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Pokémon - Analyses et Univers Étendu
Année : 2012
Système : DS, Game Boy, GBA, GBC
Développeur : Game Freak
Éditeur : Nintendo
Genre : RPG

G.III - Un regard sur le dessin animé

Nous y venons enfin. Pokémon est, j'ai tenté de vous en convaincre depuis plusieurs pages, un jeu d'une qualité rare qui a su se renouveler au fil des années et des générations, avec plus ou moins de bonheur parfois mais toujours avec ferveur. À lui seul, il aurait pu devenir un titre incontournable de Nintendo, un coup de génie qui aurait su reproduire les chocs qu'ont été Super Mario Bros., The Legend of Zelda et tant d'autres. Mais à nouveau, restons honnêtes : ce qui a su propulser cette série-ci sur le devant de la scène, bien plus que la presse ou une campagne marketing « traditionnelle », c'est bel et bien la série animée Pokémon.

Nintendo et les dessins animés, cela a toujours été une histoire d'amour : de Captain N à The Legend of Zelda en passant par le fameux Super Mario Brothers Super Show, Nintendo n'a pas attendu les années 1990 pour promouvoir et faire vendre leurs jeux, consoles et accessoires par l'intermédiaire de la télévision. Pokémon, cependant, marque une certaine rupture avec ce principe : si, auparavant, le dessin animé arrivait bien après la sortie des jeux en magasin et cherchait davantage à créer un « bastion de fans » (c'était l'époque du « Nintendo Club » et de Nintendo Power), ici, sa création et sa diffusion étaient concomitantes à celle du jeu vidéo. De plus, on remarquera la fidélité extrême (du moins, pour un produit du genre) à sa source, les lieux, personnages - du moins les principaux - et antagonistes rencontrés seront les mêmes que dans le jeu vidéo.

Captain N et le Super Mario Bros Super Show ont été diffusés de 1989 à 1991 aux États-Unis.

Comme je l'avais annoncé en début de dossier, l'objectif de la série animée Pokémon est avant tout didactique. Les aventures de Sasha et de son fameux Pikachu ont été pensés, créés, diffusés de façon à servir de « tutoriel » aux joueurs dans un premier temps, tant les règles de Pokémon peuvent paraître obscures pour un enfant ou un joueur guère habitué aux RPG, genre qui à l'époque restait malgré tout confidentiel et ce jusqu'à la sortie de Final Fantasy VII aux États-Unis et en Europe.
Aussi, les premiers épisodes nous expliquent, face caméra, le personnage se parlant à lui-même, les bases du jeu : capture et évolution, différences entre les types, etc. etc. L'avancée de Sasha dans le monde de Pokémon suit également celle du joueur, qui traversera, comme son héros favori, la forêt de Jade, le mont Sélénite, la ville d'Azuria... et le dessin animé de mettre en lumière les spécificités de chaque lieu, spécificités que l'on retrouvera dans notre cartouche. Cependant, tous les épisodes ne se cantonnent pas à « expliquer » le fonctionnement du jeu et au fur et à mesure le dessin animé prendra de la distance afin de développer quelques lignes narratrices plus ou moins longues.

La série compte, fin 2012, quatorze saisons et plus de 750 épisodes, sans parler des épisodes spéciaux.

Concrètement, chaque épisode de la série animée, et ce quelle que soit la saison, est consacrée à un et un seul thème spécifique : la découverte d'un pokémon sauvage et de ses capacités, un lieu, un champion d'arène... Et, dans chacun des épisodes ou presque, l'on trouve la Team Rocket ou, du moins, trois de ses représentants : Jessie, James et Miaouss, qui vont tenter de faire des bêtises et, surtout, de capturer le Pikachu de Sasha qu'ils jugent surpuissant. Plus drôles que dangereux, ils sont rentrés dans l'histoire grâce à leur « chanson », un leitmotiv qu'ils scandent à chacune de leur apparition :

« Nous sommes de retour !
Pour vous jouer un mauvais tour !

