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Alien Hominid
Année : 2004
Système : GBA, GameCube, Playstation 2, Xbox
Développeur : The Behemoth
Éditeur : Zoo Publishing
Genre : Plate-forme / Action
Par Niko844 (10 août 2009)

Que de choix dans le monde des jeux d'action / plates-formes ! Et pourtant, parmi les Contra, Metal Slug, Gunstar Heroes, rares sont les nouvelles licences à avoir pu s'imposer. Depuis peu, l'exception qui confirme la règle s'appelle Alien Hominid. Tout droit sorti de la scène indépendante, ce qui était à l'origine un simple jeu amateur est rapidement devenu l'une des références sur console.

Issu de la scène de jeu flash, Alien Hominid est aujourd'hui l'un des action-plaformers les plus populaires sur console.

C'est sur Newgrounds.com, le célèbre site dedié à la diffusion de créations flash, qu'Alien Hominid voit le jour en 2002. Tom Fulp, webmaster du site, a découvert les travaux de Dan Paladin, un artiste flash, et emballé par le talent et le style graphique de ce contributeur, il s'est associé avec lui afin de programmer un jeu en s'inspirant de leurs titres préférés.

De gauche à droite, Tom Fulp, programmeur du jeu, et Dan Paladin, le designer.

Une fois posté sur le site de Tom Fulp, le jeu fait un véritable carton. Le joueur incarne un petit alien jaune armé d'un pistolet laser. Le but du jeu est très simple ; sur un niveau, il faut aller d'un point A à un point B, le tout en défouraillant des agents du FBI et un mini-boss qui se mettent en travers de la route de l'extraterrestre, jusqu'au face-à-face avec le boss de fin. Le style graphique, délirant et presque enfantin, séduit immédiatement les visiteurs du site et permet à celui-ci de mieux se faire connaître. Clavier en main, le gameplay se révèle aussi très travaillé pour un jeu flash, et se paie même le luxe d'ajouter un nouveau mouvement à la palette d'actions classique. Ainsi, le petit homme jaune peut, en plus de tirer sur ses ennemis, sauter sur leurs épaules et les décapiter d'un coup de dents ! On pouvait alors s'amuser à réaliser des combos sans toucher le sol, ce qui apportait une certaine fraîcheur au gameplay.

Alien Hominid se distinguait des autres jeux flash par la richesse de son gameplay et sa réalisation.

Fulp et Paladin continuent leur petit bonhomme de chemin. Entre temps, John Baez, grand fan du jeu (et développeur par la même occasion), leur donne son avis. Le jeu est très réussi, certes, mais il serait bien plus jouable au pad. Il leur suggère alors de reprendre les bases du flash pour en faire un véritable jeu, sur consoles. L'original ayant connu un succès considérable et la communauté de fan étant bien présente, Fulp et Paladin saisissent l'opportunité. Ils réunissent alors une équipe de développeurs expérimentée et créent avec Baez l'entreprise The Behemoth. Afin de rester indépendants dans la direction de leur futur jeu, ils décident de mettre leurs fans à contribution en vendant sur leur site tout un tas de goodies (figurines, tee-shirts, tasses, etc.) pour se financer. Le développement peut alors commencer.

Le financement du développement d'Alien Homind s'est fait par la vente de produits derivés.

Finalement, le jeu sort enfin en magasin fin 2004, par l'intermédiaire des distributeur O3 Entertainment aux USA et Zoo Digital en Europe. Première déception, et de taille : pas de version Gamecube pour la France ! Un gros manque à gagner pour The Behemoth et certainement une belle boulette stratégique, les représentants du genre manquant cruellement à la console de Nintendo. On peut finalement trouver assez facilement la version Playstation 2 du titre, ce qui n'est pas vraiment le cas de la mouture Xbox.

Pour jouer au jeu, les possesseurs de Gamecube devront malheureusement passer par la case import.

