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Puzzle Uo Poko
Année : 1998
Système : Arcade
Développeur : Cave
Éditeur : Jaleco
Genre : Puzzle
Par MTF (08 août 2011)

Il y a, sur Grospixels, un dossier consacré à CAVE. Appelé très justement « Le shoot'em up selon CAVE », il se consacre aux nombreux shmups que la société a développés de Donpachi (1995) à Ibara (2005), mais d'autres jeux ont depuis rejoint les game centers ; l'on ne citera que Mushihime-sama Futari, sorti en 2006, qui fait encore sensation et qui est reconnu pour la complexité de ses patterns qui demandent une grande mémorisation.
Cependant, l'on ne saurait restreindre la carrière de CAVE aux seuls jeux de tir. Ils ont en effet à leur actif d'autres genres, notamment un petit jeu de snowboard très sympathique sur Saturn, Steep Slode Sliders (1997) et même un MMORPG, Shin Megami Tensei: Imagine (2007). Aussi, vous ne serez pas surpris si je ne vous parle pas ici d'un manic shooter ou d'un bullet hell, mais d'un tout autre jeu. Et je pense même que personne ne se doute vraiment du genre de jeu dont je vais ici parler : je vous présente Puzzle Uo Poko, Puzzle Bobble-like par CAVE !

Steep Slode Sliders et Shin Megami Tensei: Imagine.

Un petit chat jaune dans la mer...

Une fois n'est pas coutume, je m'en vais commencer par le scénario car il y en a un. Ou plutôt, il y a un prétexte au fait de jouer. Rien de transcendant, rassurez-vous, mais cela fait partie des nombreux petits « plus » qui me rendent le jeu indispensable. Vous êtes aux commandes d'un petit chat (jaune) qui a sacrément faim. Et que mangent les chats ? Des poissons ! Malheureusement, voyez comme la nature est horrible, la poiscaille se trouve au fin fond de l'océan. Notre petit chat (jaune) est donc bien embêté, car il ne peut pas respirer longtemps sous l'eau. Il décide cependant de s'embarquer dans un sous-marin (jaune) et de s'autoriser de timides excursions en combinaison de chat-grenouille. L'oxygène vient cependant bientôt à manquer, il se doit donc de récupérer de l'air autant que faire se peut. La solution ? Libérer des bulles salvatrices en brisant le carcan de verre qui les sépare de sa petite bouche.

"Miaouglb, miaouglb...". L'écran de droite vous indique votre progression et quelques statistiques.

Personnellement, je trouve cette idée fameuse. Traitez-moi de fou, mais je n'ai jamais toute ma tête quand je parle de ce jeu que j'idolâtre plus que tout. Il reste que ce périple sous-marin le conduira jusqu'au centre de la Terre ou presque, jusqu'aux portes d'une façon de temple oublié. Le scénario n'est jamais développé au cours du jeu, et l'on ne saura même rien de ces ruines étranges... Un simple écran « Congratulations » vient nous remercier avant de revenir à l'écran titre. Léger, mais, ma foi, cela mérite bien les encouragements du jury.

