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Rappel des 10 derniers messages du topic (les plus récents en haut)
RainMakeR
Chef de Rubrique Nécrologique
ca prend une tournure assez violente outre atlantique
http://www.20minutes.fr/article/1125987/ynews1125987?xtor=RSS-176

MTF
Modérateur groovy
Je comprends mieux ton point de vue de fait, et je me rends compte que nous nous rencontrons sur pas mal de points dans l'analyse, notamment quand tu dis "Si au contraire on dit: "cette pente n'est pas créatrice, ça tourne en rond, et ça nous salit tous hommes comme femmes et en tant que joueurs", là on aura un public bien plus attentif. " Je n'aurai pas su dire ça mieux finalement : le problème du sexisme n'est toujours qu'un pan d'une exploitation plus vaste - que ma logique marxiste rattache au problème du capitalisme dans son ensemble, mais je ne veux pas faire trop de politique ici - de l'Homme par l'Homme (alors que le communisme, c'est le contraire comme dirait Coluche).

Là où on sera inconciliables cependant, c'est sur l'aspect narratif du jeu vidéo - mais je pense qu'on en avait déjà discuté par MP si ma mémoire est bonne - et sur la prise de conscience du phénomène global. Car autant je comprends les choses quand tu dis que dénoncer une situation uniquement sous l'angle d'une domination "patriarcale" de l'Homme sur la femme renforce la prise de position des joueurs, autant, malheureusement, c'est là une problématique qui touche la problématique féministe dans son ensemble : l'une des choses les plus régulièrement soulevées par celles et ceux qui tentent de décrire ce genre d'événements - que ce soit concernant le jeu vidéo ou non -, c'est la négation de l'existence de ces phénomènes ce qui a eu pour conséquence, notamment, la création de mouvements encore plus virulents et encore plus "totaux" (certains groupes de féministes refusant même qu'un homme participe à leur mouvement, etc.).

De fait, je suis partagé. Si d'un côté j'ai tendance à considérer les choses comme toi à certains endroits (on ne répare pas un mal par un autre mal, ce genre de choses), de l'autre, la réaction "d'indignation" qui a été témoignée vis-à-vis de ces collections de faits me semble également étrange et remporterait paradoxalement mon adhésion, comme une réaction au second degré. Il me faut encore cependant faire le point là-dessus.

Simbabbad
Pixel planétaire
Mais il ne s'agit pas de "tout ramener" à ça, simplement si tu fais comme si ça n'existait pas tu loupes l'éléphant dans le living-room, comme disent les Anglais, et tu fais un faux diagnostic, comme les articles que j'ai dénoncés qui sont complètement à côté de la plaque AMA.

Cette logique de ficelle commerciale qui consiste à jouer avec les instincts primordiaux ne couvre pas tous les cas, je n'ai jamais dit ça et j'ai même dit le contraire, mais une partie des problèmes liés à la représentation des sexes résulte de cette logique, qui est la même que la logique de la surenchère de la violence pour donner des émotions par le biais du choc/du cul/du gore etc. (et le tout avec des doses croissantes parce qu'on s'accoutume, et la ficelle a besoin de plus gros sabots pour fonctionner). Si on n'identifie pas correctement les logiques distinctes qu'on aborde, ça ne sert à rien d'en parler et c'est même manipulatoire, et on ignore alors un problème majeur qui touche tous les médias et le cinéma et la TV en particulier.

Les articles que j'ai critiqués, en ignorant de voir cette réalité, font en fait le jeu des industriels qui en usent. Ces derniers essaient de créer un vecteur médiatique jouant sur les frustrations masculines pour créer une "zone" 100% désinhibée pour qu'ils puissent se défouler sans honte ou culpabilité, si on critique ça en disant: "les mecs sont des salauds oppresseurs, nous les geeks on devrait tous avoir honte", tout ce qu'on fait c'est frustrer encore davantage cette population en l'accusant à tort, et donc on légitime encore plus le marché de niche qui leur permet de faire son retour du refoulé. Si au contraire on dit: "cette pente n'est pas créatrice, ça tourne en rond, et ça nous salit tous hommes comme femmes et en tant que joueurs", là on aura un public bien plus attentif.

Je n'ai pas l'impression non plus que le jeu vidéo souffre plus que ça sur le plan de son image de cette problématique, j'ai surtout l'impression que le jeu souffre de la non reconnaissance du gameplay comme vecteur artistique ("c'est une perte de temps") et de l'image violente que des gens ont du jeu vidéo, et pas vraiment du sexisme.

