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Dorabo Chan
Année : 1993
Système : SNES
Développeur : Red Company
Éditeur : Naxat Soft
Genre : Action / RPG
Par David (07 mai 2002)

« Dorabo quoi ? », vous entends-je dire. Pas d'inquiétude, Dorabo Chan est un des ces softs passés quasi-inaperçus chez nous du fait de sa distribution plus que limitée. Normal : il n'est sorti qu'au Japon. Ce qui est une honte, et ce, pour cinq raisons majeures.

La première, c'est que Dorabo Chan est un jeu extrêmement plaisant à jouer. La deuxième, c'est qu'il est superbement réalisé. Enfin, la cinquième (j'ai préféré passer directement à celle-là, bien plus intéressante que les autres), c'est que Dorabo Chan sur Snes est la suite de Makai Prince Dorabo Chan, sorti trois ans plus tôt sur la PC-Engine.

« Mais pourquoi parler d'un jeu inconnu, alors que de nombreux autres classiques attendent toujours d'être traités sur GrosPixels ? » me direz-vous. Ce à quoi je vous répondrai de reprendre cette introduction depuis le début, de la lire et de la relire jusqu'à compréhension complète du concept ; puis de passer à la suite de cet article. Je pourrais bien sûr vous dire que découvrir, c'est aussi bien que redécouvrir, mais je préfère vous laisser réfléchir.

Un univers totalement délirant

Dorabo Chan est un petit garçon dont le but est de rétablir le calme et l'harmonie dans le monde - originalité, quand tu nous tiens. Armé de sa cape qu'il peut faire tournoyer sur elle-même - mais pas trop, ou alors il perd l'équilibre - et de son chapeau de feutre qu'il peut envoyer à la figure de ses ennemis, Dorabo devra traverser de multiples contrées toutes plus dangereuses les unes que les autres. Les plus malins d'entre vous diront qu'un chapeau de feutre ne peut décemment intenter à la vie d'autrui, mais dans le monde qu'est celui de Dorabo, rien n'est très normal. La magie y tient une place prépondérante, les bateaux volent, et même le plus inoffensif des cochons d'Inde (?!) peut se révéler un redoutable prédateur.

Dans sa lutte contre le mal, Dorabo n'est pas seul. Kowaru et Camilla, deux charmantes guerrières, viendront fréquemment l'épauler. Entièrement gérées par l'ordinateur, elles se contentent de vous suivre à la trace, puis de fondre sur le moindre ennemi se présentant à l'écran. D'une puissance limitée, il ne faudra pas trop compter sur elles pour faire beaucoup de dégâts dans les troupes adverses.

Le professeur, quant à lui, ménera nos amis d'une région à une autre à bord de sa superbe voiture qui, au cours de l'aventure, en verra de toutes les couleurs. C'est à lui qu'il faudra s'adresser afin de quitter un niveau entièrement débarassé de sa vermine.

Pour finir, les personnages dont la tête ressemble à s'y méprendre à celles des statues de l'Ile de Pâques, sont essentiels à la réussite de l'expédition, puisque c'est grâce à eux que vous pourrez, notamment, sauvegarder votre partie. Parfois, ils vous permettront d'atteindre des hauteurs inespérées ou même de vous projeter à pleine vitesse contre un mur afin de le détruire. De précieuses aides, donc.

Un jeu d'action relativement évolutif

Représenté de haut à la manière d'un Zelda, Dorabo Chan est un pur jeu d'action matiné d'un soupçon de RPG. Les niveaux sont, certes, extrêmement linéaires ; de plus, il n'est pas question que vous quittiez l'un d'eux sans y avoir accompli vos missions jusqu'au bout ; cependant, le héros aquiert au fil de ses aventures des points d'expérience qui, à force de bastonnade et de brimade, augmenteront sensiblement sa force de frappe, sa résistance aux coups, et son niveau de vie. Toutes ces jauges sont représentées par des tomates (!) ou des oignons (!!) : tomates pour Dorabo (qu'il pourra regagner en mangeant celles que lâcheront de temps à autres ses ennemis), et oignons pour les méchants (les ennemis les plus récurrents sont des oignons sur pattes qui, selon l'environnement, changeront de garde-robe : manteaux dans les montagnes enneigées, treillis dans la jungle... N'importe quoi).

En outre, il est possible à Dorabo d'acheter divers chapeaux qui, en fonction de leurs prix, seront plus ou moins puissants. Les premiers volent lentement en ligne droite sur une courte distance ; les derniers fusent en zig-zag vers l'ennemi le plus proche et le collent jusqu'à décès avéré de ce dernier. C'est un fait : les chapeaux sont des objets parfois fort cruels.

Enfin, Dorabo possède une boîte qu'il pourra remplir de cartes magiques. Il existe un grand nombre de cartes différentes aux effets très variés : certaines vous redonneront toute votre vie tandis que d'autres vous protégeront d'une petite fée pendant un court laps de temps. Il n'est possible d'obtenir ces cartes que dans les villages. Là, une sorte de jack-pot vous distribuera, contre espèce sonnante et trébuchante, ces mêmes cartes de façon totalement aléatoire (sur la photo ci-dessous, la carte obtenue est la Boule de Feu). La dernière carte ainsi obtenue apparaitra dans votre boîte affichée en bas à droite de l'écran.

