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Eco
Année : 1988
Système : Amiga, Atari ST
Développeur : Denton Design
Éditeur : Ocean
Genre : Simulation / Action
Par JPB (13 août 2004)

Dans l'univers des jeux vidéo, vous aviez sûrement déjà incarné un vaisseau spatial, un petit bonhomme, un glouton ou une autre créature plus ou moins charismatique... mais encore jamais une araignée ou une mouche. Eco va vous permettre de combler cette lacune.
Sorti en 1988, Eco est le premier "simulateur d'écosystème" paru sur ordinateur...

Note : merci de ne pas confondre ce jeu avec Ecco le Dauphin sorti plus tard sur Megadrive, ni avec Ico découvert, lui, sur PS2.

La boîte du jeu.

Quand le jeu débute, après l'écran d'introduction très joli qui reprend une citation de Charles Darwin, vous arrivez sur l'écran de présentation accompagné d'une superbe mélodie. Vous avez ainsi accès à :
- l'aide (les touches pour déplacer la caméra) ;
- le lancement du jeu ;
- le choix entre musique et bruitages (impossible d'activer les deux ensemble).

L'intro, une citation de Darwin.
L'écran de présentation.

Il est temps de commencer. Cliquez donc sur la mappemonde pour démarrer le jeu.
Aussitôt, le programme génère un environnement parmi 4 : polaire, désertique, tempéré ou tropical. En même temps, il génère une forme de vie sous laquelle vous allez pouvoir démarrer. En fait, la création de l'animal est aléatoire, mais ne peut être qu'une forme de vie de base : araignée ou mouche.
Le climat a une importance sur la quantité de nourriture et de prédateurs que vous allez rencontrer. À noter qu'il y a un cycle jour/nuit pendant le jeu, et que la nuit vous voyez moins bien ce qui vous entoure.

Les environnements proposés.

Première étape : se nourrir.

Au commencement... vous avez la dalle.
Si, si, ne me racontez pas d'histoires : vous crevez de faim. Et ça fait longtemps que ça dure d'ailleurs : vous n'allez pas tarder à mourir de faim. À moins que vous ne puissiez trouver quelque chose à manger.

Mais avant tout, il faut regarder autour de vous pour savoir s'il y a des prédateurs. Parce que manger, c'est bien, mais être mangé, ça craint. Le radar va vous aider : les points bleus représentent les plantes, les jaunes sont des formes de vie identiques à vous, et les oranges sont des animaux qui vous considèreraient bien comme casse-croûte.
Pour vous déplacer dans le monde qui vous entoure, vous pouvez soit cliquer sur une des icônes de direction, soit utiliser le joystick dans la direction que vous souhaitez. Aussitôt, l'araignée déambule sur ses 6 pattes (oui, dans ce jeu, elle a bien 6 pattes, voyez vous-mêmes ci-dessous...)

Le début de la vie d'une araignée. Le soleil se lève sur un climat polaire.

Visiblement, vous allez avoir du mal à évoluer ici : il n'y a pas grand chose à becqueter. Mais bon : il y a un brin d'herbe juste devant. Vous allez devoir le manger avant 1/ qu'il ne soit fané et 2/ qu'un congénère ne vous le pique.

Dans la théorie, pour trouver de la nourriture, deux manières : soit y aller directement quand vous la voyez à l'écran, soit demander à l'ordinateur de vous y conduire automatiquement en cliquant sur l'icône couteau/fourchette (ou joystick vers la gauche en appuyant sur le bouton de tir). Dans ce cas, vous serez dirigé vers la nourriture la plus proche, mais attention : d'abord s'il n'y a rien à manger dans le coin, vous allez partir un peu dans tous les sens ; et ensuite s'il y a trop de sources de nourriture, il arrive que l'ordinateur ne puisse pas se décider et alterne entre elles. Si pendant ce temps-là, un prédateur s'avise de votre présence, vous risquez fort de finir dans son estomac...

Dans la pratique, il est difficile de trouver de la nourriture car tous les facteurs sont réunis pour vous empêcher d'avancer : déjà il y en a souvent peu, et vos congénères ont la fâcheuse manie de la manger avant vous. Pendant ce temps, la tête de mort descend tout doucement, se rapprochant de votre fin...
Mais ne perdez pas courage. S'il est parfois difficile de démarrer, ça vaut la peine de s'accrocher.
Et dès que vous touchez de la nourriture, vous l'absorbez automatiquement, ce qui prend un temps plus ou moins long. Attention à ne pas vous faire manger à ce moment-là, car vous êtes immobile !

