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Silent Hill - La série
Année : 1999
Système : Playstation, Playstation 2 ...
Développeur : Konami
Éditeur : Konami
Genre : Survival Horror

Silent Hill 4 - The Room
(2004 / Playstation 2 / Xbox / PC)

Difficile de savoir par où commencer, alors restons classiques et lançons-nous avec l’attente suscitée. Silent Hill 4 est de ces très rares jeux dont on est persuadé à l'avance qu’ils seront de purs chef d’œuvre, la Team Silent n'ayant jusque là signé que de véritables œuvres d’art. En trois titres, ces développeurs ont inventé un nouveau genre de jeu d’horreur – voire un nouveau genre de jeu tout court. Bâtis sur la base d’un scénario toujours terriblement complexe et d’une intelligence rarement vue dans ce média, usant d’une esthétique sublimement atroce et d’un design viscéralement et inconsciemment terrifiant, les trois Silent Hill sont des monuments sacrés du Jeu Vidéo qui parviennent constamment à s’échapper de la conventionnalité et du syndrome de la rentabilité toute puissante. C’est donc avec un plaisir non feint que nous découvrîmes, quelques mois avant la rédaction de ce dossier, les premières images, musiques et vidéos de Silent Hill 4, laissant présager d’un jeu absolument monumental.

Conçu par le studio responsable de Silent Hill 2, ce nouvel opus était donc en développement depuis près de trois ans. Une équipe de génie et un temps de gestation des plus conséquents. Pas de doute, ce Silent Hill 4 allait faire très mal. Le premier trailer tombe. Une image crasseuse et tressautant, des sons atroces, des créatures au design terrifiant, des chansons belles et mélancoliques à en pleurer et un synopsis des plus intrigants : Henry Townshend se réveille un jour piégé dans son appartement – The Room – par de lourdes chaînes cadenassées sur sa porte depuis l’intérieur. Personne ne l’entend hurler. Les fenêtres sont condamnées. Tout au plus peut-il regarder par sa fenêtre et son judas. Le cinquième jour, Henry découvre un étrange trou dans sa salle de bain. Bien obligé de se sortir de cette impasse invraisemblable, il s’y aventure, à reculons, pour le pire des cauchemars. Un vrai cauchemar en effet. Car ce Silent Hill 4 est définitivement raté. Et c’est le plus grand fan de la série qui vous le dit, le cœur serré par les regrets. Pourquoi ? Comment ont-ils pu tout rater à ce point là ? Que le Team Silent perde malencontreusement pied et ne parvienne plus à réitérer l’exploit, faute d’une magie qui ne serait plus là, la faute à la perte de l’équilibre subtil et fragile de la série, nous aurions pu l’accepter et, résigné, ne pas aimer ce Silent Hill 4 sans pour autant maudire ses créateurs. Oui, nous aurions pu le faire. Mais il ne s’agit ici clairement pas de ça. Les initiatives sont là, intelligentes, surprenantes, intéressantes. Mais ce n’est pourtant pas dans un renouvellement mal géré que The Room s’embourbe. Non. La faute est plus grave. Ils ont tout cassé.

Tentative d'explication : voyons rapidement les nouveautés. Le héros doit désormais systématiquement retourner chez lui, dans la « room », en vue subjective, pour y sauvegarder et suivre l’évolution de l’histoire à l’aide de mémos glissés sous sa porte et d’autres évènements troublants ayant lieu dans l’appartement. Certaines énigmes de l’extérieur ne trouveront également leur solution que dans la room. De très belles idées assurément. Le problème vient du fait que revenir chez soi casse terriblement le rythme. Les chargements sont longs et les déplacements en vue subjective sont lents. Il faut systématiquement ressortir de la piaule, sauvegarder dans le salon, repartir via une autre pièce. Cette articulation autour de la room fait également perdre pied aux décors principaux. Finie, donc, la cohérence de la ville perdue dans l’obscurité. Autre nouveauté : l’inventaire. Plus besoin désormais de passer par les écrans d’antan, il suffit désormais, un peu comme dans Splinter Cell, de sélectionner les objets à l’écran pendant le jeu à l’aide de la croix. Plus d’interface. La barre de vie, très sujette à caution, est désormais clairement affichée à l’écran, et une jauge de puissance des coups fait aussi son apparition.

