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Mass Effect
Année : 2007
Système : Windows, Xbox 360
Développeur : Bioware
Éditeur : Microsoft Games Studio (Xbox 360), Electronic Arts (PC)
Genre : RPG / Action
Par Volkor (19 décembre 2011)

Première incursion de Bioware sur Xbox 360, Mass Effect sort en novembre 2007 sur la console de Microsoft, tout juste un mois après le rachat du studio canadien par le géant Electronic Arts. Ces deux événements concomitants marqueront un véritable tournant dans l'existence du développeur.

Bioware, spécialiste du RPG occidental, est avant tout un développeur PC. Depuis la création de la boîte en 1995 et jusqu'en 2003, Bioware n'œuvrera jamais sur console et se fera connaître par des hits légendaires tels que Baldur's Gate I et II ou Neverwinter Nights. Ce n'est qu'avec la réalisation de Star Wars : Knights of the Old Republic (alias KotOR) que Bioware franchira le pas sur la première Xbox, vendue justement à l'époque comme une console à l'esprit PC. Fait notable : le titre sortira sur console trois mois avant la sortie PC. L'expérience sera retentée deux ans plus tard en 2005 avec Jade Empire, Bioware ayant entre temps délégué le développement de Neverwinter Nights 2 et KotOR 2 au studio Obsidian.

Quand Mass Effect sort fin 2007, il est alors vendu comme une exclusivité Xbox 360 (la conversion sur PC n'aura lieu que plusieurs mois plus tard), ce qui reste donc une grande première pour Bioware, dont la priorité semble désormais s'orienter vers les consoles de salon. Cela aura bien évidemment son importance dans la construction du gameplay de Mass Effect, RPG action en temps réel et non au tour par tour.

Un univers solide et varié

(Si vous n'êtes pas amateur de space opera, fuyez.)

L’action de Mass Effect prend place en 2183. Avant cette date, l’humanité, rassemblée sous la bannière d’une alliance, a colonisé le système solaire, maîtrisé les voyages supra luminiques et surtout découvert sur Mars les vestiges d’une civilisation extra-terrestre disparue mais néanmoins très avancée : les Prothéens. Ces ruines mettront l’humanité sur la piste d’un relais cosmodésique aux alentours de Pluton permettant aux vaisseaux qui l’empruntent de relier quasi instantanément d’autres relais situés à des millions d’années lumière de là. C’est cela, le fameux « Mass Effect », composante indispensable à toute espèce désirant voir si les étoiles sont plus belles ailleurs. Cette découverte en engendrera d’autres, notamment la rencontre avec d’autres races extra terrestres : les sages et diplomatiques Asaris, les ultra militaristes Turiens, les scientifiques Galariens, les mercenaires Krogans, les esclavagistes Butariens, les nomades Quariens, les économistes Volus, etc. La majorité de ces espèces vit en plus ou moins bonne intelligence au sein d’une instance supra étatique : l’espace de la Citadelle, sorte d’ONU galactique avec ses États membres, son conseil, son armée, sa bureaucratie, etc.

La Citadelle : capitale administrative, culturelle et économique de la voie lactée.

Au moment où le jeu débute, l’alliance humaine est un nain politique sur cet échiquier intersidéral. Elle est regardée avec mépris par une moitié de la galaxie et avec méfiance par l’autre. Elle devra faire preuve de beaucoup de diplomatie au sein de ce panier de crabes géopolitique pour apaiser sa soif d’ambition et obtenir ce qu’elle veut par-dessus tout : une partie du pouvoir et un siège au Conseil de la Citadelle. Cette absence d’anthropocentrisme, qui remet l’humanité à sa place dans la Galaxie, donne à Mass Effect un goût tout particulier, tout en renforçant l’identification du joueur à sa propre espèce. Tout au long du jeu, on souhaite ainsi prouver aux autres (et surtout aux aliens humanophobes) qu’on n’est pas si minables que ça, nous autres les humains.

Le commandant Shepard avec son visage par défaut. Plutôt beau gosse mais le port du casque ne lui sied pas toujours à merveille.

