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Les Jeudis Découverte de Grospixels
Une rubrique de 2008 dont le concept consistait, chaque semaine, à proposer aux lecteurs trois jeux découverts par les habitués du forum lors de l'exploration de leurs romsets.

Sodom nous emmène dans les tréfonds de la mémoire vidéoludique grand-public avec le début d'une série de jeudi-découvertes centrés sur la mythique VCS d'Atari. Console mythique pour beaucoup de joueurs car elle incarna souvent leur premier contact avec les jeux vidéo, elle proposa aussi nombre de nouveaux concepts qui sont aujourd'hui devenus des classiques. Quoique, cette semaine, on commence plutôt avec un jeu très inspiré (par Tank ! d'Atari en 1974), une bonne idée et une copie.

Combat
(Atari, 1977)

Le jeu ouvrant cette nouvelle série de présentations n’est pas à proprement parler une découverte, il s’agit plutôt d'une célébrité quelque peu tombée dans l’oubli au fil des années et des générations successives de consoles. Pourtant, la plupart des grospixeliens qui ont eu l’occasion d’approcher une Atari 2600 au moins une fois dans leur vie connaissent son existence ; et pour cause, Combat a été vendu en packaging avec la console, depuis 1977 jusqu’en 1982. Il s’agit par ailleurs de l’un des titres du lancement de la VCS, si ce n’est le tout premier.

Combat est à la base un Tank Game opposant deux adversaires humains : chaque joueur est aux commandes d’un char d’assaut et doit tenter de pulvériser le copain d’en face, avant que ce ne soit ce dernier qui s’en charge. Etant donné que les projectiles lancés par les machines de guerre ne traversent pas l’écran en entier, la subtilité du jeu va reposer sur le fait de parvenir à portée de tir sans s’exposer inutilement soi-même. Les tanks faisant feu droit devant eux, il faudra également penser à les manœuvrer de façon à ce qu’ils conservent une position de tir optimale.

Ce gameplay efficace mais légèrement basique est enrichi par la présence de nombreux modes de jeu - spécialité des cartouches de la VCS - dont les principaux sont :
- Projectiles guidés : lorsque le joueur appuie sur une direction juste après avoir fait feu, la trajectoire de l’obus est légèrement incurvée dans le sens indiqué ; multiplier les changements de direction permet ainsi de contourner un obstacle pour atteindre le char adverse qui se croyait à l’abri !
- Pong-Tank : comme son nom l’indique, cette variante permet de faire rebondir les projectiles contre les murs de l’arène où se déroule l’affrontement ; il est alors possible d’atteindre le char adverse par un tir indirect et on peut même en faire une condition de victoire.
- Tanks invisibles : cette option donne lieu à pas mal de possibilités tactiques, puisque l’invisibilité cesse provisoirement lorsque les tanks font feu ; la partie de cache-cache qui en découle entre les deux joueurs vaut le détour...
- Il est enfin possible de régler la quantité d’obstacles présents sur le terrain pour transformer l’arène de base en véritable labyrinthe.

Autre apport de ces nouveaux modes de jeu, certains d’entre eux vous proposeront de passer des pesants affrontements terrestres aux combats aériens les plus expéditifs. Prenez les commandes de biplans, jets et bombardiers pour des combats en solo ou en escadrille, voire des assauts groupés contre un unique bombardier, le tout sur fond de ciel dégagé ou comportant quelques nuages masquant la position des pilotes. Sur terre ou dans les airs, chaque partie dure deux minutes et seize secondes (pourquoi 16 et non pas 10, 20 ou 30 ? le mystère reste entier...), délai pendant lequel le joueur doit remporter un maximum de manches pour s’assurer la victoire définitive. Combat, avec ses différentes variantes, est un jeu multijoueurs toujours aussi captivant de nos jours : évidemment, il faut se montrer tolérant aux Gros Pixels composant ses graphismes pour l’apprécier à sa juste valeur. Alors avis aux amateurs...

La console Coleco Telstar dédiée au jeu Combat sortie en 1977.