...qui ne copie pas (trop) sur ses voisins

Trèfle de plaisanterie, comme dit le lapin, et venons-en au fait. Uo Poko fait partie de ces nombreux Puzzle Bobble-like qui ont fleuri sur le marché de l'arcade après la sortie du premier opus en 1994. Le principe, dans les grandes lignes, est rigoureusement le même : dans l'aire de jeu se trouvent des billes de couleur disposées selon un certain schéma. En envoyant d'autres billes colorées, il faut s'arranger pour en faire rentrer trois ou plus en contact pour les faire disparaître, le niveau s'achevant une fois que toutes les billes ont disparu. Uo Poko modifie néanmoins la recette de base de façon originale. Si dans Puzzle Bobble les billes restaient accrochées au sommet de l'aire de jeu et qu'il fallait propulser les nouvelles à partir du bas de l'écran au moyen d'une façon de canon, ici, les billes se situent au bas de l'écran et les nouvelles arrivent par le haut. Mais, et c'est là la deuxième innovation de CAVE, elles ne sont pas propulsées directement mais au moyen d'un ressort qui ressemble à ceux que l'on trouve dans les flippers.
Tout se joue alors au stick, la borne elle-même ne possédant que deux joysticks et deux boutons « start ». Selon la pression enregistrée vers le bas, le ressort se bande plus ou moins et la bille va aller plus ou moins vers la droite de l'aire de jeu. Il ne faut surtout pas se manquer, car l'on ne peut pas « débander » : un petit coup tiré trop fort, et la bille part dans les choux (NdL : cette phrase n'avait rien à voir avec la procréation). Uo Poko rajoute donc ici une composante, dirais-je, « subtilité » que n'avait pas le titre de Taito et qui demande un certain apprentissage. Les trois premiers niveaux vous proposent, dès lors, une flèche-guide composée de pointillés qui vous indiquent où la bille va tomber à coup sûr. Mais arrivé au stage 4, vous êtes livrés à vous-mêmes... à moins de faire un game over, après quoi le jeu vous gratifiera à nouveau, et uniquement pour un seul niveau, de ce guide qui vous sauvera volontiers la mise.

Un écran bien chargé... ...et un autre qui se finit bientôt.

À cette composante subtile viennent s'ajouter deux autres éléments, cette fois-ci directement issus de son illustre modèle : la rapidité et la stratégie. La notion stratégique apparaît aux alentours du niveau 10 : concrètement, il s'agit d'éliminer les billes dans un certain ordre pour provoquer des réactions en chaîne. Étant donné que les billes sont sujettes à la gravité, elles choient dans les espaces laissés vacants par les disparitions précédentes, rentrent en contact les unes avec les autres et tout cela peut aider à vider un écran complet en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. C'est même, pour certains stages, l'unique façon de détruire toutes les billes dans le temps imparti.
La notion rapidité, à nouveau, est directement issue de Puzzle Bobble. Si vous tardez trop, le sol de l'aire de jeu commence à monter à une vitesse folle ; et si un élément dépasse le plafond, c'est le game over assuré. Si ce n'est donc cette petite particularité quant au lancer des billes, vous naviguerez en terrain connu. Mais pourquoi alors, pourquoi donc en parler ? Des clones de Puzzle Bobble, il y en a des dizaines... Hé bien, je vais vous donner la meilleure raison du monde. Ce jeu, je l'aime.

T'inquiète pas minou, le sol monte mais c'est bon !... Ah, je te préfère content :)

Plus c'est dur, et plus c'est...

J'aime Uo Poko tout d'abord pour son caractère mignon, kawaï diront certains. Le jeu est un déluge de tons pastels et arcs-en-ciel, sans aucun dégradé ni effets spéciaux : on le dirait tout droit sorti d'un cahier de coloriage d'élève de maternelle. L'environnement sonore n'est pas en reste : les musiques douces (bien qu'elles se fassent plus énervées vers la fin du jeu) côtoient les bruitages mignons, en premier lieu les miaulements de joie du petit chat au moment où vous faites des réactions en chaîne. Un seul de ses « miaou miaou miaw ! » me fait fondre comme un sucre dans une tasse de café.
Les arrière-plans, cela est justifié par le scénario, se composent de plans animés de la faune sous-marine, poissons, requins, pieuvres. Guère nombreux, ils sont agréables et ne surchargent jamais l'écran, permettant d'avoir à tout moment le contrôle sur ce qui se passe dans notre aire de jeu.

Les poissons-lanternes lui font peur, mais les temples mystérieux, ça va. Bizarres, les chats.