Juste avant de se nourrir.
En pleine croissance !

Deuxième étape : se reproduire.

Maintenant que vous avez bien mangé, que vous êtes repu, il va falloir penser à trouver une compagne. Histoire de vous reproduire pour perpétuer l'espèce... et même en profiter pour l'améliorer un peu.

Une copine devant. Notez l'icône de reproduction et la tête de mort qui s'est élevée.

Comment faire pour trouver une compagne ? Exactement de la même manière que pour trouver de la nourriture. Une nouvelle icône (les symboles homme/femme) est disponible sur votre écran : vous allez pouvoir l'utiliser pour demander à l'ordinateur de vous guider au plus vite vers votre dulcinée. Attention, comme pour la recherche automatique de la nourriture, les mêmes remarques sont valables pour la recherche automatique de votre compagne : l'ordinateur risque de patiner un peu s'il n'y a aucune demoiselle ou s'il y en a trop. Aussi préfèrerez-vous peut-être en rechercher une grâce au radar et vous diriger manuellement vers elle.

Trouver une compagne est assez facile dans le sens où il ne semble pas y avoir d'autres individus mâles dans ce jeu (ou si vous préférez penser que vous êtes une femelle, alors vous êtes la seule). Bref, pas de risques de heu, comment dire ? d'erreur !
Évidemment, pendant cette phase de recherche de l'accouplement, vous êtes limité par le temps (même si vous en avez obtenu beaucoup en mangeant) et par le danger que représentent vos prédateurs. Il est parfois difficile de trouver une compagne : soit elles ne sont pas là, soit elles se sont fait manger !

Mais, comme pour la nourriture, le succès est au bout de la route. Le simple fait de toucher une compagne vous fait vous reproduire, et là on accède à l'autre aspect du jeu : le tableau d'évolution.

Troisième étape : évoluer.

Vous êtes comme un généticien : vous allez pouvoir agir sur les gènes de votre créature.
Vous avez accès à 8 gènes. Chaque fois que vous arrivez à vous reproduire, vous pouvez en débloquer un. Ce gène peut être repositionné selon 8 crans. Quand vous aurez réussi à vous reproduire 8 fois, et que vous pourrez manipuler les 8 gènes, vous aurez ainsi la bagatelle de 16 777 216 combinaisons !

Le tableau d'évolution. Les gènes à gauche, le résultat à droite.

Les gènes (de haut en bas) agissent sur :
- la disposition des pattes et la forme des ailes ;
- la taille des pattes ;
- la taille de la bouche ;
- le rapport entre la taille des pattes et celle des ailes ;
- la taille des ailes ;
- un changement dans l'évolution vers le haut (araignée -> quadrupède) ;
- la taille de la queue ;
- un changement dans l'évolution vers le bas (araignée -> plante).

Avant, l'arachnide.
Après, le quadrupède !

Une fois que le choix est fait, vous pouvez cliquer sur l'icône en forme de croix pour valider votre décision... et repartir dans la nature.

Quatrième étape : survivre !

Vous redémarrez dans le même environnement qu'au départ, et votre nouvelle forme va vous entraîner vers de nouvelles aventures... en recommençant les mêmes étapes que vous avez vues : manger d'abord, se reproduire ensuite, puis débloquer un nouveau gène pour évoluer...

Un quadrupède à la poursuite d'une mouche au crépuscule.

Évidemment, les choses ne sont pas aussi simples qu'il n'y paraît.

Tout d'abord, évitez de régresser au stade de la plante. Même si c'est très marrant, il vous est impossible de vous reproduire ni même de vous nourrir. Donc vous allez pousser, et vous faner sans rien pouvoir faire.

La mouche, comme l'oiseau, peut voler (deux nouvelles icônes disponibles).

Ensuite, le fait de changer d'espèce modifie complètement votre position dans la chaîne alimentaire. Par exemple, quand vous commencez en tant que mouche ou araignée, vous devez vous nourrir d'herbe, et tous les autres animaux sont des prédateurs. Si vous avez évolué en quadrupède ou en oiseau, vous allez devoir vous nourrir d'araignées ou de mouches... et éviter d'autres espèces comme le scorpion ou l'homme. À vous de choisir ce que vous voulez devenir, sachant qu'il vous faudra au moins 3 manipulations (il me semble) pour devenir un humain.

