Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par Laurent (16 mai 2001)
Acorn est un nom qui fleure bon le passé, et les errances du marché de la micro-informatique des années 80. Leurs ordinateurs n'ont pas apporté grand chose à l'évolution des jeux vidéo, c'est ce que l'on pourrait penser au premier abord. Pourtant, en fouillant les archives de l'histoire de la compagnie, on tombe sur des noms familiers... L'histoire d'Acorn en brefEn décembre 1978, les britanniques Hermann Hauser et Chris Curry fondent la compagnie Acorn, qui se spécialise dans un premier temps dans les jeux électroniques. Ils sont rejoints par Roger Wilson, un étudiant de Cambridge, qui leur propose de s'essayer à la micro-informatique. Un projet de micro-ordinateur vendu en kit est lancé. La machine est commercialisée en 1979, mais ne connaît pas le succès escompté, trop complexe à monter pour l'utilisateur, et inabordable dans sa programmation. Début 1981, Acorn lance l'Atom, vendu 120£ en kit et 170£ monté. Cette fois, la machine est plutôt bien accueillie et apporte à la compagnie ses premiers bénéfices. L'heure est venue pour Acorn de passer à la vitesse supérieure. Hauser obtient un prêt auprès d'une banque anglaise de 5 000£, somme qui est plus tard révisée à 10 000£. Pendant ce temps, la BBC (British Broadcasting Corporation, à savoir la télé et la radio d'outre-manche) cherche une entreprise susceptible de développer un micro-ordinateur répondant à ses spécifications, en vue du tournage d'une série intitulée The Computer Program. Beaucoup de grands noms de la micro britannique sont intéressés, parmi lesquels Sinclair et NewBrain, dont les propositions sont rejetées. Acorn propose alors à la BBC un modèle nommé Proton, dont le prototype n'est mis en état de fonctionner qu'à quelques jours de sa démonstration aux responsables de la chaîne. Le Proton va au-delà des désirs de la BBC, et le contrat est signé. Le nouveau micro-ordinateur Acorn est tout naturellement rebaptisé Acorn BBC. Sa sortie est prévu pour Décembre 1981, mais de nouveaux problèmes financiers pour Acorn vont le retarder jusqu'à l'été 82. L'Acorn BBC a un look austère, moins attractif que les produits concurrents en provenance de chez Sinclair. Son seul signe distinctif est le logo de la série télévisée qui apparaît à droite du clavier. Malgré ce petit handicap, les ventes de la machine vont rapidement atteindre 1,5 millions d'exemplaires, alors qu'Acorn en avait au départ prévu environ 12 000. Deux versions du BBC sont disponibles : Le Model A (c'est-à-dire le Proton), équipé de 16 Ko de RAM, vendu 299£, et le Model B muni de 32 Ko de RAM et vendu 399£. Si le Model A s'adresse au grand public, le B, grâce à son port Econet, se vend surtout auprès des écoles pour des applications réseau. Le BBC est un ordinateur évolutif et plein de possibilités. Par exemple, on peut y monter un second CPU sur une socket prévue, dont Acorn dépose avec fierté le brevet sous le nom de Tube. Bill Gates, toujours à l'affût d'un système pouvant s'imposer comme un standard mondial (le MSX ne sortira que l'année suivante), propose à Acorn le MS-DOS comme système d'exploitation, mais se voit éconduit, la compagnie préférant développer son propre OS orienté vers les réseaux Econet. Le prix élevé du BBC pousse Acorn, en 1983, à sortir l'Electron, une machine plus abordable. Il s'agit d'un BBC dépourvu de ports d'extension et de certains modes graphiques. L'Electron ne connaît pas le succès escompté. On lui reproche notamment la lenteur de son affichage, due au chip graphique bon marché utilisé en vue de réduire le prix de vente. Néanmoins, ce successeur du BBC n'a pas trop à rougir de la comparaison avec le Commodore 64. À partir de fin 1983, Acorn, dont la trésorerie repose entièrement sur le BBC, va connaître de sérieuses difficultés financières, et c'est le