Manette en main, un premier constat s'impose : le visuel se révèle bien plus travaillé. Le design de l'alien, comme celui de son environnement, semble à présent issu d'un dessin animé, même si l'on retrouve le côté "fait main" qui donnait tout son charme au modèle de base. On est bien loin du souci du détail d'un Metal Slug donc, mais la direction artistique est au moins aussi attachante, grâce à son style unique, à la fois mignon, bête et méchant. Le sang gicle, on tourne en dérision l'anticommunisme américain, les protagonistes ont tous des tronches plus stupides les unes que les autres... C'est avant tout une question de goût. La volonté de séduire le joueur est en tout cas évidente, avec entre autres la possibilité de personnaliser votre personnage avec un "chapeau" que l'on débloque au fil des parties.

La patte graphique du jeu, évoquant des dessins d'enfant, joue à fond sur l'affect du joueur.

Au fil des premières minutes qui s'écoulent, on réalise très vite que malgré son style débile et faussement mignon, Alien Hominid, c'est pas un jeu pour les mioches ! Aussi nombreux que vicieux, les ennemis de l'alien ne font pas dans la dentelle, n'hésitant pas à sauter en tirant, voire à l'immobiliser pour faciliter la tâche d'un de leurs semblables ! Au final, si l'on n'utilise que très peu la palette d'actions du héros, les vies perdues déferleront vers un inéluctable game over. Alors pour prouver qu'on n'est pas un gars mauvais, il faut réellement s'investir, mémoriser les habitudes des boss et surtout exploiter au mieux le gameplay, le plus difficile étant de garder un oeil sur les balles qui filent sur vous, pas toujours très visibles, surtout lorsqu'on est en pleine melée contre quatre sbires. Mais le jeu est tellement fun qu'il est difficile de lâcher le pad. La bande son, quant à elle, n'est pas inoubliable mais colle parfaitement.

Avec une résistance aux tirs proche de zéro et des ennemis impitoyables, vous n'avez guère droit à l'erreur !

Même chose au niveau de l'animation. Plus travaillé que dans sa version flash, Alien Hominid est néanmoins toujours un peu animé "à l'arrache" sur console. Rien à voir avec les ténors du genre là encore, mais il s'agit peut-être d'un choix délibéré de la part des développeurs pour conserver le style de la version d'origine, et non d'une contrainte imposée par un manque de moyens quelconque. Aucun ralentissement à signaler, et ce malgré un grand nombre d'ennemis et d'explosions à l'écran. En revanche il n'est pas toujours facile de s'y retrouver, surtout lorsqu'on joue à deux ; les balles n'en deviennent que plus difficiles à distinguer, ce qui s'avère vite gênant pour son quota de vies.

Il est important de ne pas se laisser distraire pour se focaliser sur les tirs ennemis.

Penchons-nous à présent sur le cœur du jeu : son gameplay. En tâtonnant un peu la manette, on réalise que bien que la version flash soit sur ce point supérieure à Metal Slug, le héros pouvant goûter la tête de ses agresseurs, sur console le petit jaune se révèle encore plus véloce. Ainsi, se baisser pour éviter un tir ennemi et lui ouvrir le bide n'est plus forcément associé à une prise de risque. À présent, d'une simple roulade, il est possible d'effectuer une esquive et ainsi se retrouver face à sa proie avant qu'elle ne puisse viser plus bas. Il est bien entendu possible de faire cette action en avant comme en arrière (sous forme d'un flip arrière). Cerise sur le gâteau, il est même carrément possible de s'enfouir sous le sol, puis, telle la mygale, se saisir de sa proie et la dévorer sans risque ! Une action loin d'être gadget, certaines attaques ne pouvant être esquivées autrement. Cependant, gare à l'asphyxie ! La bestiole est loin de pouvoir rester dans le sol plus d'une poignée de secondes. Il faut alors bien préparer ses pièges, car on a vite fait de sortir la tête du sol alors qu'une rafale de balles vient d'être tirée. Il est important de signaler qu'il n'est plus possible, dans cette version, de réaliser des combos en passant d'épaule en épaule sans toucher le sol.