A la limite les opérations marketing des grosses boîtes, qui cherchent donc à créer une clientèle captive façon "dortoir de mecs à la FAC" fait du mal car elle est visible des non joueurs, mais les jeux en soi ne sont pas tant touchés que ça puisque justement cette tendance vient du cinéma et de la TV où elle est bien plus manifeste avec tout un créneau dédié.

Le jeu, malgré les rêves de certains développeurs/producteurs et d'une partie de la presse, n'est pas un média narratif par défaut, et c'est ça qui le protège par rapport à la TV et au ciné.

(j'ai édité pour expliquer pourquoi il est lourdement fautif de NE PAS parler de cette dimension commerciale AMA)

MTF
Modérateur groovy
Je pense que j'ai le même problème avec cet argument qu'avec celui, évoqué précédemment et contre lequel j'avais aussi émis des réserves, du biologique. En réalité, même si ces arguments partent d'une vérité établie, j'ai peur que leur mention empêche de poursuivre car tout pourrait se ramener à eux. Et ce n'est pas parce que la situation est sombre - ce que je ne pense pas, du moins je m'en excuse si j'ai donné cette impression - ou qu'elle ne serait pas nuancée, mais je présume que cela reviendrait à ramener le média à un pur produit de consommation - ce qu'il est certainement - sans aller au-delà de ceci.

Je suis le premier à pleurer quand il y a des violons et que le héros meurt ("dans les bras d'une infirmière, qu'est très belle et qui pleure" [air connu]) dans un film quelconque, mais je suis le premier également à considérer cela comme incroyablement facile comme tu le dis également. On est alors d'accord sur l'existence du phénomène et sur son efficacité.

Mais d'un point de vue heuristique, je continue de trouver ça "facile". Ce serait un peu comme tout ramener à cette logique commerciale que j'exècre personnellement, de Guillaume Musso à Michael Bay ; mais contrairement au cinéma ou à la Littérature, il y a des barrières critiques et une réflexivité qui permet de trier le bon grain de l'ivraie, pour ainsi dire, ce qui n'est pas systématiquement le cas pour le jeu vidéo : il manque une "soupape", et c'est aussi ce que cette discussion, et les problèmes entraînées, dénonce.

Bien entendu, l'on peut dire "les femmes/les hommes/les événements" sont présentés ainsi pour des raisons purement marketing, parce que la pulsion, parce que ça marche etc. - c'est d'ailleurs un argument souvent rencontré dans les billets "réponses" à l'article initiale de Mar_Lard. C'est peut-être ici que la faiblesse argumentaire est la plus sensible, car elle semble éclipser cette donnée.
Mais dans le même temps, cela donne une impression dérangeante qui phagocyte l'ensemble du média et qui est, quelque part, l'un des éléments qui contribue à lui donner mauvaise presse parmi le public en globalité et ce malgré de nombreuses tentatives, de plus en plus régulières, d'aller à l'encontre de ceci et de faire évoluer les choses, y compris au niveau de l'image "populaire" du média.

Quelque chose, ainsi, est asymétrique et me trouble. Prenons le cinéma par exemple : l'on sait que la grande majorité des productions cinématographiques (je ne me souviens plus du chiffre exact, mais c'est vraiment énorme) est d'ordre pornographique. Pourtant, même si cette "industrie" est reconnue, récompensée, si l'on en parle et si elle soulève aussi d'importantes questions éthiques (d'autant plus aujourd'hui avec l'Internet), elle n'est pas sur le devant de la scène quand on parle du cinéma dans son ensemble, où l'on va le considérer comme un média noble et intelligent etc.
En fait, je rapprocherai davantage ces ressorts de ceux observés aujourd'hui avec la télévision, qui aurait pu devenir - et à qui pu être - un média de la même noblesse mais qui a été parfaitement avalé par la télé-réalité, le voyeurisme, l'exercice de ces pulsions au point de n'être réduit quasiment à cela aujourd'hui, le moindre des débats ou la moindre des discussions qui se veulent "sérieuses" étant parasités par des choses bien moins honorables.

