Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par Laurent (16 août 2001)
Une fois de plus, battons en brèche une pensée communément admise, selon laquelle Pac-Mania fut un non-évènement, une daube, un nanar bâclé et encore plus daté que le Pac-Man d’origine. Eh bien non ! Pac-Mania est une petite merveille, un concentré de vidéoludisme (inventons le mot pour l’occasion), une éclatante démonstration de savoir faire, bref : un titre sous-estimé. Rien que le nom du jeu est déjà plein d’humour cynique. Pac-Mania est apparu en 1987, alors même qu’on ne parlait plus guère de Pac-Man, le jeu le plus populaire du monde, certes, mais déjà vieux de 7 ans et largement dépassé techniquement. Namco semble avoir voulu faire un dernier clin d’œil à une franchise quelque peu surexploitée, en nous en offrant une version 3D. Pac-Mania adopte une vue en perspective isométrique similaire à celle de jeux tels que Zaxxon, et notre héros jaune se promène dans des labyrinthes qui font au moins 16 fois l’écran. Les fantômes sont au nombre de six ou huit, selon les niveaux, mais Pac-Man à acquis la faculté de sauter, ce qui rétablit l’équilibre. Les bonus apparaissant en dessous du point de départ des fantômes sont toujours là, mais certains ont une fonction autre que rapporter des points. On peut y trouver des mini-pilules qui rendent les fantômes bleus pour une courte durée, ou d'autres qui rendent Pac-Man plus rapide pour un temps limité. À part ça, quoi de neuf ? Rien, il s’agit grosso modo du même jeu, sauf que les experts ne peuvent plus y appliquer leurs techniques puisqu’on ne voit plus le labyrinthe en entier à l’écran, et qu’il est donc quasiment impossible d’anticiper le parcours des fantômes. Cela fait de Pac-Mania un produit consommable, un jeu d’arcade pur faisant appel aux réflexes et à la chance, ce qui lui a valu des critiques sévères, et cela continue aujourd’hui dans tous les articles rétrospectifs qu’on peut lire sur le net. Ils n’ont rien compris ! Limiter l’analyse à la jouabilité dans le cas de ce jeu est une erreur, et une faute de goût. Comment ne pas tomber sous le charme de cette exceptionnelle réussite audio-visuelle dès la première partie ? Les graphismes sont magnifiques et rendent caduques toutes les tentatives de représentation en 3D de Pac-Man, de son environnement et des fantômes qu’on a pu voir jusque là. Les effets sonores, tout en restant fidèles à l’esprit de ceux du Pac-Man original (référence absolue en la matière), sont parfaits, inspirés, variés, harmonieux. Et la musique, me direz-vous ? C’est tout simplement une des meilleures jamais entendues dans un jeu d'arcade. Il n’était pas facile de composer des thèmes illustrant Pac-Man qui ne dénotent pas, et la compositrice Junko Ozawa a réussi un travail fantastique. C’est à se demander comment le thème du premier niveau n’est pas devenu un standard. En fait, ce qui frappe le plus à la vision de ce jeu, c’est l’homogénéité de l’ensemble. On a l’impression d’être plongé dans le monde de Pac-Man, chose que des millions de joueurs avaient auparavant fait mentalement. La chose est risquée, et peut provoquer un rejet immédiat - et c’est hélas ce qui s’est passé, vu le peu de succès du jeu - mais ce n’est pourtant pas faute pour Namco d’avoir fait preuve de talent. Le premier Pac-Man date d’une époque où les jeux vidéo ne présentaient pas encore de contexte cohérent. Les personnages étaient alors le plus souvent dessinés sur un fond noir, et le décor ne se justifiait qu’en tant que cadre de l’action. Pac-Mania représente une sorte de transition entre cette conception ancienne et celle des jeux vidéos actuels qui offrent la vision d’un univers virtuel. Et à quoi ressemble donc le monde de Pac-Man ? Au premier niveau, c’est une surprise de taille qui attend le joueur : des legos ! Eh oui, Pac-Man vit dans des labyrinthes construits en legos. Cela nous donne une indication sur sa taille, qui n’excède donc pas un centimètre de haut. Le jeu comprend 16 niveaux, présentant quatre types de décors différents : les 4 premiers sont donc en legos, les 4 suivants sont plus dépouillés avec des labyrinthes délimités par des cordes. Les niveaux 8 à 12 sont constitués de blocs pyramidaux dont se sont souvenus les concepteurs de Solstice et Equinox, deux jeux en perspective isométrique sur SuperNES. Les quatre derniers niveaux sont plus vicieux dans leur conception : les labyrinthes sont constitués de plates-formes surélevées. On ne peut pas tomber dans le vide mais ces labyrinthes peuvent provoquer des illusions d’optiques très gênantes, ce qui accroît la difficulté. Les niveaux sont entrecoupés de saynètes montrant Pac-Man poursuivre les fantômes ou l’inverse, dans la grande tradition. La difficulté est élevée et frustrante (heureusement, on peut commencer au niveau 4, 8 ou 12), d’autant que les fantômes profitent de la possibilité d’être hors champ pour contourner Pac-Man et le prendre à revers. En plus, ils sont si nombreux que même si on les mange tous après l’ingestion d’une super pilule, ils se régénèrent avant qu’on ait avalé le dernier. D'autre part, certains peuvent, à partir d'un certain niveau, également sauter. Il est vrai qu’après quelques parties, on se lasse et on a l’impression qu’une pratique assidue du jeu n’apportera aucune progression. L’échec du jeu s’explique certainement par ce problème, ainsi que l’usure du concept de Pac-Man en 1987. Du coup, ce superbe travail de design est passé à la trappe. Si la borne d’arcade Pac-Mania n’a pas très bien marché, les conversions du jeu sur micro (par la société britannique Grandslam) ont en revanche été fort appréciées, dans la mesure ou elles ont donné aux développeurs l’occasion de se surpasser. Adapté sur les 8-bits dans un premier temps, le jeu a particulièrement cartonné sur ST et Amiga. Sur Amiga, la conversion est une vraie merveille, utilisant l’overscan (mode graphique de l’Amiga en plein écran, cas unique pour un micro fonctionnant sur une télé), elle égale presque la borne d’arcade. En plus, le champ de vision est plus large (la borne d’arcade utilisait un écran vertical), et donc le jeu plus jouable. Sur ST, la conversion est presque identique, avec juste une petite réduction de la zone de jeu sur l’écran, qui retrouve les proportions de celle de la version arcade (et sa difficulté). Pac-Mania est aujourd’hui le jeu idéal pour se faire une partie avec MAME histoire de patienter pendant une gravure ou un téléchargement. Ses graphismes ne sont pas trop démodés, on retrouve le jeu avec plaisir à chaque fois, et on le quitte sans regret après quelques minutes. Sources, remerciements, liens supplémentaires : Une reprise d'une des musiques de ce jeu est disponible en mp3 sur la page Gromix :
http://www.grospixels.com/site/remix.php Envie de réagir ? Cliquez ici pour accéder au forum |