Warlords
(Atari, 1981)

C’est en feuilletant le n°1 du défunt magazine Tilt, qu’entre une interview d’Yves Mourousi et un guide des salles d’arcade sur Paris, je suis tombé sur le tout premier test de la revue : Warlords, développé en 1981 par Carla Meninsky pour la VCS. « Nous voici dans le monde réaliste de la guerre : un château dans chaque coin de l’écran et un seigneur frileusement abrité derrière ses murailles. Un boulet de canon vole et rebondit de toutes parts, ouvrant des brèches dans les châteaux qu’il frappe. Chaque seigneur dispose d’un bouclier pour défendre ses murs. Que le boulet réussisse à les transpercer, puis vienne frapper le seigneur, et vous avez perdu ! ». Les premières lignes du test ont le mérite d’exposer les bases de Warlords avec imagination et clarté, même si 26 années plus tard, le poids des mots résiste difficilement au choc des photos : de ce côté, les graphismes de Warlords ne dérogent pas à l’austérité habituelle de la VCS...

Là où Warlords innove, c’est dans ses éléments de gameplay : reprenant les concepts de Pong et Breakout, Carla Meninsky est parvenue à les associer de façon à créer un jeu inédit. On pourrait même presque le qualifier d’ancêtre du wargame, en raison du poids des alliances entre joueurs, de la nécessité d’assurer la défense de son quartier général et de la possibilité d’adopter de nouveaux angles d’attaques une fois l’un des adversaires détruit. Le déplacement du bouclier/raquette renvoyant la balle est géré à l’aide d’un paddle, périphérique de la VCS adapté aux pong-like, équipé d’un petit disque à rotation libre : le système est classique et connu des « vieux de la vieille ». Ce qui l’est un peu moins, c’est la façon dont le bouclier, pour assurer la couverture des remparts, se déplace en suivant les angles du château à protéger, avec une position intermédiaire en diagonale. Prenez 3 adversaires capables d’en faire autant, la possibilité d’adopter un jeu d’alliances révocables à tout moment et voilà qui promet nombre de coups tordus.

Parmi les différentes variantes proposées, on retiendra le choix entre jouer avec une balle rapide/lente (la balle lente peut servir de tutorial) et le "catch mode" activé/désactivé. Le "catch mode" permet au joueur de capturer la balle avec le bouton « feu » lorsqu’elle heurte son bouclier pour ensuite la relâcher librement vers l’adversaire de son choix. Mélangeant habilement tactique et réflexes purs, ce mode constitue le cœur du jeu.

On peut concevoir qu’en 2007, réunir 4 grands gaillards autour d’un titre paru en 1981 relève de la mission impossible – exception faîte des cercles d’atarimaniaques – mais Carla a pensé à tout : plusieurs variantes de Warlords permettent à un seul joueur d’affronter des bots gérés par l’ordinateur ; il s’agit des modes n° 4 (catch mode/balle rapide), 9 (catch mode/balle lente), 14 (mode ricochet/balle rapide) et 19 (mode ricochet/balle lente). Sous Stella, la souris remplace le paddle original : le temps d’une minute pour s’habituer à la jouabilité particulière du titre et vous voilà parti pour de longues joutes pixellisées !

Il existe un remake de Warlords, un Shareware vendu sous forme de cartouche pour la VCS. Développé en 2006, Medieval Mayhem, outre une légère refonte graphique, propose quelques modes de jeux inédits : balles multiples, catch mode paramétrable et ainsi de suite (le dragon ouvrant la partie est purement décoratif).

Après essai du Warlords arcade, il me vient deux conclusions à l'esprit :
1. Medieval Mayhem est en fait une adaptation intégrale du jeu d'arcade : le dragon décoratif et les multi-balles sont en effet des éléments d'origine.
2. Bien que plus beau, le jeu d'arcade est aussi beaucoup plus dur : l'usage du catch mode entame les remparts, les bots sont vifs et dangereux, les multi-balles sont presque ingérables, le bouclier se déplace trop rapidement... Bref, vous aurez compris que la version VCS garde ma préférence ^^

Atari_Frog : Warlords est vraiment monumental à plusieurs. C'est certainement difficile sous MAME mais, en utilisant les paddles sur la machine d'origine, on s'habitue rapidement. Puis-je aussi vous présenter la superbe conversion Atari 8-bits issue de la version arcade ? Le programme s'appelle Castle Crisis, est sorti en 2003 et on se croirait vraiment dans les années 80 pour le coup.

