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Donkey Kong Country 3 : Dixie Kong's Double Trouble!
Année : 1996
Système : SNES ...
Développeur : Rare
Éditeur : Nintendo
Genre : Plate-forme / Action
Par MTF (28 mai 2012)

Je déteste Donkey Kong Country 3. Pas pour ce qu'il est, un excellent jeu de plates-formes qui repousse encore un peu plus loin la folie du second, mais pour ce qu'il a représenté : la couverture du dernier numéro de feu Ultra Player avant son arrêt définitif et son transfert dans Player One, qui lui aussi s'arrêta, hélas fort décrépit, quelques années plus tard. Quand j'y pense : ils étaient à un numéro de tester la Nintendo 64, qu'ils avaient reçue dans leurs locaux, quel gâchis...
Mais bon, vous savez ce que l'on dit : blâmez le message, non le messager. Hélas, là aussi, c'est au-dessus de mes moyens, car d'où que je regarde, je ne puis raisonnablement pas haïr ce jeu-ci même s'il n'est pas exempt de tout reproche.

Bouh ouh ouh... Merci au site Abandonware Magazines !

Tout comme une année séparait Donkey Kong Country de sa suite, une année sépare les épisodes 2 et 3 de la célèbre série de jeux de plates-formes de RareWare. De nos jours, cela ne semble rien ; mais c'était un délai parfaitement raisonnable alors. Et l'éditeur n'a pas chômé, car encore une fois la volonté de multiplier les bonnes idées se fait sentir.
Je passerai très rapidement sur l'histoire qui fait véritablement doublon vis-à-vis du dernier épisode (cette fois-ci, ce sont Donkey ET Diddy qui ont été enlevés par K. Rool, devenu entre temps un scientifique fou) pour me concentrer sur les différents attraits et nouveautés de cet épisode. Son cœur n'a pas changé d'un iota : deux singes, sept mondes dont un secret, des pièces bonus à ramasser dans des stages spéciaux, des pièces DK à trouver un peu partout, des animaux à chevaucher/incarner et des tonnes, des tonnes de bananes à ramasser.

Cette fois, il faudra répérer les jetons DK d'un ennemi à bouclier, qu'il faudra toucher dans le dos. Réflexion en perspective ! À droite, ces ours vous vendront des objets ou vous aideront à progresser dans les mondes.

Commençons par évoquer la différence majeure de cet épisode, les protagonistes. Diddy enlevé, Dixie fera équipe avec un petit cousin de la famille, Kiddy Kong. Quand je dis « petit », cela est bien entendu imagé (hypochoristique diront les spécialistes), car le nourrisson qui se balade en grenouillère est déjà un beau bébé, aussi lourd que Donkey Kong à son époque. L'on retrouve donc ici un duo de singes de même type que le premier épisode, avec une modification de taille, la façon dont les barils sont transportés. Si Dixie les porte toujours haut au-dessus de sa tête grâce à sa queue de cheval, Kiddy va les transporter devant lui, à la façon d'un bouclier : ouf, l'équilibre est respecté ! Enfin, pas tout à fait : Kiddy conserve malgré tout la vélocité de Diddy dans ses déplacements et ses sauts, et n'a donc pas le côté massif de Donkey. Encore une fois alors, j'ai toujours préféré jouer le garçon plutôt que la fille, je dois vraiment être plus tracassé que je ne le crois.
La seconde nuance qu'apporte cette composition réside dans la façon dont les singes interagissent entre eux une fois sur les épaules l'un de l'autre. Donc, lorsque Kiddy transporte Dixie, il est capable de la lancer haut et loin comme on s'en doute ; mais lorsque Dixie porte Kiddy, elle ne peut réellement se déplacer ou le lancer en hauteur. En revanche, lorsqu'elle l'envoie contre un mur, Kiddy va demeurer en boule et Dixie va alors pouvoir rouler sur lui, tout comme elle le fait sur les barils en acier, qui signent leur grand retour ; et sur le sol, il va ainsi pouvoir le détruire pour accéder, parfois, à quelques secrets.