Vous incarnez donc le Commandant Shepard, officier de l’Alliance « qui en a ». Comme pour beaucoup de jeux de rôle, vous pourrez en déterminer le sexe, la classe, la tête (difficile d’arriver à quelque chose de potable hormis les modèles prédéfinis) et le background. Ce dernier point est important car vous aurez la possibilité de choisir la personnalité de votre Shepard (sans pitié, survivant, héros de guerre) et son passé (colon, terrien, spatial). Ces éléments ne sont pas à prendre à la légère vu qu’ils offrent des quêtes annexes exclusives. Et en tant que jeune officier prometteur, vous êtes pressenti pour devenir le premier « spectre » humain, sorte de super agent au dessus des lois qui ne doit rendre des comptes qu’au Conseil de la Citadelle. À ce titre, vous n’allez pas tarder à partir sur le Normandy, vaisseau ultra-perfectionné, à la poursuite de Saren, un ex-futur collègue, très admiré dans la profession et accusé de haute trahison pour avoir noué une alliance avec les Geths, espèce robotique belliqueuse. Le renégat semble de plus en recherche active d’anciennes balises prothéenes... Voilà pour le pitch. Je ne dévoilerai pas la suite du jeu qui réserve son lot de révélations. Le tout est remarquablement bien écrit, le scenario est clair sans être simpliste et la narration est parfaitement fluide jusqu’au final, absolument dantesque.

Attention blague pourrie : Shepard veut revoir son Normandy.

Une orgie de références

Drew Karpyshyn, scénariste à cou de taureau et vague ressemblance du commandant Shepard.

Je ne compte même plus le nombre d’influences que j’ai pu remarquer dans Mass Effect : Alien(s), 2001, Blade Runner, Ulysse 31, Babylon 5, Starship troopers, Lost Planet, Star Trek, Battlestar Galactica, Matrix, Isaac Asimov, Star Wars, Jules Verne, etc. Je ne m’attarderai pas sur toutes ces œuvres tant elles paraissent évidentes à l’écran.
Je me pencherai davantage sur l’impact qu’a pu produire l’histoire de l’humanité sur l’imaginaire de Drew Karpyshyn, scénariste attitré de Bioware. Après tout, quoi de plus parlant aux joueurs humains que l’histoire de leur propre race ?

Les références historiques sautent aux yeux. Les Quariens et leur flotte nomade, véritables manouches de l’espace, nous font immédiatement penser aux gitans, ou « gens du voyage » comme on dit dans le journal de Pernaut. Ils sont d’ailleurs victimes des mêmes préjugés. Les Volus, espèce spécialisée dans l’économie, nous renvoient aux banquiers Lombards du Moyen-Âge. La société Turienne, fortement militarisée et qui s’est unie dans la guerre mais surtout par et autour de son armée rappelle le Royaume de Prusse et son rôle dans l’unification Allemande au XIXe siècle. Et comment ne pas comparer le Conseil de la Citadelle au Conseil de sécurité de l’ONU, où tout le monde rêve d’un siège permanent ? L’instance galactique souffre par ailleurs des mêmes maux que l’ONU (et que feu la SDN) : une paralysie bureaucratique doublée parfois d’une grande frilosité qui conduisent à l’inaction de peur de provoquer des guerres.

Certains ont pu même remarquer à travers Mass Effect une critique à peine voilée de nos instances internationales et de leur inefficacité à gérer les crises mondiales autrement qu’en palabrant, pendant que les autres, les vrais durs, prennent leurs responsabilités en s’affranchissant des décisions de ces technocrates impotents. Difficile à dire si cet esprit très néo-conservateur (genre Administration Bush en 2003) a réellement été voulu par les scénaristes ou pas.

La filiation KotOR

Mais c’est aussi dans son propre passé que Bioware a puisé son inspiration, et surtout dans le très bon Knights of the Old Republic, RPG prenant place dans l’univers Star Wars. Les similitudes graphiques apparaissent, les Jedi deviennent des spectres, la Force est remplacée par les pouvoirs biotiques, l’Ebon Hawk devient le Normandy, un méchant qui bascule du côté obscur, etc. Les ressemblances transparaissent également au niveau des personnages :

