Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par JPB (24 octobre 2011)
Autrefois, les jeux de rôle sur micro étaient nombreux, de grandes sagas appelées Wizardry, Bard's Tale, Phantasie, Ultima (et bien d'autres encore !). La représentation graphique de ces jeux divisait l'écran en une petite fenêtre pour l'affichage des cartes, des lieux ou des rencontres, et le reste (la plus grande partie) pour les informations utiles, les dialogues... Loin de moi l'idée de dénigrer ces jeux : l'histoire qu'ils proposent est la plupart du temps tout à fait intéressante. Même si les limitations des machines faisaient qu'on n'avait pas toujours d'images très parlantes, ni de sons impressionnants, on pouvait toujours palier à cette "pauvreté" par l'imagination... Ne serait-ce qu'avec une simple aventure textuelle, les décors, les monstres et les actions décrites permettaient de se plonger dans le jeu. J'ai ainsi personnellement joué à quelques-uns de ces jeux, sur Atari ST : Phantasie 3 et Bard's Tale 2. J'avais bien aimé, mais je n'avais pas accroché outre mesure. Je n'avais pas encore découvert Dungeon Master... La découverte
Par une après-midi pluvieuse de 1987, je me rends chez Christophe, un copain de Marseille, pour m'amuser avec lui sur son Atari ST. Une fois installés devant son ordinateur, alors que je m'apprête à le battre, que dis-je ? à l'écraser au jeu Plutos (un des rares où on pouvait jouer à deux en même temps sur ST), il charge une disquette : Chic, me dis-je, je vais pouvoir jouer à ce jeu que Tilt et Gen4 ont tant vanté ! Après quelques secondes de chargement, le logo FTL apparaît sur l'écran de sa vieille télé avec un léger souffle. Je lui demande de mettre plus fort, qu'on entende au moins quelque chose, ce qu'il fait aussitôt en mettant le son à fond. Après la présentation du titre du jeu, une porte ; à droite, deux boutons. Mon pote s'empare de la souris (pourtant j'avais aiguisé mes réflexes en jouant à Arkanoïd !), clique sur le vert marqué "Enter"... et la porte s'ouvre dans un grincement assourdissant. Après un temps de chargement qui semble durer des heures, l'écran change légèrement. À la place du mur, des flèches de direction. Et quand on clique dessus, on avance ! Au vu des graphismes et de la maniabilité, c'est déjà bien parti. Mais quand on débouche dans le Hall des Champions, avec les 24 héros emprisonnés dans les miroirs, je commence à être vraiment intéressé. On clique partout, on examine chaque personnage, et on se décide à en prendre quatre : Hissssa, Gothmog, Daroou et Tiggy. Et puis on essaie, non sans mal, de sortir du Hall, parce qu'on est un peu perdus. Enfin, devant nos yeux admiratifs, une dalle et une grille. C'est toujours mon copain qui dirige les aventuriers. Avec la souris, il clique sur la flèche haut, et aussitôt le groupe fait un pas en avant : la dalle s'enfonce - clic ! - et la grille s'élève rapidement. On se concerte régulièrement et on prend notre temps pour faire toutes les actions, afin de ne pas nous tromper et de ne pas nous farcir un piège (alors qu'on ne risquait rien à ce niveau, mais ça, je ne le saurais que plus tard !). C'est ainsi que notre équipe met la main sur une torche, une gourde, de la nourriture et deux parchemins qu'on ne comprend pas du tout.
En déambulant, on avait auparavant repéré un escalier qui descendait quelque part dans le labyrinthe. Les Champions, toujours menés par mon pote, l'empruntent. Mais en bas de l'escalier, on ne voit plus rien. Je m'inquiète :
Je dois avouer qu'à cet instant, je suis vraiment conquis. Voir quelque chose bouger comme ça dans un jeu de rôle, ça lui donne une autre dimension.
Nous nous regardons avec stupéfaction. Quel pied ! Non seulement ça fait un quart d'heure qu'on joue à Dungeon Master, mais on s'était rarement autant amusés avec un jeu de rôle ! Je me précipite sur la souris (cette fois, c'est moi le plus rapide) et je prends la suite des opérations en main.
C'est plus loin que je me rends compte que je suis vraiment pris par le jeu. Ayant fureté un peu partout, on a découvert quelques clés, ouvert les portes qui correspondaient, ramassé de nombreux objets. Je dirige le groupe vers une porte en bois avec une petite lucarne en haut. Derrière, quelque chose de vert semble briller. J'ai deux clés en ma possession : une des deux doit bien ouvrir la porte, ce que je fais effectivement avec la deuxième.
