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Robocop
Année : 1988
Système : Arcade, Amiga, Amstrad CPC, Apple II, Atari ST, C64, Game Boy, MSX, NES, DOS, ZX Spectrum
Développeur : Data East
Éditeur : Data East
Genre : Action / Shooter / Beat'em all
Par Tonton Ben (10 janvier 2011)
L’affiche du jeu, qui reprend celle du film mais en modifiant légèrement l’accroche
('All Game' remplace 'All Cop').
Cliquez sur l'image pour une version plus grande. Merci au site Mobygames !

Detroit. Murphy. OCP. Data East. Si vous avez vécu les années 80, ces mots devraient vous dire quelque chose. Sinon, sachez que l’on va parler de la rencontre improbable entre un monument du cinéma et un géant des salles d’arcade. Nous allons parler de RoboCop de Data East. J’en prendrai pour un dollar !

Peter Weller est RoboCop. Inoubliable malgré des conditions de tournage compliquées (comme tous les rôles en armure, demandez à Anthony Daniels qui a joué C-3PO dans Star Wars).

RoboCop, c’est d’abord l’œuvre de Paul Verhoeven, surnommé le Hollandais violent par le magazine Première. Sorti en 1987, ce film raconte l’histoire de l’officier de police Alex Murphy de la police de Detroit, dans un futur proche et sombre où la ville américaine est la proie du crime et de la violence. Le cartel OCP (Omni Consumer Product), un conglomérat militaro-industriel fabricant entre autres des prothèses, robots et armements, gère la police de Detroit et veut créer Delta City, la ville du futur qui remplacera Detroit.

Pour ce faire, l’OCP veut fabriquer le policier parfait, « un policier qui fonctionne 24 heures sur 24, qui n'a besoin ni de manger ni de dormir, doté d'une grande puissance de feu et des réflexes adéquats ». Le numéro 2 de l’OCP, Dick Jones, présente son candidat, le robot ED-209, une machine à deux pattes gigantesque et surarmée lors d’une démonstration à sa direction qui tourne mal (le cobaye simulant un voyou est criblé de balles malgré sa reddition). Bob Morton, un jeune cadre ambitieux, en profite pour placer son projet RoboCop : un androïde créé à partir d’un policier fraichement décédé. Le policier Alex Murphy ayant fraîchement été abattu par le terroriste Clarence Boddicker, il est le candidat rêvé pour son projet. Ramené à la vie grâce à la science et la robotique, sa mémoire effacée, il devient RoboCop, l’ultime policier dans un corps cybernétique.

Dick Jones (Ronny Cox, magistral en parfaite enflure), et l’ED-209 derrière.

Doté d’une force sans pareille, programmé selon quatre directives principales (être au service des citoyens, protéger les innocents, faire respecter la loi, interdiction de s'attaquer à un membre de l'OCP), et armé d’un puissant pistolet, il est réaffecté dans son commissariat pour mener à bien sa mission de maintien de l’ordre. Mais est-on sûr que la mémoire de Murphy a bien été effacée ? Que reste-t-il de Murphy dans RoboCop ?

Énorme carton au box-office, RoboCop est un film ambigu comme sait si bien les réaliser Paul Verhoeven, lui qui réalisera par la suite Total Recall et Starship Troopers. Sous ses apparences de film de vigilante bourrin fascisant, se cache une satire féroce de la société américaine sous l’ère du Président Reagan, et des dérives de la réponse policière musclée face aux problèmes d’une société en perdition. Detroit est sale, sans avenir pour ses citoyens, et RoboCop représente la déshumanisation de l’autorité, un thème déjà vu dans Judge Dredd (le comic, hein, pas le flim). Paul Verhoeven saupoudre ses films d’humour noir, et RoboCop n’y fait pas exception : fausses pubs télés consuméristes, émissions télés navrantes, et répliques cinglantes sont au menu, le tout ficelé dans un spectacle gore et malsain. Un joyau du cinéma des années 80, à voir absolument.

The Future of Law Enforcement !
Notez le “Licensed from Ocean Software”.
Au début, RoboCop prend plaisir à latter
du vilain aux poings.

Et donc, en 1988, Data East obtient l’autorisation d’adapter le film en arcade. N’y cherchez pas une quelconque adaptation engagée, RoboCop en arcade, c’est un run and gun, pardon, un walk and gun au premier degré. Mais bien fichu.

Data East, souvenez-vous, avait sorti la même année Bad Dudes Vs Dragonninja, qui à part porter un nom ridicule, est surtout connu pour être un vrai jeu d’arcade rafraîchissant, une relecture de Vigilante et Shinobi, mais à deux, et avec une très bonne réalisation. Ni une ni deux, les p'tits gars de Data East reprennent le moteur de Bad Dudes, et proposent leur RoboCop. Le jeu sera d’ailleurs proposé en kit d’évolution pour les bornes de Bad Dudes, les transformant en RoboCop.