À gauche, Mission Vao (KotOR), à droite, Liara T'Soni (Mass Effect).
Même peau bleue et grosses similitudes dans la personnalité : l'ado sympa, inexpérimentée mais débrouillarde. Opportunité sexuelle bi.
À gauche Canderous Ordo (KotOR), à droite Urdnot Wrex (Mass Effect).
Le mercenaire au visage balafré, qui porte ses cojones en bandouillère, et qui passe son temps à nous raconter des anecdotes sur ses précédents contrats.
À gauche, Carth Onasi (KotOR), à droite Kaïdan Alenko (Mass Effect).
L’officier de l’alliance, qui fait office de premier coéquipier, un peu pénible, tendance dépressive mais néanmoins opportunité sexuelle si vous incarnez une femme.
À gauche, Dark Revan (KotOR), à droite Saren Arterius (Mass Effect).
L’ancienne légende, autrefois au service du bien, qui a fini par mal tourner.
À gauche Bastila Shan (KotOR), à droite Ashley Williams (Mass Effect).
La fille un peu grande gueule, tendance garçon manqué. Opportunité sexuelle si vous incarnez un homme.

Bioware a su aussi corriger certains défauts de KotOR, le principal étant d’attribuer trop peu de charisme à son héros. Jusqu’à présent, la politique du studio était de laisser le joueur constituer son personnage de A à Z. Notre avatar avait donc le nom qu’on lui choisissait (ce qui avait pour conséquence de ne jamais être appelé par son patronyme) et était systématiquement muet lors des dialogues. Dans Mass Effect, notre personnage est vraiment consistant : il a une voix et parle avec !
Le fait d’avoir un nom inchangeable contribue aussi au renforcement de sa caractérisation. Ton nom c’est Shepard, point barre ! Du coup, tout le monde vous appelle Shepard.

Bon, c’est pas tout ça mais on va peut être parler du jeu non ?

Le jeu

Comme dit précédemment, Mass Effect est un RPG d’action en temps réel. On y dirige donc notre Shepard qui pourra représenter 6 classes différentes. En fait, il n’y en a que 3 véritables : le Soldat (grosse santé et possibilité d’utiliser toutes les armes), le Biotique (possibilité de pouvoirs spéciaux tels que la télékinésie, la déchirure, la projection) et l’Ingénieur (pouvoirs technologiques, piratage, ouverture des caisses, etc). Les 3 autres sont des mélanges de ces 3 classes pré-existantes. On pourra faire équipe avec 2 partenaires à choisir parmi 6, qui représentent tous une classe différente. Libre à nous de choisir les meilleurs coéquipiers pour telle ou telle mission.

Qui prendre pour cette mission ? Le choix est toujours difficile. En cas d'hésitation, prenez toujours Wrex !

Comme tout bon jeu de rôle qui se respecte, l’avancement dans le jeu donne lieu à des points d’expérience qui permettent au joueur de développer les compétences de son personnage, ainsi que celles de ses équipiers. Pour les paresseux, il sera possible de choisir l’option automatique et les choix seront faits à votre place. Bien évidemment, les possibilités d’amélioration dépendront de votre classe. Ainsi si vous incarnez un soldat, vous aurez la possibilité d’augmenter les dégâts de toutes vos armes ou votre santé. Si vous incarnez un ingénieur, l’accent sera davantage mis sur le décryptage ou le sabotage. Bref, ça reste du classique. Notons cependant que quelque soit votre classe, vous pourrez développer vos compétences « charme » ou « intimidation » qui permettront de déverrouiller des options de dialogue particulièrement utiles et parfois indispensables à la résolution de certaines quêtes annexes.

Le moment est venu de choisir, Commandant Shepard. Alors choisissez bien...

Lors de la sortie de Jade Empire deux ans auparavant, Bioware avait procédé à un savant mélange de beat’em all et de RPG pour les phases d’action. Le mélange est encore à l’ordre du jour pour Mass Effect puisque cette fois-ci, le jeu de tir à la troisième personne est à l’honneur. Lorsqu’on n’est pas en phase d’exploration/dialogues, on suit donc Shepard avec une caméra située légèrement derrière son épaule droite durant les scènes d’action.

Que les fans du fusil à pompe se rassurent : leur arme fétiche existera toujours en 2183.

A l’instar de Gears of War sorti un an plus tôt, notre personnage a la possibilité de se protéger derrière les éléments du décor (il faudra quand même vite se dépêcher avant que nos partenaires nous piquent les meilleures planques !) Les combats sont donc assez tactiques et les commandos constitués par nos soins se doivent d’être complémentaires sous peine de grosses galères par la suite. Honnêtement, ces phases d’action n’ont rien de bien extraordinaire. Ça reste bon mais néanmoins très classique. L’intérêt du jeu ne réside pas là de toute façon. La possibilité de combiner les pouvoirs face à l’ennemi reste tout de même assez fun (mention spéciale au combo lévitation + projection !)