Quatre jours après, j'ai acheté la version Atari ST de Dungeon Master, en filant Cours Lieutaud chez A.M.I.E. J'ai commencé à faire les plans, et je les ai finis un an après. Au moment où je voulais les envoyer à Tilt, ils sont sortis dans Gen4... Pas de bol ! L'histoireVous venez d'assister au tout début du jeu. Mais quelle est exactement l'histoire que propose Dungeon Master ? Je vais vous résumer ça. Dans son donjon, le Grey Lord recherchait des informations sur divers problèmes concernant les humains et la magie, notamment le moyen de récupérer la Gemme de Puissance, qui lui permettrait de façonner un monde harmonieux et équilibré pour tous ses habitants. Après de nombreuses recherches, il trouva enfin l'incantation permettant d'extraire la Gemme de Puissance du cœur de la montagne. Hélas, il se trompa dans la formule, et l'univers tout entier explosa ; le Grey Lord fut divisé en deux. Sa moitié "positive", expulsée de ce plan matériel et obligée de survivre dans les limbes, prit le nom de Librasulus. Sa moitié "négative" s'appropria son donjon, le transforma selon ses noirs desseins (détruire le monde, what else ?), et se donna le nom de Lord Chaos. Le Grey Lord avait un apprenti, Theron, qui avait été mis à l'abri auparavant. Celui-ci fut quand même atteint par l'explosion, et se retrouva sous la forme d'un fantôme incapable d'agir directement. Librasulus réussit à entrer en contact avec lui : il lui donna l'ordre de rentrer dans le donjon de Lord Chaos, afin d'examiner les 24 Champions emprisonnés : grâce au pouvoir de Librasulus, Theron pourrait en ressusciter quatre et les diriger dans leur quête. Le but de Librasulus était de récupérer le Bâton de Feu (Firestaff), caché au fond du donjon ; avec son pouvoir, Librasulus pourrait pénétrer dans le donjon, récupérer la Gemme de Puissance (que Chaos n'avait pas encore découverte), et éliminer Lord Chaos. La quête du Bâton de Feu serait longue et difficile, car Lord Chaos avait transformé le donjon en un immense piège, rempli de monstres, d'obstacles, de passages où la logique devait être prépondérante pour passer. Des milliers de personnes furent envoyées par Librasulus pour tenter de récupérer le Bâton de Feu, et aucune n'avait encore réussi - le nombre de survivants était d'ailleurs affreusement faible. Mais là où tous ces Champions avaient échoué car ils ne parvenaient pas à maintenir une unité suffisamment cohérente, la présence discrète de Theron guidant un petit groupe pouvait permettre de changer la donne et de réussir la quête. Vous trouverez l'histoire complète en fichier .pdf en annexe, en section Bonus à la fin de l'article. Je vais maintenant vous parler du jeu proprement dit. Les images que vous avez vues jusqu'ici proviennent de la version Atari ST, c'est avec elle que j'ai découvert le jeu en l'achetant à Marseille ; elle est en anglais. Les captures suivantes proviennent de la version Amiga, que j'ai achetée quelques années plus tard à Nancy : elle est en français. J'essaierai autant que possible de faire la correspondance entre les deux versions dans mon article, sachant que parfois, la traduction est un peu hasardeuse. Les championsVous incarnez donc Theron, désincarné, qui doit choisir ses Champions parmi 24 personnages : les voici par ordre alphabétique (les hommes avec un fond gris et les femmes avec un vert, parce que mine de rien, des fois on peut se permettre de douter) :
Les noms de ces Champions sont parfois inspirés d'œuvres diverses. Ainsi, on retrouve Chani Sayyadina Sihaya, que ceux qui ont lu Dune de Frank Herbert reconnaîtront sans peine ; Halk est inspiré de Conan, Sonja de Red Sonja, Gothmog et Gando de l'univers du Seigneur des Anneaux. D'autres Champions sont des hommages à des personnes ayant vraiment existé, telles que Leif Ericson (explorateur islandais), Wu Tse-T'ien (impératrice de Chine), ou Azizi Johari (playmate de juin 1975 dans Playboy !) Vous allez pouvoir cheminer parmi les méandres du Hall des Champions, pour regarder les caractéristiques des 24 personnages et choisir au moins l'un d'eux (au minimum) pour affronter les labyrinthes de Lord Chaos. Quand vous les examinez, vous pourrez voir leurs caractéristiques en cliquant sur l'œil, comme sur l'écran ci-dessus. Les informations les plus importantes sont la santé (health) qui représente les points de vie, la vigueur (stamina) pour l'endurance, et la mana pour les compétences magiques. Évidemment, plus le héros possède de points, mieux c'est. Les Champions sont versés dans quelques compétences parmi les quatre suivantes : guerrier (fighter), ninja, sorcier (wizard) et prêtre (priest). Vous verrez que tous n'ont pas les mêmes par défaut ; mention spéciale à Zed qui touche à tout. Mais ne vous focalisez pas sur ce qui est déjà inscrit : chaque personnage peut évoluer dans la compétence qu'il désire, même si au départ il ne la connaît pas ! Ainsi, pour augmenter la compétence de guerrier, il faut combattre avec une arme de poing. Pour devenir meilleur ninja, vous devez combattre à mains nues ou lancer des armes de jet (dague, shuriken...), mais vous pouvez aussi lancer des objets, n'importe lesquels, même de la nourriture ! Par contre, seule la pratique des sorts, soit de magie soit de guérison (potions), permet aux personnages de monter dans les compétences de sorcier et de prêtre : il faut donc qu'ils aient un minimum au départ, ce qui n'est pas le cas de Halk et de Stamm, privés à jamais de la pratique des arcanes - du moins tant qu'ils n'ont pas récupéré une Lame Fantômas au niveau 7, qui octroie 5 points de Mana à celui qui l'utilise. Les différents niveaux de compétences sont dans l'ordre :
Je vous recommande de former vos champions à toutes les compétences. Ce n'est jamais perdu, et fort gratifiant. Ainsi, en plus de faire combattre vos guerriers, obligez-les à faire le sort magique de lumière... Et n'hésitez pas à faire lancer tous les objets de leur inventaire à vos magiciens !