Mais cette volonté de clarifier les contrôles et la situation physique du héros paraît incompréhensible, tant l’austérité de l’interface et la récalcitrante des contrôles faisaient en partie l’identité même de la saga – surtout que, au final, Henry n’est pas plus maniable. La jauge de charge des coups donne, elle, carrément trop dans le trip action game – tout ce que Silent Hill n’était pas jusque là. Et c’était très bien comme ça. Bref, ce remaniement de l’interface n'aboutit qu'à un résultat aussi douteux qu’inutile.

Voyons maintenant ce que le Team Silent a changé alors qu’elle n’aurait jamais dû y toucher. Par exemple l’obscurité. Dans Silent Hill 4, tout au plus fait-il un peu sombre. Jamais Henry ne progresse à la lueur d’une simple torche faiblissante. Abandonnée, cette formidable audace de plonger dans l’encre la plus noire un monde travaillé et façonné jusque dans ses moindres détails. L’effet faisait pourtant merveille : tout semblait si vrai et si fou à la fois, et, surtout, tout était éreintant, exténuant, épuisant, propice à la claustrophobie, voire à l’asphyxie. À la consternante opposée, ce Silent Hill 4 semble se dérouler en plein jour, plombant et bafouant l’ambiance originelle. Ajoutons à cela des monstres au design raté dans leur grande généralité. À l’exception de quelques réussites incontestables (les fantômes qui traversent les murs), le reste fait dans le classico-grotesque le plus misérable, le tout agrémenté de cris tellement ridicules qu’on en revient tout simplement toujours pas : les infirmières désormais gigantesques - mais ratées – rotent (!!), les macaques poussent des cris de... macaques. Et ça ne colle pas. Ça sonne faux, ça énerve, et, de fait, la moindre tentative d’accroche à ce jeu fantasmé mais au final si dur à avaler est balayée. Et que penser des fantômes ? L’idée était pourtant brillante : des ennemis invincibles et impossibles à fuir car capables de traverser les murs. Reconnaissons que l’effet de stress est indéniablement là : ces saloperies vous mettront la pression comme jamais – mais on ne peut parler de peur tant l’effet général n’aboutit qu’à l’énervement le plus pur.

Et faut-il parler de ces musiques magnifiques mais tout aussi magnifiquement massacrées par un volume inadapté, des paroles injustement passées sous silence, une piste tronquée, une scène tout à fait inadaptée ? Faut-il pointer du doigt ce scénario plus simple qu’à l’accoutumée, et, surtout, si mal mis en scène via des cinématiques trop vides d’informations et de tensions, de ces personnages à peine esquissés, déjà trucidés – et on aurait en plus dû s’y attacher pour les pleurer ? N’est pas Maria qui veut. Ajoutez un jeu coupé en deux, vous obligeant à tout vous retaper, certes en modifié mais en franchement bâclé, le tout accompagné d’un incroyable boulet au pathfinding catastrophique et au potentiel relou maximum. Ne cherchez point de réconfort dans les énigmes : à part une ou deux bien pensées au point de vous faire gentiment haïr les développeurs, le verdict est sans appel : le jeu n’est qu’un enchaînement de puzzles simplistes à base de clés ou autres éléments basiques à combiner. Simple à en pleurer. Et s’il est vrai que la plus intéressante énigme du jeu reste bien évidemment son scénario, rappelons alors que celui-ci est décevant, non pas dans ses fondements – passionnants – mais dans la manière dont il est mise en scène ; là encore le contraste est violent et plus dur encore à accepter : comment ont-ils bien pu oser massacrer un tel script ? Terminons avec un final certes original mais trop vite expédié et des fins intéressantes sans plus – mais qui aura réellement le courage de refaire le jeu pour tenter une autre des quatre fins ?