Car du contrôle, il en faudra ! C'est la deuxième raison pour laquelle j'ai choisi de parler de Uo Poko. Il ne faut en effet surtout pas se focaliser sur l'aspect mignonnet du titre : sous ses dehors guimauve se dissimule un plat des plus épicés ; le jeu est relativement difficile pour un puzzle game, du moins si on essaye de le finir en un minimum de credits. Le sol monte incroyablement vite très tôt dans le jeu : à peine quatre secondes après le « Go ! » et vous voilà déjà dans les ennuis. Le stress augmente rapidement, la musique s'accélère, le chat fait la grimace. Il faut alors à tout prix garder son sang-froid pour envoyer la bille où il le faut : dans nombre d'écrans, vous n'avez pas droit à l'erreur. La moindre faute, et vous vous retrouvez avec des billes « déchets » qui non seulement vous empêchent d'atteindre celles qui pourraient provoquer une réaction en chaîne, mais qui de plus vous rapprochent davantage encore de l'asphyxie.
Il faudra du reste apprendre à composer avec certaines billes spéciales, nouvel héritage du jeu de Bub et Bob, aux pouvoirs souvent décisifs qui vous sauveront la mise... ou vous empêtreront davantage encore. Voici une liste exhaustive des différentes billes que l'on trouvera dans le jeu :

La bulle de base, celle qui doit disparaître ! Existe en rouge, jaune, violet, rose, bleu, vert et gris, soit sept teintes. La couleur violette et la rose sont assez proches... Je suis un peu daltonien et dans le feu de l'action parfois, je me mélange les pinceaux.

La « double bulle ». Elle devient une bulle normale de la couleur affichée du moment que des bulles adjacentes disparaissent, quelles que soient leur nature.

La bombe s'active du moment qu'une bulle tombe exactement sur elle : il ne faut pas qu'elle glisse le long d'autres bulles présentes. Elle élimine les bulles adjacentes, et peut activer d'autres bombes.

L'hexagone est indestructible : il s'agit donc d'un obstacle qui vient bloquer les bulles situées sous lui. Il tombe au fur et à mesure que les bulles en-dessous de lui sont validées.

La bulle d'air est coincée par les bulles de base et se libère dès qu'il y a un espace libre au-dessus d'elle, ce qui a souvent pour conséquence de faire tout tomber. À chasser absolument !

Le cristal se brise encore une fois uniquement si une bulle tombe exactement sur lui. Il a la fâcheuse tendance à basculer lorsqu'on valide des bulles en-dessous de lui, ce qui rend plus délicat sa destruction.

Le vortex est une pièce très intéressante. Quand une bulle tombe exactement sur lui, il devient de la couleur de celle-ci. Il y en a généralement une dizaine dans l'aire de jeu, et il s'agit souvent de trouver la bonne couleur pour provoquer une réaction permettant de vider l'écran.

La bulle flèche, que l'on ne trouve que dans deux stages, abaisse le sol de l'écran lorsqu'elle est validée. À utiliser en cas de coup dur.

Le sous-marin apparaît lorsque vous êtes en position de difficulté. Si une bulle le touche, il envoie un faisceau qui détruit trois colonnes de bulles sous lui, et transforme les « doubles bulles » en bulles normales.

À jouer jusqu'à la mi-août !

Le jeu possède cependant un immense défaut : sa durée de vie. Malgré sa difficulté, somme toute relative car au moindre game over le guide revient pour vous aider à progresser, le jeu ne comporte que trente niveaux et il n'y a guère plusieurs stratégies par stage ; aussi, jouer pour le score n'a pas réellement d'intérêt, sauf si l'on se pose comme contrainte de n'utiliser qu'un nombre limité de crédits. Il est vraiment dommage que les développeurs n'aient pas poussé le vice un peu plus, car l'on peut facilement être demandeur : le jeu dégage une ambiance très particulière à laquelle on peut aisément être sensible.

