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Ultimate Play The Game
L'histoire d'une compagnie d'origine anglaise, fondée par les frères Chris et Tim Stamper, qui ont notamment su introduire plusieurs concepts de jeux vidéo révolutionnaires durant les années 80, en particulier sur le mythique ordinateur ZX Spectrum.

The end is the beginning

Pendant les péripéties sur Commodore 64, Les frère Stamper n'ont pas pour autant abandonné le développement sur Spectrum et en 1985, soit quelque part entre Blackwyche et Imhotep, sort Nightshade.

Nightshade (Octobre 1985) - ZX Spectrum, BBC, Amstrad, C64, MSX

Toujours basé sur le principe de la perspective isométrique lancée par Knight Lore, Nightshade tente pourtant d'en améliorer le principe en se basant sur un nouveau moteur graphique assez logiquement baptisé Filmation II. Le changement le plus frappant réside dans la présence d'un scrolling multi-directionnel sur tout le jeu, là où le premier moteur Filmation ne permettait aucun scrolling et ne résidait donc qu'en un affichage d'une succession d'écrans fixes. En revanche la surface de jeu est un peu plus réduite, contrepartie sans doute liée aux limites de mémoire du spectrum. En outre, pour éviter que le joueur ne se retrouve avec un personnage masqué par le décor, les façades et autres murs disparaissent automatiquement lorsque le héros rentre dans un batiment (idée excellente mais qui a pour effet secondaire de laisser trop souvent le joueur évoluer dans un univers un peu vide). Nighshade peut sembler plus orienté action que ses ainés, mais exige de ne pas faire n'importe quoi : vous y tenez le rôle d'un chevalier qui doit parcourir un village infesté par la peste, à la recherche de 4 artefacts permettant de venir à bour des 4 boss du jeu. Pour combattre le mal qui règne en ces lieux, il vous faudra amasser et lancer sur les différents ennemis le bon anticorps, sous peine de le voir muter en un ennemi potentiellement plus dangereux. Un mélange action et aventure typique d'Ultimate, vraiment prenant même si certains pourront estimer que l'idée du scrolling était peut-être une fausse bonne idée...

Nous somme maintenant en 1986 et le vent tourne en Albion. La boite derrière le spectrum, Sinclair Research, est rachetée courant avril par Amstrad, permettant à ce dernier de désormais totaliser 60% du marché anglais. De leur côté, les jeux Ultimate, s'ils restent globalement bons, ne suscitent plus le même engouement qu'avant. Les productions sur C64 ne sont pas représentatives de ce qu'on aimerait voir d'Ultimate, les jeux Spectrum utilisent des recettes efficaces mais qui ont fait leur temps, sur une machine au hardware qui s'essouffle doucement... Une baisse de régime accompagnée de probables futures difficultés financières, qui persuadent les frères Stamper qu'il est temps de passer au plan B : conscients que l'aventure spectrum ne durerait pas éternellement, et toujours désireux d'avoir un train d'avance sur la concurrence, l'équipe s'était, dès sa sortie au Japon en 1983, procuré une Nintendo Famicom qu'ils avaient étudiée afin d'apprendre la façon de la programmer. Finalement la Famicom, rebaptisée Nintendo Entertainement System ou NES pour les États-Unis, sort enfin en occident et se met à y ressusciter le marché des consoles de salon, ce que les anciens leaders occidentaux n'avaient su faire et avaient fini par abandonner, laissant la porte grande ouverte à cette entreprise japonaise dont personne n'avait apparemment estimé le potentiel... Personne hormis peut-être cette petite société anglaise qui se retrouve brutalement avec quelques courtes mais inestimables longueurs d'avance en termes de programmation sur la toute nouvelle console d'un futur seigneur du monde des consoles de jeux. En juin 1986, les frères Stamper franchiront le pas, créant une branche annexe à AC&G nommée Rare Ltd., et abandonnant le développement sur Spectrum pour ne plus se consacrer qu'à la NES. Mais tout ne peut se faire en un seul jour, et durant cette transition, après les rumeurs d'un possible rachat par Ocean Software, le nom "Ultimate - Play the Game" ainsi que les droits d'exploitation sont finalement acquis par la société U.S.Gold. Durant la première moitié de l'année 86, les frères Stamper tirent donc leurs dernières cartouches sur ZX :

