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Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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III-b. Le pendant pessimiste. ![]() Et si, plus tard, tout allait plus mal, et même, lâchons le mot : si tout allait moins bien ? F-Zero pense aussi au pire et, comme meilleur preuve, je citerais la course Lightening, qui, contrairement à ce que son nom laisserait présager, est le circuit le plus sombre d'entre tous. Jugez plutôt : Un violent orage éclate, la piste est formée de grilles de métaux rouillées... Et c'est réellement dans un esprit fataliste que la course a été créée. Voici comment Nintendo présentait l'ambiance de ce nouveau circuit peu avant la sortie du jeu NGC : "la couche d'ozone est détériorée par la pollution, l'obscurité est entretenue par des nuages, le climat est de plus en plus imprévisible, les compagnies investissent alors dans de nouveaux dispositifs de production d'énergie". Bref, nous sommes très loin de la sérénité et de l'optimisme béat de tout à l'heure. On retrouve plutôt, en images, toutes les prédictions les plus alarmistes que ces dernières années ont laissé présager aux spécialistes. Lightening en est l'héritière directe et ne laisse aucun doute : dans le coin, ce n'est pas l'éclate. Et dans Fire Field : Cilinder Knot non plus ! Les mêmes grilles (mais qui sont leurs fournisseurs ?) forment cette fois-ci des tuyaux, avec des bosses dangereuses qui nous propulsent en l'air. Les véhicules sursautent et tournoient sans cesse. Il faut toute la concentration du monde pour échapper à la lave qui, juste en dessous, nous menace, et nous menaçait déjà d'ailleurs, il y a six ans, dans la version précédente de course Fire Field (F-Zero X). Une particularité de la série ? Pensez donc, pas du tout, au contraire : encore une ambiance classique que notre jeu évoque... Dans Star Wars : Racer ou bien encore dans Wipeout, la même lave, écarlate, agrémente certains parcours, pas plus joyeux. Dans Forsaken (1998, PSX, N64), Akklaim exploite à fond ce "futurisme-là". Comment le nommer ? Pour se faire comprendre, la meilleure solution reste encore de décrire le jeu : Suite à un accident nucléaire, la Terre a été nommée 'Forsaken' (=Zone abandonnée). Nous chevauchons alors une moto hi-tech, lancée à pleine vitesse dans des dédales de couloirs métalliques pour piller tout ce qu'il reste. Des dizaines de robots tentent de nous barrer la route, mais, rassurez-vous, nos instincts les plus destructeurs prennent le dessus et libèrent la route par la violence. Des robots, des armes, des explosions - tout un programme. ![]() C'est l'Apocalypse ! Le progrès qui nous échappe. Pour l'instant, juché sur la GameCube, Rob, le bricoleur, est bien gentil, docile, mais vous allez voir que bientôt... Il va réclamer un salaire, une prime de risque pour l'altitude, des indemnités en cas d'accident. Rebelles, les robots vont tous nous tuer. C'est aussi ça F-Zero, une ambiance parfois sombre, fataliste, parce l'évolution technique possède son revers à la médaille. Contrairement à la plupart des jeux futuristes, F-Zero ne choisit pas son camp. Et qu'il soit une aide ou une menace, Rob est un robot. En tant que simple décor, il représente le progrès technique. Voilà pourquoi il est là... J'espère que ça vous a plu, au revoir les amis. ... Il représente le progrès ? Le progrès technique !? Ce n'est peut-être pas si sûr, parce que Rob est un très vieux robot. On a vu que le futurisme de F-Zero est plutôt rétro, mais là quand même, Rob est plus que rétro, il est carrément Antique ! Une nouvelle piste, allez, on décortique : Rob s'intègre peut-être dans... III-c. ...Le paradoxe de l'Antiquité futuriste. De légers mouvement des bras, les yeux qui se ferment par intermittence, pas de doute : Le robot tique, il ne comprend pas ! Et on peut se mette à sa place - même si on ne rentre pas dans la boîte de l'Action Set Deluxe de Nintendo - car aucun style, ou presque, n'est plus ancien que l'Art Antique, ou, à plus forte raison, que les décors de la Préhistoire... Et donc intuitivement, rien n'est plus incompatible avec l'idée du futur lointain... ![]() Pourtant, nombreux sont les jeux futuristes montrant des paysages antiques ou primitifs, à l'opposé des deux types de développements industriels que nous venons de voir. Qu'il fusse idéal ou destructeur, au moins, dans la précédente partie, il y avait un développement, ou, du moins, une évolution, un changement - mais là, que voit-on ? Des montagnes de pierres brutes, de grandes zones de sables, de grands espaces inexploités comme dans Sand Ocean (F-Zero GX).Et l'antique est là à chaque