Bon, renseignement pris, je peux vous proposer, en version intégrale, l'article sur Edge paru dans le Libé du vendredi 10 janvier. Alors le voilà (tout un suspense pour ça, pfff). Vous pourrez constater qu'il a bien été charcuté (un paragraphe entier a sauté, plus quelques autres trucs, sans compter les modifs zarbs) :

EDGE DE RAISON

Après plus de trente ans de jeu vidéo, aucune critique digne de ce nom n'a encore éclot. Il faut s'aventurer sur le Net pour trouver des textes profonds sur le sujet (1). Pour ce qui est de la presse écrite, c'est le néant quasi-total. L'existence du magazine anglais Edge n'en est que plus précieuse.

A l'amateurisme, la superficialité, la puérilité et la corruption de l'immense majorité de ses pairs (notamment anglo-saxons), Edge a opposé, dès sa création en 1993 par Steve Jarratt, une extrême prestance esthétique et un grand sérieux rédactionnel. Ce qui frappe d'abord, c'est le look : sobre et sophistiqué à la fois, fondé sur une charte graphique ultra vissée, il est aux antipodes de la surenchère flashy et bordélique des mags de jeux traditionnels.

Mais ce qui fait le prix de Edge est ailleurs. Dans ses chroniques, dont celles, indispensables, de Steven Poole (auteur du livre Trigger Happy, dissection virtuose et cultivée du médium jeu vidéo) et Toshihiro Nagoshi (créateur, chez Sega, de Daytona USA ou Super Monkey Ball). Dans ses makings-of passionnants de jeux majeurs (Tetris, Street Fighter 2, Elite…). Dans ses reportages chez les plus grands studios (même les très secrets génies de Nintendo ont ouvert leurs portes à l'occasion du n°100). Et, surtout, dans ses dossiers de fond denses et documentés, portant sur des sujets aussi variés que l'intelligence artificielle, les recherches académiques ou les raisons pour lesquelles le Japon domine le secteur.

Chaque mois, le magazine pratique un travail inhabituel de sélection, de hiérarchisation et de développement de l'information, qui se traduit par un nombre de news, de previews et de tests plus limité qu’ailleurs. Synthétiques, rigoureux, parfois proches de la grande critique ciné par leurs qualités de style et d'analyse, les meilleurs articles de Edge sont bien loin des textes sans structure et sans regard dont la presse vidéoludique est coutumière.

Rien de surprenant, dès lors, à ce que Edge soit majoritairement lu par les gamers les plus pointus et par les professionnels –ou aspirants- du secteur (à qui sont destinés une rubrique technique sur le développement, des offres d'emploi et un supplément annuel sur les métiers du jeu). Un public plus adulte et plus averti que celui de ses concurrents, donc, et aussi moins volatil : titre étendard pour l'éditeur Future Publishing, le magazine possède une diffusion modeste mais stable, aux alentours de 30.000 exemplaires, soit autant que Joypad, l'un des leaders, en tout cas qualitativement, en France.

Si la reconnaissance du jeu vidéo doit passer par la constitution d'une critique ample et solide, capable d'éclairer les plus fins aspects du médium et de le légitimer aux yeux du grand public, alors Edge est une pierre angulaire de ce processus. On attend encore un équivalent en France : l'édition hexagonale de Edge, Next Games, n'a survécu que sept mois, de mai à décembre 1998.

PIERRE GAULTIER

(1) voir http://www.knowledge.hut.fi/projects/games/gamelinks.html

Edge – Repères

Rédacteur en chef : João Diniz-Sanches
Prix : 4£
Site : www.edge-online.com
Moyenne d'âge des lecteurs : 25 ans
Disponible en librairie internationale.
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Encore toute mes félicitations pour la parution de cet article, même s'il a été modifié. Je ne jetterai pas la pierre au rédac'chef de Libé, puisque toute proportion gardée, je fais aussi des modifs dans presque tous les articles de GP.

Pour ce qui est de Edge, je ne peux trop rien dire vu que je n'ai jamais lu ce magazine (il n'y a pas de boutiques de presse internationale par chez moi), mais j'ai sacrément envie de le découvrir.