Pour finir, sachez que l'humain n'est pas à l'abri d'un autre prédateur... Ce n'est pas lui qui est au sommet de la chaîne alimentaire dans ce jeu. Il n'existe aucun animal (sauf erreur de ma part) qui ne soit pas ingérable par d'autres.

La fin. Verdict : tué par un prédateur (ici un oiseau qui s'éloigne).

Réalisation

Elle est globalement de très bonne qualité.

Si on regarde les graphismes, effectivement ça peut paraître un peu moche (surtout de nos jours !) Mais il ne faut pas oublier que ce jeu est sorti avant des titres en 3D pleine tels que Carrier Command, et qu'il exploite très bien la 3D filaire. En décor de fond, et au niveau de la couleur des animaux, les couleurs changent uniquement en fonction de l'environnement, et le résultat est tout de même acceptable.

Mais l'un des points forts de ce jeu est l'animation. Comme il est difficile d'en parler, la capture d'écran ci-dessous vous donnera une idée de l'animation d'un quadrupède. Jusqu'ici, je n'ai pas le souvenir d'avoir vu des programmes plus anciens qui reproduisaient aussi bien les mouvements et déplacements d'animaux (les jeux en 3D filaire se déroulaient principalement dans l'espace, si ma mémoire est bonne, et un exemple qui me vient en tête est Starglider). Voir déambuler un humain ou un quadrupède, en marchant ou en courant, voilà qui était fort impressionnant ! Surtout que les mouvements sont très détaillés et réussis, et qu'il est possible de modifier le point de vue en temps réel.

L'animation d'un quadrupède.

Les musiques sont superbes, tant celle d'introduction que celle en cours de jeu. Les deux sont longues et bien adaptées aux machines. C'est d'ailleurs la seule différence entre la version ST et la version Amiga : la qualité de la musique. Si comme la plupart du temps, le ST en natif a du mal à concurrencer l'Amiga, c'est le contraire qui se passe si on décide de brancher un synthé grâce à la sortie MIDI de l'Atari !
Les bruitages, eux, sont plus moyens.

Le maniement est simple. Les 8 directions du joystick (sans appuyer sur le bouton de tir) servent à se déplacer, et les 4 directions principales (en appuyant sur le bouton de tir) servent à trouver de la nourriture, trouver une compagne, s'envoler ou atterrir. Sachant qu'elles sont doublées par le clic à la souris sur l'icône correspondante, l'ergonomie ne souffre d'aucun reproche. En parallèle, les flèches du clavier servent pour le positionnement de la caméra.

Venons-en maintenant au jeu lui-même. Si le principe est extrêmement simple, comme vous avez pu le voir jusqu'ici, le challenge est ardu. Il est très fréquent de faire trois mètres au début du jeu et de se faire boulotter par un prédateur. Il est fréquent de mourir de faim alors qu'on arrive à quelques mètres d'une source de nourriture. De plus, si un prédateur vous prend en chasse, le semer est quasiment impossible, et les chances à la course d'une araignée contre un oiseau sont ridicules... à moins de pouvoir s'envoler, vos chances d'en sortir sont très minces. Bref, on meurt souvent, très souvent même, ce qui est décourageant. Et bien sûr, comme il n'y a aucun moyen de sauvegarde, il faut recommencer à zéro.

L'évolution ultime ? L'humain, à la foulée athlétique, en quête de nourriture.

Alors, que penser d'Eco ?
Que c'est un jeu qui est sorti à la surprise générale, et qui a innové sur de nombreux points. Sa qualité technique est indéniable, mais sa répétitivité et sa difficulté ont terni son image. Néanmoins, dans le contexte du rétro-gaming, c'est un incontournable.

Eco fut testé :
- dans le Tilt n°53 d'Avril 1988 (Hit, 18/20) ;
- dans le Gen4 n°3 de Mars/Avril 1988 (85%).

Eco reçut le prix suivant :
- le Tilt de Bronze 1988 du Jeu le Plus Original.

JPB
(13 août 2004)
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