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Index du Forum » » Hors-sujet » » Watchmen (La BD + Le film + La série)
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Auteur Watchmen (La BD + Le film + La série)
Vinny
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Inscrit : Feb 24, 2006
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Posté le: 2006-04-27 10:48
Suite à l'intervention de Laurent en première page de ce topic, je me suis acheté la BD (un volume, ebay UK, même pas 15 euros) et je l'ai dévoré la semaine dernière!
J'étais dubitatif sur les premières pages (Est-ce vraiment ça le chef d'oeuvre des chefs d'oeuvre ?), mais j'ai vite changé d'avis. Je suis devenu un grand fan de Rorschaw. Comme tout le monde...

Du coup, j'ai enfin pu lire tout le reste du topic bourré de spoilers et maintenant, j'ai envie de le relire !

Laurent
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Joue à Super Mario Bros. Wonder

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Posté le: 2006-04-27 11:32
J'ai lu récemment une interview de Dave Gibbons dans un mag de comics français (j'ai hélas oublié lequel, mais il ne doit pas être difficile à trouver). Il expliquait que sur les Watchmen, Moore et lui avaient eu beaucoup de chance, qu'ils étaient tombés par pur hasard, pendant la réalisation de la BD, sur une partie des coincidences narratives et visuelles qui la caractérisent. Il disait même un truc du genre "c'est comme si une force invisible nous guidait dans notre travail".
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Xavier
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De : le sept sept

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Posté le: 2006-04-27 19:55
Citation :

Le 2006-04-27 10:48, Vinny a écrit:
Suite à l'intervention de Laurent en première page de ce topic, je me suis acheté la BD

Pareil.

Citation :

mais j'ai vite changé d'avis. Je suis devenu un grand fan de Rorschaw. Comme tout le monde...

Ah ben non en fait. J'ai décroché très rapidement et il prend la poussière depuis des mois. Je ne suis pas allé bien loin et je n'ai absolumment pas éprouvé l'envie de réitérer l'expérience.
(c'est pas un troll, hein, c'est vrai)
Quand je lis vos opinions dessus, j'avoue être devant un grand mystère. A l'occasion, j'en discuterai sur le Live.

Pierre
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Posté le: 2006-04-27 20:55
Xue, je te recommande très fortement de réessayer. C'est vraiment un gros morceau, pas forcément très digeste au départ, mais tu peux en ressortir transformé. Watchmen, c'est presque toutes les grandes écoles de la pensée humaine réunies en une seule BD (rien que ça ^^).

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Xavier
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Posté le: 2006-04-27 20:58
Déjà, je bloque sur l'aspect visuel alors ce n'est pas très engageant. J'ai essayé de faire abstraction mais ça n'a pas marché. On aura bien l'occasion d'en discuter.
(lis tes messages Pierre !)
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Simbabbad
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Posté le: 2006-04-27 21:57
Sans vouloir faire le troll non plus, juste pour donner un autre son de cloche, je trouve que c'est très très sur-évalué, comme ce que fait Moore en général à mon avis.

Je vais faire court parce que je ne veux pas gâcher la passion des autres, mais en substance, même si c'est quand même très bien, c'est assez superficiel.

Je vais prendre un exemple : le test de Rorschach ne consiste absolument pas à voir si quelqu'un est "sain" en espérant qu'il voit des papillons ou des lapins roses. Ce n'est pas un test sur l'optimiste, ça sert juste à avoir quelques vagues directions sur la personne, notamment pour détecter une éventuelle schizophrénie.

Il y a un carte du vrai test, si on ne voit pas un géant qui défèque, c'est un petit peu louche, par exemple. Donc le but n'est pas de vérifier si on voit la vie en rose.

Tout est un petit peu comme ça pour moi dans ce comics (et Moore en général), ça se veut très profond mais c'est assez cliché en fait, comme le fameux secret de l'histoire qui est très simple et, encore une fois, superficiel (à mon avis).

Je pourrais dire la même chose de Killing Joke ou From Hell, mais je ne l'ai pas lu ce dernier de A à Z. Et puis, je vais pas insister, je ne veux pas être lourd...

A part ça he ne vois pas comment on peut caser le comics en film, un bonne partie de son intérêt tient de sa durée et de son ton "réaliste".

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Slowriot
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Posté le: 2006-04-28 02:49
A vrai dire, je comprends ton point de vue sans le comprendre. Intrigué par Rorschach, j'ai lu des bouquins sur le TAT et les tests projectifs après avoir lu la BD et il est vrai que la situation est peu crédible.

Seulement le propos de Moore, ce qu'il cherche à faire passer par le perso, se ressent assez efficacement chez la majorité des lecteurs des Watchmen. Si tu voulais démonter la BD point par point comme quelque chose de peu réaliste, il te suffisait de commencer par le Doc et l'affaire était entendue. Je veux dire, un surhomme qui embrasse le temps comme une sorte d'absolu simultané, c'est déjà pas franchement crédible.

A la limite on s'en balance que Rorschach soit un cas psychiatrique pertinent Comme tous les personnages des Watchmen, il existe avant tout comme archétype, comme le couple hibou/laurie incarne une certaine idée de la normalité. Rorschach, c'est l'intransigeance bornée. Pour moi c'est ça l'idée des Watchmen : plusieurs personnalités confrontées à une même situation qui réagissent selon leurs valeurs, et ces valeurs qui s'entrechoquent.

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Simbabbad
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Posté le: 2006-04-28 11:54
Citation :

Le 2006-04-28 02:49, Slowriot a écrit:
A vrai dire, je comprends ton point de vue sans le comprendre. Intrigué par Rorschach, j'ai lu des bouquins sur le TAT et les tests projectifs après avoir lu la BD et il est vrai que la situation est peu crédible.