Gunfright (début 1986) - ZX Spectrum, Amstrad, MSX

Gunfright est sorti sur Spectrum à peu près en même temps que le Outlaws du C64. Les deux jeux partagent en outre le même thème puisque l'action se déroule au far-west. Ceci dit Gunfright est beaucoup plus proche de Nightshade, et en reprend d'ailleurs le moteur Filmation II. Les qualités et défauts du jeu sont d'ailleurs un peu les mêmes que pour Nightshade; cette idée d'action isométrique à scrolling procure, à cause du fond noir uni, un sentiment de vide, et ce malgré des décors très réussis. Le but du jeu est, en tant que shérif de la ville, de chercher et tuer un à un tous les hors-la-loi récemment débarqués (certains ont d'ailleurs des noms de véritables bandits ayant existé, tels que Billy the Kid ou Jesse James). Le jeu changera alors de vue, et il faudra à l'aide d'un viseur, éliminer son adversaire le plus vite possible avant que lui même ne tire, et ainsi toucher une récompense permettant d'acheter des munitions pour continuer l'aventure.

D'un point de vue historique, Gunfright est un jeu particulier puisque de tous les jeux développés par Ultimate, c'est chronologiquement le dernier dans lequel Chris et Tim Stamper se soient réellement impliqués avant de tirer un trait sur l'aventure Spectrum (et de façon générale sur les ordinateurs, puisque par la suite les frangins pratiqueront leur art sur console). En réalité un autre jeu estampillé Stamper aurait dû voir le jour, à savoir Mire Mare, autre épisode de la série Sabreman, évoquée précédemment dans cet article. Du fait de la popularité des Sabre Wulf et autre Knight Lore, ce Mire Mare aurait en outre été le chant du cygne parfait pour symboliser le départ des créateurs d'Ultimate. Apparemment, ce dernier jeu n'est pas sorti pour une raison simple : U.S.Gold, conscient du potentiel financier d'un tel soft, pressait régulièrement les développeurs pour savoir quand le jeu serait prêt. Finalement, énervés par cette attitude, les deux frères ont fait trainer les choses jusqu'à ce qu'U.S.Gold se résigne à retirer le jeu de ses plannings. Il est toutefois possible (rêvons un peu) qu'une version plus ou moins avancée de Mire Mare existe quelque part et, qui sait, émerge un jour sur internet...

Zone frontière

Mi-86, date charnière, période floue correspondant à l'éloignement des fondateurs d'Ultimate pour fonder Rare. On en revient à la problématique du silence chez Ultimate : les jeux post-Stamper sont-ils de "vrais" jeux Ultimate ou simplement des jeux U.S.Gold sortis sous une sorte de label populaire ? Et surtout, Cyberun et Pentagram, tous deux sortis courant 86, sont-ils à considérer comme des jeux Stamper ou pas ? Pour Pentagram on peut estimer que oui, dans la mesure où le jeu utilise le moteur graphique qui a fait la célébrité d'Ultimate, et où graphismes et gameplay sont dans la pure lignée des autres jeux Filmation que sont Knight Lore et Alien 8. Le cas de Cyberun est plus délicat.

Pentagram (1986) - ZX Spectrum, MSX

Quatrième volet de la série des Sabreman, Pentagram est probablement un peu moins intéressant si on le compare à Knight Lore. Oh bien sûr, graphiquement parlant la formule est toujours aussi détonnante, mais malgré diverses améliorations par rapport aux précédents jeux filmation, le résultat n'a pas beaucoup évolué et, du coup, peut décevoir dans le sens où l'effet de surprise n'est plus là. Un "more of the same" qui reste toutefois un incontournable pour tout amateur de jeu d'aventure en perspective isométrique qui se respecte, avec son lot de nouveautés et de subtilités (certains ennemis sont non mortels mais peuvent pousser le héros, à l"image d'Underwurlde, et peuvent même bouger quelques objets en les percutant, ce qui en terme de programmation fait toujours son petit effet sur le ZX Spectrum, machine réputée pour ses superpositions de sprites!).

Le fait d'avoir réutilisé le moteur Filmation I après deux jeux Filmation II est assez surprenant. En fait, d'un point de vue chronologique, on pourrait presque se demander si, à l'image de Knight Lore, Pentagram n'aurait été développé avant Nightshade ou/et Gunfright, mais édité après pour telle ou telle raison... Il est donc assez difficile de dire avec certitude quand a été créé Pentagram et du même coup, qui l'a programmé. En effet, si à la sortie du jeu les frères Stamper avaient déjà un pied dans la future aventure Rare sur consoles Nintendo, cela ne prouve pas que le jeu n'était pas déjà en gestation depuis plusieurs mois (un jeu ne se développe pas en quelques jours). L'équipe formant le noyau initial d'Ultimate a donc potentiellement, mais pas nécessairement, pu être épaulée par un programmeur d'U.S.Gold sur Pentagram. Cette incertitude vis-a-vis de qui a fait quoi met à nouveau en évidence cette constante chez Ultimate consistant à communiquer un minimum sur ses jeux.