Les tonneaux bonus sont toujours là. Kiddy étant plus gros, il rend les niveaux aquatiques plus délicats.

L'autre différence majeure de cet épisode est le principe de cartes : pour la première fois dans l'histoire des Donkey Kong Country, il ne s'agit plus de simples points sur des images fixes, et nos héros vont pouvoir réellement se déplacer comme ils le désirent... du moins dans la zone globale distribuant les différents mondes. Dans ces derniers, Dixie et Kiddy se déplacent toujours selon un chemin délimité et progressent de niveau en niveau sans qu'un autre choix leur soit offert.
En revanche, dans le hub, les singes seront relativement libres de leurs mouvements grâce à Funky qui s'est ici reconverti en mécanicien de génie : au fur et à mesure de la progression des Kongs dans l'aventure, et grâce à des objets qu'ils lui ramèneront de leurs combats contre les boss, il leur construira de nombreux véhicules : bateau, hovercraft capable de franchir les récifs, jet-ski remontant les cascades comme un saumon et ce jusqu'au « gyrocoptère », qui récompensera votre ténacité à trouver les nombreux secrets que le jeu recèle. Ce nouveau système de cartes apporte une réelle dynamique à l'exploration du jeu et vient corriger le dernier réel défaut des épisodes précédents : leur linéarité. En permettant au joueur de découvrir son environnement au fur et à mesure, il lui devient possible, même si dans les faits cela ne sera possible qu'à une seule occasion dans le jeu, de choisir le monde qu'il voudra bien faire.

Petit montage personnel représentant l'univers de DKC3, « le kremisphère nord » et les différents mondes. Tout n'est pas montré ici...

Comme symbole même de cette nouvelle liberté, les développeurs ont introduit un nouvel élément à collecter en sus des jetons bonus et des pièces DK : ce sont les « oiseaux bananes ». Quelque part dans le monde de DKC3 se trouve une reine qui a perdu ses petits du fait de K. Rool ; elle demande alors au joueur de tous les récupérer pour qu'elle puisse enfin mettre un point final à toute cette affaire. Ces oiseaux sont cachés dans des grottes dérobées, accessibles en explorant un peu partout avec les véhicules. Les récupérer exige à chaque fois de résoudre une petite énigme musicale à la façon d'un jeu de Simon, et ce sont eux qui permettront d'atteindre non pas 101, non pas 102 mais bien 103% de complétion, histoire d'achever la trilogie en beauté.

La reine en question, et le jeu de Simon. Chaque couleur correspond à un bouton de la manette.

Dans son esprit et les environnements qu'il propose, DKC3 a un petit goût de DKC premier du nom : on y retrouve des zones précédemment traversées, bien que modifiées pour l'occasion comme l'usine ou les pics recouverts de neige à côté d'autres, comme les granges, la cime des arbres ou les montagnes. Il est dommage cependant de constater, au-delà de cette reprise d'anciens univers, que leur qualité graphique semble légèrement moindre que celle de Donkey Kong Country 2, remarque qui peut s'étendre, du reste, à l'ensemble du jeu : que ce soit pour les décors, les ennemis ou les boss, il semblerait que la grandeur majestueuse de Diddy's Kong Quest soit loin d'être égalée comme en témoignent ces ennemis au design parfois douteux, ces animations saccadées ou le manque de détails des parcours.
Cela n'est en aucun cas dramatique, ni préjudiciable au jeu car l'on reste, malgré tout, dans le haut du panier de ce que la Snes a à offrir ; et ce n'est qu'un petit regret, car le jeu a, à côté de cela, tant de qualités que l'on serait bien stupide de bouder son plaisir.