Le gameplay plus riche qu'à l'accoutumée permet de tuer ses ennemis avec style. Ou pas.

Autre nouveauté par rapport à la version originale : la possibilité de se mettre aux commandes d'un véhicule, voire d'une créature, ou de piloter le vaisseau de l'alien en haute altitude. À l'image de Metal Slug, ces phases de jeu permettent de rompre le rythme classique des séquences à pieds. Si les niveaux sur la terre ferme maintiennent une certaine cohérence, les phases de shoot à bord du vaisseau peuvent en revanche paraître relativement déconcertantes car elles marquent un changement brutal dans la logique du gameplay. Ici, on peut se déplacer sur 180 degrés, ce qui implique que pour tirer sur un ennemi, il faut le viser... On en vient donc, du moins au début, à s'arrêter avant chaque tir. Il faut un petit temps d'adaptation pour grappiller un maximum de points lors de ces séquences.

L'alien n'hésite pas à ranger son pistolet pour varier les plaisirs.

Bien évidemment, l'alien peut varier les plaisirs pour tuer tout ce qui se trouve sur son chemin. Outre la possibilité de charger ses tirs, il est possible, en récupérant des sphères d'énergie, parfois offertes par des écoliers ou laissées par l'ennemi, de changer les munitions de son arme. On peut selon la sphère choisie découper, brûler, geler voire réduire en poussière les terriens hostiles à notre progression. À noter que ces sphères influent aussi sur les grenades.

Au fil du jeu, les sphères d'énergie se révèlent de plus en plus indispensable.

Une fois le jeu terminé, il y a encore de quoi s'occuper grâce aux mini-jeux débloqués en cours de route. Loin d'être relégués au second plan, ces derniers se révèlent être au moins aussi amusants, car ils se basent sur le même choix qu'Alien Hominid, à savoir reprendre des concepts old-school pour les retravailler de façon à les imprégner du style à la fois débile et artisanal propre à Dan Paladin. Au programme : un jeu de plates-formes façon Lode Runner, une épreuve à la Mario Party histoire de flinguer sa manette, un jeu qui parodie la guerre froide (avec des graphismes rétro dignes d'une VCS), et enfin des challenges de type "survival" avec pour gameplay celui du jeu principal.

Les mini-jeux sont aussi drôles et travaillés que le mode solo.

Un an après la sortie de la version Xbox, en 2006, le jeu a fait son retour sur GBA. Cependant, une fois la cartouche inserée, force est de constater que les développeurs (Tuna Technologies, qui s'est chargé de l'adaptation) ne maîtrisaient pas aussi bien ce nouveau hardware. Si l'on retrouve le style "à l'arrache" de la Gamecube, le passage sur ce support ne s'est pas fait sans heurts. Niveau gameplay rien n'a changé, c'est tout aussi maniable, et le panel d'action n'a pas été sacrifié. La bande-son reste correcte et adaptée. On ne peut malheureusement pas en dire autant du déroulement du jeu. Il manque quelques niveaux, les boss ne sont plus accompagnés de sbires, etc. Si l'on pourrait dans un premier temps imputer ces sacrifices aux capacités de la console de Nintendo, la comparaison avec la référence du genre sur ce support, Gunstar Heroes, laisse à penser que le résultat final aurait pu être beaucoup plus proche des versions pour consoles de salon. Qu'importe, le jeu reste amusant, et on a toujours droit aux mini-jeux (là encore moins nombreux que sur grand écran).

Malgré un plaisir de jeu indéniable, on sent que cet opus n'exploite pas pleinement la puissance de la GBA.