Du coup, c'est plus un pessimisme que j'exprime ici en étant à l'encontre de cet argument je présume. Le fait de poser, cependant, ces questions à la lumière du sexisme et de la représentation des genres dans sa globalité, c'est aussi avertir que le jeu vidéo peut tomber dans le travers que tu illustres avec la nouvelle d'Asimov - que je ne connais pas, mais j'ai peu lu de cet auteur à ma décharge - si les choses continuent dans le pire des scénarios.
Éviter cet argument, c'est aussi pour moi une façon de repenser les choses en me déchargeant de cette contrainte commerciale, et d'envisager non pas ce que le jeu vidéo est, mais ce qu'il pourrait être et d'envisager les virtualités de son évolution. Et dénoncer, de là, ce qui peut appartenir (réellement et légitimement selon certaines précautions) à une forme de sexisme/de violence/de facilité pulsionnelle, c'est également faire du jeu vidéo quelque chose de plus réflexif, ajoutant à la portion ludique et au système d'action/récompense une beauté rare qui pourrait concilier tout le monde.

Simbabbad
Pixel planétaire
Citation :
Le 2013-03-23 23:44, MTF a écrit :
Ben oui, et je suis parfaitement d'accord avec tout ça. Mais je ne suis pas contre le mécanisme, et je ne renie pas ce que tu appelles la "base animale de l'Homme", je dis juste que faire ça, c'est moche.

Ah on est complètement d'accord, je me suis assez exprimé sur ce que je pense de Kratos (alors que le jeu dans lequel il se trouve est bon, c'est dommage) ou d'autres titres. Je pense aussi que cette attitude, portée consciemment par une partie de l'industrie, est en partie responsable de la désinhibition de certains comportements lors des salons de jeu vidéo par exemple.

Mais je conteste la vision majoritaire que toi ou Kimuji (qui parlait de 90%) donnez. Par exemple, j'ai fait récemment "Space Marine", qui est quand même l'archétype du jeu bourrin avec du gore, des décors apocalyptiques, un côté virilo-facho etc., et quand j'ai découvert que le commandant allié qui dirige toutes les forces militaires sur la planète que l'on défend était une femme à poigne qui mène tout le monde à la baguette et qui n'est pas tellement sexualisée, je n'ai pas été surpris, dès la première scène je savais à quoi j'aurais droit.
De même, je joue à "Mark of the Ninja" sur XBLA et le guide autoritaire qui instruit notre personnage muet en le prenant un peu de haut est une femme, et là non plus ça ne m'a pas étonné.

Il y a un pan énorme du jeu qui ne joue pas vraiment sur la représentation des sexes parce que c'est hors propos ("Geometry Wars"), un autre pan sur lequel les personnages sont juste des pions car le jeu n'est pas un média narratif par défaut et la représentation des sexes n'y compte pas vraiment ("Mutant Mudds", "Beat the Beat"), une autre grosse tranche qui utilise des personnages plus présents et une situation moins abstraite mais sans qu'on puisse vraiment détecter grand-chose de condamnable ("Sin & Punishment 2", "Super Meat Boy", "Space Marine" donc, "Aliens Colonial Marines" de ce que j'ai pu en voir où des soldats sont des femmes, "Dead Space Extraction" et "Dead Space"), des jeux narratifs avec des personnages bien plus développés où là non plus il n'y a rien de vraiment choquant là-dessus alors que des tonnes de sujets ou scènes y sont archi casse-gueule ("No More Heroes", "Deadly Premonition", les "Silent Hill")...

Est-ce que la situation est si pourrie? Le jeu vidéo a des bases que je trouve assez solides par rapport à ces questions, c'est la dérive qui cherche à copier le cinéma à grand spectacle de cette dernière génération qui copie certaines recettes qui pose problème (bon, et certains jeu de combat ou ciblés).

Il y a aussi, comme dans les autres formes d'art, déjà des jeux qui parlent à la fois aux instincts et au cerveau, des fois dans des directions sublimement contradictoires (les trois derniers exemples cités plus haut en sont de bons représentants), cela me paraît absolument remarquable alors que le jeu vidéo, par nature, ne se prête à priori pas du tout à ce type de résultat. La situation me paraît assez riche et nuancée, je ne vois pas pourquoi le constat des ficelles d'une certaine tendance récente (et partielle) gèlerait le débat.

MTF
Modérateur groovy
Ben oui, et je suis parfaitement d'accord avec tout ça. Mais je ne suis pas contre le mécanisme, et je ne renie pas ce que tu appelles la "base animale de l'Homme", je dis juste que faire ça, c'est moche. Je ne vois pas pourquoi le jeu vidéo devrait en appeler pour la grande majorité à ces mécanismes primaires sans qu'on y rechigne, même du côté des journalistes (cf. l'affaire Tomb Raider/Joystick), alors qu'un film de Michael Bay, quand bien même serait-il un succès populaire, est allumé par les critiques.