Et là, l’action s’arrête, la cuisse de RoboCop
s’ouvre, son flingue apparait...
... ça va dégommer sec à tous les étages !

Et les similitudes entre les deux titres sont flagrantes. La taille des sprites est la même, on retrouve les indicateurs de temps, de score, de vie... Les quelques modifications graphiques de ces éléments ne peuvent masquer la filiation. Le déroulement du jeu n’y fait pas exception : RoboCop doit se battre, avec ses poings, contre des vagues de petites frappes qui déboulent de tous les côtés ; un coup suffit à chaque fois pour s’en débarrasser.

Et d’un coup, dans le premier niveau, l’action s’arrête en plein milieu d’une rue, après avoir affronté un motard un peu pénible : RoboCop sort sa grosse pétoire (je parle de son flingue). Et là, on bascule dans une autre dimension. Changement de gameplay, il s’agit désormais de bien viser. Dans un style qui rappellera Sunset Riders (sorti quelques années plus tard), l’homme-boîte-de-conserve pourra dégommer les malfrats vicieusement postés aux fenêtres, en hauteur, ou derrière des caisses, le joystick permettant de viser horizontalement, verticalement, mais aussi en diagonale (haute). Au corps-à-corps, il envoie toujours sa patate fulgurante (je parle de ses poings), mais l’on est clairement passé d’un Bad Dudes à un Contra ou un Rolling Thunder.

Première rencontre avec l’ED-209 ! Ouille !
De temps en temps, on viendra délivrer
des jeunes femmes.

Rolling Thunder, justement, semble avoir là aussi servi de modèle : l’animation de RoboCop est assez bien fichue (on est tout de même loin de la perfection de Rolling Thunder, mais il y a eu un effort de fait), les ennemis sortent de nulle part, et souvent de portes dérobées, l’action se passe souvent sur deux plans verticaux. RoboCop, lui, peut ramasser des power up pour obtenir diverses améliorations (tirs multiples, puissance de feu accrue) en nombre limité. Sa barre de vie peut être augmentée selon votre score lors des tableaux bonus, une séance de tir d’entraînement au commissariat. Il y a décidément beaucoup de similitudes avec des titres comme Sunset Riders ou Gun Force, sortis pourtant plus tard. RoboCop aurait-il servi de modèle ?

La réalisation du jeu est propre, sans plus. Tout au long des sept stages que comporte le jeu, les graphismes sont corrects, on y retrouve les éléments principaux du film, le thème musical principal est aisément reconnaissable, et on a même droit à des voix digitalisées. Des boss retors viendront vous barrer la route, comme l’ED-209, bien entendu, mais aussi des choses plus originales, comme une camionnette de vilains, une grue... et quelques ED-209 supplémentaires, à la limite de l’indigestion.

Dans les locaux de l’OCP,
il y a beaucoup de monde.
Ne riez pas, ceci est un boss de fin.
Boîte de conserve contre tas de ferraille...

L’action n’est pas très rapide, en même temps, RoboCoop (l’homme-robot qui traque les vilains prix – merci Les Nuls !), ce n’est pas non plus un foudre de guerre. Il avance à deux à l’heure, ce qui le rend très vulnérable face à l’abondance des tirs ennemis. Soyez conscients que RoboCop est un jeu dur, avancer tête baissée ne vous permettra pas de voir la fin du premier niveau, car une poignée de coups encaissés vous fera perdre une vie, et recommencer à un checkpoint. Il faut bien faire attention à se repositionner, éliminer toute forme de menace avec une certaine dextérité. Le masque de dégâts des ennemis est assez large, on peut viser légèrement à côté sur les tirs en diagonale et toucher sa cible. Petite manœuvre d’esquive, l’homme-ferraille peut sauter, enfin, sautiller, ce qu’il ne peut pas faire dans le film original (il ne peut pas nager non plus, ni se gratter les orteils, mais bon on s’en fout un peu).

À deux reprises, une séance de tir
viendra égayer l'action.
Certains méchants volent très haut.

Très présent dans les salles d’arcade, RoboCop est un titre sympathique qui a été adapté par Ocean (qui détient originellement les droits d’adaptation) avec plus ou moins de bonheur sur de nombreux supports : Amiga, Atari, Commodore 64, Apple II, Pécé, MSX, NES, CPC, ZX Spectrum... et Gameboy. Cette dernière version est peut-être la plus réussie, en tout cas, c’est un excellent titre sur la console portable de Nintendo. Une telle foison de versions est peut-être la preuve de son succès, ou d’une tentative assez lourde de vouloir le vendre à tout prix en surfant sur le succès du film original.

Tonton Ben
(10 janvier 2011)
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