Parmi les caractéristiques vraiment utiles, reste la charge (load), qui permet de voir ce qu'un personnage peut porter. Hé oui : dans Dungeon Master, le poids transporté a une importance énorme. Plus on est chargé, plus on s'essouffle et plus l'endurance descend vite ; de plus, cela a des répercussions sur la nourriture et la boisson qui diminuent aussi plus rapidement.
Maintenant, à vous de voir si vous préférez ressusciter (resurrect) ou réincarner (reincarnate) un Champion.
Vous pouvez tenter de finir le jeu avec moins de quatre personnages, mais ce sera assez difficile... L'interfaceRévolution dans le monde des jeux de rôle sur micro : l'interface est très complète, et en même temps très ergonomique. Tout peut se faire à la souris, clic gauche et clic droit permettent d'accéder en un instant aux différents écrans. Les touches du clavier servent uniquement à se déplacer dans le labyrinthe. Et la révolution ne s'arrête pas là : c'est la première fois que l'écran de jeu proprement dit est aussi grand ! Jusque là, on devait se contenter d'une petite fenêtre avec des dessins plus ou moins clairs ; la partie principale de l'écran était utilisée par les informations textuelles (descriptions ou infos de combat). Si vous le voulez bien, on va regarder ensemble les différents éléments qui constituent l'écran de Dungeon Master.
Tout d'abord, en haut de l'écran apparaissent les quatre fenêtres des Champions. On voit leurs deux mains et les trois barres correspondant à la santé, l'endurance et la magie. Le nom est en tout haut de chaque fenêtre, celui qui est inscrit en jaune représente le leader. Quand on clique avec le bouton droit de la souris sur une des quatre fenêtres, on accède à l'inventaire du Champion correspondant, je vous en parlerai plus loin dans un chapitre spécifique. Si vous cliquez avec le bouton droit de la souris ailleurs que sur une fenêtre en haut de l'écran (par exemple sur l'écran de jeu proprement dit), vous accéderez directement à l'inventaire du leader. En haut à droite de l'écran, on voit la position des quatre Champions, comme si on les regardait en étant au-dessus d'eux. Vous pouvez les mettre dans l'ordre que vous voulez, mais pensez à placer les guerriers plus résistants (et utilisant des armes de poing) à l'avant. Par défaut, les quatre personnages sont orientés vers le haut (ils regardent donc vers l'avant) ; mais s'ils subissent des attaques de côté ou de derrière, le portrait se tournera vers la menace. À droite se trouvent d'abord les onglets de la magie. Pour lancer un sort, il suffit de choisir un nom en cliquant sur l'onglet du Champion, puis de saisir les symboles correspondant à l'incantation. Une fois que c'est prêt, on peut passer à une autre personne, pour faire la même chose et ainsi mémoriser un sort pour les quatre Champions ; on peut aussi lancer directement le sort en cliquant sur l'incantation. Là aussi, je vous raconterai plus en détail comment ça fonctionne dans un chapitre dédié. En-dessous sont affichées les quatre icônes de main principale (si une icône est complètement vide, c'est que le Champion correspondant porte un objet avec lequel il ne peut pas agir). Si vous cliquez sur l'une d'elles, on vous proposera jusqu'à trois options de combat. Par exemple, pour une personne ne possédant pas d'objet en main, si vous cliquez sur l'icône qui prend justement la forme d'une main, vous pourrez choisir entre Cogner (Punch), Coup de pied (Kick) ou Amort (War Cry ou Cri de Guerre). Pour finir, on trouve les 6 flèches de directions (4 pour bouger et 2 pour faire un quart de tour sur soi-même), qu'on peut utiliser directement avec la souris, mais il est bien plus pratique et agréable de se servir des touches du clavier correspondantes. Et sous l'écran, quelques lignes pour indiquer les informations courantes (passage de niveau, sort raté...) L'inventaireQuand on fait un clic avec le bouton droit sur une fenêtre de Champion, on accède à son inventaire. On peut ensuite, d'un clic gauche de souris, choisir un objet et le changer de case (pour changer d'arme, ou manger une pomme). Grâce à la souris, passer un objet d'un champion à un autre est d'une facilité déconcertante, c'est un plaisir d'utiliser l'inventaire de Dungeon Master pour peaufiner les armes et armures des Champions : après tout, vous avez intérêt à bien les préparer au combat. Vous voulez donner à manger à un Champion ? Amenez l'aliment sur la bouche. Vous voulez en savoir plus sur une épée ? Amenez-la sur l'œil et cliquez pour lire les infos supplémentaires. Vraiment, tout se fait instinctivement, c'est rapide, efficace, un vrai bonheur.
