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Rocket, Robot on Wheels
Année : 1999
Système : N64
Développeur : Sucker Punch
Éditeur : Ubisoft
Genre : Plate-forme / Aventure
Par Simbabbad (07 mai 2007)
Les talentueux créateurs.
Le premier monde, Clowney Island.

Rocket : Robot on Wheels est un des meilleurs jeux de plateformes de la génération Nintendo 64/PlayStation/Saturn, sorti en 1999 sur Nintendo 64. Premier jeu sur la console de Nintendo du développeur américain Sucker Punch (plus connu pour la série des Sly Cooper sur PS2, et dont les fondateurs sont tous d'anciens programmeurs de chez Microsoft), son destin est largement immérité...

Original, très soigné, à la réalisation exemplaire, appartenant à un genre généralement très apprécié sur les consoles Nintendo et tournant sur une console en manque de jeux, il a pourtant été globalement oublié malgré un bon accueil de la critique de l'époque (IGN, alors une référence, lui avait notamment décerné un 9, ex-aequo avec Rayman 2, et classé parmi les 25 meilleurs titres de la machine – 20 ans plus tard, le jeu était exclu d'une réédition de cette liste, illustrant mon propos).

Le "hub", le monde principal.

Une fausse impression de déjà-vu

La structure de Rocket : Robot on Wheels sera familière à quiconque aura joué à des jeux de plateformes de cette génération : à partir d'un "hub" (monde principal), Rocket, le petit robot monocycle, doit trouver et ramasser 84 tickets dispersés dans ce monde ainsi que dans 6 mondes secondaires (12 tickets par monde). Les mondes secondaires en questions ne sont rendus accessibles qu'au fil des améliorations techniques de Rocket, améliorations que l'on peut acquérir par paliers de jetons dispersés un peu partout (200 par monde). Une fois au moins 65 tickets acquis, on peut aller régler son compte au méchant du jeu, rien n'empêchant par la suite de continuer, et de s'amuser à tout ramasser pour le plaisir.

Tickets, étoiles, pièces de puzzle, jetons, pièces de monnaie, notes de musique ou bananes : que ça soit Rocket : Robot on Wheels, Super Mario 64, Banjo Kazooie ou Donkey Kong 64, la formule est connue. Et ce n'est certainement pas l'histoire, totalement arbitraire (le jeu se passe dans un parc d'attractions futuriste, et l'on doit empêcher une de ses deux mascottes de trucider l'autre pour lui voler la vedette) qui changera grand-chose...

En fait, ce qui rend Rocket : Robot on Wheels unique, c'est surtout son moteur physique tout à fait étonnant, puis sa richesse de situations et sa réalisation exemplaire, et enfin ses parti-pris très "puristes" en matière d'immersion et de présentation.

Rocket portant une caisse.
Trajectoire de lancer.

F=mg et tous ses amis

On estime généralement que la génération Nintendo 64/PlayStation/Saturn a mal vieilli, non sans raison : les graphismes en 3D, la gestion de la caméra, la maniabilité étaient alors en plein bouleversements, et rejouer à ces jeux est donc parfois difficile – ce n'est pas pour rien que "on dirait de la Nintendo 64" est fréquemment utilisé comme une insulte. Et pourtant, quand on joue à Rocket : Robot on Wheels, on est surpris par sa modernité.

Un principe de base du jeu (en dehors des clichés du jeu de plateformes) est en effet que notre petit robot dispose d'un rayon agrippant lui permettant d'attraper, transporter et lancer certains objets, ainsi que de se suspendre à diverses poignées. En allant vers un objet, presser 'B' ('A' permettant de sauter) crée un rayon aux propriétés élastiques qui s'empare de l'objet, ce dernier flottant alors aux côtés de Rocket.

Lors des déplacements, l'objet réagit naturellement en fonction des accélérations, sauts et freinages de Rocket, l'élasticité du rayon étant parfaitement réaliste. Cela fait qu'en transportant des explosifs, par exemple, on doit être très prudent de ne pas faire de mouvement brusque, pour que l'explosif ne heurte pas Rocket, le sol (après un saut), le plafond (lors d'un saut) ou les murs. Ce naturel de situation (faire attention à ses mouvements en portant une bombe) n'a pas été fait dans un autre jeu à ma connaissance, et certainement pas de façon aussi précise, logique et naturelle, et c'est grandement aidé par une maniabilité en toute circonstance irréprochable.

Rocket peut poser un objet agrippé à tout moment avec 'R', faire une charge au sol en le jetant à terre en sautant ('A') puis par pression de 'Z', ou, surtout, le lancer avec 'B'. Presser 'B' une première fois fait apparaître une jolie parabole que le stick analogique de la Nintendo 64 peut régler très précisément, avec indication du point d'impact, puis on peut valider la trajectoire en ré-appuyant sur 'B' – ou annuler le lancer avec 'R'.