Seulement le propos de Moore, ce qu'il cherche à faire passer par le perso, se ressent assez efficacement chez la majorité des lecteurs des Watchmen. Si tu voulais démonter la BD point par point comme quelque chose de peu réaliste, il te suffisait de commencer par le Doc et l'affaire était entendue. Je veux dire, un surhomme qui embrasse le temps comme une sorte d'absolu simultané, c'est déjà pas franchement crédible.

A la limite on s'en balance que Rorschach soit un cas psychiatrique pertinent Comme tous les personnages des Watchmen, il existe avant tout comme archétype, comme le couple hibou/laurie incarne une certaine idée de la normalité. Rorschach, c'est l'intransigeance bornée. Pour moi c'est ça l'idée des Watchmen : plusieurs personnalités confrontées à une même situation qui réagissent selon leurs valeurs, et ces valeurs qui s'entrechoquent.

Non, ça n'est pas ce que je voulais dire. Je vais donc aller plus loin que le détail des cartes pour m'expliquer, attention je ne veux pas troller, juste donner mon avis.

Je trouve Rorschach très très réussi en tant que design et en tant que personnage, simplement tout le côté pseudo-profond dans le chapitre qui lui est dédié avec le psy et son noeud papillon rose me paraît en fait à la fois superficiel et un peu ridicule, et en fait, pour tout dire, m'a agacé, un peu comme Moore en général.

Si tu veux, je trouve que l'on voit où il veut en venir bien avant qu'il y vienne et il aurait pu y venir avec des moyens plus pertinents et complexe et justes. Le personnage du psy par exemple n'est pas crédible, un psy du genre qui veut traiter le cas Rorschach ne change pas sa vision du monde parce qu'il apprend qu'une gamine a été coupée en morceaux et nourrie à des chiens, il en a déjà vu des vertes et des pas mûres à priori. Par exemple (il se trouve que je m'intéresse à la psychanalyse) vous seriez étonnés par la quantité d'histoire d'incestes et de viols et de tortures qui arrivent quotidiennement.

J'ai eu des problèmes psychologiques à un moment de mon histoire, et étant RMIste je suis allé à mon centre médico-social local. Je t'assure que la salle d'attente c'est quelque chose. Je ne sais pas si tu as suivi les auditions d'Outreau (c'était passionant), mais c'est hallucinant la situation qu'on vécu les gamins dans cette affaire, je ne vois pas comment on peut se relever de ça, et en écoutant les psys et associations qui en parlaient, on voyait bien qu'elles en avait vu d'autres - comme les psys du centre où je suis allé - et dans cette affaire ils ont juste essayé d'arranger les choses, mais on fait du mal en se trompant encore une fois.

Donc, c'est une situation qui n'est pas exceptionnelle, et les gens font avec et essaient de peser dans la balance. C'est la vie et c'est complexe.

Alors, quand un gars dont on nous rabache que c'est un génie veut nous faire passer le message que ah ma bonne dame, il y a des choses affreuses dans ce bas-monde et que si on y réfléchit on ne peut pas ne pas être révolté et/ou pessimiste, et que pour s'envelopper un peu plus dans une couche de faux sérieux on utilise un symbole fort avec un nom scientifique (les cartes de Rorschach) mais sans même prendre la peine d'en saisir le vrai sens (et on peut le faire très facilement), eh ben on ne mérite pas sa réputation. Voilà. A la limite, le thème lié à Rorschach est exploré de façon bien plus mature par le psychopathe de SE7EN, par exemple.

Je sais, c'est du comics, mais je n'ai jamais senti ça chez Miller ou Morrisson. Je n'aime pas tout ce que eux ont fait non plus mais il n'y a pas ce côté "je me prends terriblement au sérieux pour dire des choses banales". Moore nous fait un cours magistral mais il n'a pas les bases pour. Alors que Miller se contente soit de laisser libre court à son bonheur de s'enfoncer dans un exercice de style (Sin City, Elektra) soit de dépeindre une situation sans forcément juger. "Dark Knight Returns" a son côté militant mais ça passe, ses personnages sont toujours complexes, même ceux qu'il n'aime pas comme le psy qui chouchoute Two-Face ou le Joker. Alors que Moore a toujours ce côté plat et unidimensionnel (pourquoi pas) mais très prétentieux.

Pour reprendre mon exemple, tu regardes les auditions d'Outreau puis tu lis Miller, ça passe, c'est compatible. Tu regardes les auditions d'Outreau puis tu lis Moore et tu te dis : oui, bon, Moore à comparer c'est des petits Mickeys, quoi.

Je ne veux pas passer pour un croisé anti-Moore et troller, d'autant plus que honnêtement c'est pas mal ce qu'il fait, mais il ne mérite pas le piédestal qu'on lui a fait et que lui-même pense qu'il mérite quand on lit ses interviews.

Pour prendre un dernier exemple, le foin que l'on fait sur "The Killing Joke" m'agace aussi. J'ai bien aimé quand j'avais 12 ans, mais franchement, ça n'est pas profond pour un sou, et c'est même un peu con. En substance c'est : je vais vous dire la VRAIE histoire du Joker. Eh bien, le Joker n'a pas été toujours méchant, en fait il a perdu sa femme, qui en plus était enceinte, et en plus, il était aussi au chômage. C'est pour ça qu'il est méchant, donc en fait, c'est une victime, et lui et Batman se ressemble, au fond. Woha le concept.