dos au mur que la société lance un nouvel ordinateur, le BBC B. Surpassant le BBC grâce à son BASIC amélioré, ses 128 Ko de RAM et ses graphismes supérieurs, le BBC B repose sur la technologie RISC, ce qui en fait une machine d'avenir, mais dont le développement est horriblement coûteux. Ne pouvant plus suivre le rythme, Acorn se voit racheté par Olivetti, qui devient propriétaire de 80% des parts de la compagnies et des stocks. On est en 1987, et l'Atari ST et le Commodore Amiga font un carton. Acorn se lance dans le développement d'un micro-ordinateur 32-bits : l'Archimedes, qui sort en août. L'Archimedes est à l'époque de sa sortie le micro-ordinateur le plus puissant du marché, avec son microprocesseur RISC nommé ARM2, dont le développement a coûté encore une fois une fortune à Acorn. Hélas, comme beaucoup de systèmes, l'Archimedes va souffrir d'un manque cruel de logiciels. Les développeurs se sont focalisés sur le "tiercé MC 68000" : ST, Amiga, et Mac, et même le PC fait de la figuration sur le marché. L'Archimedes A3000, sorti en Mai 1989, constitue le sommet de la gamme Archimedes. Pendant quelques temps encore, Acorn va améliorer sa gamme, notamment au niveau de son système d'exploitation, avant de changer de registre en 1994 avec le RiscPC, un standard visant à concurrencer le Mac et le PC, basé sur le système RiscOS. Le RiscPC est une machine tournée vers le marché grand public, dont la principale qualité est l'évolutivité, grâce à des emplacements permettant de lui ajouter des extensions apellées slices (littéralement des tranches augmentant l'épaisseur de l'unité centrale) ce qui le différencie d'emblée de l'Archimedes dans sa conception. En 1991, Acorn sort son premier portable, le A4, qui se montre plus performant qu'un 486-50 Mhz, summum du PC de l'époque. Le A4 est équipé de 2 Mo de RAM, d'un moniteur 9 pouces et son autonomie est de 3 heures. En 1995, Acorn sort deux autres ordinateurs, le RiscPC 600 et le RiscPC 700, machines très puissantes, puis le A7000, ultime RiscPC qui est une version simplifiée du RiscPC 700. A l'automne 98, Acorn annonce son retrait du marché des micro-ordinateurs pour se concentrer sur l'Internet, et change de nom pour s'appeler Element 14. Les ordinateurs Acorn : hardware et jeuxL'Acorn AtomSpécificités techniques
Quelques jeux furent développés pour Atom. Il s'agit le plus souvent de conversions de jeux d'arcade. Des rumeurs prétendent que le légendaire jeu Elite aurait été programmé en premier lieu sur Atom. Émulation : Il existe un émulateur d'Atom sous DOS, Atom Acorn Emulator, crée par Wouter Ras. L'Acorn BBC et l'ElectronSpécificités techniques
Acorn ArchimedesSpécificités techniques de l'Archimedes A305
Autres modèles
L'Archimedes introduit donc la technologie RISC dans la micro-informatique, bien avant le Power Macintosh, et fait montre d'une puissance et d'une vitesse de calcul inégalables à l'époque de sa sortie. Cela ne suffira pas à lui faire trouver sa place sur un marché dominé de façon écrasante par l'Amiga et l'Atari ST, pourtant bien inférieurs techniquement. Côté jeux, pas beaucoup de titres, mais signalons tout de même Zarch, de David Braben, toujours fidèle à Acorn, qui sortira sur d'autres systèmes sous le nom de Virus. Une version de Elite a aussi été réalisée sur Archimedes, qui, selon Ian Bell lui-même, est la meilleure jamais sortie. En dehors de ces deux titres forts, quelques jeux des Bitmap Bros, de Bullfrog ou de Hewson sortis sur ST et Amiga ont été adaptés sur Archimedes. Une légende prétend que chez Microsoft, une partie des employés sont des fans de l'Archimedes très portés sur les jeux vidéo, et qu'à l'époque du développement de Windows 3.1 la sortie de Lemmings, adapté sur Archimedes, aurait provoqué un retard significatif de la sortie de la fameuse interface graphique utilisateur (de sinistre mémoire). Quant