épisode. Sur GameBoy Advance, une course s'appelle Empirean Colony et démontre la même absence de développement. Dans l'épisode 64-bits, de grands colosses s'élèvent au milieu de rien. Et dans les circuits Sand Ocean et White Land (toujours N64) des écritures anciennes remplissent des obélisques en or, elles semblent composer des mots dans un alphabet inconnu. Huit années encore plus tôt, et sur Super Nintendo : des dolmens agrémentent déjà le lointain de la course Silence ; des défenses et un gros crâne préhistorique sortent du circuit Death Wind ; et dans le dernier niveau, ce sont de grands bâtiments à porches qui sortent d'une étrange marre de sang, comme autant de Collisées infernaux... Et tout, et tout, et tout... Et ça devient franchement intrigant quand on imagine que tous les jeux futuristes font appel à ce genre de visuels : Dans ExtremeG, les motos filent, notamment, dans une ville ancienne évoquant la civilisation Maya. Dans Quantum RedShift, le récent jeu futuriste de la X-Box développé en partie par la même équipe que Wipeout, une des courses se déroule en Egypte, sans doute la ville la plus antique qui soit. Et ce ne sont que quelques exemples entre mille, c'est du 100% classique, parce que pour être tout à fait honnête, dans Wipeout aussi, l'antique est là, partout même, complètement intégré à l'univers. ![]() ![]() Il y aurait une explication logique, et si Rob, le cartésien, disposait d'un haut-parleur sous les diodes, voilà ce qu'il ne manquerait pas de vous lancer : "Bonjour. Je suis Rob le robot. Un jeu qui se situe dans le futur, suppose que l'on voyage sur d'autres planètes, certaines peuvent être inexploitées, sans développement, comme ces zones totalement vierges découvertes, dès le XVe siècle, par vos navigateurs. D'ailleurs, [ajouterait-il avec un brin de perfidie] dans le jeu, cette idée est parfaitement étayée par la présence de Gomar & Shioh, deux p(il)otes de 102 ans, dont les coutumes ressemblent beaucoup à celles des 'vraies' tribus des îles du Pacifique décrites par certains ethnologues...". L'ancienneté de certains paysages serait le fruit de planètes (plutôt isolées ou "peu développées" ß avec des guillemets énormes) que les humains auraient découvertes depuis très peu de temps. Est-ce la vraie raison ? III-d. L'impression de 'Passé' global : Des éléments aussi scientifiques que mythologiques. La logique est réductrice : c'est en dehors de toute explication strictement rationnelle que ces jeux montrent des paysages antiques. La preuve, toujours dans Sand Ocean (F-Zero GX), des animaux mythologiques : de grands poissons fabuleux et un serpent gigantesque, dansent dans le sable. Nous sommes alors clairement dans l'émotion. Les animaux mythologiques ne sont pas, à proprement parler, des animaux du passé, mais ils font, eux aussi, référence au Passé et à l'Antiquité. Le jeu vidéo, média instinctif par excellence, n'a pas le temps de démontrer, surtout en ce qui concerne les motifs des décors, il doit aller au plus efficace, il doit montrer et suggérer. C'est donc l'impression visuelle de Passé qui compte, celle qui est en chacun de nous, mais ça, ça passe au dessus de la tête toute métallique d'un Rob customisé. Cela ne fait pourtant aucun doute : ce n'est pas une exception de cette série. Au contraire, toute une foultitude de jeux montraient déjà un futur myhtologico-archaïque et parfois avec beaucoup plus d'insistance. Là aussi, c'est un grand classique du futur que notre jeu reprend à son compte. ![]() ![]() Dans le non moins mythique Space Harrier (Sega, 1985, Arcade/Consoles de l'époque), les développeurs vont encore plus loin : Le Mythologique (et donc l'imaginaire, le culturel) se mêle intimement et souvent dans un même sprite (!) avec le Préhistorique (le scientifique, le réel) pour former cette fameuse impression de 'Passé global'. Pourquoi les développeurs auraient-ils fait naître le 'mammouth cyclope', sinon pour créer cette atmosphère ? Un mammouth cyclope, c'est quand même une sacrée trouvaille ! Soit un grand mélange des images 'archaïques' qu'elles soient fictives ou effective. Les colonnes et les serpents-boss peuvent aussi illustrer cette idée. Mais attention, tout ceci dans le futur : ce double passé ne doit pas nous faire oublier l'esprit cyber, les armes Hi Tech, ou les écrans géants téléporteurs (au début du 2ème épisode sur megadrive) qui définissent aussi le thème du soft... C'est à dire, l'étrange cocktail du futur et de l'antique que l'on retrouve donc dans tous les plus grands jeux de ce thème. Et bon sang, pourquoi ? Pourquoi, Rob, escalades-tu la bibliothèque ? Tu vas tomber ! Des critiques littéraires qui