Sauf que 50% des "méchants" de la vieille école des comics et 90% de la nouvelle ont des histoires qui "justifient" le fait qu'ils soient "méchants". En fait c'est de plus en plus dur d'avoir un bad guy qui n'ait pas son joli background dramatique. Je veux dire, dans Batman, on a déjà Two-Face, qui est dramatique depuis le début, alors pourquoi passer le bad guy le plus monstrueux de l'histoire des comics au rouleau compresseur du politically correct ? Maintenant que son rewritting infantile est en passe de devenir l'histoire officielle du Joker, il est sur le point d'avoir pourri un des seuls vrais grands salauds qui restait.

Moi, ça me donne envie de revoir "Return of the Joker", ça c'est du coup de poing dans la gueule avec une VRAIE profondeur psychologique, et il y a encore plus d'éléments futuristes ou fantaisistes que chez Moore.

Voilà j'ai fini !

Ceci étant je redis encore qu'il a beaucoup de talent aussi et je respecte totalement qu'on en soit fan.

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Laurent
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Posté le: 2006-04-28 13:16
Pour le cas de Rorschach et cette psychanalyse peu crédible, plusieurs hypothèses : le test choisi est celui de Rorschach pour son aspect visuel. Le personnage est en partie créé autour de cette image, le blanc, le noir, la symétrie. L'impact de ce personnage sur le lecteur est renforcé par la manière dont son histoire est racontée, sous la forme d'un flashback remontant jusqu'à son enfance. Pour un tel développement du personnage, une scène de psychanalyse était idéale. L'utilisation du test de Rorschach n'a pour d'autre but que d'en faire un grand moment de bande dessinée. Ca doit faire partie des trucs qui, selon Gibbons, se "sont imposés d'eux même". Ou peut-être, tout simplement, que pour Moore Rorschach est sain d'esprit, c'est juste un facho qui n'a aucune excuse et le psy fait fausse route : pour appuyer cela, on le voit pratiquer sur lui un test inapproprié qui se retourne contre lui, et du coup ce psy se remet en question. Un personnage intéressant de plus vient ainsi s'ajouter au récit, et son destin sera soumis au lecteur.

C'est comme la discussion entre le Doc Manhattan et Laurie, sur Mars. Le Doc explique que Mars s'est épanouie en réfutant toute forme de vie. Sur le plan scientifique c'est bancal, mais à partir de là Moore développe cette théorie sur les miracles thermodynamiques qui donne au récit un sens global et rend la fin si émouvante.

Pour du Moore précis sur le plan historique et scientifique, il vaut mieux lire From Hell et ses 100 pages de renvois à la fin du bouquin, mais personnellement ça ne me passionne pas, je préfère lire une vraie BD avec des dessins magnifiques et un bon travail sur le découpage. Et The Watchmen est pour moi ce qui se fait de mieux dans le genre car c'est un exercice de narration et d'étude de caractères dans lequel les choses montrées et contées se renforcent mutuellement, d'où ma conviction que Gibbons est le meilleur dessinateur avec lequel Moore ait travaillé, celui avec l'alchimie semble avoir le mieux fonctionné. Tous les éléments s'entrecroisent pour créer chez le lecteur un vertige supposé symboliser la théorie du chaos ou un truc dans le genre, enfin c'est comme ça que je le vois. Ca valait bien quelques raccourcis et artifices, en tout cas.

Par contre personne n'a dit que The killing joke était une grande oeuvre. C'est un excellent Batman, ce qui est déjà largement suffisant. Personnellement mon préféré reste "Un cri dans la nuit" de Scott Hampton et Archie Goodwin.
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Posté le: 2006-04-28 13:34
C’est un post très intéressant. Je ne sais pas si tu le sais, mais Moore non plus n’aime pas Souriez, ça vous fait un point commun.

Il l’a souvent défoncé en interview. Le scénar a été écrit pendant ou juste après Watchmen et on sent qu’il n’en était pas sorti, mais il voulait vraiment bosser avec Bolland. Perso, c’est pas mon préféré. La fin est un peu une pirouette, mais j’aime bien toute sa période « ambiguïté morale, » et je trouve ça bien de rappeler, des fois, que Batman est aussi un psychopathe en collants. Enfin bref, ton post est éloquent et j’ai pas grand-chose à dire (à part que des vrais méchants qui ont la classe, y en a plein dans Judge Dredd).

Pour Rorschach : On a déjà parlé du fait que la réaction du psy n’est pas crédible dans ce topic, mais sur la narration, le chapitre est superbe et la progression imparable. Ca passe par énormément de choses, par le ton employé par le psy qui dérive de plus en plus vers celui de Rorschach, par le dispositif de répétition des séances et je connais pas grand monde qui n’était pas sur le cul à la première lecture (en fait, je crois que tu es le premier).

Maintenant, si tu prends un peu de recul sur la figure du psy et le fait qu'il devrait être préparé à ce genre de choses, le fond du chapitre est crédible. Tu as l’air de trouver qu’une fillette massacrée, c’est du pipi de chat à côté d’Outreau : c'est quand même y aller un peu fort. C’est pas parce qu’on est mentalement assez solide pour accepter le fait qu’un truc comme la Shoah ait pu exister qu'elle est moins révoltante. C'est pas parce que des psys ont un seuil de résistance énorme à l'horreur que l'horreur n'est pas là. Ca me paraît crédible, en tant qu'être humain, de craquer face à une situation extrême. Si on n’érigeait pas des défenses mentales et une capacité à zapper ce genre de choses, on péterait tous les plombs. Quand j’écris « On a retrouvé des abat-jour en peau humaine dans les camps de concentration » je n’ai pas la moindre idée de ce que ça représente, en fait je ne peux pas l’imaginer. Mais si j’avais vécu ça, ou si j’avais vécu une expérience aussi traumatisante, alors la dépression ne serait qu’un strict minimum. On peut s’imaginer qu’avec un terrain favorable et une énorme capacité d’empathie, la détresse de l’autre vous tire vers le bas : le problème de ce psy, c’est finalement d’avoir eu un très mauvais conseiller d’orientation.