Évidemment qui dit RPG dit aussi équipement. À ce niveau-là, Mass Effect demeure très riche. Les armes et armures, mods, amplis biotiques, sont légion. Vous les récupérez sur les cadavres encore fumants de vos ennemis ou chez les traditionnels marchands. Vous passerez ensuite de nombreuses heures dans l’inventaire (terriblement mal fichu d’ailleurs) à chercher la meilleure configuration possible pour vous et votre équipe.

La gestion de l’inventaire et de l’équipement, bien qu’un peu fastidieuse, est parfois très subtile. Privilégiez l’équipement officiel des Spectres mais je vous préviens, va falloir casquer !

Le jeu inclut également des phases en véhicule. Vous prendrez alors place dans le « Mako », un blindé à 6 roues spécialisé dans les terrains accidentés. Et là, j’espère que vous aimez ça, les phases en véhicule, parce que vous allez en bouffer. Chaque mission (que ça soit dans la trame principale ou dans les quêtes annexes) comprend une phase en Mako, qui est très répétitive. En gros (en ce qui concerne les missions principales) vous vous baladerez dans des couloirs, dans lesquels il y a toujours une tourelle après un virage. La tactique très sommaire consiste alors à tirer sur la tourelle, faire marche arrière pour se planquer, resurgir pour tirer sur la tourelle et ainsi de suite jusqu’à ce que mort s’en suive pour cette pauvre tourelle (ou pour vous).

Ces phases, considérées comme l’un des points faibles du jeu, furent très décriées par la presse spécialisée au moment de sa sortie. Il faut dire que la maniabilité de l’engin est assez coton et que quelques bugs sont à déplorer. Il est par exemple impossible de pouvoir faire feu de façon précise sur un ennemi situé en contrebas. La visée est dans ce cas toujours déréglée. Deux solutions s’offrent alors à vous : descendre jusqu’à son niveau et laisser tomber l’avantage du terrain ou tout simplement mettre le pied à terre et dézinguer l’ennemi avec son fusil de Sniper. Et tenter de détruire une tourelle au fusil, c’est long. En revanche, ces passages en véhicule seront nettement plus amusants lors des quêtes annexes où les maps seront beaucoup plus ouvertes et où les facultés tous terrains du véhicule seront mises à rude épreuve.

Le fameux Mako, objet de toutes les controverses. Malgré les critiques, il reste l’un des facteurs essentiels à l’immersion du joueur dans l’univers du jeu.

Ces phases d’action seraient bien anecdotiques si on les prenait séparément. Cependant, les développeurs ont pris le soin de les insérer dans un univers particulièrement riche, comme on l’a vu plus haut. C’est ce qui fait la force du jeu. Les amateurs de hard SF seront aux anges grâce à l’insertion dans le jeu du « codex galactique », véritable encyclopédie de l’univers de Mass Effect. Vous voulez tout savoir sur les guerres civiles Turiennes ? Sur les méthodes d’accouplement des Asaris ? La biologie des Galariens ou la rebellion Krogane ? Alors prenez votre temps, installez-vous bien confortablement dans votre fauteuil et lisez. Vous allez en avoir pour votre argent. La somme d’informations est phénoménale, les articles apparaissant au fur et à mesure de votre avancement dans le jeu, de vos découvertes et de vos dialogues. Même lorsqu’on aborde une planète, on a le droit à un descriptif plus ou moins long nous narrant son histoire, son climat, et le cas échéant sa colonisation. Bref, Mass Effect est un jeu où la lecture tient une place prépondérante et si vous êtes curieux et lisez toutes les infos du codex, vous en augmenterez la durée de vie de façon substantielle.

Le codex : on peut très bien finir le jeu sans en lire le moindre article mais ce serait faire là une belle erreur tant il s'inscrit dans la démarche globale du jeu.

