Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
|
|||
|
Par JPB (03 décembre 2012)
Voici un jeu que je n'ai pas connu à l'époque de sa sortie en salles. Pourtant, dans un bouquin sur les jeux vidéo que j'avais acheté en 1982, il était bien dedans, avec les astuces pour faire exploser le score. Dans ce livre d'ailleurs, se trouvaient des classiques dont je vous ai déjà parlé dans des articles précédents : Pac-Man, Donkey Kong, Tron, QiX... Mais bon : à Clermont-Ferrand en tout cas, aucun exploitant n'a parié sur ce jeu, et du coup il était introuvable. Comme la plupart des jeux Atari sortis dans cette période, Tempest proposait de nombreuses nouveautés, et un challenge intéressant. Note : pour avoir des images de qualité correcte, je suis obligé de les laisser avec une taille assez conséquente... Vu qu'il s'agit d'un jeu vectoriel, la moindre tentative de réduction se solde par un résultat illisible à l'écran. J'ai réussi à obtenir un compromis acceptable, mais impossible de diminuer encore la taille des images. Le principe du jeuÀ l'origine, Tempest était un clone en 3D de Space Invaders, appelé Vortex. Mais le programmeur Dave Theurer changea d'avis lorsqu'il se rendit compte que les autres employés, après l'avoir testé, ne revenaient pas jouer à son jeu. Vous le verrez en lisant les articles sur Battlezone ou Missile Command : la fréquentation de la machine par les employés d'Atari servait de baromètre pour savoir si le jeu allait avoir du succès ou pas ! Dave Theurer, qui adorait les explosions en tous genres, changea donc son fusil d'épaule et se mit en devoir de créer un jeu "pour un gars qui est totalement éreinté par son travail et qui a besoin d'un moyen de s'évader temporairement." Tempest est un shoot'em up, ce qui implique forcément des vaisseaux ennemis à détruire. Mais ici, point de scrolling horizontal, vertical ou multidirectionnel. Non, dans Tempest, vous dirigez votre vaisseau, le Blaster, à travers l'univers ; votre périple vous fait traverser des figures géométriques aux formes plus ou moins tourmentées, du fond desquelles des vaisseaux ennemis surgissent et se dirigent vers vous pour vous éliminer. Une fois que vous avez détruit tous les adversaires, vous plongez dans l'hyperespace vers la figure - et les ennemis - suivants.
Si on devait faire une comparaison aujourd'hui, on pourrait dire que Tempest est un mélange de
Gravitar (pour la représentation en vecteurs colorisés) et de Gyruss (pour le
contrôle du vaisseau en cercle) - même si ces deux jeux sont sortis respectivement un et deux ans plus tard. Les niveaux et le "Skill-Step"Au début du jeu, nouveauté Atari : le "Skill-Step" (qu'on pourrait traduire par "le saut de compétence") qui permet au joueur, lorsqu'il commence une nouvelle partie, de choisir un niveau impair de départ, du 1 au 9. Si le joueur a atteint un niveau plus élevé, il peut lors de sa prochaine partie décider de commencer à partir d'un des paliers prédéfinis précédant le niveau où il a perdu (qui a dit "Qui veut gagner des Millions" ?) ; et s'il réussit à passer la figure en question, il obtient un score bonus proportionnel au numéro du niveau. Voici les tableaux paliers, avec les bonus que vous obtenez - bien entendu, une seule fois par partie - si vous arrivez à passer le tableau de démarrage :
Attention : vous avez un compte à rebours, ne traînez pas pour choisir votre figure de départ quand vous en avez l'occasion ! Progression dans le jeuCe qui est assez amusant, c'est que Tempest est d'une simplicité désarmante (comme je vous l'ai expliqué plus haut) mais que pour expliquer correctement tout ce qui s'y passe, c'est très compliqué. Tempest est une succession de 16 figures ou niveaux. Comme vous le voyez ci-dessous, chaque figure est constituée d'un dessin au premier plan (cercle, carré, croix, triangle, ligne...) et de "couloirs" qui se basent sur ce dessin et partent vers l'horizon, au centre de l'écran. C'est comme si on avait étiré le dessin de départ vers l'infini, et qu'on regarde dans le "tube" ainsi formé en perspective. Les 16 figures apparaissent toujours dans cet ordre : Une succession de 16 figures représente un cycle, une vague, un round (vous pouvez rayer la mention inutile). Une fois que vous avez réussi à passer les 16 niveaux, vous passez à la vague suivante et recommencez à affronter des ennemis sur la première figure.