Ne soyons pas lapidaires. Avouons donc du bout des lèvres la qualité technique de certains éléments, comme le moteur 3D capable d’afficher des visages humains toujours aussi formidables, ainsi que d'impressionnantes textures. Citons aussi quelques caméras dynamiques des plus expressives permettant d’accrocher quelque peu. Il y a aussi la lente transformation de la paisible room en une zone envahie de démons vivants dans les murs, un effet incroyablement bien rendu. Citons enfin - réussite magistrale - la découverte du cadavre de Walter Sullivan.

Mais il s’agit là de trop peu de choses, si courtes et tellement diluées que, globalement, Silent Hill 4 ne prend pas, saboté par de trop nombreuses fautes de goût. Les visages sont certes parfaits, mais ils ne laissent transparaître aucune émotion – pourtant ils le pourraient, techniquement. C’est bien là un signe du manque de perfectionnisme des développeurs. Et pourquoi diable ont-ils abandonné ces effets de textures dynamiques si formidables mis au point pour l’hôpital de Silent Hill 3 ? Pourquoi avoir remplacé ces murs sanglants et suintants, flous et brûlants, grouillant d’organes sanguinolents, par ces ridicules vers de terre rosâtres ou ces seules peintures décrépites ? Pourquoi ? Pourquoi un tel gâchis ? Nous attendions un chef d’œuvre de la part de ceux qui ont permis au monstre sacré Silent Hill 2 d’exister. Silent Hill 4 devait faire hurler le jeu vidéo de toute son âme. Hélas, cette séquelle résiste à toute tentative d’accroche, repousse toutes les avances, se fait récalcitrante et finalement ne lâche qu’un bien maigre morceau au tout dernier moment. Reste à espérer que la saga, massacrée de l’intérieur par ce fossoyeur de fantasmes, puisse se relever.

Silent Hill, le film
Date de sortie (France, UK, US) : 21 avril 2006
Réalisé par Christophe Gans
Ecrit par Christophe Gans, Roger Avary, Nicolas Boukhrief
Directeur photo : Dan Laustsen
Musique : Jeff Dana, Akira Yamaoka
Acteurs : Rhada Mitchell, Sean Bean, Laurie Holden, Deborah Hunger, Alice Krige, Kim Coates
Durée : 127mn
Budget : 50M$
Recettes : 97M$

De plus en plus souvent, la petite Sharon rêve d'une ville abandonnée, Silent Hill. Sa mère, Rose, décidée à comprendre l'étrange mal dont souffre son enfant, décide de l'accompagner sur place. Alors qu'elles pénètrent dans cet univers lugubre, Sharon disparaît. Rose se lance à sa poursuite, mais se rend vite compte que ce lieu étrange ne ressemble à rien de normal. Noyée dans le brouillard, peuplée d'étranges créatures, hantée par des ténèbres vivantes qui dévorent littéralement tout ce qu'elles touchent, cette dimension va peu à peu livrer ses terrifiants secrets...

Lorsque l'on sait à quel point les adaptations de jeux en films ont parfois été désastreuses, on ne pouvait que redouter que ce Silent Hill, le film, ne plombe définitivement l'image du jeu vidéo auprès des non-initiés. Mais fin du suspens : Silent Hill est une réussite majeure. Bon film dans l'absolu, adaptation intelligente d'un médium réputé inadaptable, chef d'œuvre visuel et peut-être, enfin, la reconnaissance du jeu vidéo comme autre chose qu'un passe-temps aussi futile que dangereusement lobotomisant. Le film narre donc l'histoire de Rose, qui s'inquiète du somnambulisme de sa fille Sharon. Celle-ci n'a de cesse de répéter le nom d'une ville : Silent Hill. Voulant à tout prix guérir sa fille, Rose l'emmène dans la fameuse cité. Maudite, forcément, car ravagée il y a des dizaines d'années par un incendie cataclysmique qui couve toujours et plonge la ville dans un épais brouillard toxique. Seulement voilà : à peine arrivée, Sharon disparaît. Et lorsque Rose part à sa recherche, la ville révèle ses immondes atours.