La réalisation technique est d’un niveau plus qu’honorable. Rompant avec la tradition des moteurs 3D faits maison comme l’Aurora Engine, Bioware utilisera pour Mass Effect le fameux moteur Unreal Engine 3, développé par Epic Games et utilisé pour certains gros hits de la Xbox 360 comme Gears of War ou Bioshock. La modélisation des visages est exemplaire et les environnements graphiques (au moins en ce qui concerne la quête principale) sont pour la plupart réussis. Les options permettent également d’activer un léger grain de pellicule qui renforce l’esprit SF du jeu. Au niveau sonore, le doublage français reste globalement satisfaisant et les plus fines oreilles reconnaitront dans la voix de Shepard le doubleur officiel de Colin Farrell ou de Jason Statham. Quant à la musique, elle est tout simplement parfaite et colle à merveille à l’esprit du jeu. Les amateurs se souviendront tout particulièrement de la musique illustrant la carte stellaire (personnellement, il m’est déjà arrivé plusieurs fois d’ouvrir cette carte et de poser la manette rien que pour cette fameuse mélodie).

La toute première mission, qui fait office de didacticiel, sur la colonie humaine d’Eden Prime. Mensonges, meurtres, manipulation politique, trahisons, visions d’apocalypse... Bien plus qu’un simple tutoriel, ce passage riche en enjeux scénaristiques nous met tout de suite dans le bain.

L’autre point fort du jeu réside dans les dialogues. Le système de gestion de choix des répliques est tout simplement ce qui se fait de mieux en la matière. En gros, au lieu de lire toutes les tirades possibles et de choisir laquelle nous va le mieux, les choix se résument à une mini phrase annonçant le ton de notre futur réponse. Cette méthode nous fait gagner un temps fou et donne beaucoup de punch à ces phases, étant donné qu’il permet de choisir la bonne tirade avant même que son interlocuteur ait fini la sienne. Du coup, les temps morts se font rares et les dialogues sont souvent pleins de surprises. Ainsi, il ne sera pas rare de voir Shepard décocher des mandales à ses interlocuteurs (femmes comprises) en choisissant la réplique « pragmatique » plutôt que « conciliante ». Il est à noter que jouer avec un Shepard badass s’avère être particulièrement jouissif. Ses répliques font souvent mouche et donnent l’impression d’incarner un croisement entre Snake Plissken et Sentenza. On prendra également beaucoup de plaisir à discuter avec les PNJ et tous nos coéquipiers et ainsi développer pourquoi pas des relations amoureuses avec certains membres de notre équipage, avec scène de sexe ultra soft à la clef.

Le système de dialogues de Mass Effect reste l’un des meilleurs jamais mis en place dans un jeu vidéo.

Les personnages sont aussi un bon point pour Mass Effect. Variés, complémentaires, bien écrits, tout est fait pour qu’on puisse s’attacher à eux. Ce qui nous rendra difficiles certains choix à faire au cours du jeu. Les connaisseurs se souviendront tout particulièrement de la mission sur Virmire, dans le dernier tiers du jeu où des décisions cruciales devront être prises, le tout dans un suspense particulièrement haletant. La mission avant tout, Commandant Shepard, la mission avant tout...

Mais comme le disait Hitchcock, il n’y a pas de bonne histoire sans bon méchant. Et à ce titre, en tant que méchant charismatique, le spectre renégat Saren en impose. À mon goût, il aurait du être un peu plus exploité mais il n’empêche, les 3 confrontations Shepard/Saren sont riches en enjeux dramatiques. Et même lorsqu’il n’est pas là, on sent sa présence tout au long du jeu. À la fin de l’histoire, on en vient à le trouver sympathique, le bougre. Et on comprend presque les raisons de sa trahison. La fin du méchant pourra même en émouvoir plus d’un en fonction des choix que vous avez faits jusqu’alors. Oui, Mass Effect est également un jeu où les prises de décision cruciales s’imposent au joueur tout au long de l’histoire et qui ont un impact significatif sur la suite des évènements et même dans les épisodes ultérieurs.

Saren et son armée de Geths.

Quelques défauts

A m’entendre, on pourrait presque croire que Mass Effect est le plus grand jeu de la création. Comme je l’ai dit plus haut, les défauts ne sont pas absents. Les sorties en véhicule sont perfectibles, l’inventaire est bordélique au possible et les coéquipiers parfois franchement débiles ont tendance à bien aimer manger du pruneau. Une petite pensée également pour tous les malheureux qui ont du subir les interminables déplacements en ascenseur masquant très subtilement les temps de chargement.