Le genre de niveau délicat sans le guide. Il faut faire tomber une bille exactement entre les hexagones pour exploser les cristaux et provoquer une réaction en chaîne qui videra tout l'écran d'un coup.

Reste alors à tenter l'aventure à deux, si jamais vous voulez jouer avec votre petite amie (ou votre petit ami). Le mode deux joueurs n'est pas, cependant, un mode versus mais un mode coopératif : le joueur deux dirige un petit chat, violet cette fois-ci, sur la partie droite de l'écran. L'aire de jeu est doublée, et il faut à nouveau éliminer toutes les billes présentes. Il faut prendre garde cependant, car les deux joueurs envoient leurs bulles comme ils le désirent, et il arrive très souvent que celles-ci s'entrechoquent et n'atterrissent donc pas là où l'on aurait voulu. Je ne trouve pas ce mode très agréable pour ma part, même s'il augure quelques petites tranches de rigolade.

Le mode deux joueurs a le mérite d'exister, même s'il est un rien chaotique dans les niveaux avancés.

Que doit-on retenir de Uo Poko en définitive ? S'il n'arrive pas à la cheville du grand Puzzle Bobble ou d'autres perles du genre comme les Magical Drop, il reste mon clone favori en raison de son ambiance mignonne qui dissimule un certain challenge et une certaine originalité dans sa jouabilité. Il n'aura certes pas fait énormément d'émules, et l'on en parle définitivement peu sur la toile malgré sa belle paternité ; mais il a un je-ne-sais-quoi qui me fascine et me plaît. Je ne peux que vous encourager à l'essayer, et à vous laisser prendre au jeu : et si vous baillez dans les premières niveaux, je puis vous garantir que bientôt, vous verrez votre premier game over... Allez-vous donc vous laisser faire ?

Are you a bad enough cat to eat the fishes?

La revue de Lyle (janvier 2008)

Je n'avais pas encore fait de puzzle (appellation souvent surfaite pour les jeux d'arcade, du reste). Voici Puzzle Uo Poko :

Deux raisons de parler de ce matching game sorti en 1998 : le fait qu'il ait été réalisé par Cave nous donne enfin l'occasion de voir ce que ce développeur pour le moins « spécialisé » sait faire en dehors du manic. L'autre raison, c'est son cadre d'aquarium aussi relaxant qu'adorable. Le son des bulles, le timbre cristallin des collisions ou la voix qui fait « Ready, go ! », c'est tout un poème. Et ça suffit à faire lancer la rom régulièrement alors que dans l'absolu, le jeu n'est que le 50ème quasi-plagiat de Puzzle Bobble en arcade. Comme quoi, il en faut parfois peu à un jeu d'arcade pour se distinguer de la masse.

Le concept inventé par Taito est ici réduit à sa plus simple représentation. Vous lancez les bulles à l'aide d'un lance-billes de flipper, il vous suffit de doser correctement la projection pour que la bulle tombe à peu près à l'endroit souhaité (il ne doit pas y avoir beaucoup de jeux vidéo qui se jouent avec un seul bouton). On prend rapidement le coup, il faut tout de même faire preuve de suffisamment de précision pour qu'une bulle atterrissant sur une autre bulle tombe du bon côté. Comme d'habitude, les possibilités de chains sont très ouvertes (même si dans un premier temps, on ne les provoque pas volontairement).
Le « sol » monte rapidement et on se sent en danger dès les premiers niveaux, mais en faisant attention, on peut dès les premières parties aller assez loin. On a parfois, dans les situations délicates, la possibilité de viser un sous-marin passant en haut du niveau. Le sous-marin touché envoie alors un puissant laser qui détruit une bonne moitié des bulles accumulées. Pour finir, le jeu propose une trentaine de niveaux et au fur et à mesure de votre progression, vous tombez sur des bulles aux propriétés inédites. Une rom à essayer, ne serait-ce que pour le côté mignon/zen.

MTF
(08 août 2011)
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