L'écran d'inventaire permet d'accéder tout d'abord au rappel des caractéristiques principales (en bas à gauche, elles correspondent aux trois barres verticales en haut de l'écran) mais surtout à l'état d'alimentation : provisions et eau sont gérées indépendamment via deux barres qui diminuent régulièrement. Il faut passer par l'inventaire de chaque Champion pour lui donner à manger et à boire ; certains sont de vrais ventres à pattes, vous passerez un temps fou à les nourrir ! Mais si vous ne le faites pas, vous vous en mordrez les doigts : vous pouvez tuer un personnage si vous ne vous en occupez pas ! Mon conseil : chaque fois que vous passez devant une fontaine, faites boire les Champions jusqu'à plus soif et remplissez toutes vos gourdes ou flacons. Vous ne savez pas quand vous retrouverez de l'eau... Vous verrez ici également l'équipement utilisé directement par le Champion : casque, torse, jambes et pieds, et si une de ces parties du corps est blessée, un bandage sera ajouté ; vous pourrez aussi changer les objets placés dans la main principale (combat) et secondaire. L'écran vous montre enfin les différents containers : le grand sac à dos qui permet de porter 17 objets ; la sacoche avec deux emplacements ; le carquois, en lien direct avec la main principale, qui comporte 4 emplacements d'éléments à lancer (dagues, flèches, shurikens...) et dans lequel le Champion puise automatiquement. Placer n'importe quel objet sur l'œil vous donne son nom, son poids, et s'il est comestible : c'est utile pour savoir si les morceaux des monstres que vous venez d'occire sont mangeables - n'oubliez pas que vous ne trouverez pas toujours de nourriture autour de vous. Quand vous trouverez des coffres, vous pourrez eux aussi les emporter : chaque coffre comporte 8 emplacements, mais attention au surpoids. Tout ce vous portez, sur vous ou dans les containers, a une incidence sur la charge. Si vous portez beaucoup, l'indicateur passe en jaune et le Champion est ralenti ; si vous portez plus que la charge maximale, l'indicateur passe au rouge : le personnage se traîne, il perd beaucoup d'endurance, et puise dans ses ressources plus que de raison. N'oubliez pas que le groupe se déplace à la vitesse du plus lent des Champions. Que dire d'autre ? Vous trouverez une case pour faire dormir le groupe (tout le monde dort en même temps, il n'y a pas de tour de garde), et une autre pour sauvegarder le jeu. Dernier point : le jeu est en temps réel, donc quand vous regardez dans votre inventaire (et quand vous dormez) vous n'êtes pas à l'abri d'une attaque ! La magie
Cet aspect du jeu mérite lui aussi un chapitre à part entière. Pour reprendre les informations transmises par le Grey Lord lui-même, la 'Magick' se base sur l'utilisation du Mana (énergie magique propre en chacun de nous et partout autour de nous, oui, on croirait entendre Yoda). Une personne possédant la connaissance du Mana peut prononcer une incantation, qui se compose de symboles précis. Si le magicien ne se trompe pas dans la prononciation, s'il visualise le symbole correctement dans son esprit, et s'il a l'expérience nécessaire, alors l'incantation réussit ; sinon, le magicien a consommé du Mana en vain, il lui faut tout recommencer. Les symboles de la 'Magick' se divisent en quatre influences : la puissance, l'élément, la forme et l'alignement ; pour chaque influence, on connaît six symboles. Chaque incantation commence obligatoirement par la puissance, puis par un symbole d'élément ; les autres symboles sont facultatifs et dépendent du sort choisi. Bien sûr, plus on utilise de symboles, plus on consomme de Mana ; mais chaque influence de symboles nécessite en elle-même plus de Mana que la précédente. Les incantations compliquées sont donc réservées aux meilleurs des magiciens.
