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Warcraft II
Année : 1995
Système : Mac, Windows, Playstation, Saturn
Développeur : Blizzard Entertainment
Éditeur : Blizzard Entertainment
Genre : Stratégie Temps Réel
Par Tonton Ben (07 février 2011)
La jaquette du jeu reprend celle du premier épisode, avec une thématique de piraterie maritime.
Cliquez sur une image pour une version plus grande. Merci au site Mobygames !

Souvenez-vous : dans l’épisode précédent, le monde des humains, Azeroth, subissait une invasion d’Orcs belliqueux aussi soudaine qu’inattendue. Ces créatures, originaires du monde lointain appelé Draenor, avaient réussi à atteindre Azeroth grâce à la Porte des Ténèbres, un portail créé par des êtres supérieurs corrompus qui ont également rendu les Orcs haineux et sanguinaires, devenant une meute de barbares appelée la Horde. S’étant rendus maîtres de Draenor, et n’ayant plus d’ennemis à combattre, les Orcs débarquèrent ainsi en Azeroth pour conquérir ce nouveau territoire.

C’est le début de la première guerre entre les Orcs et les Humains.

La résistance et l’organisation humaines ont repoussé le premier assaut au château de Hurlevent (NDIsKor : Tonton, tu descends dans mon estime à employer les noms français), tirant profit du manque d’organisation et des conflits internes de la Horde. La deuxième vague de la Horde a réussi à progresser en Azeroth, massacrant les villages humains un à un. Lors de ces exactions, un des clans de la Horde, le clan Loup-de-Givre, a perdu son chef et sa femme dans une embuscade ; leur bébé sera recueilli par les humains et mis en esclavage. Il s’appelle Thrall.

Blackhand, le chef de la Horde, est assassiné par Orgrim Doomhammer, ce dernier devenant de fait le nouveau leader des Orcs. Sous son commandement, le château de Hurlevent tombe sous les assauts répétés des Orcs, et le Roi Lothar, devant la menace croissante, est obligé de s’exiler dans la province de Lordaeron. Lothar, avec l’aide de Lordaeron, parvient à unifier les sept nations humaines, les elfes et les nains face à la Horde. Les Orcs, quant à eux, s’allient aux Ogres et aux Trolls des forêts.

C’est le début de la deuxième guerre entre les Orcs et les Humains.

Par contre, l’écran titre n’a rien à voir avec la boite.
Le menu de jeu, avec ses crobards de fond très jolis.

Voilà pour le décor ; attaquer la série des Warcraft sans se plonger dans l’histoire complexe mais passionnante d’Azeroth vous ferait passer à côté de toute la cohérence de la saga, car chaque épisode est imbriqué dans une grande chronologie remplie de lieux et de personnages de toutes factions. Et si vous avez joué à World of Warcraft, vous prendrez un grand plaisir à reconnaitre dans chaque jeu les protagonistes et les régions.

Warcraft II ne cherche pas à révolutionner son prédécesseur, il a seulement pour objectif de le battre dans tous les domaines, et l’on peut dire que c’est pour le moins réussi. Comme vous l’avez lu plus haut, la deuxième guerre voit le conflit s’étendre au-delà du clivage Orcs/Humains, en impliquant les autres races d’Azeroth. Sur le terrain, cela se traduit non pas par une augmentation des camps jouables, mais par une extension significative de la puissance de chaque camp.
En effet, le conflit prend une ampleur jamais égalée jusqu’ici, et va se dérouler sur terre, mais également sur les flots et même dans les airs.

Côté Orcs, les Trolls lanceurs de haches ont remplacé les Orcs lanceurs de javelots, et les Ogres supplantent les Raiders et les Warlocks, les Death Knights prennent la place des Necrolytes, tandis que les goblins font leur apparition avec toute la fantaisie qui les caractérise, à base de raids kamikazes et de reconnaissance aérienne. Le fin du fin chez les Orcs, ce sont les dragons : volants, rapides, puissants, ils sont redoutables en meute. Côté Humains, les elfes prennent les arcs et les carquois, tandis que les gnomes et les nains investissent tous les espaces : aérien en machine volante ou sur les griffons, terrestre avec les escouades de démolition, ou marin avec les bathyscaphes.

Même les briefings de mission sont graphiquement soignés.
Une meute d’orcs vient de mettre la pâtée à un pauvre garde humain isolé.