Chaque round possède des couleurs propres, que ce soit celles de la figure, de votre vaisseau, ou de vos adversaires ; et bien entendu la
difficulté augmente d'un round à l'autre. Ainsi, lors du premier cycle (niveaux de 1 à 16), les tubes sont bleus et votre Blaster est jaune -
comme vous le verrez sur les captures écran de cet article ; lors du second (niveaux de 17 à 32) ils sont respectivement rouges et vert, puis
jaunes et bleu au troisième round, cyan et bleu au quatrième... Le BlasterParlons maintenant un peu de votre vaisseau. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il ne ressemble à rien de connu jusque là dans l'histoire des jeux vidéo, et j'aurais tendance à ajouter : à rien non plus depuis Tempest... C'est une forme changeante, qui ressemble vaguement à un C. Vous le déplacez à l'aide d'une molette (la même que Breakout cinq ans plus tôt) dans le sens des aiguilles d'une montre ou dans le sens inverse ; la molette permet par ailleurs des déplacements très lents ou au contraire des rotations à la vitesse de l'éclair... Tout est affaire de doigté et de réflexes. Le mode de déplacement du Blaster est étrange. Je vous ai expliqué plus tôt qu'une figure était un dessin, avec des couloirs en perspective qui prolongent ce dessin vers le centre de l'écran ; eh bien, c'est sur le ce dessin au premier plan, uniquement, que vous déplacez votre vaisseau. En simplifiant, vous le faites tourner sur la tranche de la figure, comme dans Gyruss, pour viser vos adversaires ou leurs tirs, et éviter tout contact avec quoi que ce soit. Quand il est immobile, votre vaisseau se trouve toujours lié à un couloir, qui est dessiné de la même couleur que lui (vous le voyez sur la capture écran à gauche). Si vous tournez doucement la manette, le Blaster ne va pas "sauter" directement d'un couloir à l'autre, non : il va se contorsionner, se déformer bizarrement, et au bout d'un moment il va franchir la ligne séparant deux couloirs. C'est assez déstabilisant au début mais on s'y fait vite. Le nouveau couloir sur lequel vous venez d'arriver change à son tour de couleur. Vous tirez toujours au centre du couloir où vous vous trouvez, vers l'autre extrémité, et vous avez deux méthodes pour éliminer vos ennemis. Soit en appuyant sur le bouton de tir de façon standard (un appui = un tir), soit en laissant appuyé ce bouton : vous disposez alors d'un tir automatique très rapide, qui nécessite cependant de se recharger une fois que vos 8 projectiles sont partis. Vous avez également une arme secrète, accessible par le second bouton de tir : le SuperZapper. La première fois que vous l'utilisez dans un niveau, la figure devient multicolore et tous vos adversaires sont anéantis (mais pas leurs tirs) ; la seconde fois, seuls les ennemis les plus proches de votre vaisseau sont détruits. Heureusement, le SuperZapper se recharge entièrement entre deux niveaux. Vous ne plongez vers le centre de la figure que lorsque vous avez éliminé tous vos ennemis, à la fin de chaque niveau. Les ennemisVos ennemis surgissent du fond de la figure, vue en perspective plongeante, et se dirigent vers vous. Regardez bien dans le lointain, vous verrez des points (rouges dans la première vague) qui virevoltent : ce sont vos adversaires avant qu'ils n'entrent sur la figure... Tant que vous voyez de ces petits pixels, vous avez encore du travail ! Vos premiers adversaires sont les Flippers. Leur couleur est rouge pendant la première vague. En plus d'avancer le long du tube jusqu'à vous en vous tirant dessus, ils se déplacent d'un couloir à l'autre de la figure (sauf au premier niveau où ils se contentent d'avancer en ligne droite dans leur couloir). Ils peuvent atteindre la tranche de la figure où vous vous trouvez : prenez alors garde qu'ils ne vous touchent pas ! Il est possible de les détruire s'ils sont juste à côté de vous, mais il faut être très précis et rapide ; il est également possible de les feinter et de les croiser sans qu'ils vous touchent (j'arrive à le faire de temps en temps mais c'est plus de la chance qu'autre chose). Détruire un Flipper rapporte 150 points. À partir du niveau 3, vous rencontrerez les Tankers (100 points), qui sont roses au premier round. Ils se déplacent en ligne droite vers vous en vous tirant dessus, mais ne peuvent pas atteindre la tranche de la figure. Quand vous les touchez, aux niveaux de base ils libèrent 2 Flippers ; mais aux niveaux avancés, ils peuvent contenir des Fuseballs ou des Pulsars, qui sont bien plus dangereux (il faut bien regarder le dessin sur le Tanker qui renseigne sur son contenu). Dès le niveau 4, vous affronterez les Spikers (50 points) : ils sont verts dans le premier round, et se déplacent en ligne droite ans leur couloir vers le Blaster. Eux non plus ne peuvent pas atteindre la tranche de la figure où vous évoluez, mais ils laissent derrière eux des "lances", représentées par des traits verts au milieu d'un couloir. Il est possible de détruire ces lances en tirant dessus à répétition, sachant qu'à la fin d'un niveau vous devez à tout prix avoir au moins un couloir vide de toute lance, pour arriver à passer en hyperespace au niveau suivant. Les Fuseballs (qui rapportent 250, 500 ou 750 points) apparaissent à partir du niveau 11. Ils sont multicolores, et donc ne changent pas de couleur d'un round à l'autre. Comme les Flippers, ils avancent vers vous depuis le fond de l'écran, et peuvent passer d'un couloir à un autre, mais attention : ils se déplacent sur les lignes des figures. Il est donc difficile de les toucher : le seul moment où c'est faisable, c'est quand ils passent d'un trait à un autre en traversant un couloir. Attention aux Fuseballs qui auraient atteint la tranche de la figure où vous vous déplacez : ils sont alors invulnérables. Pour finir, les derniers ennemis que vous rencontrerez à partir du niveau 17 (et que je n'ai jamais affrontés : je suis trop mauvais !) sont les Pulsars. Ils valent 200 points, ressemblent à des lignes brisées (W ou M) et sont très dangereux car ils peuvent faire disparaître purement et simplement un des couloirs de la figure conjoint au vôtre. Si vous vous déplacez dessus à ce moment-là, vous êtes mort.