Comme avec Ebert, Silent Hill et cette « lumière orpheline », je crois que c’est l’idée du Rorschach plus que son fonctionnement qui intéresse Moore. En tant que motif, c'est vraiment un super joujou, dans la symétrie du chapitre 5, dans le fait que la tache change à chaque apparition du personnage (ce qui a poussé certains à y chercher des patterns de répétition, et si c’est effectivement ce que Moore voulait dès le départ, MGS2 peut aller se coucher). Il y a de la simplification et c’est normal : si le psy devait étudier le vocabulaire, les temps de réponse et les couleurs du sujet pendant tout le chapitre, ça serait bien vite chiant. Mais même si sur le principe, le test n’est pas maîtrisé, le fond est imparable : c’est une tache, sur laquelle on pose une grille de lecture, mais ça reste une tache, et ça n’a pas d’autre sens que celui qu’on veut bien lui donner.

EDIT : Laurent-ed

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Posté le: 2006-04-28 15:34
Citation :

Le 2006-04-28 13:16, Laurent a écrit:
Pour le cas de Rorschach et cette psychanalyse peu crédible, plusieurs hypothèses : le test choisi est celui de Rorschach pour son aspect visuel. Le personnage est en partie créé autour de cette image, le blanc, le noir, la symétrie. L'impact de ce personnage sur le lecteur est renforcé par la manière dont son histoire est racontée, sous la forme d'un flashback remontant jusqu'à son enfance. Pour un tel développement du personnage, une scène de psychanalyse était idéale. L'utilisation du test de Rorschach n'a pour d'autre but que d'en faire un grand moment de bande dessinée. Ca doit faire partie des trucs qui, selon Gibbons, se "sont imposés d'eux même". Ou peut-être, tout simplement, que pour Moore Rorschach est sain d'esprit, c'est juste un facho qui n'a aucune excuse et le psy fait fausse route : pour appuyer cela, on le voit pratiquer sur lui un test inapproprié qui se retourne contre lui, et du coup ce psy se remet en question. Un personnage intéressant de plus vient ainsi s'ajouter au récit, et son destin sera soumis au lecteur.

Oui, mais le problème c'est que la façon dont les entretiens et le test font fausse route ne pose pas juste un problème d'inexactitude, ce qui en soit ne serait pas forcément grave, mais un problème sur le fond.

Par exemple, le psychanalyste Bartholomew Wolper dans Dark Knight Returns est caricatural, mais il y a vraiment des gens comme ça (j'en connais), et plus généralement il représente une partie de ce que l'on pourrait appeler la tendance politically correct/gauche caviar/angéliste. Donc ce qu'il représente est réel et pertinent et complexe. Miller se contente de le mettre en scène et nous laisser nous faire notre opinion, du coup le personnage ne me choque pas, il est cohérent et sincère, il est intéressant (et rigolo en plus, on aime bien le détester, même si l'on n'est pas satisfait à sa mort). Il n'est pas totalement mauvais non plus, par exemple, il défend Two-Face et Bruce Wayne le fait aussi (même si Wolper le fait mal), il ne se rend juste pas compte, il vit dans son monde et théorise tout sous un angle politique libéral. Du coup, par exemple, quand on voit dans la vraie vie des psy ou des politiques parler des émeutes en banlieue, en entendant certains trucs je me dis : "tiens, du Bartholomew Wolper" !

Alors que le psy de Watchmen (dont je ne me souviens plus du nom, c'est symptomatique de son insignifiance), non, il ne correspond à aucune pertinence complexe. On voit venir le but de Moore à 3km : voilà un gars qui vit dans son confort et ne se rend pas compte du camboui de la réalité, il est optimiste parce qu'il ne sait pas, mais Rorschach sait, lui, et va changer sa vision. Sauf que les gens en général ne sont pas aussi ignorants de ces choses-là, et les psys en particulier (même les psys cons, et il y en a plein). Moore a une attitude paternaliste avec ses personnages.

Que Rorschach devienne facho suite à une affaire qui lui a définitivement fait perdre confiance en l'humanité en général et l'a radicalisé à outrance, ça fonctionne, et son costume est tout bonnement génial. Mais le psy est un personnage inintéressant et totalement à côté de la plaque, il est démonstratif et lourd comme procédé narratif. Et c'est pareil pour le test : la maladie mentale n'a rien à voir avec le manque d'optimisme, et le test de Rorschach n'est pas un test sur l'optimisme. Quand il félicite Rorschach parce qu'il voit un joli papillon (et ment), c'est à côté de la plaque, ce n'est pas le but de la psychanalyse et ce n'est pas le fonctionnement du test, on ne félicite jamais quelqu'un pour un test psychologique.

