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Just Cause
Année : 2006
Système : Windows, Playstation 2, Xbox, Xbox 360
Développeur : Avalanche
Éditeur : Eidos Interactive
Genre : Action
Par Tonton Ben (12 octobre 2009)

Allez, une fois n’est pas coutume, on ne va s’intéresser ni à une grande gloire des années ’90, ni à un énorme succès commercial récent, pas même à un titre obscur réservé aux hardcore gamers. Non. Aujourd’hui, on va se concentrer sur un titre bien commercial, qui n’a pas très bien été accueilli, et qui porte un nom qui prête à pas mal de vannes : Just Cause.

Lui
+ Lui
+ Lui
= Rico. Facile, non ?

Just Cause, c’est une espèce de sous-GTA développé par Avalanche Studios et édité par Eidos en 2006, et qui tire son nom de l’opération Just Cause, le nom de code qui désigne l’invasion du Panama en 1989 par les États-Unis afin de renverser le Général Noriega, soit 27 000 soldats américains qui ont combattu plus de 16 000 soldats Panaméens, avec de lourdes pertes côté Panaméen, surtout et comme toujours chez les civils.

Ici, pas question de reproduire cette opération militaire au travers d’une quelconque simulation stratégique en temps réel ; chez Avalanche, on lorgne plutôt du côté action-nanar. Il n’y a pas d’armée américaine dans Just Cause, non. Il y a juste Rico Rodriguez. Le Rico, l’homme de main de la CIA, celui qui va libérer l’archipel de San Esperito de son dictateur, Mendoza, qui tient le pays d’une main de fer grâce au cartel des Montanos, et qui inonde par la même occasion les USA en drogue. D’où la CIA. D’où Rico. Là, je sens que votre 6ème sens nanar se réveille.

Alors, Rico, dans la vie, il a deux grosses passions : le parachute ascensionnel sauvage...
... et le plastiquage de bâtiments gouvernementaux en tous genres.

Modestes, les développeurs ont décrit Rico dans ces termes : « Il est à la fois James Bond, Mad Max, Jason Bourne, El Mariachi, Wolverine, Punisher, Rambo, Tony Montana et Han Solo. Avec une touche D’Enrique Iglesias. ». Mouais. Dans les faits, on est plutôt proche d’un mix entre Steven Seagal et Chuck Norris, tellement le personnage est bourrin. Avec une touche de Julio Eglesias (le seul, l’unique, le vrai, pas sa pâle copie de fiston). Voilà l’un des deux principaux attraits de Just Cause : les capacités de Rico. Un vrai surhomme, Rico est tout simplement increvable !

Rico peut attaquer des armées entières à la solde du gouvernement à lui tout seul, il vise comme un dieu (merci la visée automatique), peut survivre sans boîter à une trentaine de pruneaux, à des explosions de grenades, à des tirs de lance-roquettes. Rico n’a même pas mal si d’aventure il se vautrait lamentablement d’une vingtaine de mètres de hauteur ; mais de toute façon, il est équipé en permanence d’un parachute qu’il déploie à loisir dès que la hauteur le lui permet. Il pratique le base jumping et le sky diving comme personne, peut sauter sur le toit d’une bagnole à une autre sans être décoiffé, lancer un grappin sur un hélicoptère en plein vol et en prendre le contrôle, ou faire du parachute ascensionnel depuis n’importe quel véhicule en mouvement, même une mobylette. Même à pied, Rico est une machine de guerre, capable de grimper sans broncher des falaises d’un dénivelé vertigineux. Rico a aussi passé plusieurs années avec des mérous des profondeurs, puisque Rico sait nager, plonger, et n’a pas besoin de respirer sous l’eau. Rico, faut pas lui

Il aime aussi le sky diving...
... et le flinguage facile.

Et c’est un peu pour cela que l’on joue à Just Cause au départ : les possibilités du héros sont multiples, franchement farfelues, mais très ludiques. Je l’ai dit plus haut, Just Cause ressemble à un sous-GTA à cause de sa vue, de sa maniabilité, du car-jacking et de l’immensité du terrain à parcourir. Mais là où un Tommy Vercetti n’a très peu de résistance physique, Rico, c’est tout le contraire. Après quelques minutes d’adaptation, les possibilités s’affichant à l’écran selon la situation, l’on commence à s’amuser avec les enchainements rocambolesques. Même les véhicules, très nombreux et variés, survivent à une quinzaine de tonneaux, et sont tous capables de rouler dans la jungle à une forte vitesse, quelque soit le type de revêtement. Attention tout de même

