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Cannon Fodder
Année : 1994
Système : Amiga, Atari ST, Windows
Développeur : Sensible Software
Éditeur : Virgin Interactive
Genre : Action / Stratégie
Par EdO / Sector One (09 octobre 2006)

War! Has never been so much fun!
War! Has never been so much fun!

Adepte du jeu vidéo des années 90, vous vous souvenez forcément de cette rengaine quasi hypnotique alors que le titre énigmatique Cannon Fodder, affublé d'un énorme coqueliquot, apparaissait sur votre écran.

Cannon Fodder... Je n'ai appris que bien plus tard la signification de ce titre (chair à canon), étant à l'époque peu pratiquant de la langue de Shakespeare. Aujourd'hui, je me demande ce qu'auraient pensé mes parents si le vendeur de la Fnac leur avait traduit le titre. Le logo sur la boite m'avait déjà mis la puce à l'oreille : Sensible Software... Damned, ce sont encore ces Anglais complètement déjantés qui ont redonné un bon coup de jeune au foot video-ludique grâce à leur hit Sensible Soccer ! Cette société avait quand même un passé assez prestigieux : Wizball, Microprose Soccer ou Mega Lo Mania !
Plein de confiance et 299 francs plus tard, j'insérais la disquette dans mon Atari ST...

Cannon Fodder... Tout un concept ! Le message guerrier du jeu est complètement décalé : on a affaire à un vrai jeu de guerre mais les développeurs ont su intelligemment mettre de coté l'aspect gore du sujet en adoptant certains jeux de mots complètement barrés, un style graphique très mignon et des bruitages à la limite de la caricature. D'ailleurs, j'ai appris récemment que les concepteurs avaient donné leurs propres surnoms aux personnages du jeu ! (Jools Jameson - programmeur - et Stoo Cambridge - graphiste - merci à CBL pour l'info)

En 1994, cette petite perle a fait le bonheur d'une armée de joueurs aussi bien sur consoles que sur micro-ordinateurs. Il mets en scène un commando de petits soldats qui doivent remplir plus de 40 missions relativement variées, missions découpées en plusieurs niveaux (généralement 3 phases par mission).

Cela va de la destruction de bâtiments, à la liquidation pure et simple des ennemis jusqu'à protéger des civils ou libérer des otages. Bien sûr, vous avez à votre disposition une arme de poing basique, utile contre les soldats ennemis, mais aussi des roquettes et des grenades (qu'on peut aussi récupérer au cours des niveaux mais attention à ne pas tirer dessus sinon c'est l'explosion). Ces armes lourdes seront bien plus efficaces contre les bâtiments et autres bunkers que les armes légères.
De plus, au fil des niveaux, vous pourrez emprunter de nombreux véhicules qui pourront s'avérer très utiles, voire indispensables. Je pense notamment aux hélicoptères qui peuvent emmener votre troupe dans des endroits inaccessibles ou la jeep qui par le biais d'un tremplin pourra vous faire accéder au territoire ennemi.
Attention à bien manœuvrer car ces engins ne sont pas imperméables aux roquettes envoyées par les antagonistes. Profitez-en pour écraser quelques adversaires au passage, ça économise du temps (et des balles gniark gniark !).

Au début, vous ne disposez que d'un nombre limité de recrues à envoyer "au casse-pipe" mais en cas de succès, vos effectifs augmenteront mission après mission. Cependant, certains niveaux ne requièrent pas une escouade entière et il n'est pas rare de n'avoir à disposition qu'un simple troufion face à un régiment entier ! D'où la nécessité de ne pas foncer tête baissée et d'analyser soigneusement la carte afin de prendre les chemins les moins risqués. Attention aussi aux nombreux pièges laissés par vos ennemis, destinés à entraver sérieusement votre progression : il est ainsi très fréquent de sauter sur une mine lors d'un passage un peu étroit entre les arbres ! Méfiez-vous aussi des pièges naturels comme les sables mouvants !

Le Game Over ne surviendra que lorsque votre réserve de chair à canon sera épuisée. En effet, entre chaque mission, vous avez un écran où vous voyez les soldats faire la queue en attendant le prochain massacre (avec en arrière-plan, les pierres tombales des collègues qui vous ont précédé, c'est pas très gai mais bon c'est la guerre hein ?).

Les contrôles sont très simples et tout se fait à la souris : click gauche pour déplacer votre escadron, click droit pour tirer et combinaison des 2 boutons pour envoyer une grenade ou une roquette. Bien entendu, vous pouvez (et devez !) envoyer des éclaireurs en scindant votre équipe en plusieurs parties afin de protéger par exemple une zone ou poster un homme à un endroit stratégique afin de couvrir vos arrières. Une carte de la zone est disponible et permettra de visualiser la position des cibles ou des bâtiments à détruire.