Mais le pire défaut du jeu, à mon sens, réside dans la pauvreté de ses quêtes annexes. Retrouver un pauvre gars enlevé par les pirates de l’espace, traquer un baron de la drogue sur une planète inconnue, intervenir dans une prise d’otages ? Ok pas de problème. On est là pour ça après tout. Et puis ça en impose comme objectifs non ? Sauf que ces missions sont dans leur architecture pratiquement toutes identiques. Au niveau du level design, c’est bien simple il n’y a que trois environnements possibles qui se répètent à l’infini en fonction des quêtes : la base extérieure (2 salles dont une en mezzanine) le vaisseau spatial (3 salles) et le complexe enterré (4 salles dont deux où il n’y a jamais personne). Ces missions deviennent donc ultra-répétitives et lassantes.

Je ne peux m’empêcher d’inclure à cet article quelques vignettes issues du blog de Dereck sur fluctuat.net, expliquant son désarroi face à l’inutilité de ces quêtes :

Contenu téléchargeable

5 mois après la sortie du jeu sur Xbox 360, le premier DLC arrive. Intitulé « Bring down the sky » en VO, on lui préférera le nanaresque titre français : « Turbulences à 900 000 pieds », qui colle parfaitement à l’esprit de cette mission. Shepard se transformera alors en un John McClane galactique envoyé en urgence sur l’astéroïde X-57, qui a été détourné par des terroristes butariens (surnommés Batariens par notre Shepard pragmatique) afin de le précipiter sur la colonie humaine de Terra Nova.

En plus de nous présenter officiellement les Butariens, la mission « turbulences à 900 000 pieds » nous offrira de merveilleux panoramiques, comme cette colonie terrienne vers laquelle on se dirige inexorablement et qui va finir pulvérisée si on ne fait rien dans l’heure qui suit.

L’espèce butarienne, qui avait été pour le moment seulement évoquée, apparaît ici de manière officielle pour la première fois. Esclavagistes et belliqueux, les butariens n’ont toujours pas digéré de s’être fait gentiment dégager de la Bordure Skylienne par l’alliance humaine. Du coup, un petit génocide s’imposait. Trois réacteurs à désactiver, des mines à esquiver, une colonie à sauver, un choix moral final à assumer et 400 points Microsoft à claquer. Ce DLC reste relativement honnête, surtout pour ce prix-là - même si la durée de vie est limitée (pas plus de deux heures). Il permet surtout de faire main basse sur de l’équipement top niveau à la fin de la mission et notamment la fameuse armure Colossus X, la meilleure du jeu.

Un second DLC, intitulé « Station Zenith » pointera son nez un peu plus d’un an après, durant l’été 2009. Pas de scénario ici. Une fois les 400 points Microsoft déboursés, on vous donne accès à une station spatiale servant d’entraînement au combat dans une sorte de réalité virtuelle. Le but du jeu : taper du high score afin de faire la nique aux autres concurrents.

De l’action pure et simple. Voilà ce que nous réserve cette extension qui ne présente pas beaucoup d’intérêt. Mais au moins vous aurez une belle vue...

Plusieurs scénarios sont jouables : Capture de drapeaux, chasse (les morts vous rapportent du temps), survie (rester vivant le plus longtemps possible), etc. Étrange DLC que celui-ci. Mass Effect n’est pourtant pas Gears of War en ce qui concerne l’action pure et dure, et on se demande encore ce qui a bien pu passer par la tête des développeurs pour ne s’être focalisés que sur ce point. Résultat : un intérêt très limité pour cette station Zénith. Bioware a en effet oublié que même si l’action représentait une part importante dans le jeu, celle-ci était toujours insérée dans un contexte scénarisé, propice à l’immersion.

Vers l’infini et au-delà

Comme on l’a vu au début de cet article, Mass Effect inaugurera une nouvelle ère pour Bioware. Grand succès critique et public, le soft devient alors le vaisseau amiral du studio canadien, qui envisage tout de suite de développer une franchise qui sera l’objet de toutes les priorités. Le second volet, sorti en janvier 2010 adopte un ton différent, plus sombre et plus adulte dixit Bioware. Le jeu est encore une fois un énorme succès tout à fait mérité.
Les principaux défauts de Mass Effect sont gommés mais cela ne contribuera pas pour autant à faire de Mass Effect 2 le jeu parfait. L’inventaire, qui était difficilement gérable, est tout simplement supprimé. Pareil pour le Mako. Et les ascenseurs ? On les remplace par des écrans de chargement qui durent près d’une minute. Le nombre de quêtes annexes a été baissé de moitié mais ces dernières sont plus étoffées.