On peut rapprocher aussi, pour comprendre ce que je veux dire, la problématique de Rorschach de celle de SE7EN. Le tueur de SE7EN est tout à fait comme Rorschach sur le fond : horrifié de la décadence du monde, il se radicalise à outrance, jette par la fenêtre tout compromis, et fait de sa vie un sacrifice pour une cause qu'il considère comme supérieure (en sacrifiant d'autres personnes au passage mais ce sont des pécheurs de toute façon et c'est pour le bien commun à terme). Dans les deux cas on est horrifié de ce qu'il fait mais on est encore plus horrifié de pouvoir aussi comprendre son point de vue. Mais la différence, c'est le monde autour. Prend le personnage (génial) de Morgan Freeman. Lui est un personnage réel, nuancé, complexe, c'est un bien meilleur faire-valoir. La scène dans le fourgon avec Doe à l'arrière bat totalement la "psychanalyse" de Rorschach. Ce personnage de Freeman me permet d'ailleurs de bien résumer ma position. Il dit à la fin de SE7EN : << Earnest Hemingway once wrote, "The world is a fine place and worth fighting for." I believe the second part. >> Et ça, ça détruit la caricature du psy de Watchmen. Les vrais gens sont comme ça, on n'a pas attendu Moore pour avoir un avis nuancé.

J'ai l'air de focaliser sur un détail, mais en fait je l'utilise comme exemple, ça s'applique pour moi à tout Watchmen et à Moore en général, son message est premier degré et infantile : "il y a des guerres, c'est pas bien, donc un super-intelligent est obligé de créer un ennemi commun pour instaurer la paix". Oui, sauf qu'en pratique, non. Il y a déjà eu bien des conflits globaux qui ont généré plus de frictions qu'autre chose, l'histoire l'a déjà montré. Quand une ville est ravagée par une puissance inconnue, les gens n'arrête pas de se battre pour se serrer les coudes + qu'en temps de paix, ils ont plutôt tendance à s'égorger pour un ouvre-boîte, et c'est normal, c'est humain. Il n'y a qu'à voir "La Guerre des Mondes" de Spielberg (excellent, lui).

Moore enfile des gros sabots et donne des sermons simplistes... quitte à prendre un autre exemple de fusion entre super-héros et réalité/réflexions sur le monde, je trouve que les films X-men y parviennent bien, bien mieux.

Il raconte très bien par contre, là no problem, c'est un très bon bouquin, c'est juste que bon, c'est pas si universellement profond. D'où ma réflexion sur les petits Mickeys : des fois je pense à Miller (pas tout, hein) dans la vraie vie, ou même à Morrison (plus rare tellement c'est space), mais Moore, jamais, ça fait pauvre face à la réalité.

Citation :

Le 2006-04-28 13:16, Laurent a écrit:
C'est comme la discussion entre le Doc Manhattan et Laurie, sur Mars. Le Doc explique que Mars s'est épanouie en réfutant toute forme de vie. Sur le plan scientifique c'est bancal, mais à partir de là Moore développe cette théorie sur les miracles thermodynamiques qui donne au récit un sens global et rend la fin si émouvante.

Oui sauf que là aussi on comprend Manhattan au bout de 3 pages et ça n'empêche pas Moore de se contenter d'enfoncer le clou : il a un accident, il devient une entité supérieure, du coup il se dés-humanise et trouve + d'intérêt à voir flotter des particules qu'à parler avec des semblables qui n'en sont plus. C'est une bonne idée, mais il n'en fait rien de spécial non plus. Ce qu'il dit, une entité non-divine aurait pu le dire, et d'ailleurs, Lovecraft l'a dit de façon plus fine et métaphorique bien avant par exemple...

En soit ce n'est pas un problème, c'est un bon thème (que partagent des personnages comme Sherlock Holmes par exemple), mais on a l'impression qu'il est là pour un prêche très spéficique de la part de Moore, que c'est juste un outil pour quelque chose de naïf, et du coup ça gêne.

Citation :

Par contre personne n'a dit que The killing joke était une grande oeuvre. C'est un excellent Batman, ce qui est déjà largement suffisant. Personnellement mon préféré reste "Un cri dans la nuit" de Scott Hampton et Archie Goodwin.

Ah si si, ici peut-être pas mais sur les forums anglo-saxons que j'ai lus ils sont tous à genoux devant Killing Joke, alors que je prends le Joker de "Arkham Asylum" ou "Return of the Joker" à la place quand on veut.

Citation :

Le 2006-04-28 13:34, Slowriot a écrit:
Il a souvent défoncé [Killing Joke] en interview. Le scénar a été écrit pendant ou juste après Watchmen et on sent qu’il n’en était pas sorti, mais il voulait vraiment bosser avec Bolland. Perso, c’est pas mon préféré. La fin est un peu une pirouette, mais j’aime bien toute sa période « ambiguïté morale, » et je trouve ça bien de rappeler, des fois, que Batman est aussi un psychopathe en collants. Enfin bref, ton post est éloquent et j’ai pas grand-chose à dire (à part que des vrais méchants qui ont la classe, y en a plein dans Judge Dredd).

Rapidement, parce que je me suis déjà étalé parce que c'est intéressant mais il faut que je bosse :

Je ne sais pas pourquoi il n'aime pas pourquoi sa propre oeuvre, mais il se trouve que le Joker est déjà ambigü, de façon beaucoup plus fine. Il est autant ambigü que Hannibal Lecter ou Richard III : se sont des salauds et des monstres, mais ils sont tellement intelligents, roublards et charismatiques que l'on s'attache + à eux qu'aux gens autour, c'est ça leur ambigüité. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle malgré bien des défauts le "Batman" de Tim Burton est réussi, c'est que son Joker fonctionne tout à fait de la même façon.

Il est dingue que dans la scène du flashback de "Return of the Joker" (je ne détaille pas, je ne sais pas si tout le monde l'a vu) on éclate plusieurs fois de rire, par exemple, c'est tout de même un des pires trucs que j'ai vu en comics. Mais il sort une réplique et on est écroulé... et l'instant d'après on a un peu honte.