En ce qui concerne l'inexistence de ce type de revue chez nous, je ne peux dire qu'une chose : il suffit peut-être, pour comprendre pourquoi on en est là, de constater que les sites web français documentaires de jeux vidéo ne font l'objet d'aucune publicité vers le grand public. Seuls les accros du net les connaissent et les fréquentent. Ouvre un de ces annuaires de sites web comme il en fleurit un par mois sur les étalages de nos libraires, et tu verras que les milliers de sites qui y sont référencés et critiqués ne proposent pour la plupart que des services payants ou à la rigueur un traitement superficiel (mais bien présenté) de tel ou tel sujet à la mode (y a même pas Grospixels ! ).

S'interroger, réfléchir, écrire et lire sur les jeux vidéo, c'est en France l'apanage des sociologues. Quand on en parle, c'est pour se demander s'ils rendent violent, s'ils sont subversifs, s'il faut les censurer... Plus grave : Jouer à un jeu vidéo et s'interroger sur les jeux vidéo en même temps semble être réservé à quelques allumés. Personne ne semble admettre que les jeux vidéo peuvent être intéressants pour ce qu'ils sont, qu'ils représentent une culture. Dans ces conditions, le fossé entre les joueurs et la presse "spécialisée" qu'ils lisent d'un côté, et les journalistes et observateurs qui les considèrent comme des rats de laboratoires de l'autre se creuse régulièrement un peu plus.

Mais qui nous dit qu'en Angleterre Edge n'est pas un cas isolé ?

[EDIT] En plus, le fait qu'il n'y ait rien d'intéressant à lire sur les jeux vidéo dans la presse en français nous permet de faire les marioles avec Grospixels, alors on va pas se plaindre
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Edge est disponible en abonnement sur l'Europe pour environ une centaine d'euros par an. C'est le seul magazine que j'achete et le seul dont je lis tous les articles, dossiers, previews, tests, etc... Avec son approche qualitative et critique (un jeu est juge sur sa qualite mais aussi son originalite et potentiel ludique, d'ou des notes regulierement controversees), c'est le complement ideal du net pour les infos quantitatives.
Et c'est tres bien ecrit, ideal pour parfaire son Anglais (la colonne de RedEye est un petit bijou de sarcasme).

Tout à fait OBBB. Et, en effet Laurent, Edge est une exception en Angleterre, et même dans le monde.
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Un bien bel article, bravo!!

En ce qui concerne Edge, j'avais commandé plusieurs numéros par Internet il y a quelques années. Et je suis d'accord, c'est certainement le meilleur! Dommage que l'importer d'Angleterre revienne aussi cher. A l'époque, ça coûtait près de 50F, avec un supplément de 10F pour frais bancaire, vu que la transaction se faisait en livre sterling. Bref, faut vouloir! Et franchement 100€ d'abonnement, c'est excessif: presque 3 fois plus qu'un magazine français! Par contre, s'il y avait une librairie internationale à Strasbourg qui proposait cette revue, je la prendrais sans aucun doute, mais, voilà, il n'y en a pas (un comble à Strasbourg capitale européenne!).

Next Games, je connais bien, je m'étais abonné dès le premier numéro pour les 6 suivants. Ensuite, il m'ont envoyé une petite lettre, me remerciant pour le soutien apporté à la revue et expliquant qu'ils en suspendaient la parution en raison du faible succès rencontré. Triste...

Quelques mois plus tard, un autre magazine, GameOn a fait son apparition (dans la même société d'édition)! Il s'agissait cette fois de la version française du célèbre (paraît-il) magazine Arcade. Mais il a aussi disparu après quelques mois, et j'ai reçu la même lettre. Finalement c'est peut-être moi qui leur a porté la poisse!

Arcade a été, durant ses huit premiers mois d'existence, le meilleur mag de jeux vidéo de tous les temps, et il l'est encore. Un croisement incroyablement riche, vif, intelligent et drôle du meilleur de Edge et du meilleur de Joypad. J'en parle dans mon papier sur la presse jeu vidéo paru sur Polygonweb (http://polygonweb.free.fr).
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