Le nombre de bâtiments disponibles de chaque côté a bien évidemment augmenté : le chantier naval, la fonderie et la raffinerie de pétrole font partie des nouveautés. Le pétrole ? Oui, il va falloir raffiner du pétrole. Avec l’or et le bois, il s’agit de la troisième ressource disponible dans Warcraft II, à extraire en pleine mer. Le pétrole sert à pas mal de choses, principalement en matière maritime, mais pas que : il permet notamment l’extension des Town Hall (ou Great Hall chez les Orcs). Oui, les Hall peuvent désormais monter de niveau, sous réserve d’avoir construit certains bâtiments préalables, et ouvrent l’accès aux constructions de deuxième et troisième niveaux.

Exemple : chez les Orcs, le Great Hall peut évoluer en Stronghold si les baraquements ont été construits ; ainsi, non seulement la résistance du bâtiment et la production d’or vont augmenter (+10 par récolte), mais de nouvelles constructions vont être disponibles, comme l’Ogre Mound, le Goblin Alchemist, ou l’évolution des Trolls Axethrower en Trolls Berserker (si la scierie a été construite). Si vous rajoutez la scierie, la forge, et l’antre des Ogres, la forteresse devient disponible, ouvrant la voie aux dernières évolutions comme l’autel des Ogres (pour transformer les Ogres en Ogre-Mage, le temple des morts (pour les Death Knights) et le Dragon Roost (pour les dragons).

Je viens de l’évoquer, il existe de nombreuses options d’améliorations des bâtiments et des troupes ; ce n’est pas une nouveauté, mais dans Warcraft II, ce mode d’évolution est poussé à son paroxysme. En effet, à part l’ouvrier de base, toutes les unités peuvent bénéficier de ces bonus, qu’il s’agisse d’augmentation des statistiques d’attaque et de défense (soldats, catapultes, mais aussi navires), évolution de la race (Trolls Axethrower en Trolls Berserker, Ogre en Ogre-Mage), acquisition de compétences supplémentaires (régénération pour les Trolls Berserker), voire de sorts (les sorts des Death Knights et des Ogre-Mage). Tous ces ajouts sont visibles aussi bien en apparence sur le terrain (les Ogres arborent des peintures sur le visage lorsqu’ils passent en Ogre-Mage, et tiennent un langage bien plus maniéré), mais aussi dans les menus, car - enfin ! - les statistiques de tout ce petit monde sont affichées, une option qui manquait cruellement dans Warcraft.

Mission commando : pas de base, un nombre d’unités limité, et des personnages à libérer.
Mon petit paysan part à la mine. Du travail, encore du travail...

Parlons un peu de l’interface, justement. Si le menu de commande n’a pas tellement changé depuis l’épisode précédent, soit une barre de navigation verticale à gauche et un système d’icône (l’héritage de Dune II), côté souris, c’est le jour et la nuit. Fini ce petit curseur vert en croix, une grosse main permet de diriger au doigt et à l’œil toutes vos troupes : bouton gauche pour sélectionner, bouton droit pour se déplacer ou attaquer. Quel soulagement face à la lourdeur d’action de Warcraft, où l’on devait obligatoirement passer par le menu ou par un raccourci clavier pour avancer, attaquer ou récolter des ressources ! Pour les masochistes, il est possible de rétablir l’interface de Warcraft, une option bien inutile selon moi. Le drag and drop est instauré, indispensable.

Les règles du jeu ont également évolué. Fini ces immondes routes à construire, et la proximité des bâtiments à respecter : comme dans tous ses hits, Blizzard apprend de ses erreurs et des retours d’expérience, en tirant souvent vers la simplification du gameplay pour les versions suivantes. Dans Warcraft II, vous pouvez construire n’importe quoi où bon vous semble, sous trois contraintes : les bâtiments doivent respecter leur sol d’attribution (ne construisez pas en pleine mer les scieries... et les bâtiments à vocation marine s’implémentent sur les rivages), le sol peut ne pas être viable pour les constructions (la rocaille par exemple), et les Town Hall doivent respecter une distance minimum par rapport aux mines. Mais rien ne vous empêche de construire un deuxième ou un troisième Town Hall à l’opposé de votre camp de base sur la carte (c’est même conseillé). Et oui, on peut enfin construire les Town Hall, ce qui rend les ouvriers de base extrêmement importants : tant qu’il en reste un vivant sur la carte, rien n’est perdu. La chasse au peon planqué dans la forêt est même devenue un sport courant en réseau.