Imagine que l'on apprenne que si Hannibal Lecter ou Richard III sont comme ils sont c'est qu'ils ont eu une enfance malheureuse (Harris l'a fait dans le livre d'ailleurs - pathétique). Tout s'écroule. Ou que Pyramid Head est comme il est parce qu'on s'est moqué de lui quand il était petit.

Tu vois mon propos ?

Quand à Batman en psychopathe en collant, on ne le voit pas vraiment dans "Killing Joke", il fait ce qu'il est censé faire et a 4 lignes de dialogues. Sans compter que ça fait plus de 10 ans que c'est un psychopathe en collant et que ça fait un peu limité à la longue, d'ailleurs, je suis content que ça n'ait pas été repris dans la série animée ou Batman Begins.

Citation :

Le 2006-04-28 13:34, Slowriot a écrit:
Maintenant, si tu prends un peu de recul sur la figure du psy et le fait qu'il devrait être préparé à ce genre de choses, le fond du chapitre est crédible. Tu as l’air de trouver qu’une fillette massacrée, c’est du pipi de chat à côté d’Outreau : c'est quand même y aller un peu fort.

Ce n'est pas ce que j'ai dit du tout, ce que j'ai dit c'est que les gens vivent déjà avec ça, et les psys (surtout du niveau théorique du personnage) en particulier.

Ce qui m'agace c'est cette façon de créer des personnages simplistes et d'avoir une attitude parternaliste à leur encontre. Un bon auteur doit être possédé par ses personnages, pas se considérer supérieur à eux. J'allais dire "les manipuler comme des marionnettes", mais mon mec est marionnettiste et je l'ai vu jouer des coulisses, et il est possédé par ses personnages aussi, alors...

J'ai l'impression d'être plus intelligent et mature qu'à peu près n'importe qui dans Watchmen. Pas le cas avec Dark Knight Returns par exemple.

Citation :
Quand j’écris « On a retrouvé des abat-jour en peau humaine dans les camps de concentration » je n’ai pas la moindre idée de ce que ça représente, en fait je ne peux pas l’imaginer. Mais si j’avais vécu ça, ou si j’avais vécu une expérience aussi traumatisante, alors la dépression ne serait qu’un strict minimum.

Mais le psy n'a pas vécu ça, il voit un gars le lui raconter, c'est tout. Donc à la limite, quand j'ai vu "Nuit et Brouillard" (le documentaire sur les camps, pas sûr du titre) en classe d'histoire étant adolescent, ça aurait dû être bien pire pour moi que ce qu'un psy professionnel et adulte aurait vécu lors de cet entretient où il y a juste un gars qui parle, non ?

Tu vois ce que je veux dire ? Les personnages sont des figures en carton, c'est ça mon problème.

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Antoine
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Posté le: 2006-05-27 19:24
Juste pour dire que je viens de finir ce monument, et qu'il m'a bien sûr complètement retourné. Une seule envie, le relire parce que là c'est vrai que ça fait beaucoup à assimiler et digérer d'un coup. Dan Dreiberg m'a fait penser à François Hollande...
Oh et mes persos préférés sont Ozymandias, et le Comédien. Ben si.

Je viens également de lire les posts de Simbabbad, et à vrai dire j'ai du mal à avoir une vision globale de Watchmen, là tout de suite, et donc à savoir si le propos de Moore, ben c'est de l'esbrouffe ou non. Mais j'aurais tendance à dire, comme ça a été déjà mentionné plus haut, que les personnages, leur façon de voir le monde, et donc leur épaisseur et leur légitimité comparés à ceux des "gens dans la vraie vie" sont volontairement caricaturés par Moore. Ils sont chacun un mode de pensée, un stéréotype, un modèle, simplifié, abstrait, d'individu, un état d'esprit isolé, et l'intérêt du procédé, qui serait absent ou en tous cas beaucoup plus prise de tête à entreprendre avec de vrais bons peronnages complexes avec lequel l'auteur fait corps, réside dans le fait de se faire renvoyer ces figures antagonistes, plus ou moins valorisées par la situation mise en scène, mais auxquelles reste l'heureuse possibilité d'être rééquilibrées par l'affect du lecteur.

Je crois que chaque personnage a eu plusieurs paroles qui m'ont parlé et m'ont touché. Si chaque personnage est un avis tranché, peut-être qu'on les rassemblant tous, et en limant les angles, on obtient l'avis nuancé qui leur faisait défaut. Ou pas, libre à chacun d'y voir une absolue incompatibilité, ce à quoi Dreiberg et Rorschach semblent apporter une réponse différente à la fin. Après j'ai bien du mal à contredire les critiques que tu dresses sur le psy, même si ça ne m'avait pas interpelé, justement parce qu'il est lui aussi un stéréotype utile, voire nécessaire au projet de Moore.

Je dirais que cette BD est unique pour son concept, qui est de confronter plusieurs concepts philosophiques. Quelle philosophie ne peut pas être d'une manière ou d'une autre considérée comme obtue et réductrice? Il est trop tôt pour dire si dans la "vraie vie" je penserai à Watchmen, mais en le lisant, j'ai beaucoup pensé à la "vraie vie".

Après je suis jeune, ce qui excusera l'erreur dans laquelle je me vautre peut-être depuis 20 lignes, mais ce qui m'apparaît maintenant, c'est une synthèse énorme et très belle de faiblesses et dérives humaines très belles, enveloppée dans une structure narrative très belle. Bref, ça a marché sur moi!


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Posté le: 2006-05-29 14:05
Citation :

Le 2006-05-27 19:24, Antoine a écrit:
Je viens également de lire les posts de Simbabbad, et à vrai dire j'ai du mal à avoir une vision globale de Watchmen, là tout de suite, et donc à savoir si le propos de Moore, ben c'est de l'esbrouffe ou non.