Cyberun (mai 1986) - ZX Spectrum, Amstrad, MSX

Depuis la sortie de Knight Lore, Ultimate n'a plus édité pour le spectrum que des jeux en perspective isométrique, et Cyberun sera la seule et unique exception à cette règle. Au premier abord, le jeu fait penser à un mélange entre Jetpac et Lunar Jetman. On pilote un vaisseau auquel il faudra adjoindre de nouvelles pièces (propulseurs, etc.) éparpillées dans le niveau, et qui en amélioreront progressivement les capacités. L'aire de jeu est assez grande et scrolle dans toutes les directions, ce qui fait gagner de l'intensité à l'action, et ce ne sont pas les entités hostiles qui manqueront de venir vous importuner. Attention aussi aux nuages acides ! Avec Cyberun, Ultimate renoue non seulement avec la 2D traditionnelle, mais aussi avec le shoot'em up, le genre de ses débuts, et si le jeu peut décevoir les premières minutes, on se laisse volontier emporter dans ce tourbillon de pixels maîtrisés et funs.

Alors au bout du compte, de quoi est-on sûr concernant le développement des jeux Ultimate ? Eh bien que tous les jeux ZX Spectrum sortis depuis Jetpac jusqu'à Gunfright sont signés par l'équipe initiale : Chris Stamper à la programmation, Tim Stamper aux graphismes, John Lathbury au code, et Carol Ward au design graphique. Il est plus que probable que les frères Stamper aient aussi eu leur mot à dire dans des jeux comme Pentagram et Cyberun, même si Gunfright reste pour beaucoup de gens le dernier jeu Spectrum des frères Stamper, surtout depuis une interview parue dans Crash en avril 1988 et dans laquelle Chris Stamper déclarait que Gunfright était "le dernier jeu que nous avons développé en tant qu'équipe". Le fait de sous-entendre que tout ce qui a suivi Gunfright n'était pas un travail d'équipe est une façon claire d'opposer l'avant et l'après U.S.Gold. Il est toutefois amusant de remarquer que sous certains aspects, Cyberun est un peu le chaînon manquant entre Lunar Jetman et Solar Jetman, édité par Rare sur NES en 1990.

Nous étions Ultimate

Martianoïds et Bubbler, les deux jeux sortis un an après Cyberun sous le label Ultimate sont en revanche des développements signés U.S.Gold :

Martianoïds (mai 1987) - ZX Spectrum

Un an après la sortie de Cyberun, Martianoïds fait revivre le nom d'Ultimate. La première chose qu'on pense en voyant le jeu, c'est que tout de même les frères Stamper avaient fait preuve d'un certain talent pour avoir pondu le moteur Filmation, car Martianoïds est le premier jeu Ultimate en perspective isométrique à ne pas utiliser ce moteur mais plutôt une pâle copie, et le résultat est beaucoup, beaucoup moins classieux. En fait, c'est comme si on avait fait un bond en arrière. Le soucis vient principalement de l'angle choisi pour simuler la 3D. Ici, les objets ont tendance à paraître écrasés et plus étroits que nécessaire, ce qui leur procure un aspect final qui s'intègre assez mal dans le jeu. Je ne voudrais pas tomber dans le piège consistant, sous prétexte qu'Ultimate a changé de propriétaire, à démolir sans distinction tout jeu futur et à crier à qui veut bien l'entendre que "Ultimate est mort", mais il faut bien admettre que Martianoïds n'est pas à la hauteur de ce qu'on pouvait légitimement en espérer. Plus ou moins la même recette que les fameux jeux Ultimate, mais en moins joli, moins maîtrisé, moins intéressant. En un mot comme en cent le jeu ne peut QUE décevoir. Même le magazine Crash, qui dans ses différents tests a toujours su faire preuve d'enthousiasme ou au besoin de magnanimité envers Ultimate, sanctionnera Martianoïds d'un 58% comme note globale, soit la plus mauvaise note qu'un jeu Spectrum d'Ultimate ait jamais reçu de la part de Crash...