Sachez qu'à partir du moment où vous avez atteint le niveau où apparaît l'un de vos adversaires, il sera présent à tous les niveaux suivants. RéalisationPour info, le premier prototype de Tempest proposait un vaisseau immobile au centre de l'écran, alors que c'était toute la figure qui tournait ; mais comme cela rendait les gens malades au bout d'un moment, Dave Theurer revint à un concept plus classique : la figure est fixe et c'est le vaisseau du joueur qui tourne sur la tranche.
Tempest fut le premier jeu à utiliser le "Color Quadrascan", système de vecteurs colorisés, ce qui représentait une avancée
technologique immense quand on compare avec Battlezone, qui ne proposait que des vecteurs blancs et des caches colorés disposés devant.
Par la suite, pour ne citer que lui, Gravitar offrira ce même mode de représentation. Graphiquement, c'est donc du vectoriel : ne vous attendez pas à des éléments très travaillés, mais au contraire à des objets simplistes mais reconnaissables au premier coup d'œil. Comme je le disais plus haut, le look du Blaster est le plus étrange que j'aie pu voir pour un vaisseau spatial, mais si les ennemis sont plus traditionnels ils restent eux aussi assez surprenants. Gros avantage des couleurs propres à chacun d'eux : on les repère immédiatement quel que soit leur éloignement. Pour finir, les différentes figures sont très bien faites, l'effet de perspective est impeccable, et quand on plonge en hyperespace c'est bluffant. L'animation est sans reproche, normal : c'est du vectoriel. J'aime beaucoup la déformation du Blaster, quand on le déplace lentement et qu'on peut regarder les étapes du mouvement... encore une fois ça ne ressemble vraiment à rien de connu. Ça me fait penser à quelque chose d'organique ! Le son est plus standard. On n'a que des variantes de bruits d'explosion ou de tirs, avec un petit effet supplémentaire pour l'hyperespace. Une fois de plus, Tempest, Battlezone et Gravitar partagent le chipset sonore POKEY. Le record de 1 728 329 points fut inscrit le 30 juillet 1983, par Hector C. Vasquez. ConversionsPeu de conversions officielles à l'époque, et encore : celle pour Atari ST était bien faite, mais comme toujours en cette période d'émergence des 16-bits, la réalisation était "indigne des capacités de la machine". Donc le jeu s'est plus ou moins fait descendre par la presse, alors qu'il s'agissait d'un portage tout à fait correct du jeu d'arcade... La version Atari 2600 semble n'être qu'un prototype, en tout cas je l'ai testée et j'ai vite abandonné tellement c'est injouable... Au contraire de la version Amstrad, que je trouve très réussie. Une adaptation de Tempest, non officielle, fut Tubeway sur Apple II. Je n'ai pas trouvé d'autres clones, mais il est fort possible qu'il y en ait eu pas mal. Une suite, Tempest 2000, sortit sur Atari Jaguar en 1994. Réalisée par Jeff Minter, elle propose des améliorations, un peu comme Arkanoïd par rapport à Breakout. Cette version fut ensuite portée sur DOS, Macintosh, Saturn et Playstation (et plus tard, une version Windows fut programmée par Interplay). Les critiques furent excellentes. Depuis quelques années, les vieux jeux ont le vent en poupe. Tempest a donc fait partie de nombreuses compilations de hits d'arcade depuis 1996 sur PS1, SNES, Saturn, Dreamcast et j'en passe... Une version remise au goût du jour est présente sur le XBox Live Arcade, et depuis 2011 Tempest fait même partie de la compilation "Atari Greatest Hits" disponible sur Apple Store et Android Market. ConclusionQue penser de Tempest ? C'est un jeu difficile, mais prenant, avec une patte propre à Atari qu'il est impossible d'ignorer. Un concept novateur, efficace, qui ne demande pas beaucoup d'investissement pour comprendre comment on joue, et pas mal de temps pour arriver à faire des scores de haut niveau. Bref, l'arcade dans toute sa splendeur ! L'émulation sur M.A.M.E. est parfaite, on peut jouer à la souris : faites-vous donc une idée ! Un avis sur l'article ? Une expérience à partager ? Cliquez ici pour réagir sur le forum (11 réactions) |