Parlons-en, des véhicules. Des modèles des années ’60 importées des US, façon Cuba, aux jeeps militaires, en passant par les 4x4 de police, les bus scolaires, les corvettes, les motos (différents modèles de deux-roues sont disponibles), les buggys, mais aussi les hélicoptères, les avions, les bateaux, il y en a pour tous les goûts. De nombreux modèles sont armés, en munitions illimitées. Et si jamais Rico se retrouvait malgré tout à pied, il peut toujours sortir son PDA, et demander un largage d’un modèle spécial Agence de son choix (moto, 4x4, hélico, hors-bord) à son contact de la CIA. Car Rico possède un soutien de poids, avec une espèce de caricature d’agent de la CIA en chemise hawaïenne et aux blagues douteuses, assisté d’une bimbo paramilitaire un peu facho sur les bords. Rico lui-même étant une parodie à lui tout seul, les scènes cinématiques, bien qu’assez bien réalisées, font définitivement basculer le jeu dans le nanar avec ses dialogues savoureux très mal doublés en français. Tout y est : le chef des guérilleros fier et investi de sa mission, le patron du cartel de drogue concurrent moustachu et adipeux, flanqué de sa plantureuse épouse au décolleté hypnotique, rien ne sera épargné au joueur.

Attention là-dessous, Rico arrive !
Rico, même dans les airs, ses cheveux ne se décoiffent pas, il est trop fort.

L’autre attrait de Just Cause, c’est son terrain de jeu, estimé à 1024km², et découpé en une vingtaine de provinces. Avalanche cherchait un moyen de promouvoir leur moteur de jeu, Just Cause sert cette caus... cet objectif. Pour le coup, les distances sont énormes, avec un fort dénivelé. Vice City vous paraissait trop plat ? San Andreas pas assez étendu ? Just Cause explose les titres de Rockstar, à tel point qu’une option fort pratique d’évacuation est à disposition du joueur : un coup de PDA, et l’Agence vient vous chercher en hélico et vous largue à la base de votre choix. Oui, il vous largue vraiment, en chute libre au-dessus du point demandé, à vous de sortir le parachute au bon moment. Effet garanti. Et des bases, il y en aura un paquet au fur et à mesure de votre progression.

Graphiquement, c’est très réussi, et cette sensation d’infini est assez grisante. Ayant joué à la version Xbox, j’avoue avoir été bluffé, Just Cause tourne très bien sur cette console, avec un nombre d’images par seconde constant, et une résolution très acceptable. Le jeu fait honneur à la machine, les temps de chargement y sont même assez réduits.

Bon, là, vous avez compris...
De bien beaux effets aquatiques.

Si la trame principale du jeu ne se compose que de 21 missions, assez réussies dans l’ensemble (assaut, assassinat, escorte, attaque de convoi...), de très nombreuses missions secondaires ainsi que des objectifs alternatifs sont proposés et doivent être accomplis. En effet, Rico va très vite se faire quelques amis au sein de la guérilla locale, et auprès du cartel Rioja ennemi du cartel des Montanos. Rico va être amené à progresser de province en province au fur et à mesure de ses missions principales, et ses actions vont créer l’instabilité politique. Dès qu’une province devient instable politiquement, il est possible de déclencher des libérations de villages, de bases militaires, voire de villes pour le compte de la guérilla, ou des assauts de QG du cartel Montanos pour le cartel Rioja. Le déroulement de ces phases de jeu est à peu près le même : il faut abattre un grand nombre d’ennemis afin d’amener un curseur de progression au maximum, faire exploser quelques barrages à la grenade, puis capturer le drapeau pour les libérations guérillas, ou exécuter le lieutenant Montano pour le cartel. En libérant les villages et les QG, l’on finit par renverser le pouvoir en place dans la province, et l’on fait apparaitre des bases appartenant à la guérilla ou au cartel, au-dessus desquels l’on pourra de faire larguer, et qui contiennent des armes, des soins, et des points de sauvegarde.

Ces libérations rapportent des points de réputation auprès des deux factions, et permet de monter en grade. Chaque grade donne accès à du matériel supplémentaires (armes, véhicules...), et à des bases. Les missions secondaires disponibles dans chaque village libéré permettent également de monter sa réputation, à coups de vol de véhicule, d’assassinat, ou de livraison. Il existe également de nombreux objectifs cachés, qui se déclenchent lorsque l’on ramasse des objets éparpillés sur tout le territoire, et qui participent également à la montée de réputation. Un peu comme les paquets cachés de GTA, sauf qu’ici, ils apparaissent sur la carte.