La réalisation est signée Christophe Gans, connu pour avoir signé le très controversé Pacte des loups, magnifique mais délirant trip sous acide sur la Bête du Gévaudan. Que ceux que sa présence en tête du générique rebuterait soient prévenus : Gans a changé, en bien. Toujours aussi appliqué techniquement, mais définitivement moins frimeur et porté par un scénario intelligent car bien moins simpliste qu'en apparence, Gans signe là un film de toute beauté. On pourra même lui reprocher de mettre en scène uniquement ses somptueux décors plutôt que l'histoire qui s'y déroule. Mais au final, même ceux qui seront déçus par le rythme et le scénario ne pourront qu'admettre l'immense beauté morbide des cette ville. Silent Hill est, au moins, une cinématique de luxe. Une démo technique sublime. Un film d'horreur atroce, servi dans le plus beau des écrins. Chaque plan est travaillé jusqu'à l'extrême, le travail sur la lumière est stupéfiant et le design des créatures, immondes mais pourtant tellement humaines, achève de faire de ce Silent Hill l'un des films les plus esthétiques de ces dernières années. Les premières minutes suffisent à s'en convaincre. Rose erre dans un brouillard à couper au couteau. Les bruits se font atroces, déchirants. Tout semble possible derrière ce rideau blanc. Et c'est pire encore lorsqu'il devient noir comme la nuit des temps. L'obscurité enveloppe Rose d'une noirceur infinie, les ombres torturées du moindre mobilier vacillent sous la lueur blafarde de son briquet à pétrole, les cris déchirent l'obscurité, les cadavres suppliciés s'amoncellent, le silence se fait pesant... Les lieux de notre quotidien se retrouvent transfigurés par des textures crasseuses, de subtiles aberrations, du sang séché. Les sirènes hurlent, signe d'un danger imminent. La peinture s'écaille puis vole en éclats, la rouille se propage, du sang et des organes suintent à travers les murs. Le monde s'altère, signe du passage dans un monde parallèle aussi obscur qu'étouffant. Alors place au Seigneur du Mal : la créature surmontée d'une inconcevable et gigantesque tête pyramidale approche lentement, traînant sa gigantesque épée avec un bruit strident à vous percer les tympans.

Mais Silent Hill n'est pas un simple film de slasher, il est mille fois plus intelligent. Et même à ce niveau, il trône mille coudées au-dessus de n'importe quel concurrent. Car si le scénario est consistant, si la photo est belle, Silent Hill sait aussi se montrer terriblement gore et violent. Au moment où l'on s'y attend le moins, n'hésitant pas à sacrifier ses personnages, le film met en scène quelques unes des morts les plus violentes qu'il ait été donné de voir au cinéma. Sans concession aucune, le sang gicle, les corps se démembrent, se disloquent, explosent ou sont brûlés vifs en gros plan sans la moindre coupure ni hésitation de la part de la caméra, dans un maelström ignoble servi par une musique magnifique, entre rock agressif et piano terriblement mélancolique. Les sons organiques, les basses sourdes, des borborygmes puissants et un incessant sifflement, à peine perceptible mais insidieux, achèvent de faire vivre ce monde profondément dérangeant.