Jessie : Afin de préserver le monde de la dévastation !
James : Afin de rallier tous les peuples à notre nation !
Jessie : Afin de d'écraser l'amour et la vérité !
James : Afin d'étendre notre pouvoir jusqu'à la voie Lactée !

Jessie ! James !

Jessie : La Team Rocket plus rapide que la lumière !
James : Rendez-vous tous ou ce sera la guerre !
Miaous : Oui, la guerre ! »

Et, bien entendu, dans chaque épisode ils se feront tatanner le visage et se feront expulser manu militari dans une grande explosion les expédiant dans les nuages, où ils hurlent alors :

« Une fois de plus la Team Rocket s'envole vers d'autres cieux ! »

La Team Rocket, en pleine gloire et en pleine défaite. Voici un lien vers la version française de la chanson.

D'autres membres de la Team Rocket et des autres factions bio-terroristes (Team Aqua, Magma...) apparaîtront au cours de l'aventure, mais ce trio infernal restera encore et toujours présent, bénéficiant du reste d'un engouement formidable de la part des spectateurs, et non sans raison. Le dessin animé Pokémon ne restera pas, soyons honnêtes, dans les annales de l'animation japonaise ; n'eût été le « phénomène » des monstres de poche, le show n'aurait même pas duré une saison. Très brouillon dans sa narration, animation en dents de scie, messages simplexes... Pokémon est la cible de choix favorie des opposants aux produits nippons, qui arguent systématiquement que ce sont des œuvres imbéciles et incapables d'élever la jeunesse.
Alors, cela est-il vrai ? Oui et non, dirais-je et, comme souvent dans ce genre de produits, il y a une différence improbable entre la version originale et les versions occidentales, celles que nous avons eues sur nos télévisions. Pourtant, peut-on se dire, rien que de plus inoffensif que Pokémon : mais aux yeux des censeurs, il y avait plusieurs choses à couper. Aussi, tous les instants où Sasha se moque des filles ou mange comme un porc en se gavant, les tentatives de séduction de Pierre, l'un de ses compagnons, sur toutes les femmes qu'il rencontre, etc. etc. bref, tout ce qui pouvait y avoir de « potache ».

Deux des quelques épisodes bannis. Le premier a été interdit à cause de la prédominance d'armes à feu (une première, on n'en voit jamais dans les jeux), le second car James se déguise en femme et exhibe sa poitrine généreuse (et gonflable)...

Alors, bien sûr, ces scènes-ci étaient loin d'être du niveau des cartoons de Nickelodeon mais ils apportaient une soupape de décompression nécessaire qui élevait légèrement le dessin animé et le rendait « acceptable » pour les grands enfants ou les pré-ados, du moins, largement plus regardable. Une fois tout ceci supprimé, nous nous retrouvions devant une soupe sans saveur et quand bien même l'on serait fan du jeu comme je l'étais, au fur et à mesure, l'on ne peut que s'en détourner. Son besoin de mener une « grande aventure » prend rapidement le pas sur les bribes d'informations que l'on aurait pu récupérer dans le jeu lui-même, informations du reste bien mieux développées et bien plus riches, et le tout devient rapidement indigeste.
Si Pokémon, du reste, a également su marquer les esprits, c'est pour son générique incroyablement catchy, sans doute l'un des mieux écrits du genre aux côtés de celui de Duck Tales (La Bande à Picsou) ou les œuvres de Richard Stone (générique des Tiny Toons, de Freakazoid, des Animaniacs...), à la fois épique et même poignant, la plupart des joueurs de ma génération, même ceux qui ne se sont intéressés que de très loin à tout cela, reconnaissent ces quelques notes et les autres, comme moi, récitent ces vers sans s'y tromper.

Un jour, je serai le meilleur dresseur...
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