chacun de sauter par-dessus les adversaires, même si, mais c'est là un poncif du genre, certaines rencontres sont inévitables.
Le second, c'est la prévisibilité du jeu. Entendons-nous bien : ce n'est pas que le cheminement de nos héros suive un chemin connu de longue date et même, le scénario peut, ponctuellement, surprendre. Mais l'on sait d'avance quand surgira le boss ou un ennemi retors : la présence d'un point de sauvegarde, d'une auberge, etc. sont autant d'indices que l'on apprend rapidement à décrypter et que l'on interprète comme une invitation à faire le plein de vie et de magie.

Yoshi est présent, mais bien caché, alors que Birdo fait office de boss.

Est-ce pour autant que le jeu est facile ? Oui et non, dirais-je. Si on lit un peu partout que le jeu est « facile », il faut pourtant moduler un peu ce premier sentiment. Moi-même, qui pourtant ai fait nombre de RPGs réputés plus compliqués que celui-ci, je n'ai pas su éviter plusieurs fois de honteux game over. Ce n'est pas parce que l'enrobage est sucré que le bonbon n'est pas acidulé pour autant ; et même les routiers seront surpris de certains boss retors ou de zones labyrinthiques qui nous font craindre pour notre intégrité. Super Mario RPG est un jeu à prendre au sérieux : les dégâts occasionnés et reçus se chiffrent à la fin du jeu par centaines, et les points de vie des adversaires en milliers ; on peut être endormi, incapable d'utiliser la magie ou changé en champignon ; et certains coups, s'ils portent, sont même mortels.
Globalement cependant, tout est fait pour ménager la santé du joueur. L'argent se récupère avec une facilité déconcertante, les points de vie ou de magie sont régénérés par des blocs « point d'interrogation » au cours de la partie et une victoire contre un boss se traduit automatiquement par un remplissage des points de vie ou de magie, de même qu'une grimpée de niveau. En cas de game over, on garde même l'expérience acquise précédemment... bref, le principe de « punition » n'a pas cours dans le jeu. On est cependant surpris de la résistance de certains ennemis de base ou de certains boss, et on est souvent assailli d'adversaires. Plus que jamais, il faut être vigilant, notamment au moyen de ces fameuses « commandes action » dont je parlais plus haut.

La carte du monde, qui vous fera traverser jusqu'aux cieux.

Pour résumer, l'on peut dire que Super Mario RPG est à la fois facile et difficile Je sais que cela peut être étrange et même impossible, mais c'est là mon grand sentiment. Il est facile dans la mesure où l'on sait toujours que faire et où aller, et que l'on peut aisément éviter tous les ennemis, si ce n'est les rencontres inévitables ; difficile car ponctuellement surgit un boss incroyablement compliqué, ou un donjon d'une longueur démentielle, ou un simple ennemi qui possède une résistance hors normes. Le jeu n'a donc rien d'une parfaite promenade de santé ; mais il ménage suffisamment le joueur pour l'inviter à poursuivre et à se dire que, finalement, sa mort dernière n'était qu'un accident de parcours dû à un manque d'attention.

L'influence de Super Mario RPG

Celles et ceux qui connaissent Paper Mario ou Superstar Saga seront surpris de voir que Super Mario RPG a introduit énormément d'éléments repris encore aujourd'hui et que l'on ne retrouve quasiment presque pas ailleurs. Les « commandes action », l'utilisation d'armes comme le marteau pour Mario, le fait que Bowser et le plombier fassent équipe, le fait que tous les goombas, boos ou koopas ne soient pas foncièrement mauvais et servent parfois d'adjuvants, l'humour omniprésent et volontiers potache, etc. se retrouvent encore dans les derniers jeux. Il est impossible de ne pas voir en cela le rôle précurseur que ce titre a joué pour cette série qui a connu une belle renommée.
Le maître mot a cependant été « simplification » : tous les aspects connotés « RPG », et en particulier Final Fantasy ont été gommés au fur et à mesure : les points de vie ne dépassent plus la centaine souvent, l'accent a été davantage mis sur la plate-forme et l'exploration, les équipes se sont réduites à deux personnages seulement. Je pense même que le choix d'un Mario « plat » pour Paper Mario (connu d'ailleurs au début sous le nom de Super Mario RPG 2) part d'une volonté de contestation contre la (fausse) 3D de Super Mario RPG, mais peut-être me fais-je des idées. Il est dans tous les cas heureux que l'Europe puisse à présent découvrir ce titre longtemps inaccessible qui me faisait rêver dans les magazines de l'époque.

Paper Mario et Mario & Luigi: Superstar Saga.

Super Mario RPG est un jeu exceptionnel, je le crois sincèrement. Il n'a pas la prétention de marcher aux côtés de Chrono Trigger ou de Final Fantasy ; mais il a trouvé sa propre voie, qui sera sans cesse améliorée par la suite. Et n'est-ce pas là le signe de qualités indéniables, que d'avoir servi de modèle à ses disciples ?

MTF
(30 mai 2011)
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