Des singes belliqueux vous canardent. Heureusement, le tonneau vous protège. À droite, un peu de neige... « Étoile des neiges, mon cœur amoureux... »

Il est vrai qu'encore dans l'épisode précédent, l'on pouvait se plaindre d'une façon de redite ou, du moins, d'un manque d'idées parfois : certains niveaux ne faisaient qu'introduire un nouveau type d'environnement ou se consacraient à un animal sans réellement apporter quelque chose de neuf. C'est chose parfaitement impossible pour cet épisode qui semble se faire d'un défi de toujours surprendre le joueur avec une idée nouvelle même si, de temps à autre, la chose ne semble pas des mieux réussies. Trop rares sont, ainsi et en définitive, les instants où le gameplay s'en trouve véritablement changé : le nombre « d'amis animaux » a baissé mais, surtout, ils se font bien moins présents au cours de l'aventure. Si l'on retrouve toujours avec plaisir Enguarde, Squitter et Squawks (qui a ramené des copains bleus pour l'occasion, qui ne crachent plus d'œufs mais savent saisir des tonneaux entre leurs serres), l'on regrettera en revanche la disparition totale de Rambi, de Rattly et de quasiment tous les animaux supports d'antan (seul un petit oiseau du nom de Parry prend la relève) ; en revanche, un soin particulier a été apporté à la nouvelle venue, Elie, une petite éléphante qui va se servir de sa belle trompe pour transporter des barils, quitte à les aspirer pour les faire venir de loin, et aspirer/recracher de l'eau pour s'en servir comme arme à distance. Cependant, que l'on ne s'y trompe : les véritables stars des lieux, ici, ce sont bien les deux singes qui, dès lors, vont en voir du pays !
En vrac, ils devront donc notamment faire la course contre un essaim d'abeilles, échapper à des bûcherons mal intentionnés, nourrir un piranha hargneux, monter une corde qui se brûle au fur et à mesure de l'avancée dans le niveau, nager dans des eaux qui inversent les directions du contrôleur ou prendre garde à la foudre qui toujours menace de tomber. L'on sent véritablement que chaque niveau a fait l'objet d'une réflexion certaine de la part des développeurs même si, comme je l'ai dit précédemment, la chose n'est pas toujours une franche réussite. En réalité, il s'avère qu'au fur et à mesure du jeu un profond sentiment de lassitude finit par s'imposer.

La corde se consume au fur et à mesure. À droite, le meilleur niveau du jeu, où un sniper vous vise continuellement.
Elie aspire l'eau... Elie aspire les tonneaux...
...mais Elie a peur des rats. Parry, à droite, est un oiseau qui reste au-dessus de vous et ramasse les bonus inaccessibles. Attention, car il s'enfuira s'il se fait toucher.

Je l'avais ressenti à l'époque, et je l'ai ressenti encore en me replongeant dans cette aventure pour écrire cet article. Peut-être est-ce dû à un peu d'agacement, de « trop plein » : trois Donkey Kong Country en trois ans, il est vrai que cela peut être décevant, surtout quand on s'aperçoit que le fond du jeu n'a, quant à lui, aucunement évolué. Alors oui, les améliorations sont intéressantes, la difficulté est encore au rendez-vous (exception faite des boss, qui sont bien moins difficiles à vaincre cependant) et les secrets abondent. Mais le petit rejet que l'on peut avoir face aux graphismes et à l'univers en règle générale, le manque de soin, parfois, apporté à un décor ou un ennemi et, globalement, l'effet de surprise passé, on pourrait juger cet épisode comme surnuméraire.
C'est cependant quelque chose qui, en toute honnêteté, est sujet à discussion. Quelqu'un qui connaîtrait sur le bout des ongles DKC et sa révolution DKC2 se sentira clairement lésé même s'il y a plusieurs stages qui sont réellement touchés, et aura l'impression qu'effectivement, Dixie Kong's Double Trouble! est l'épisode de trop. Il préfèrera alors revenir vers l'épisode précédent, bien plus audacieux et bien plus maîtrisé dans sa formule. En revanche, celui ou celle qui aimerait s'initier pour la toute première fois à cette série aurait, à mon sens, tout intérêt à débuter par cet épisode-ci dont il saura apprécier à leur juste valeur les nombreuses qualités, notamment de variété et de semi-liberté, sans être rebuté par une difficulté trop grande ou une linéarité par trop pesante. Ce n'est qu'ensuite qu'il pourra revenir parfaire sa connaissance de la trilogie par les autres épisodes et jugera véritablement qui, de celui-ci ou de Diddy Kong's Quest est le meilleur, le premier opus étant clairement hors course puisque le plus faible de tous.