Attention, mon but n'est pas de teinter ou pourrir l'enthousiasme que l'on peut avoir vis à vis de cette oeuvre. Disons que je voulais apporter un autre son de cloche à ce que l'on entend souvent à son propos.

Je trouve aussi que c'est plutôt très bon, et je ne me suis pas ennuyé en le lisant. Mais bon... je ne trouve pas ça aussi profond et certainement pas aussi subtil que ce que disaient les critiques que j'avais lues, et je voulais donc nuancer une opinion souvent entendue.

Ceci étant tu n'as pas à décider maintenant tout de suite de ton ressenti... si ça t'a touché c'est très bien, c'est bon des fois de se laisser aller à son enthousiasme sans avoir à le nuancer juste après avoir fini l'oeuvre. Tu as le temps de voir ce que tu en penses au long terme.

Citation :

Le 2006-05-27 19:24, Antoine a écrit:
Mais j'aurais tendance à dire, comme ça a été déjà mentionné plus haut, que les personnages, leur façon de voir le monde, et donc leur épaisseur et leur légitimité comparés à ceux des "gens dans la vraie vie" sont volontairement caricaturés par Moore. Ils sont chacun un mode de pensée, un stéréotype, un modèle, simplifié, abstrait, d'individu, un état d'esprit isolé, et l'intérêt du procédé, qui serait absent ou en tous cas beaucoup plus prise de tête à entreprendre avec de vrais bons peronnages complexes avec lequel l'auteur fait corps, réside dans le fait de se faire renvoyer ces figures antagonistes, plus ou moins valorisées par la situation mise en scène, mais auxquelles reste l'heureuse possibilité d'être rééquilibrées par l'affect du lecteur.

Certes, mais Moore a à mon avis vis à vis de ses personnages un paternalisme à la fois bienveillant et méprisant, un peu comme un Dieu vis à vis de ses créatures.

Par exemple, dans Dark Knight Returns de Miller, il y a aussi des personnages tranchés et symboliques : Alfred, Gordon, Wayne, Wolper (le psy du Joker et de Two-Face), le Joker, le chef des Mutants, etc.

Ils représentent quelque chose pour former un tout qui contient un sens important, un commentaire, mais la différence est que les personnages de Miller font plus grands que leur symbole. On sens qu'ils ont une complexité et une subtilité qui ne cadre pas uniquement avec l'usage que Miller en fait, qu'il nous dépassent un peu, même si on en retire un sens général. On sent aussi que Miller est dépassé par eux dans le sens où Miller est habité par ses personnages - c'est littéralement vrai, par exemple, avec Marv' dans Sin City (pourtant il est archétypique lui aussi) : Miller a écrit qu'au début Sin City devait être une nouvelle courte, mais que Marv' ne l'a pas lâché et ne l'a pas laissé finir son histoire rapidement.

Alfred représente quelque chose, le passé j'imagine, il meurt d'ailleurs en même temps que le manoir Wayne est détruit, mais on ne sait finalement pas grand-chose sur lui, et dans la façon dont Miller fait vivre son personnage, on sait qu'il y a beaucoup plus dans ce personnage. Il y a une vraie complexité suggérée, comme dans la vraie vie on sent qu'on ne saura pas tout sur ce personnage en si peu de temps. Pareil pour Gordon ou tout les autres, Miller suggère toujours que ce sont de vrais personnages et il montre simplement une de leur facette à un moment donné.

Alors que chez Moore, chaque personnage fait mannequin de cire, petit engrenage dans une oeuvre que son auteur veut colossale et démonstratrice de quelque chose de précis. On sent que les seuls que Moore estime à peu près à son niveau sont Manhattan et Ozymandias, et encore.

Tout ça a l'air abstrait, donc pour être plus concret je dirais qu'en lisant Watchmen, à chaque personnage présenté, je me disais : "oui je vois le genre", et jamais plus je n'étais surpris par ce personnage. Mais du tout. Je voyais Moore venir.

Alors que Wolper, qui pourtant est très caricatural tout de même, m'a surpris jusqu'à sa mort. On change même d'avis sur certains personnages, comme la grosse dame qui défend Batman dans les débats TV, qu'on aime plutôt bien au début alors qu'on prend en grippe son interlocuteur ; puis elle finit par nous agacer et on trouve que son opposant dit des choses pertinentes, finalement.

Citation :

Le 2006-05-27 19:24, Antoine a écrit:
Après j'ai bien du mal à contredire les critiques que tu dresses sur le psy, même si ça ne m'avait pas interpelé, justement parce qu'il est lui aussi un stéréotype utile, voire nécessaire au projet de Moore.

J'ai choisi cet exemple parce qu'il était le plus simple à expliquer, mais je pense avoir été plus clair plus haut...

Moi ça m'a agacé ce passage (bon, je l'ai déjà dit), déjà je trouvais que la BD faisait faussement pompeux avant mais là... enfin je n'insiste pas.

Citation :

Le 2006-05-27 19:24, Antoine a écrit:
Il est trop tôt pour dire si dans la "vraie vie" je penserai à Watchmen, mais en le lisant, j'ai beaucoup pensé à la "vraie vie".

Après je suis jeune, ce qui excusera l'erreur dans laquelle je me vautre peut-être depuis 20 lignes, mais ce qui m'apparaît maintenant, c'est une synthèse énorme et très belle de faiblesses et dérives humaines très belles, enveloppée dans une structure narrative très belle. Bref, ça a marché sur moi!