Il serait pourtant malhonnête d'encenser le film et de taire ces graves défauts. Il est ainsi regrettable de voir s'insinuer dans le récit des scènes rajoutées à l'emporte-pièce où le mari de Rose cherche sa femme dans la ville alors que celle-ci est perdue dans le monde parallèle. On a l'impression d'assister à un film à deux vitesses. Il faut également se résigner : Gans ne sait toujours pas diriger correctement ses acteurs. Si l'héroïne, Rose, est parfaite et si la petite fille de huit ans bluffe son monde en jouant trois personnages en même temps, les autres semblent tout faire pour plomber un récit qui méritait mieux que ça en déclamant avec force ridicule des dialogues terriblement mal écrits, que l'on jurerait sortis d'une série super Z. Certains personnages frisent même le grotesque, couverts d'une épaisse couche de maquillage et engoncés dans leur costume. Mais Silent Hill tient bon et nous achemine vers son final explosif et sa fin troublante. Il aura fallu, hélas, passer par une narration consternante de linéarité, articulée autour d'indices gros comme des maisons. Certains diront que ça fait jeu vidéo et que c'est bien normal. Et ridicule. Seulement voilà, Silent Hill, le jeu, n'était justement pas comme ça. Il était beaucoup plus intelligent que ça. Il est donc cruel de voir Gans trébucher et faire pire que le jeu sur ce point. S'il a su avec brio retranscrire son univers visuel, les plusieurs niveaux de lecture proposés par l'histoire sont ici réduits à leur strict minimum dans un récit qui, s'il tient la route, se retrouve grandement épuré et, pire, défloré dans un pré-final ridicule, quasi-tutoriel pour abrutis exposant toutes les clés de la compréhension. De ce point de vue, le manque d'ambition est flagrant. Le scénario du film n'arrive donc jamais, hélas, à la cheville des méandres psychologiques et incroyablement tragiques du jeu. Côté frissons, soyons clairs : la peur qu'instaure Gans est loin du malaise du jeu ou des films d'horreur étalons. Mais si Silent Hill ne fait jamais véritablement peur, il met la pression comme jamais. Ce n'est plus vraiment un film d'horreur, mais plutôt un film d'ambiance. Nuance. Enfin, Gans échoue lamentablement à retransmettre le sentiment de solitude du jeu, ce désespoir total qui pousserait presque au suicide. Tout d'abord parce qu'avec le film, on ne joue pas. C'est stupide, mais Gans, lui, fait comme si. Il joue. Pas nous. Et ça ne colle pas. Ensuite, tout simplement parce qu'il y a trop de monde dans ce film alors que le jeu était un vide humain désespérant. Alors, certes, cela permet de conclure par un bain d'hectolitres de sang bouillonnant. Mais on n'en demandait pas tant. Surtout que, comme à son habitude lorsqu'il se lâche, Gans tombe dans l'absurde et le grand-guignolesque (cf. Le Pacte des loups) et fait de ce final un sommet du gore, certes, mais où les fautes de goût se multiplient plus vite encore que les morts.

En résumé, une adaptation visuelle formidable d'un univers, une histoire intrigante mais bafouée et une direction artistique puissante font de ce Silent Hill un film certes bancal et imparfait, mais tout de même d'une grande qualité. Surtout, le jeu vidéo tient enfin là sa revanche sur le cinéma grâce à cette adaptation sérieuse, honnête et appliquée. Oubliez les Resident Evil et autres nanars sur pellicule, Christophe Gans envoie ad patres les Milla Jovovich qui se la jouent et ne trouvent de consistance qu'en brandissant des flingues ou à grands coups de high-kick tournoyants. Non, Silent Hill vaut mieux que cela. Et pour une fois, on attend la suite.

Silent Hill Origins
(2007 - PSP / PS2)

Silent Hill Origins était attendu avec beaucoup d'appréhension. La série Silent Hill avait en effet commencé sur les chapeaux de roue en 1999 avec un premier épisode sur PlayStation absolument traumatisant. On attendait un genre de Resident Evil, mais au final Silent Hill avait fait montre de tellement plus d'intelligence, distillant une terreur psychologique jamais vue. L'apogée avait été atteinte dès le second épisode, où tout était absolument parfait (scénario, technique, musique, esthétique), ne permettant plus aucun doute sur l'existence du jeu vidéo en tant qu'art. Avec Silent Hill 3, la série prit un tournant vers l'action, délaissant légèrement l'aspect psychologique de la saga, mais la direction technique et artistique était encore tellement forte que ce troisième épisode n'a pas à rougir de ses prédécesseurs. Mais pour Silent Hill 4, c'est une autre paire de manche. Ne manquant pas d'ambitions, pétri de bonnes intentions, mais torché en un an et demi, ce fut un échec artistique. Et économique. Un moment, on crut que la série s'arrêterait là.