Les scènes cinématiques sont à mourir de rire.
Et encore, vous n’entendez pas le doublage. Hombre !
Rico, il pratique le car-jacking d’une seule main, par le toit.

Just Cause, c’est finalement tout ça, enrobé de jolis thèmes musicaux très latino, et pas plus. Le comparatif avec GTA s’arrête donc à certains mécanismes, comme également la répression crescendo des forces de l’ordre gouvernementales et du cartel Montanos en cas de grabuge sur leurs territoires. Pour le reste, Just au four... euh, non, Just Cause est ni plus ni moins qu’un gros jeu d’action bien bourrin, à la difficulté plutôt clémente. Alors, certes, il a piqué pas mal d’idées à son grand frère, mais il n’a pas repris le concept complet, et a surtout évacué des éléments qui, avec le recul, nuisaient au plaisir de jeu : l’évacuation, par exemple, est quelque chose que j’aurais adoré voir dans GTA. De même, le largage de véhicule à la demande est encore une fois une super idée.

Alors, qu’est-ce qui déconne dans Just Cause ?

Eh bien, ce titre a souffert principalement de sa comparaison avec GTA. Il faut bien avouer qu’Avalanche ne s’est pas trop cassé avec son jeu, puisque la partie évolution se résume à la libération des provinces, point final. Là où GTA savait occuper le joueur avec la montée en puissance de son personnage principal, ici, que dalle, on flingue et on passe à la suite. Donc, sachez-le : Just Cause est un jeu d’action, et n’a pas la prétention d’aller plus loin que ça.

Le problème, c’est que si les deux premières heures sont sympathiques, pour les suivantes, il va falloir vraiment aimer le concept du jeu, parce que vous allez en bouffer. Just Cause est ultra-répétitif dans son gameplay : Rico libère des villages, récupère des objets perdus, et fait toujours les mêmes missions secondaires. C’est long, et pas varié du tout. Et en termes de variété, ce n’est pas la géographie de San Esperito qui va améliorer le constat : il n’y a que de la jungle. Certes, le relief est très accidenté, il y a de temps en temps une grosse autoroute, souvent des pistes, et des plages, mais dès qu’on rentre à l’intérieur des terres, c’est de la jungle. Rien ne ressemble plus à un village qu’à un autre, les villes sont construites sur le même modèle, si bien qu’on a vraiment du mal à se repérer dans l’archipel.

Compris ? Fais pas le mariole.
Qu’est-ce qu’on vient de dire ?
Pas si près de la falaise !

Enfin, le jeu souffre de nombreux bugs, et là, c’est plus difficile à avaler : la version PS2 est réputée pour être littéralement plombée par les plantages et bugs rendant certaines missions impossibles à finir. Sur Xbox, je n’ai pas constaté ce genre de phénomène, juste un plantage lors d’un chargement de partie, un bug sur un bâtiment qui flottait à deux mètres au-dessus du sol, et un blocage des contrôles du personnage lors d’un chargement d’un point de contrôle. Dans le même acabit, force est de constater que l’ergonomie générale est moins bien pensée qu’un GTA : j’ai toujours besoin de regarder le rappel des commandes lors d’une cascade (j’ai souvent appuyé sur le bouton d’éjection au lieu du bouton d’action de cascade, résultat, je quitte le véhicule au lieu de monter sur son toit). Il m’est également arrivé de remonter dans une voiture en flammes et sur le point d’exploser, alors que je venais de la quitter. De même, les bateaux sont un peu pénibles à contrôler au bord des plages : si vous passez trop près du sable, l’embarcation s’échoue, et il est impossible de le remettre à flot. Rageant.

Alors, Just Cause ou Cause Perdue ? Tout dépend de ce que vous voulez en tant que joueur, et de votre niveau de tolérance. Et de son prix à l’achat. J’ai personnellement pris ce jeu comme un bon divertissement estival, sans plus. On y trouve des éléments assez funs, mais pas de quoi y vouer un culte ou révolutionner le milieu du jeu vidéo. En tout cas, les parties ambiance et scénario sont bien fendardes, pour peu qu’on les prennent pour ce qu’elles sont : de grosses parodies de nanar. Jusqu’à la jaquette du jeu, d’ailleurs.

Note : les images des héros de votre enfance, Chuck et Steven, viennent de leurs bios respectives chez Nanarland, ze site incontournable pour le cinéma d’auteur, le vrai !)

Tonton Ben
(12 octobre 2009)
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