Bubbler (juin 1987) - ZX Spectrum, Amstrad

Dans la foulée de Martianoïds, Bubbler sort à son tour. Le jeu est plus ou moins un dérivé de Marble Madness (encore un fleuron de la perspective isométrique!) sans pour autant en égaler la qualité. En revanche il faut bien avouer que pour une machine aussi vieillissante que le Spectrum, ce genre de parti-pris graphique reste toujours très attirant, d'autant qu'ici le résultat est bien plus convaincant que pour Martianoïds. Toutefois, si le jeu se révèle être un Marble Madness-like agréable, il ne transcende nullement le genre. A vrai dire, la maniabilité est même assez imprécise, à cause d'une inertie qui devient vite difficile à maîtriser du fait que le jeu soit, à l'image de tous les jeux Ultimate en perspective, basé sur un maniement "turn & move" (un seul bouton sert à avancer, un autre sert à tourner son avatar dans la direction souhaitée). On est loin du beaucoup plus intuitif système à quatre touches pour quatre directions. Finalement, Bubbler est surtout un jeu qui se noie dans la masse des autres jeux Spectrum. Le temps où Ultimate redéfinissait voire inventait un genre ludique, ou/et repoussait les frontières techniques de sa machine de prédilection, est révolu.

Le reste de l'histoire est des plus classiques : Ultimate se fait encore remarquer quelque temps sur spectrum à travers quelques unes des grappes de compilations que U.S.Gold fait pousser sans relache. On peut notamment citer que la compilation intitulée Unbelievable! Ultimate 1 sortie durant 1987 regroupe Jetpac, Lunar Jetman, Pssst et Trans Am, Unbelievable! Ultimate 2 propose de rejouer à Atic Atac, Sabre Wulf, Underwurlde et Alien 8, quant au volume baptisé Spectrum Stingers, il propose Cyberun ainsi que trois autres jeux d'U.S.Gold (Bruce Lee, Zorro, et Pole Position). Enfin, Knight Lore et Pentagram participent à la compil The Gold Collection II et Martianoïds apparait dans The Gold Collection III. Ce n'est bien entendu pas la première fois que les hits d'Ultimate font l'objet de compilations ou même d'éditions budget (il serait peu intéressant de tout décortiquer ici-même, mais chaque jeu a eu son lot de rééditions), et Ocean Software a aussi apporté sa pierre à l'édifice les années précédentes avec par exemple sa collection They Sold a Million.

Les jaquettes de deux compilations où se trouvent plusieurs classiques d'Ultimate.

En guise de révérence, on retiendra surtout la compil' nommée Ultimate Play the Game : The Collected Works, qui réunit sur deux cassettes 11 jeux développés par Tim et Chris Stamper sur Spectrum (autrement dit depuis Jetpac jusqu'à Gunfright, seul Underwurlde manque à l'appel, apparemment pour des raisons de mauvaise compatibilité selon les différents modèles de Spectrum).

L'incontournable compilation ZX Spectrum Ultimate Play the Game : 11 jeux, et pour ainsi dire autant de hits.

Aujourd'hui, les noms Ultimate et Spectrum sont indissociables, au point qu'il difficile d'imaginer s'intéresser à l'un sans apprécier l'autre. Cependant les projets de remake ne manquent pas sur le net, et plusieurs jeux voient le jour sur la toile. Citons à titre d'exemple le site Retrospec.sgn.net, qui regroupe plusieurs versions modernisées de "vieux" jeux pour PC et Mac, parmi lesquelles Jetpac, Pssst!, Atic Atac, Alien 8 ou encore Trans AM, et qui a quelques autres projets en cours tels que SabreWulf et Knight Lore...

Jetpac Refuellled sur Xbox360, et son mode rétro qui permet de (re)jouer à la version de 1983

Terminons ce dossier en signalant qu'un hommage ultime (haha) a été rendu à Ultimate en avril 2007, par sa petite soeur, Rareware. En effet, Rare a développé un jeu Xbox 360 Live Arcade sous le label "Ultimate - Play The Game", nommé Jetpac Refuelled.