C'est très simple et très précis, et le résultat est étonnant : l'objet vole en pivotant de façon réaliste, rebondit, tourne, glisse sur les pentes, dérape, bouscule d'autres objets, etc. et on se dit : "Hein, la Nintendo 64 pouvait faire ça ?!"

En fait, le moteur du jeu englobe tous les éléments de ce dernier sans pour autant en dicter le gameplay, ce qui est encore une fois surprenant. Les déplacements de Rocket lui-même, des adversaires, les objets, les puzzles, les mécanismes, et les véhicules utilisent tous le moteur du jeu, mais celui-ci n'insiste pas lourdement là-dessus. En fait, le même jeu aurait pu en gros être fait sans le moteur, mais comme nous allons le voir en détaillant le gameplay de Rocket : Robot on Wheels, Sucker Punch a fait dans la subtilité ce que d'autres auraient fait à la truelle.

Donnez à manger aux présidents !
Rocket se baigne dans la peinture pour se déguiser.

Comment ça se joue ?

Rocket : Robot on Wheels se caractérise par une ambiance résolument Zen, très bien matérialisée par sa bande son/musique de fond "piano jazzy façon film d'animation avec Charlie Brown". Entre l'ultra-densité parfois brouillonne de Super Mario 64 et le gigantisme démesuré mâtiné de collectionnite de certaines productions Rare, Rocket : Robot on Wheels prend le chemin de la détente, de la clarté, du divertissement, à l'image de son décor factice de parc d'attraction. Rarement un jeu aura été aussi anti-dramatique, au point d'en arriver à une forme d'humilité. Une vraie force tranquille.

Dans les faits, l'action est d'une certaine manière divisée en "stands" : on se promène dans une zone du parc, puis on tombe de façon très manifeste sur une épreuve précise, à laquelle on peut s'essayer ou passer son chemin. Si on la réussit, on gagne un ticket, si on échoue et qu'on se lasse, on passe à un autre "stand", au gré de son humeur. La circulation au sein d'un monde demande certes de l'exploration et de l'analyse pour bien comprendre son architecture, mais elle demeure cependant assez libre et ouverte, aérée et tranquille.

Dans le cas où l'on a déjà gagné une bonne partie des douze tickets d'un monde, et que l'on ne trouve pas comment obtenir les tickets restants, des indices formulés comme de petites énigmes ou jeux de mots très bien faits sont donnés pour chaque ticket dans le menu principal accédé en pressant 'START'. Le jeu permet donc de passer facilement d'une activité à une autre, étant moins dirigiste que Super Mario 64 (il n'y a pas d'ordre obligé ou suggéré dans un même monde en dehors des machines à construire, on verra ça plus loin) et étant plus facile à parcourir et à s'y repérer que dans les jeux avec Banjo, même si les mondes de Rocket : Robot on Wheels sont très grands et segmentés en plusieurs zones. Caractéristique importante qui illustre mon propos : tout élément collecté est sauvegardé, le moindre jeton collecté l'est définitivement et on n'aura pas à le ramasser de nouveau.

En dehors de certains défis typiques que l'on retrouve d'un monde à l'autre, les épreuves sont très variées et sont un des points forts du jeu. Parmi les défis récurrents, on doit :

  • Trouver les 200 jetons du niveau (un grand classique).
  • Passer tous les anneaux d'un parcours dans un temps limité, les anneaux apparaissant au fur et à mesure qu'on les traverse (cette épreuve se fait souvent à l'aide d'un véhicule, ce qui varie beaucoup son gameplay).
  • Construire une machine dispersée en sept morceaux. Celle-ci active en général un mécanisme qui soit donne tout bêtement accès à un ticket, soit change réellement l'architecture du niveau en activant des ascenseurs, robots, plateformes, téléporteurs, etc. et permettant ainsi de "débloquer" certains accès et puzzles.

Les autres tâches sont très variées et surprenantes. Un bon exemple se trouve dans le premier monde, "Clowney Island" : après avoir poursuivi et attrapé avec son rayon quatre boulons récalcitrants, Rocket répare un stand de montagnes russes... en kit ! Un ticket et différents jetons étant situés à diverses hauteurs au-dessus de l'espace de montagnes russes, Rocket doit utiliser l'éditeur pour construire une attraction passant par ces objets à ramasser. Puis, on quitte le "construction kit" et on saute dans le manège, profitant de l'adrénaline joyeuse que permet l'excellent moteur physique du jeu !

Le "construction kit" de montagnes russes.
Ça secoue !
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