Ben c'est l'objectif, et chacun a sa propre sensibilité et son vécu !

Moi je suis content qu'il existe des choses que je n'aime pas mais que les autres aiment... c'est enrichissant comme sujet de discussion.

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Antoine
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Posté le: 2006-05-29 18:51
Citation :
Attention, mon but n'est pas de teinter ou pourrir l'enthousiasme que l'on peut avoir vis à vis de cette oeuvre. Disons que je voulais apporter un autre son de cloche à ce que l'on entend souvent à son propos.


Oui, oui, on est bien d'accord, pas de problème, au contraire, le fait de défendre et de discuter une oeuvre, ou n'importe quelle idée, ne peut que servir à mieux la connaître et mieux la comprendre. Aussi, c'est une façon pour moi de prolonger l'expérience donc je ne peux que te remercier pour ton son de cloche divergent.

Je comprends ce que tu veux dire en tous cas, et je viendrai rediscuter ça après ma 2e lecture. Pas tout de suite donc. Quoique je ne vois pas trop ce qu'il y a à ajouter. Tu m'as donné envie de lire Sin City en tous cas.

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Posté le: 2006-05-29 19:33
Citation :

Le 2006-05-29 18:51, Antoine a écrit:
Tu m'as donné envie de lire Sin City en tous cas.

C'est très différent comme style, c'est surtout un exercice de style qui pousse le principe du roman noir à son paroxysme, c'est bien moins ambitieux que Watchmen mais très jouissif !

J'ai même encore plus aimé le film que les livres, que j'aime pourtant beaucoup, c'est dire ! Le mieux je pense c'est lire les livres puis voir le film, qui est épatant et nouveau dans son approche, c'est à la BD ce que Silent Hill est au jeu (en encore plus poussé dans la fidélité).

Si tu ne l'as pas lu et veux une oeuvre un peu plus dans le ton de Watchmen je te conseille plutôt Dark Knight Returns, tant qu'à rester dans Miller.

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Antoine
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Posté le: 2006-05-29 20:51
En fait, j'ai vu le film Sin City au cinoche. J'ai passé un très bon moment dans l'ensemble, avec un petit bémol pour la partie mettant en scène Clive Owen. Un peu longue selon moi, avec moins de charme que les deux autres segments. N'empêche qu'à la sortie du film, et bien j'avais un petit goût de vain, comme si tout ça n'avait en effet été qu'un bel exercice de style un peu vide. Il a été comparé à Pulp Fiction, sans doute pour la construction narrative et la participation de Tarantino, m'enfin pour moi c'était quand même pas du même niveau. Attention j'ai quand même passé un très bon moment je le répète.

Ce que tu en dis a réveillé mon intérêt pour le comic : après avoir vu le film, je m'étais promis de le lire, en me disant que je pourrais alors peut-être vraiment l'apprécier (le film), et puis pas l'occasion, d'autres priorités...Notamment The Dark Knight Returns, peu avant de m'atteler aux Watchmen. Et que j'ai trouvé pour le coup (mais là encore il faudra que j'y revienne) très beau, à tous points de vue. La mise en scène (ça se dit en BD?) baroque et les personnages si profondément sombres m'ont particulièrement marqué, outre le style et le découpage déments de l'oeuvre. Ce que tu en dis me semble très vrai. Les protagonistes nous enveloppe de leur mélancolie et de leur folie, et le tout s'apparente à une pure tragédie, un mythe crépusculaire absolument bouleversant. Là pour le coup, après la voir fini, je ne pouvais pas m'en défaire et je me refaisais les moments d'anthologie, les combats titanesques...Au fait, la grosse femme qui défendait Batman s'appelait Lana Lang. Dans le comic Superman, c'était déjà un personnage récurrent?

Enfin, dans les bonus du dvd du 1er Batman de Burton, il est dit que le réalisateur a pris le comic de Miller pour référence. Or, je vois pas trop le rapport entre les 2 versions.

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Posté le: 2007-03-10 10:02
Première image de Watchmen, finalement réalisé par Zack Snyder (300 et le remake de Zombie) :


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Posté le: 2007-03-10 11:17
Bonne nouvelle : L'armée des morts était un pur moment de jouissiverie coupable. Il est bien, ce petit.
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Posté le: 2007-03-10 15:03
Pour situer un peu mieux l'origine de cette image, vaut mieux aller faire un tour sur aintitcool :

[quote=aintitcool]This isn't final film still, but one of many test shots that Zach has done for WATCHMEN.

http://www.aintitcool.com/node/31814[/quote]


Pour Watchmen, Snyder pourra pas se cacher derrière le comicbook comme il semble l'avoir fait pour 300... Dawn of the Dead était effectivement plutôt bon, mais j'ai de gros doutes sur la capacité du gars à faire un film qui soit pas un c/c de morceaux choisis de la bd d'origine.
Et j'aime pas le buzz-trick qui consiste à cacher une image bidon de pré-production de Watchmen dans le trailer d'un film qui s'annonce super pourri !


(déjà le trailer est super moche et j'aime pas les comics où Miller est en roue libre, j'avoue ^^)

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Posté le: 2007-03-10 15:51
Citation :

Le 2007-03-10 15:03, *** a écrit:
(déjà le trailer est super moche et j'aime pas les comics où Miller est en roue libre, j'avoue ^^)


Hérétique, ne l'écoutez pas Je ne sais pas ce que vaut le film, qui ne m'attire pas plus que ça, mais la bd 300 est juste grandiose, la meilleure de son auteur avec Batman Dark Kniught et Ronin : puissante, sans concession, graphiquement irréprochable, d'une violence assumée et signifiante, ...
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