Ainsi, le tout premier parchemin qu'on trouve, au même niveau que le Hall des Champions, propose ce texte : "Invoque le Ful et tu obtiendras une touche magique". Bon, il faut remplacer "touche" par "torche", il s'agit là d'une erreur de traduction (qui sont hélas nombreuses dans la version française)... Mais si on tente l'incantation Lo Ful, on obtient effectivement de la lumière autour des Champions, ce qui remplace l'utilisation d'une torche. Rien n'empêche de préparer un sort, puis de dormir pour faire le plein de Mana ; ce sera toujours ça de pris en plein combat. Et ne perdez pas de vue que si vous vous trompez de symbole en préparant une incantation, vous perdez la quantité de Mana correspondante. Pour la petite histoire, il y a des années je farfouillais dans une boutique de livres d'occasion, et je suis tombé sur un exemplaire du Necronomicon (hé oui, je l'ai ouvert et je ne suis pas devenu fou). Je l'ai feuilleté en vitesse - il était réservé à un client - et j'ai pu voir que dans ce livre se trouvaient exactement les mêmes symboles que ceux qu'on trouve dans Dungeon Master... Hélas, je n'ai pas pu approfondir, et je n'ai jamais pu remettre la main sur ce livre ; mais je trouve le parallèle amusant. Les niveaux et énigmesPour la première fois, et c'est la nouveauté la plus importante en termes de gameplay, on se dirige en temps réel dans un univers hostile. L'immersion est immédiate, totale, rien d'autre n'existe plus quand on est plongé dans Dungeon Master. Qui dit temps réel, dit gestion des Champions et des objets, et vie indépendante des monstres. Ainsi, vous allez devoir ranger vos torches quand vous dormez, ou elles vont s'épuiser pour rien ! Ne restez pas le nez dans votre inventaire trop longtemps, on ne sait jamais ce qui rôde près de vous... Mangez cinq fruits et légumes par jour, buvez, dormez, chouchoutez vos héros si vous voulez avoir une chance de réussir votre quête ! Le jeu se compose de 14 niveaux. Le premier est le Hall des Champions, avec une petite zone annexe dans laquelle on ne risque rien : parfait pour se mettre dans le bain de l'interface. Ensuite, on découvre 13 niveaux remplis de pièges et de monstres de plus en plus retors. Mais on ne se contente pas de descendre d'un étage à l'autre : certaines clés sont nécessaires pour ouvrir des portes, et on ne les trouve que plus bas (je pense ici aux nombreuses clés nécessaires au Niveau 7, dans lequel se trouve le Bâton de Feu). On ne peut pas vraiment dire qu'on passe d'une quête à une autre, comme ce sera le cas plus tard dans Black Crypt ; ici on doit survivre, trouver le Bâton de Feu, et puis après... on verra déjà pour récupérer le bâton, hein ! Les environnements sont toujours représentés par des murs de pierre grise. Ceci sera reproché au jeu, mais beaucoup plus tard, et de toute façon c'est secondaire et ne gêne en rien le plaisir de jouer. Parfois, dans ces murs, vous verrez des inscriptions, ou des boutons plus ou moins visibles (cachés devrais-je dire). Certains murs sont des illusions et vous pouvez les traverser ; d'autres disparaissent en accomplissant une action précise, ou une suite d'actions. Le sol est uni, mais gare aux trappes, certaines sont automatiques et peuvent s'ouvrir au moment où vous passez dessus ; seule une corde peut vous permettre de descendre dans une trappe sans dommages. Les portes, grilles ou champs de force nécessitent la plupart du temps la clé correspondante, mais certains sont liés à des boutons ou des trappes. Enfin, des téléporteurs vont mettre du piquant dans vos recherches : certains sont visibles (ils ressemblent à des cascades d'eau), d'autres sont invisibles et leur effet peut être totalement insoupçonné : soit ils vous tournent d'un quart ou d'un demi-tour, soit ils vous téléportent ailleurs... mais où ? Les escaliers, qui permettent le passage d'un niveau à un autre, ne sont pas forcément orientés dans le même sens, ce qui fait qu'il est difficile de savoir où on débouche entre deux étages. Il existe un premier escalier caché, qui permet de rapidement descendre du niveau 8 au 13, mais vous aurez du mal à le trouver... Il vous faudra les clés en forme de tête de mort. Ceci dit, à partir du moment où vous savez que vous devez descendre au plus bas du donjon, votre but sera toujours de trouver le chemin vers l'escalier