étudient la modernité, ont remarqué qu'une des caractéristiques des œuvres dites modernes, est de faire, paradoxalement, très souvent référence à l'Antique et à la Mythologie. Ces critiques expliquent cela par le fait que le 'Passé Antique' est tellement vieux qu'il en devient intemporel, et donc, indémodable. Je crois qu'ici, ce qui marche avec les livres marche aussi avec les jeux. De quoi un jeu futuriste a-t-il plus besoin qu'une impression de modernité ? Mais le plus étonnant (et un peu la vraie raison de cette Annexe au dossier F-Zero) est une autre Antiquité, assez particulière, il faut dire qu'elle concerne directement notre media favori. Et ce n'est pas Rob, l'accessoire High Tech de la Famicom qui me contredira. IV) L'ANTIQUITE IMPERISSABLE (COMME TOUTES LES ANTIQUITES) DES BITS : UN PARADOXE QUI SE VERIFIE CONSTAMMENT.Moi et la vieille boite de conserve, nous avons vu pas mal de futurismes, mais cela reste parcellaire. Il nous reste des clichés sur le dos. C'est tout un pan des codes futuristes que nous avons oublié. Pourtant, ce doit être le pan plus important, le plus fondamental, surtout pour notre enquête puisque ce futurisme concerne tout particulièrement les jeux vidéo. Il n'a pas vraiment de nom, on y accède en éliminant les autres, il est donc temps de se frotter à ces morceaux de décors, toujours récurrents, et de prendre des risques interprétatifs. "C'est moins dangereux que prendre des risques sur la piste" me rétorque Rob, venant de dériver son circuit imprimé sur la chaîne Hi-fi pour pouvoir enfin nous parler. Décidément, cette machine gagne en esprit... ![]() On l'a vu, Sand Ocean est une des courses les plus antiques de la saga, notamment sur GameCube. Pourtant, sur cette console, le circuit ne montre pas seulement du sable, des animaux mythologiques et des pierres brutes. Il est composé de deux sections très différentes : Au cours de la course, on quitte l'Antiquité mythologique du désert (que l'on a décrit) pour rentrer dans une grotte, à l'inverse, très technoïde avec des effets lasers, des formes géométriques, des hologrammes, des couleurs fluorescentes... Bref, à première vue, c'est un contraste total entre les passages extérieurs et intérieurs de cette drôle de course. Cependant, ce n'est sans doute pas un hasard si ces éléments apparaissent justement dans la course 'Antique' par excellence. Les décors technoïdes de l'intérieur du temple sont comme ceux de l'extérieur : Ils montrent simplement une 'autre' sorte d'Antiquité qui est, elle aussi, moderne et intemporelle : l'Antiquité des pixels. Explications. IV-a. Vieux écrans Et si dans l'Informatique, encore plus qu'ailleurs, le plus ancien était aussi le plus moderne ? Et s'il fallait regarder les 'gros pixels, point comme' des vestiges mais, au contraire, comme les signes d'un univers d'anticipation ? Avant d'en arriver là, reconnaissons une chose : de gros pixels c'est un style, c'est le symbole même des univers virtuels. Vous voudriez dessiner un logo pour une rubrique jeux vidéo ou Informatique, vous n'auriez guère le choix : vous simuleriez les pixels et l'aliasing. C'est l'image d'Epinal des images numériques. A l'inverse, les petits polygones lissés et nombreux sont très réalistes, du moins, ils aident au réalisme des jeux, mais ils n'ont, en eux-mêmes, aucun style particulier. Ils représentent ce qu'ils sont censé représenter, fidèles et discrets, sans rien y ajouter. Forcément, ils sont 'tout et son contraire'. La carence technique du début de l'histoire des images créés par informatique a un style particulier, elle - ça, c'est indéniable. Du coup, pour dire à l'œil : "Attention ceci est technologique !" nous voilà obligé de faire appel à des éléments rétros, parce qu'ils sont typiques de l'informatique. Paradoxe : l'Informatique qui ne cesse d'être impliquée dans l'idée de modernité et même l'idée de futur, crée une impression d'autant plus moderne et futuriste lorsqu'elle contient des régressions techniques volontaires. Moralité : ce que l'on a tant tenté de cacher d'un côté pour aller vers le futur, pour progresser, est ce que l'on montre de l'autre, et de plus en plus : qu'elle soit dans un fond de sélection ou au détour d'un décor, la (fausse) carence technique est une panacée. Les gros pixels font modernes, les motifs répétitifs nous font plonger dans un futur alternatif - un univers cyber. Et quand le fond est vide, c'est encore mieux, mais dorénavant c'est un choix revendiqué, un parti pris - un écran black is beautiful. Sur un fond noir, tout ressort, toutes les couleurs sont en sur-brillance. Surtout le vert d'ailleurs.
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