Calibré pour conquérir le grand public de la GBA, Alien Hominid a clairement revu la difficulté du jeu à la baisse, à tel point qu'un bon joueur peut finir le jeu d'une traite ! Les handicapés du pad pourront ainsi sans problème investir dans cette cartouche qui leur permettra de commencer dans le genre en douceur. Difficile en revanche de justifier l'absence pure et simple d'un mode deux joueurs. Une fois terminé, l'intérêt du jeu risque d'en prendre un méchant coup, à moins que vous vous tiriez la bourre avec d'autres joueurs, avec la possibilité d'enregistrer les meilleurs scores à votre nom. Dernier point important à signaler, les Européens n'ont pour cet opus GBA pas été traités comme les dindons de la farce, le jeu ayant été uniquement distribué chez eux. S'il est parfois décevant comparé aux autres opus, cet Alien Hominid n'en reste pas moins un bon jeu qui mérite sa place dans votre ludothèque.

Alien Hominid n'est pas le meilleur jeu du genre sur GBA, mais offre une bonne alternative aux débutants.

Encore un an plus tard, une fois la Xbox 360 sur le marché, The Behemoth saisit l'excellente opportunité offerte par le Xbox Live Arcade en y commercialisant un remake d'Alien Hominid en haute définition et 16/9. Leur jeu étant ici vendu de manière immatérielle, ils peuvent s'affranchir d'âpres négociations et surtout de pertes de profits assez conséquentes en faveur des éditeurs. Une fois téléchargé, le jeu se révèle identique en tout point aux anciennes versions, à cette exception près qu'il offre du contenu téléchargeable (le prix de la version de base étant environ trois fois moindre que pour les versions consoles de 2004-2005). Pas forcément intéressant pour les possesseurs de la version Xbox sur DVD, qui auraient d'ailleurs sûrement aimé à la place un patch pour pouvoir y jouer en rétrocompatibilité sur 360. Ainsi, on pourra se délester de quelques euros pour se payer des niveaux supplémentaires pour les jeux du PDA, ou bien encore des images pour le profil Xbox Live... C'est abusif certes, mais comparé à des entreprises prospères comme Capcom, on peut toujours se consoler en se disant qu'on apporte ainsi son soutien aux développeurs du jeu.

Simple remake, Alien Hominid HD n'a guère d'intérêt pour les possesseurs des versions originales.

Le principal intérêt de cet opus XBLA ne réside certainement pas dans la présence de ces contenus, mais dans les incroyables récompenses promises par les développeurs aux meilleurs joueurs. En effet, pendant un certain temps, les leaders des scores se voyaient carrément offrir de véritables trophées pour les récompenser ! Un coup de pub monstrueux qui donna un véritable coup de fouet à la communauté, mais n'a plus court depuis un bon moment, The Behemoth n'ayant plus envie de produire ces récompenses. À noter que pour être le meilleur au mode solo, il ne suffit pas de finir le jeu sans encombres, mais de tuer un maximum d'ennemis, ces derniers venant par vagues successives et infinies ! Il faut ainsi beaucoup plus de "skill" pour caracoler en tête d'un mini-jeu que pour le mode difficile du mode solo. Les meilleurs joueurs solo d'Alien Hominid ont ainsi certainement dû passer de longues heures à décimer quelques millions de sbires et exploser les scores de leurs prédécesseurs. On aurait aimé un autre système, mais bon, il est ainsi assez facile de faire partie des meilleurs. Pas vraiment valorisant pour le joueur, mais beaucoup plus pour l'ego :D

Coup de pub calculé ou bonne initiative foireuse, la mise en jeu de trophées a vite été abandonnée.

Au final, Alien Hominid, en plus d'exploiter avec talent la fibre nostalgique des joueurs, fait preuve d'une telle générosité, d'un tel savoir-faire qu'il se révèle assez difficile d'en décrocher. Grâce à des bases solides, de bonnes idées marketing et une communauté de fans bien présente, The Behemoth est à l'heure actuelle la boîte de développement indépendante la plus appreciée des joueurs, leur titre suivant, Castle Crashers, malgré un prix de vente élevé, ayant été élu meilleur jeu XBLA en 2008.

Niko844
(10 août 2009)
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