Plus qu'un simple remake, cette version Refuelled du tout premier jeu Spectrum de la firme renouvelle complètement le challenge en utilisant les possibilités techniques "d'aujourd'hui" pour créer un jeu "comme avant". Un pur gameplay oldschool servi par des graphismes nouvelle génération qui s'inspirent paradoxalement des vieux space-painting, le tout agrémenté d'ennemis variés et de quelques items qui permettent à chacun de comprendre en une poignée de secondes la totalité de ce que le joueur peut (et doit) faire durant une partie, mais qui plusieurs heures de jeu plus tard continue de révéler au compte-goutte des subtilités... Par ailleurs, Refuelled propose en bonus la version Spectrum originale (allant jusqu'à reproduire les clignotements des sprites typiques de la machine de Sinclair), ainsi qu'un bref historique des débuts de la société. Il est rare qu'une boite de jeu revendique à ce point son passé. D'ailleurs avant de vous laisser, voici une petite remarque histoire d'alimenter perfidement un débat sans fin : nous évoquions plus haut le fait qu'Ultimate joua beaucoup la carte de la discretion, au point qu'on ne puisse pas affirmer avec certitude qui a ou non développé tel jeu. Bien entendu, Ultimate, puis Rare, ont par la suite beaucoup joué avec ça. Ainsi, si l'on fait la liste des jeux Ultimate sur Spectrum, on obtient 16 jeux. Enlevons Martianoïds et Bubbler que l'on sait être des jeux U.S.Gold. il nous reste donc 12, 13 ou 14 jeux, selon que choisisse ou non d'inclure Pentagram et Cyberun dans la liste des "vrais" jeux Ultimate. Or, si vous avez joué à Jetpac Refuelled, vous aurez surement remarqué que chaque tableau porte un nom différent, souvent propice à un jeu de mot typiquement anglais ("The Sea of Trankillitie")... Or il existe un niveau baptisé Mire Mare, en hommage à un jeu ZX Spectrum supplémentaire des frères Stamper, resté inédit, et ce niveau porte justement le n°15. Coïncidence ? Le débat reste ouvert...

Un fantôme dans la machine

Ultimate Play the Game fait partie de ces développeurs qui marquent leur temps. A une époque où beaucoup de choses restaient à découvrir dans les jeux vidéo, les frères Stamper ont offert au ZX Spectrum de Clive Sinclair quelques jeux d'avant-garde en un temps record. Outre les brillants jeux typés arcade évoqués en début de dossier, on retiendra évidemment Atic Atac, qui créa une recette totalement inédite en réutilisant judicieusement des ingrédients déjà existants, formant ainsi une nouvelle sorte de jeux dits d'Action-Aventure. Quant à Knight Lore, il parvint à redéfinir totalement cette même notion d'action-aventure grâce à des graphismes novateurs qui n'étaient pas juste "beaux et simulant la 3D" mais s'inscrivaient totalement dans le gameplay. Si l'on peut déplorer qu'Ultimate n'ait par la suite jamais vraiment réussi à faire évoluer ses jeux en perspective isométrique et se soit ainsi enfermé dans un genre amené à être tôt ou tard supplanté par la concurrence, on ne peut que se réjouir de l'influence qu'à eu Knight Lore sur d'autres productions. Car si Knight Lore descend de Zaxxon ou 3D Ant Attack, il n'en demeure pas moins le père spirituel de quasiment tous les jeux en 3D iso qui suivront. On peut d'ailleurs se remémorer une bonne quantité d'autres softs de qualité qui font la part belle à ce parti-pris graphique et au gameplay si particulier de la 3D isométrique. Spindizzy bien sûr, mais aussi Crafton & Xunk, ou encore Airball. Citons aussi Batman et surtout le redoutable Head Over Heels, deux jeux programmés par Jon Ritman qui avouera lui-même avoir une grande admiration pour le travail de Chris Stamper (d'ailleurs pour l'anecdote, lorsque Ritman abandonnera le moment venu le Spectrum, il travaillera pour le compte de Rareware, étant même de ce fait à l'origine du très sous-estimé Monster Max sorti sur Game Boy en 1994). Autres jeux dont chaque pixel revendique ses origines, Solstice sur NES (véritable hommage à Knight Lore), sa suite Equinox sur SNES, et Altered Space sur Game Boy (trois productions signées Software Creations, qui est d'ailleurs l'auteur du portage jamais sorti d'un jeu Rare sur Commodore64, Solar Jetman). On notera d'ailleurs que ces jeux, et particulièrement Equinox, renouvellent le concept en intégrant aux différents tableaux du jeu des énigmes de plus en plus axées sur le défaut de perspective propre à la 3D isométrique (l'absence de point de fuite) et proposant des environnements dont la position des objets, plates-formes, ennemis, etc., est volontairement confuse et dont cette confusion est totalement revendiquée, mettant ainsi plus que jamais en avant la notion de graphisme au service du gameplay. Et à travers tout ces jeux que nous venons de voir, dont certains sont très bons, d'autres dispensables, et quelques uns novateurs, c'est peut-être là le véritable héritage d'Ultimate.

Jean-Christian Verdez
(09 septembre 2008)
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