Swanky vous proposera cette fois des mini-jeux d'adresse. Et cette vue sera utilisée pour le boss du monde 5, très sympathique.

DKC3 a été boudé par les joueurs cependant. Il enregistre les plus faibles ventes de la trilogie, mais cela est grandement lié à la sortie, quelques mois plus tôt, de la N64 (excepté en Europe, qui ne l'aura officiellement que quatre mois plus tard), il faut le dire. Et quand on en entend parler de la bouche des joueurs qui l'ont connu d'alors, c'est souvent sur un air mitigé, mi-figue mi-raisin, lui préférant toujours son frère aîné et ce parfois pour de mauvaises raisons. L'on ne saurait parfaitement dire quel aurait été son accueil si la dame noire n'était pas arrivée pour couper l'herbe sous le pied de la mère grise, mais l'on peut supposer que son destin fut, finalement, assez similaire à celui de Secret of Evermore, arrivé trop tard dans la vie d'une console superbe mais vieillie et souffrant de la comparaison avec un grand frère bien trop arrogant.
Que la qualité de Donkey Kong Country 3 soit globalement moindre que celle de Donkey Kong Country 2, cela semble évident sur certains aspects que sont les graphismes, l'ambiance musicale (David Wise s'est associé à Eveline Fischer, pour un rendu sympathique mais bien moins inspiré que sur les deux premiers épisodes) ou l'univers ; mais on ne peut l'accuser de paresse ou de facilité, ce serait lui faire un faux procès.

Ici, les hiboux vous canardent du fond de l'écran. Anecdote : en anglais, la musique de l'usine s'appelle « Nuts'n Bolts »... tout comme l'épisode de Banjo-Kazooie qui sortira sur Xbox 360. À droite : parviendrez-vous à trouver le tonneau-fusée ?

Finalement, je ne déteste pas DKC3. Au contraire, j'ai de la sympathie pour lui. Et si vous avez été quelque peu intrigué par cet article, n'hésitez plus : donnez, ou redonnez une chance à ce jeu.
Il le mérite bien.

Annexe : petite sélection de niveaux sympathiques...

Un Kremling armé d'un bazooka, et qui n'hésite pas à s'en servir... (Monde 4) À droite, Belcha est le premier boss du jeu, et il faut une petite astuce pour le vaincre. Heureusement, la démo du jeu vous livre la solution, c'est comme ça que j'avais fait à l'époque.
Pour la première fois de la série, un boss sous-marin ! (Monde 6) À droite, un boss très moche... (Monde 3)
Un des rares nouveaux tonneaux de l'aventure. (Monde 3) À droite, les chariots sont de retour, et peuvent maintenant s'agripper à des filins. (Monde 4)
Un charmant effet de transparence. (Monde 3) À droite, des tonneaux fantômes, qui apparaissent et disparaissent. (Monde 6)
Gare à la foudre ! (Monde 7) À droite, l'eau pourpre inverse les directions du pad. (Monde 7)
Il faut nourrir le piranha, mais il a l'estomac fragile. (Monde 3) À droite, Squawks saisit maintenant les barils. (Monde 6)
MTF
(28 mai 2012)
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