C'était sans compter Silent Hill Origins. Développé pour la PlayStation Portable, et confié à une équipe occidentale (Climax UK), arrivant après un Silent Hill 4 raté, on s'attendait au coup de grâce. Mais non. Sans atteindre l'excellence scénaristique des deux premiers épisodes, et forcément moins percutant visuellement (développement sur PSP oblige), Silent Hill Origins est finalement un bon jeu. Un très bon jeu, même. Un ton en dessous des premiers volets, certes, mais après l'échec de Silent Hill 4, Origins est une très bonne surprise. Finalement porté sur PlayStation 2, sans mise à jour graphique et donc un peu cheap sur une telle console de salon, Origins plaît par son côté « petit Silent Hill appliqué ». Aucune fulgurance de quelque sorte bien sûr, mais Climax UK a su capter l'ambiance et la mythologie de la série pour aboutir à un titre très bien ficelé.

Vous êtes Travis Grady, conducteur de poids lourds solitaire, qui se retrouve à Silent Hill, pris dans la tourmente des événements. On se doute bien que Travis n'est pas ici par hasard, on sait bien qu'il a un lien avec cette petite ville maudite, mais lequel ? Origins prend son temps pour nous l'expliquer, et la conclusion est tout à fait dans l'esprit de la saga. Niveau gameplay, on compte quelques nouveautés : le combat à mains nues, plutôt pêchu, et tout un tas d'armes « du bord » de toutes sortes. C'est curieux mais efficace, on tabasse les monstres à grands coups de micro-ondes ou de machines à écrire. On s'en serait bien passé, mais l'esprit du jeu n'en est pas trop altéré.

Non, la vraie différence, c'est de pouvoir désormais switcher à volonté entre le monde « normal » et le monde « démoniaque », en utilisant des miroirs. En fait, vous n'aurez pas vraiment le choix, le passage dans le monde démoniaque étant obligatoire, mais, justement, c'est encore pire. Certes, on pourra revenir « souffler » dans le monde normal en cas de grosse panique, mais encore faudra-t-il trouver un miroir à proximité. Et puis surtout, ce procédé force à se jeter de soi-mêmes dans l'enfer. Ça parait anodin, mais actionner le miroir est une véritable souffrance. Auparavant, ces aller-retours étaient imposés, c'était à chaque fois une torture, mais on n'y pouvait rien. Maintenant, on se jette délibérément dans ce monde atroce. Pour le moral, c'est dur. Très dur. Voilà la « jolie » petite trouvaille de Origins.

Techniquement, on l'a dit, c'est relativement faible, mais la gestion des lumières reste une sacrée réussite. Et puis, pour un jeu PSP, c'est finalement très impressionnant. Côté musique, Akira Yamaoka, l'unique rescapé de la Team Silent originel, continue de faire des miracles, avec son rock mélancolique. Du très grand boulot, tout simplement.

Au final, Silent Hill Origins est une vraie petite réussite. On espère que le prochain épisode intitulé Silent Hill Homecoming, et une nouvelle fois réalisé par des occidentaux, finira de remettre la saga sur les rails. Il n'en reste pas moins que l'échec de Silent Hill 4 reste sans réponse, et que la dissolution de la Team Silent continue d'apparaître comme un triste et terriblement dommageable événement de l'histoire récente du jeu vidéo. Ce qui est sûr, d'aûtre part, est que Homecoming tirera partie des consoles haute-définition, et verra le grand retour de Pyramid Head. En outre il reprendra un certain nombre d'éléments du film de Christophe Gans. Rien que pour ça, on est curieux de voir le résultat.

À suivre...

Bruno, Nordine et Corentin
(28 janvier 2005)
Sources, remerciements, liens supplémentaires :
Les images portant le copyright Fun TV proviennent du making-of de Silent Hill 2 présent dans la version PS2 PAL du jeu.
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