Graphiquement le jeu est extrêmement agréable bien qu'il n'échappe pas non plus aux clichés : ainsi, vous bataillerez sur des terrains assez variés mais peu originaux : antarctique, jungle, désert, forêt, souterrain... Néanmoins, le jeu est suffisamment lisible pour ne pas s'emmêler les pinceaux avec les quelques pixels dont sont fait vos courageux soldats. Le champ de bataille est présenté de haut et on a une bonne vision générale de l'ensemble des opérations.

La musique est toutefois la grande absente car hormis la bande son de l'intro, vraiment excellente (une vraie chanson digitalisée et pas un simple soundtrack ou soundchip), nous nous contenterons de bruitages peu nombreux mais très convaincants (sons de forêts ou d'animaux, bruitages d'armes et d'explosions, bien évidemment). Pourtant, quelques morceaux de musique viennent agrémenter les "Hall of Fame", ces légendaires écrans de fin de mission qui font passer à la postérité ceux tombés au combat ou ceux qui ont prit du galon !
Notez justement que les grades militaires sont bien respectés puisque vos soldats survivants ont un grade de plus en plus élevé au fil des épreuves et donc ont une portée de tir plus importante, ce qui peut être primordial lors d'une mission un peu délicate.

La difficulté est par contre assez élevée : ces salauds d'ennemis ne sont pas toujours nombreux mais très bien placés : planqués entre les buissons ou en hauteur, armés de lance-roquettes, ils attendent tranquillement que vous traversiez le fleuve à la nage (donc en état de vulnérabilité totale car vous ne pouvez pas tirer en eaux profondes) pour vous coller une bastos entre les deux yeux ! Aucun honneur !
Le gros soucis vient plutôt du système de sauvegarde (versions PC, ST et Amiga) qui ne vous autorise à enregistrer votre position qu'entre les missions, ce qui signifie que vous devez vous taper les 3 phases de chaque mission sans perdre une seule fois sinon c'est reparti pour un tour. Et franchement ça énerve. À contrario, les versions console disposent d'un système à base de mots de passe plus pratique.

Les copies d'écran présentées sont issues des versions Atari ST et Amiga mais le jeu a été développé sur tous les supports possibles et imaginables de l'époque : même le GameBoy Color y a eu droit, avec plus ou moins de succès. Une version pour mobile (Symbian) a aussi été à l'ordre du jour par Codemasters, société qui a racheté Sensible Software il y a quelques années. Certaines versions diffèrent suivant les machines : apparemment, certaines cinématiques en synthèse ont été rajoutées sur les versions CD.

Une séquelle à Cannon Fodder existe sur PC et Amiga mais de mon point de vue, il s'agit plus d'un add-on qu'une suite puisque aucune amélioration n'est visible, que ce soit dans le concept ou dans la représentation graphique. Intitulée Cannon Fodder 2, cette suite est clairement beaucoup plus difficile.

Le coquelicot est Angleterre associé au souvenir des combattants de la première guerre mondiale, et le fait qu'il apparaisse dans le jeu causa une polémique à sa sortie. L'éditeur fut obligé de modifier l'illustration de la boîte du jeu et d'y ajouter la phrase "This game is not in any way endorsed by the Royal British Legion", qui fut par la suite parodiée dans d'autres jeux Amiga)

En conclusion, Cannon Fodder est un très grand jeu de stratégie/action qui fait la part belle aux réflexes mais beaucoup de persévérance et une certaine dose de réflexion seront les clés qui vous mèneront à la victoire ! Les seuls bémols sont une difficulté un peu trop élevée, une maniabilité moins intuitive pour les versions consoles (joypad) et l'absence d'un système de sauvegarde digne de ce nom sur les versions micro. À ce sujet, n'hésitez pas à essayer Cannon Fodder avec un émulateur ST ou Amiga, la fonction "save state" prend ici toute son ampleur (et le jeu devient subitement plus agréable).

Pour ceux qui aiment ce type de jeu alliant un (petit) peu de stratégie et (beaucoup) d'action, je me permets de conseiller l'excellent Soldiers: Heroes of World War II, sorti récemment sur PC (2004). Un Cannon Fodder nouvelle génération en quelque sorte avec moult effets spéciaux et un moteur physique bien sympathique.

EdO / Sector One
(09 octobre 2006)
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