au RiscPC, la sortie de jeux pour cette plate-forme n'est pas encore de l'histoire ancienne, puisque les jeux PC les plus populaires sont adaptés, encore aujourd'hui (mai 2001), sur RiscPC, environ 3 ans après leur sortie. Un des titres les plus récents sortis est Heroes of Might & Magic 2. Émulation : Il existe, sur PC, un émulateur Archimedes A440, sous DOS, et un autre, nommé ArcEm, fonctionnant sous Linux, et un autre nommé Archie fonctionnant sous Windows. Les stars de la "BBC Academy"Les jeux ne sont pas la spécialité du BBC, dont le prix élevé le réservait plutôt à une clientèle dite sérieuse, mais il est important de noter la cohorte de développeurs de jeux prestigieux qui ont démarré leur carrière sur cet ordinateur. David Braben et Ian BellCréateurs d'Elite (1984-Acornsoft), jeu de commerce spatial par excellence, sorti en premier lieu sur BBC et qui plus tard a été porté sur des machines 8-bits plus en vogue comme le C64 ou le Spectrum. Pour en savoir plus sur Elite, lisez l'article sur ce jeu ou faites un tour sur la page web de Braben. Geoff CrammondUn autre britannique qui a marqué l'histoire des jeux vidéo, avec des jeux comme Stunt Car Racer, F1 Grand Prix 1, 2, 3 et 4, ou The Sentinel. Geoff Crammond a développé sur la plupart des ordinateurs qui ont bien marché depuis le début des années 80. Sa principale particularité est de toujours travailler seul, malgré la complexité croissante des titres qu'il développe. Sur F1 Grand Prix 3, sorti sur PC en 2000, il n'a passé la main à une équipe de graphistes que peu de temps avant la sortie du jeu, afin d'y implémenter le support de l'accélération 3D des dernières cartes graphiques à la mode. Sur BBC, Crammond a développé : (Voir aussi l'article sur Revs et l'article sur Geoff Crammond). Nick Pelling, alias Orlando, alias Orlando M.PilchardCe développeur, avant de se tourner vers l'Amiga, a converti d'excellente manière plusieurs jeux d'arcade sur BBC : Chris RobertsChris Roberts est le créateur de Wing Commander, le tout premier jeu vidéo de l'histoire, si vous vous en souvenez bien, à avoir donné l'envie aux joueurs de s'acheter un compatible PC (il fallait au moins ça). Encore une célébrité, donc, qui s'est d'abord fait la main sur BBC, avec le jeu Stryker Run. Il s'agit d'un shoot'em up à scrolling horizontal où le joueur peut piloter un hélicoptère ou un avion. Ce fut le premier jeu à exploiter les 128 Ko du BBC B. Martin EdmonsonAvec son complice Paul Howarth et le musicien David Whitaker, il a crée, sur Amiga, Shadow of the Beast (Psygnosis), jeu d'une beauté incomparable mais hélas presque injouable à cause d'une difficulté mal dosée, qui a été suivi de deux suites, Beast 2 et Beast 3, jeux beaucoup plus intéressants mais aux graphismes moins inspirés. Par la suite, avec son équipe de développement nommée Reflections, il a aussi développé Destruction Derby 1 et 2 et Driver, toujours chez Psygnosis, sur Playstation. Bien avant tout ça, on le retrouve sur BBC, avec deux jeux : ConclusionUne petite rétrospective du parcours d'Acorn n'est pas inutile, pour montrer l'influence des jeux vidéo sur le déroulement de la carrière d'un ordinateur, voire même d'une marque d'ordinateurs. Les ordinateurs Acorn n'ont jamais manqué de puissance pour faire fonctionner de bons jeux, ni de bons développeurs de jeux dévolus à leur cause. L'acharnement d'Acorn à présenter ses machines comme des outils de travail, délaissant totalement le côté entertainment, est certainement à l'origine de leur manque de succès. Atari et Commodore, adoptant une politique commerciale différente, n'ont pas commis la même erreur, et ont, pour un temps, totalement dominé le marché sans que leurs produits n'aient été réellement meilleurs. Sources, remerciements, liens supplémentaires : merci à Xavier Tardy Envie de réagir ? Cliquez ici pour accéder au forum |