menant au niveau suivant. Et les énigmes dans tout ça ? Comme je le disais plus haut, elles sont pour la plupart liées au passage à activer par un moyen quelconque (principalement, trouver la bonne clé qui va dans la porte). Mais dans certains cas, elles vous obligeront à trouver la solution d'un passage au niveau physique : appuyer sur certains boutons dans le bon ordre, arriver à faire un pas de côté au bon moment dans une suite de téléporteurs, comprendre comment le fait de reculer dans le sens contraire des aiguilles d'une montre vous fait passer d'un couloir à un autre... Bref, plus vous descendez plus vous allez faire fonctionner vos méninges, et j'ajouterai que de nombreuses énigmes ne vous apparaîtront que parce que vous êtes en train de faire le plan, et que vous vous rendez compte qu'il y a quelque chose d'étrange dans vos recoupements... J'insiste : faire les plans (ou au moins se servir de plans existants) est INDISPENSABLE pour espérer s'avancer au fin fond du donjon. Petite astuce : si vous ne voulez pas utiliser des plans déjà faits (comme les miens, que je vous propose en annexe) et que vous préférez dessiner vous-mêmes vos propres plans, faites une sauvegarde en arrivant à un nouvel étage ; prenez votre temps pour dessiner, vous allez consommer une énorme quantité de nourriture ; une fois que c'est fini, reprenez votre sauvegarde du début du niveau et parcourez-le normalement. Sinon, vous ne vous en sortirez jamais. Les monstres et les combatsEncore une innovation ! Les monstres sont représentés directement dans la fenêtre de jeu. Finies les descriptions, ou les images montrant le dessin d'une bestiole : ici, vous les voyez arriver, vous les voyez se rapprocher, vous les voyez vous taper dessus ! Du jamais vu jusqu'ici. Dungeon Master a été le précurseur de ce nouveau type de jeux de rôle, appelés par la suite Dungeon Crawlers, et dont les clones furent innombrables. C'est donc lui qui a lancé le principe du combat en temps réel, où "on cogne et on se pousse". Le monstre est devant le groupe : on fait frapper les quatre champions (les guerriers à l'épée, les magiciens au lancer ou au sort), puis on fait un pas de côté et on pivote, en attendant que le monstre avance là où on se trouvait auparavant ; et ensuite, on recommence jusqu'à ce que l'ennemi soit détruit.
L'intelligence des monstres est standard. Une fois qu'ils ont repéré le groupe, ils avancent jusqu'à lui ; s'ils sont bloqués par le groupe, ils l'attaquent ; si le groupe s'écarte, ils le pourchassent. Mais si les monstres se sentent affaiblis, ils sont capables de fuir... On se retrouve à leur courir après pour les achever - et en général on tombe nez à nez avec d'autres monstres, en bon état ceux-là, ce qui n'était pas prévu. Les combats sont assez simples à mettre en œuvre, on revient sur le fonctionnement de l'interface que je vous décrivais plus tôt. En fonction de l'arme utilisée dans la main principale, on pourra effectuer jusqu'à trois actions avec celle-ci. Au joueur de choisir celle qui sera la plus adaptée (en général, la troisième fait plus mal, mais il faut plus de temps pour pouvoir utiliser l'arme à nouveau). Sachant qu'en parallèle aux armes, on peut lancer des sorts, et qu'à haut niveau tous les personnages en sont capables si on les a bien entraînés, on se retrouve avec des possibilités assez puissantes : deux combattants à l'arme de poing, deux au lancer, et les quatre à la magie ! Et comme tout se passe en temps réel et que les sorts et les armes de lancer se voient à l'écran, l'immersion est vraiment exceptionnelle ! Les créatures que vous allez rencontrer sont pour la plupart tirées du monde d'Advanced Dungeons & Dragons. Certains sont plus rapides que d'autres ; vous aurez des monstres gérant la magie et d'autres non. Les voleurs vous piqueront ce que vous avez dans la main secondaire, et ensuite s'enfuieront à travers le labyrinthe - une horreur pour retrouver ce qu'ils vous ont dérobé ! Bien entendu, certaines bestioles sont plus résistantes que d'autres (je pense aux golems de pierre et au dragon), les fantômes et les Materializers ne sont sensibles qu'à la Lame Fantômas (Vorpal Blade en VO, une épée à la lame immatérielle comme eux), et Lord Chaos est le pire de tous car invulnérable... Je vous propose un joli bestiaire dans la section Bonus.