Censé adopter un contenu plus adulte, Mass Effect 2 sera paradoxalement davantage orienté grand public que son prédécesseur, le jeu n’étant plus un RPG action mais un jeu d’action/aventure avec quelques soupçons de RPG. Les niveaux sont de plus en plus fermés mais la réalisation est dantesque, à des années lumière du premier volet. Des fans reprocheront à Electronic Arts, qui a racheté Bioware fin 2007, d’être responsable d’une certaine dénaturation de cet univers et d’une simplification du jeu pour en faire un produit plus facilement vendeur. EA s’en défend, expliquant que sa nouvelle politique est justement de laisser une totale indépendance aux studios acquis. Bioware aurait-il lui même sacrifié ces éléments de jeu de rôle sur lesquels il a fondé toute sa notoriété pour écouler plus de produits ? Bioware a-t-il basculé du côté obscur ?

Signalons tout de même que cet abandon du RPG pur et dur ne date pas de Mass Effect 2. Le 1er volet, caractérisé par une action très nerveuse, portait déjà en lui les germes de cette simplification. De même que Jade Empire qui, bien qu’étant une merveille enchanteresse, présentait lui aussi des aspects jeu de rôle plutôt légers. À quelques mois de la sortie du dernier volet de la trilogie, personne ne connaît vraiment le chemin que prendra cette conclusion. Entre les déclarations de Casey Hudson, chef de projet de la saga, annonçant en grandes pompes un retour aux sources du 1er chapitre et les dernières images, laissant croire que l’on se situera plutôt en pleine continuité du deuxième, le mystère reste entier.

Pour aller plus loin : les produits dérivés

Tournant vidéoludique dans l’histoire de Bioware, Mass Effect aura également été pour eux une révolution sur le plan marketing. Drew Karpyshyn, le scénariste du studio depuis l’époque des Baldur’s Gate, a ainsi écrit le 1er roman Révélation venu accompagner la sortie du jeu en 2007. Celui-ci est une préquelle à Mass Effect et nous narre le passé trouble de Saren ainsi que la jeunesse du Capitaine Anderson, mentor de Shepard. Le succès commercial de Mass Effect incitera Bioware à poursuivre sur cette voie et à multiplier les supports de diffusion de sa saga. Le deuxième roman, Ascension, se situe directement après la fin de Mass Effect et prend comme point central les magouilles de Cerberus, organisation clandestine pro humaine qui occupera une place prépondérante dans Mass Effect 2. Le 3ème, intitulé quant à lui Rétribution, comble les trous entre Mass Effect 2 et 3 et se focalise toujours sur Cerberus et les coups bas de son chef, l’Homme Trouble. Notons au passage que Shepard n’est pas le personnage central de ces romans. D’autres romans sont bien évidemment en cours de préparation (NdJPB : un quatrième roman, Dissimulation, était annoncé au même moment que ces trois premiers tomes ; mais aucune nouvelle depuis des années).

La saga sera également illustrée en BD, avec le comics « Mass Effect Redemption », qui se focalise cette fois sur le rôle joué par Liara T’Soni, une de nos équipières dans le jeu durant les zones d’ombre de Mass Effect 2.

Mais ce n’est pas tout. Les fans les plus hardcore pourront également tâter du Mass Effect sur leur IPhone avec Mass Effect Galaxy ! Prenant toujours place avant Mass Effect 2, on suit désormais Jacob Taylor et Miranda Lawson (futurs équipiers du deuxième volet) dans un jeu de tir avec vue aérienne.

Volkor
(19 décembre 2011)
Sources, remerciements, liens supplémentaires :
- Voir aussi : en.wikipedia.org, masseffect.wikia.com, bioware.com, drewkarpyshyn.com
- Merci à jeuxvideo.com, gamekult.fr, bioware.com et fluctuat.net pour les nombreuses photos empruntées.
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