Près du port orc se trouve une nappe de pétrole encore non exploitée.
Une base humaine, ces paysans n’ont-ils donc rien d’autre à faire ?

Autre changement de règle majeur : le fog of war (ou brouillard de guerre, comme diraient nos amis québécois). Vous savez, ce système qui rend opaque tout endroit de la carte encore non exploré ? Dans Warcraft, le fog of war disparaissait une fois pour toutes par l’exploration progressive des lieux. Dans Warcraft II, le fog of war a évolué en incluant une version intermédiaire : tout endroit visité mais hors de vue d’une quelconque unité ou bâtiment de votre équipe se grise. Les paysages sont toujours visibles et affichés sur le radar, mais toute évolution y sera cachée jusqu’à ce que l’endroit redevienne à portée de vue. Les unités ennemies deviennent donc invisibles sauf à courte portée, même la déforestation ennemie ou l’exploitation de la mine adverse est cachée. Ce fog of war rend les parties bien plus techniques, et généralise le danger de façon permanente.

Autre fossé des générations : le visuel. Warcraft II s’affiche en SVGA pour notre plus grand bonheur face au vieillissant VGA de Warcraft qui n’était pas adapté aux petits sprites. Ici, le détail est poussé très loin, et les graphistes de Blizzard ont donné le meilleur d’eux-mêmes dans la conception visuelle des éléments du jeu. C’est simple, chaque bâtiment est aisément reconnaissable, et le style graphique de la saga Warcraft prend sa source ici-même, contrairement au design étrange que pouvait proposer Warcraft (le Town Hall Orc ressemblait aux maisons des Nameks dans Dragon Ball Z !) Les unités ne sont pas en reste, il est impossible de se tromper. Côté son, même chose, chaque unité à ses propres voix très caractéristiques. Marque de fabrique de la série, les unités finissent par s’énerver ou péter un câble lorsque l’on s’acharne sur eux à la souris. Les musiques ne sont pas très variées, mais les thèmes, aux gimmicks entêtants, restent en tête pour les quinze années qui suivent.

Ah, voilà une base humaine mieux agencée : murs, tours de défense, balistes.
Mais les Ogres à deux-têtes sont redoutables en meute.

Le dernier point fort de Warcraft II, c’est bien sûr son mode réseau, où l’on peut s’affronter jusqu’à quatre joueurs. C’est certainement par ce biais que ce jeu a acquis ses lettres de noblesse, tant l’expérience proposée est intense et demande de forts réflexes et une bonne dose d’organisation. Adeptes de la blitzkrieg et du rush, Warcraft II vous attend de pied ferme en multijoueurs.

Comme l’a expliqué Laurent dans l’article prédécent, Warcraft II se décline en trois versions : Tides of Darkness, avec 14 missions dans chaque camp ; Beyond the Dark Portal, un add-on sorti un an plus tard et renouvelant l’expérience avec 7 missions supplémentaires, et aucun autre ajout significatif, à part un décor de carte supplémentaires (les Marécages de Zangar en Outreterre pour les joueurs de WoW – les champignons ont remplacé les forêts), et des unités héroïques – un prélude à Warcraft III. Vous savez ce que je pense des add-on de Blizzard (voir Diablo : Hellfire), ce n’est pas leur point fort, et celui-ci n’échappe pas à la règle. Il existe une troisième version, la Battlenet Edition, qui est le regroupement des deux morceaux précédents, le tout sous Windows avec une option réseau pour Battlenet en prime. J’y ai constaté deux ajouts : les ressources alimentaires sont affichées en permanence à côté des trois ressources à collecter, et parmi les astuces affichées en début de partie, l’on trouve de la promo pour Starcraft, sorti entre-temps.

Voilà, c’est à peu près tout. Vous l’aurez compris, Warcraft II est CULTE. Énormissime carton à sa sortie sur PC et Mac, moins sur Saturn et PlayStation à cause de l’absence de souris, il a toujours ses fans, et propose une richesse de jeu incroyable avec des règles aussi simples. Il a trôné longtemps dans la catégorie des RTS pourtant très prisée à l’époque. Warcraft était déjà très bon, Warcraft II s’impose en digne successeur, ne serait-ce que pour la partie maritime extrêmement bien fichue – une partie qui manquera cruellement dans Warcraft III.

Tonton Ben
(07 février 2011)
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