NesLP : Par le plus grand des hasards, lors d'une de mes séance de farfouillage dans mes jeux, je suis tombé ce soir sur un remake de Warlords sorti sur Amiga (1989, Digital Concepts) : Lords of War. Animation au poil, sons digitalisés (voix, bruitages). Je trouve le concept du gameplay très efficace, puissant même pour une base si simple. A deux joueurs (pas encore testé me concernant), j'imagine l'ambiance.

J'oubliais une autre version made in Atari, éditée à l'occasion du 30ème anniversaire de la société en 2003 :

Starmaster
(Activision, 1982)

Avec Starmaster, développé en 1982 par Alan Miller, Activision confirme sa maîtrise de la VCS en nous livrant une simulation de combats spatiaux de très bonne facture. Placé aux commandes d’un vaisseau – avec vue à la première personne – vous avez pour mission de protéger plusieurs bases spatiales des assauts répétés d’aliens hostiles. En tout début de partie, vous errez un peu au hasard dans le vide cosmique, une jauge d’énergie présente à l’écran diminuant au fil de vos déplacements : il faut agir et vite ! Enclenchez le bouton de difficulté (F5/F6 et F7/F8 sous Stella) pour qu’apparaisse une carte galactique indiquant votre position ainsi que l’emplacement des bases spatiales et vaisseaux ennemis ; ces derniers étant plus ou moins nombreux selon le mode de difficulté choisi. Lorsque les aliens parviennent à encercler une base sur ses 4 côtés, celle-ci est anéantie : réussir la mission en cours implique de préserver au minimum une base et d’exterminer tous les adversaires.

Vos trajets sur la carte se font à l’aide d’un curseur que vous allez placer à côté des aliens – pour entrer en phase de combat – ou sur une base – pour réparer les éventuelles avaries subies. En appuyant sur le bouton d’action, votre vaisseau file à vitesse-lumière vers les coordonnées indiquées : prenez cependant garde aux quelques astéroïdes figurant sur votre trajectoire, ils peuvent faire des dégâts sérieux... Lorsque vous arrivez dans une aire de combat, l’écran de contrôle passe en alerte rouge et le système de visée se met à scintiller de façon à signaler un ennemi en approche : votre canon laser est prêt à servir (bouton action), y compris pour stopper les tirs adverses.

Les combats se déroulent en un contre un, même si vous avez choisi d’affronter une flotte de chasseurs (dans ce cas ils se succèdent les uns après les autres). Cette limitation est certes regrettable mais elle se comprend pour deux raisons :
1. La VCS est poussée dans ses derniers retranchements en affichant les étoiles, le vaisseau ennemi, ses tirs ainsi que les vôtres. En demander plus ne serait pas raisonnable, à moins d’avoir une passion démesurée pour les clignotements de sprites.
2. Chaque coup porté par votre adversaire est susceptible de causer un dommage critique, déterminé aléatoirement parmi la liste suivante :
- Armement désactivé : vous n’avez plus qu’à prendre la fuite pour aller remettre votre canon laser en état de marche ;
- Radar endommagé : la carte galactique n’indique plus la position des vaisseaux ennemis ;
- Système de visé atteint : cibler un adversaire prend beaucoup plus de temps ;
- Bouclier détruit : l’alien n’a plus qu’à porter un seul coup au but et votre vaisseau est détruit, quelque soit le niveau d’énergie restante.

Des dommages subis pendant l’affrontement ? Un astéroïde capricieux venu vous heurter de plein fouet ? Direction la base spatiale la plus proche pour effectuer les réparations nécessaires et refaire le plein d’énergie : on appréciera la présence d’une phase d’approche avant de pénétrer dans la station. Du reste, cette accumulation de petits détails, ainsi qu’une réalisation sans faille, permettent à Starmaster de traverser les années tout en gardant son intérêt initial.

NdT : La superbe publicité d'époque pour Star Raiders et le jeu en action. Comme ils disaient en 68, l'imagination au pouvoir!

Atari_Frog : A souligner que Starmaster est un clone du mythique Star Raiders [NdT et Atari Frog : conçu par Doug Neubauer et adapté sur VCS par Carla Meninsky, déjà auteur de Warlords] sorti sur Atari 400/800 en 1979 puis converti sur VCS. Ce n'est pas l'unique fois où les programmeurs d'Activision se vengent de leur manque de reconnaissance alors qu'ils étaient chez Atari : il existe plusieurs exemples de jeux Atari améliorés (Kaboom! copie ouvertement Avalanche par exemple).

Lyle
(01 janvier 2008)
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