Petite note positive dans tout ça : il existe des lieux, dans le donjon, où les monstres se régénèrent constamment. Ainsi, au niveau 3, les crieurs (les espèces d'arbres/champignons) reviennent régulièrement dans une petite pièce ; si vous laissez la grille fermée, vous pourrez vous constituer une bonne réserve de nourriture dans laquelle vous pourrez remonter puiser régulièrement. Pareil au niveau 9 avec une salle remplie de rats, par contre ceux-ci sont plus difficiles à éliminer - mais le rat est nettement plus goûteux que le crieur. Maintenant, vous n'êtes pas à l'abri d'une mort suite à un combat, ou une chute dans une trappe. La partie se termine si vos quatre Champions sont décédés ; mais tant qu'il en reste au moins un en vie, vous pouvez tenter de ressusciter les autres. Pour cela, ramassez les os des Champions tombés au combat (ça fait plus classe que "tombés dans un trou" même si ça arrive aussi) et cherchez un Autel de Vim (Altar of Vi en VO) : vous en trouverez un au niveau du Hall des Champions, les autres sont disséminés dans le labyrinthe. Placez-y les os et miracle, votre Champion revient parmi les vivants, esquinté, sans ses possessions, mais au moins il est bien là ! Vous n'avez plus qu'à retourner chercher les affaires du (ou des) personnage(s). Attention : des autels, il n'y en a pas beaucoup dans le donjon : vous risquez de faire de mauvaises rencontres en tentant d'en retrouver un... Techniquement et historiquement parlant
Je vous ai déjà dit que Dungeon Master était une révolution ? Graphiquement, je pense que vous avez suffisamment de captures écran pour vous rendre compte que c'est très beau, très détaillé, surtout qu'on est en 320 x 200 et 16 couleurs. Les différents monstres sont très bien dessinés, les couloirs sont détaillés, même si (j'en ai déjà parlé) on ne trouve finalement qu'un seul environnement de briques grises. Les effets visuels des sorts sont eux aussi très réussis, on sait tout de suite si on se fait brûler ou empoisonner !
L'animation est peu présente mais très bien exploitée. Il s'agit en fait de sprites dessinés en plusieurs étapes - encore une fois, on n'avait encore jamais vu ça pour un jeu de rôle ! Du coup, chaque créature est dessinée de face, des deux profils, de dos, et ce en plusieurs images en fonction de l'éloignement ; de plus, les programmeurs ont joué sur l'effet de miroir (symétrie horizontale) pour insuffler un peu plus de vie. On a enfin un sprite pour l'image d'attaque. Dungeon Master propose du coup un effet de vie vraiment réussi, on a l'impression que le monstre bouge devant les Champions, qu'il se tourne un peu pour les regarder d'un autre côté... Même certains clones sortis plus tard, comme Black Crypt, ne rendront pas les ennemis aussi vivants.
Le son est lui aussi parfaitement maîtrisé. Le bruit des portes qui s'ouvrent, des armes qui volent, des petits déclics qu'il faut bien entendre pour savoir si le bouton a ouvert quelque chose... C'est du très beau travail.
Dungeon Master est donc sorti tout d'abord sur Atari ST en version anglaise. Vu le succès du jeu, il a été ensuite adapté sur Amiga (avec 1 Mo de mémoire), puis sur d'autres machines, et dans plusieurs langues.
Les autres versions de Dungeon Master ne sont pas très différentes de l'original. La version PC-9801 dispose d'une palette de couleur plus limitée, mais uniquement pour la fenêtre de jeu (pas pour l'inventaire). Certaines ont même de la musique. Dans tous les cas, le jeu propose le même challenge exceptionnel ! Un mot sur les suites
La suite directe, Chaos Strikes Back, est sortie en 1989. Ce jeu utilise le même moteur que Dungeon Master. Si vous aviez galéré dans celui-ci, Chaos Strikes Back est dix fois plus retors, les plans sont indispensables mais on en bave vraiment pour arriver à les faire correctement... Et les monstres, quand vous saurez qu'il y a, par exemple, une salle avec plus de quatre dragons (les mêmes que celui du niveau 14 de Dungeon Master, si difficile à combattre), vous comprendrez où je veux en venir... De nouvelles créatures ont été ajoutées, et Lord Chaos est encore une fois votre adversaire principal. Theron's Quest est une adaptation de Dungeon Master sortie sur PC-Engine en 1992. Il s'agit de sept mini-donjons qui reprennent des éléments de Dungeon Master et de Chaos Strikes Back. Dungeon Master II : the Legend of Skullkeep était attendu au tournant. Sorti en 1993 au Japon, puis en 1995 en Europe, on retrouve toute l'ergonomie de Dungeon Master. Hélas, cette ergonomie était novatrice en 1987, mais presque dix ans plus tard elle n'apporte plus rien d'exceptionnel. De plus, même si le jeu propose des environnements en extérieur, les graphismes semblent sortir d'un autre âge... Le jeu n'a du coup pas eu beaucoup de succès (en tout cas chez nous). Je me rappelle que j'ai acheté ce jeu sur PC, en version disquettes, et curieusement je n'y ai presque pas joué. Je n'ai pas accroché du tout, et je serais bien en peine de vous dire pourquoi. Enfin, Dungeon Master Nexus est une suite de Dungeon Master, sortie uniquement sur Sega Saturn, et en japonais. Le jeu est en vraie 3D, ce qui le rapproche davantage d'un Ultima Underworld. Petite remarque : en 2012, le studio Almost Human sortit un jeu rendant hommage à Dungeon Master et aux autres jeux du même type (les Dungeon Crawlers, comme je l'ai déjà énoncé plus haut) : Legend of Grimrock. Il ne fallut pas longtemps pour que des acharnés réussissent à créer un mod reprenant autant que possible l'univers de Dungeon Master lui-même. Attention : ce n'est pas un remake du jeu, on joue à Legend of Grimrock avec ses mécanismes, mais dans une copie du donjon. Voyez par vous-mêmes : Si vous voulez télécharger ce mod, dont le nom est Back to the Dungeon, le plus simple est encore de passer par le Workshop du jeu via Steam. Et merci à IsKor pour l'info ! ConclusionVoilà. Je vous ai tout dit sur ce jeu que je considère comme mythique. Si vous ne l'avez pas connu, vous avez raté un monument de l'histoire du jeu vidéo ; en tout cas, j'espère que cet article vous aura plu et que, si vous trouvez un émulateur, vous aurez envie de tenter l'aventure...
