Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par Laurent (08 mai 2002)
Réalisé près d'un an avant la sortie du film de Tim Burton, Batman – The Caped Crusader (BCC) n'est en rien un produit dérivé de la « batmania » et c'est tant mieux car c'est un vrai jeu, parfaitement pensé dans tous ses aspects, et non l'exploitation mercantile d'une licence, chose à laquelle l'éditeur Ocean s'est pourtant de nombreuses fois livré. Les jeux au concept les rendant susceptibles d'être aussi bien jouables sur 8-bits que sur 16-bits ont toujours possédé un charme particulier. Combinant le soin apporté à la réalisation avec une certaine économie de mouvement à l'écran, ils ne proposent pas une action frénétique, trouvant leur intérêt dans un gameplay posé et réfléchi à base d'énigmes à résoudre, n'utilisant pas la surenchère visuelle pour maintenir en éveil le joueur. C'est sur cet équilibre fragile que repose la réussite de BCC. Nantie d'un énorme succès, la série déboucha en 1966 sur deux longs métrages exploités en salles (seulement aux US), qui furent froidement accueillis, ce qui empêcha Adam West de décoller en tant qu'acteur. Le Batman de la série n'a pas grand chose à voir avec celui qu'ont plus tard incarné Michael Keaton, Val Kilmer, Georges Clooney et Christian Bale. Loin de l'être torturé et avide de vengeance qu'on connaît, il est plutôt prétentieux et ridicule, assez maladroit, et à son costume moulant un peu rococo s'ajoutent tout un tas d'accessoires très rigolos aux noms démentiels mais qu'on ne verra que rarement en action, faute d'effets spéciaux dignes de ce nom. Les épisodes, filmés en studio, sont constitués à 90% de dialogues ineptes récités avec le plus grand sérieux, entrecoupés de bagarres lors desquelles des bruitages de BD apparaissent à l'écran. Mais ne vous y trompez pas : c'est un régal ! C'est ce Batman qu'on retrouve dans le jeu d'Ocean et le joueur va devoir l'accompagner dans deux aventures : A bird in the Hand contre le Pingouin, et A fête worse than Death contre le Joker. La première chose qui frappe lorsqu'on découvre les versions ST et Amiga, c'est la qualité graphique du jeu et la petite taille de la zone d'écran qu'il occupe. Pour ce dernier point, les choses s'expliquent rapidement : en fait, le jeu est affiché à la manière d'une bande dessinée dont les cases s'empilent les unes sur les autres. À chaque fois que l'on change de lieu, le suivant apparaît dans une nouvelle case qui vient se superposer aux précédentes, qui, pour créer un effet de relief, ne sont plus que partiellement visibles et passent en &« grisé ». L'effet est magnifique et c'est une vraie trouvaille, qu'on a vu dans aucun autre jeu (en dehors de Comix Zone, qui ne reprend pas l'idée d'empilement mais situe aussi son action au sein d'une BD). Les combats, contre des hommes de main du Pingouin ou du Joker, ne sont là que pour compliquer un peu la tâche du joueur, BCC étant bel et bien un jeu d'aventure, dans lequel la gestion de l'énergie du héros devient vite une obsession. On touche là le point discutable du jeu : à tout moment, le fait de presser le bouton de tir tout en tirant le joystick fait apparaître un inventaire. Les nombreux objets que Batman est amené à ramasser apparaissent et il est possible de les utiliser ou de s'en débarrasser. Au centre, la tête de Batman est dessinée, symbolisant l'énergie du héros. Celle-ci se change peu à peu en squelette à mesure que son énergie diminue. Non seulement le processus ne s'arrête pas lors des accès à l'inventaire, mais en plus il est d'une effrayante rapidité ! Chaque utilisation d'un objet est l'occasion de constater qu'on a perdu beaucoup d'énergie, et le joueur se retrouve mis sous pression alors qu'il aimerait bien savourer tranquillement le jeu. La première aventure confronte Batman au Pingouin. C'est celle-ci qui inspire la magnifique page de présentation du jeu, particulièrement réussie sur ST, dont les couleurs plus vives que celles de l'Amiga étaient pour l'occasion tout à fait appropriées. Batman doit contrecarrer les plans de domination mondiale du Pingouin. Pour ce faire, il va devoir pénétrer le repaire de son ennemi (une usine), et introduire une disquette plombée d'un virus dans son ordinateur. La deuxième aventure nous montre un Batman touché au point sensible : son pire ennemi le Joker vient de capturer son fidèle ami Robin. Si les graphismes sont en tous points superbes, dignes d'une très bonne BD, la bande son laisse perplexe. Reprenant à l'envi le thème rigolo de la série télé, elle prend très rapidement la tête mais on se demande un peu si ce n'est pas un fait exprès, tant on est vite tenté de réduire le volume sonore quasiment à zéro. Il n'y a aucun effet sonore qui ponctue l'action, et la musique a le même rendu quelle que soit la version du jeu. Les auteurs de BCC, Jonathan Smith, Charles Davies et Keith Tinman (formant à l'origine le studio Special FX), ont par la suite continué d'œuvrer pour Ocean, réalisant quelques jeux issus de licences de films et en reprenant différentes scènes pour en faire des minis-jeux d'action, comme par exemple The Untouchables (Les Incorruptibles, d'après le film de B.de Palma), avec à chaque fois une certaine réussite, surtout si l'on considère la qualité médiocre de ce genre de jeu. Jamais ils ne retrouveront toutefois l'inspiration qui fut la leur pour ce Batman. Après la sortie du film Batman, et le raz-de-marée médiatique sans précédent qu'elle provoqua (quel tapage quand on y repense ! à côté, Le Seigneur des Anneaux semble sorti dans l'intimité), un jeu intitulé Batman The Movie sera lancé, estampillé du label Ocean, comme il se doit. Ni vraiment raté ni vraiment réussi (la course en Batmobile est fort bien réalisée mais les autres phases de jeu sont quelconques), c'est un produit de série comme il en est tant sorti sur ST et Amiga, mais qui a eu pour effet de faire tomber The Caped Crusader dans l'oubli. Aujourd'hui, BCC prend sa revanche. Les sites rétro reviennent volontiers sur ces qualités étonnantes de gameplay et de réalisation, qui en font tout simplement un des meilleurs jeux jamais édités par Ocean, et peut-être un des meilleurs jeux mettant en scène l'homme chauve-souris. Un avis sur l'article ? Une expérience à partager ? Cliquez ici pour réagir sur le forum (10 réactions) |