Plaisir de jeu avant tout

Que dire, sinon que Dorabo Chan était un de mes jeux d'action favoris à la grande époque de la Super Famicom ? Pour autant, ce titre n'avait rien de révolutionnaire : l'action accusait, disons-le franchement, un manque certain de variété ; la difficulté, bien que croissante, restait généralement si réduite que parvenir au dénouement du jeu ne prenait pas plus de quelques heures ; et les niveaux, bien que différents graphiquement, n'apportaient généralement aucune idée franchement novatrice. Pourtant, le charme opérait sans mal.

L'univers du jeu, tout d'abord, s'inscrivait dans la droite lignée des « cute games » qui, comme à leur habitude, apportaient leurs lots de personnages mignons et attachants tout droit sortis des mangas. Très bien animés, tous les sprites, amis ou ennemis, avaient clairement fait l'objet d'un soin tout particulier ; monstres de fin de niveau en tête. Ces boss, parfois coriaces, avaient à leur disposition de nombreuses attaques destructrices qui, couplées à leur possibilité de décupler leur force de frappe en milieu de combat, pouvaient aisément envoyer un joueur au pays des morts en un rien de temps.

Les boss

Ce soin apporté à l'animation se retrouvait dans tous les autres compartiments du soft : graphisme, son, déroulement du jeu... Tout était propre, net et sans bavure. Ce souci du détail allait même jusqu'aux dialogues des personnages qui, en fonction de la personnalité de ces derniers, voyaient leurs paroles s'afficher à l'écran avec des sonorités tantôt douces, tantôt agressives. Une bien bonne idée qui ne fut reprise que dans très peu de jeux où, pourtant, les dialogues abondaient.

Alors certes, l'ensemble n'atteignait pas les degrés d'excellence des meilleures réalisations de la Super Nes, mais il ne faisait aucun doute que cette production de Naxat avait été peaufinée juste comme il fallait afin de ne pas décevoir les fans de la première heure sur la PC-Engine de Nec. La musique, souvent guillerette et enjouée, accompagnait des bruitages simples mais très agréables ; les graphismes alternaient le bon - les sprites - et le moins bon - les décors, au final assez pauvres. Mais ce dernier point est bien là le seul reproche véritable que l'on puisse faire à la réalisation de Dorabo Chan, tant l'ensemble y reste de haute tenue.

Une durée de vie, hélas, un peu courte

La pile de sauvegarde et le didacticiel de début de partie, très bien fichu, laissaient augurer d'une aventure riche et longue. Dommage : Dorabo Chan ne comporte que 6 niveaux de longueur moyenne - le fin mot de l'histoire, qui ne manque pas d'humour, survenant après seulement quelques heures de jeu !


Le didacticiel

Deuxième hic, et non des moindres : les textes sont entièrement en japonais ! Que cela ne vous rebute pas pour autant : les dialogues sont relativement courts, et il n'est nullement nécessaire de comprendre la langue de Miyazaki pour progresser. Seul le premier niveau d'« apprentissage » pourra vous demander quelques secondes de réflexion - et encore. Bien évidemment, si vous séchez, n'hésitez pas à me contacter.

Un jeu à ne pas rater !

Globalement, Dorabo Chan sur Super Famicom reste un excellent divertissement qu'il serait vraiment dommage de ne pas découvrir. La première mouture de ce jeu, sortie en 1987 sur PC-Engine, n'avait pas grand chose à voir, puisqu'elle n'était qu'un - très - vulgaire jeu de plates-formes réalisé avec 2 sous en poche par Red Company en partenariat avec Naxat, alors toute jeunes sociétés. Par la suite, Naxat Soft développa un grand nombre de titres, voire de hits, sur la console de NEC, dont le sublissime jeu de flipper Devil's Crush (1990), repris plus tard par Technosoft sur Megadrive ; ou le shoot'em up aux milliards de sprites, Coryoon (1991). Red, de son côté, se tailla une réputation inimaginable suite à la réalisation d'un des meilleurs - sinon LE meilleur - RPGs de tous les temps, Tengai Makyô 2, uniquement sorti au Japon sur le Super CD-Rom de la Nec PC-Engine. Hélas, cette compagnie de qualité ne s'essaya que très peu à la Super Famicom - tout juste compte-t-on un Tengai Makyô Zero étonnant puisque gérant les heures du jour et de la nuit grâce à une horloge intégrée à la cartouche. On ne peut évidemment que le regretter à la vue du résultat obtenu par l'équipe sur ce Dorabo Chan injustement oublié des joueurs.

Dorabo Chan(version NEC PC Engine)
Devil's Crush (PC Engine)
Coryoon (NEC PC Engine)
David
(07 mai 2002)
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