Dungeon Master fut testé :
Dungeon Master reçut les prix suivants : Bonus !Ci-dessous, vous trouverez le lien vers l'histoire, les plans des 14 niveaux... Je vous montre aussi les caractéristiques de tous les Champions et tous les sorts disponibles. Vous trouverez également une petite galerie des monstres rencontrés en cours de jeu. - Liens
Avant tout, si vous cherchez des indications plus poussées, je vous invite à consulter LE site qui sait TOUT sur Dungeon Master et ses suites : L'Encyclopédie Dungeon Master ! N'hésitez pas à y plonger, vous serez estomaqués (le mot est faible) par le nombre d'informations qu'il propose. Une référence ! - L'histoire J'ai réécrit l'introduction de la documentation, parce qu'il y avait beaucoup de fautes dans la version française... Le fichier est disponible ici. Si vous voulez lire la documentation complète en français, le site dont je vous parlais juste au-dessus la propose : allez sur ce lien. - Les Champions La liste ci-dessous correspond à la disposition de mes plans, qui elle-même dépendait du tableau des Champions proposé dans le Tilt n° 61 (avec le début de la solution complète du jeu). L'ordre dans lequel on rencontre les personnages n'est pas très logique, mais à l'époque il fallait faire avec, c'était le seul tableau récapitulatif que j'avais pu trouver ! C'est celui qui est photocopié et collé sous mon dessin du niveau 1 (voir plus bas).
- Les sorts (précédés d'une syllabe de puissance)
- Les protections (précédées d'une syllabe de puissance, affectent tout le groupe)
- Les potions (précédées d'une syllabe de puissance, nécessitent une fiole vide en main)
Il existe d'autres incantations liées à la carte magique, mais celle-ci n'existe ni sur Amiga ni sur Atari ST. - Écrans de fin de jeu Première fin possible : après avoir récupéré le Bâton de Feu au niveau 7 (mais pas la Gemme de Puissance au niveau 14), et après avoir refait tout le parcours à l'envers jusqu'à la porte de départ (avant le Hall des Champions), Lord Librasulus vous accueille. Mais la "bonne" moitié du Grey Lord est aussi mauvaise que Lord Chaos, et ne veut le Bâton que pour combattre et vaincre Lord Chaos, pas pour redevenir le Grey Lord... Seconde fin possible, la bonne en fait : après avoir mis des cages d'énergie tout autour de Lord Chaos, et l'avoir forcé à entrer dans l'une d'elles grâce au sort Fusionner du Bâton de Feu, vous assistez à la réunion entre Lord Chaos et Lord Librasulus : le Grey Lord est "reconstitué" et vous remercie. - Les plans des 14 niveaux Que de souvenirs, quand je pense au temps que j'ai passé à les dessiner, à me cogner dans tous les murs pour être sûr qu'ils n'étaient pas factices... Il y a eu deux écoles : soit on notait le Hall des Champions le niveau 0, soit on l'appelait niveau 1. Attention du coup si vous retrouvez d'autres plans sur le net, vérifiez bien par quel numéro ils commencent ; mais de toute façon il y a toujours 14 niveaux en tout ! Ici, j'ai décidé de débuter par le Niveau 1.
- Le bestiaire complet par ordre alphabétique anglais (noms officiels) Les noms indiqués ici proviennent du jeu lui-même, récupérés en désassemblant les infos (vous en saurez plus sur le site dont je parlais plus haut). En français, je sais que le Screamer s'appelle Crieur (on le voit dans l'inventaire, quand on en ramasse un bout). Pour les autres, je n'ai pas trouvé de traduction " officielle ", alors je n'en dis pas plus.
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