Le jeu vidéo est un média qui pourrait permettre de transformer les pulsions en désirs de façon très interactive, mais j'ai davantage l'impression d'une industrie qui affame pour mieux nous proposer un steak après. Du coup, je suis sceptique quant à l'utilisation de cet argument même s'il est fondé sur quelque chose de vrai, car ça bloque la réflexion et pousse à l'immobilisme. Si l'on avait raisonné ainsi quand le cinéma avait été inventé, on en serait encore à trembler de peur quand une locomotive fonce sur nous.

Je désire juste que l'on dépasse l'argument capitaliste du temps de cerveau disponible, de peur que cette discussion perde quelque peu de sa force.

Simbabbad
Pixel planétaire
Citation :
Le 2013-03-23 21:30, MTF a écrit :
Je reviendrai cependant sur l'argument de "les sociétés font cela pour faire du profit, et ils utilisent les recettes qui fonctionnent". C'est un argument valable, vérifiable et sans aucun doute pertinent, mais je le trouve captieux pour plusieurs raisons.

- La première, et je rejoins Sim sur cette question, c'est que les sociétés faisant cela exploitent des parts pulsionnelles de notre individu profondément primitives et activent un interrupteur nous rabaissant même dans notre condition d'êtres humains civilisés. Mais, de là, dire ceci revient à accepter de n'être pris que comme des Hommes préhistoriques, ce qui est bien dégradant. Je rappelle alors, comme cela a été fait, que rabaisser la femme dans les jeux vidéo, c'est aussi rabaisser l'homme par miroir ; de là, la réaction naturelle devrait d'aller à l'encontre ce phénomène.
- La seconde, c'est que je tends à considérer cet argument comme un "anti-argument" prompt à fermer toute discussion : c'est presque une "astuce d'autorité" cyclique, revenant à dire "ils font ça parce que ça marche, et ça marche parce qu'ils le font".
- Enfin, en acceptant cette idée, on empêche toute remise en question profonde comme superficielle de ces phénomènes divers, et l'on accepte une forme d'immobilisme étrange.

C'est captieux rien du tout !

J'ai déjà développé, ce que je dis est plus fin que ça quand même, et je n'ai jamais prétendu "boucler" quoi que ce soit. Dans tout individu, tu as des couches, des couches primordiales, instinctives, et des couches civilisées. Et la fiction filmée (et certains jeux) appuie de plus en plus sur des réactions instinctives, que l'on ne peux pas contrôler. Exemples:

- "The Descent 2" est une bouse, j'ai grogné et roulé des yeux pendant tout le film, mais quand un cadre montre un personnage au premier plan filmé de près qui prend 33% de l'écran à gauche, alors que tu as du noir absolu sur 66% de l'écran à droite, tu agrippes fermement les accoudoirs avec tes doigts parce que tu t'attends à ce qu'un monstre souterrain surgisse du noir tout d'un coup. Et le film le sait parfaitement, et ne fera surgir rien du tout, mais profitera du plan d'après où instinctivement tu vas te détendre parce que tu auras "passé" l'épreuve du gros plan pour te prendre à revers alors que tu ne t'y attends plus. D'où surprise, poussée de trouille, envoi d'adrénaline automatique, et donc plaisir et euphorie, façon montagnes russes.
C'est mécanique, assez rapidement on peut le voir venir à trois kilomètres, mais qu'on l'ait décodé ou pas intellectuellement et qu'on soit consterné par le film ou non, ça marche, c'est comme ça.

- Dans "WALL-E", quand on essaie de nous faire croire que WALL-E a perdu son âme à la fin, je me suis dit en grinçant des dents et en levant les yeux aux ciel, déçu: "ah ça y est, c'est le moment du chantage émotionnel à la 'E.T.'", et bien que je savais très bien que c'était bidon, que c'était juste là pour arriver en contrepoint, eh bien j'ai dû me retenir de ne pas pleurer, et au moment du soulagement nous montrant que non, il n'avait pas perdu son âme finalement, j'ai ressenti beaucoup de joie, alors que consciemment je n'ai jamais été dupe et que je connaissais le procédé par cœur et que je trouvais ça minable.
Parce que le contexte, parce que la musique, parce qu'on a joué sur ton excitation/adrénaline dans la séquence juste avant, etc.

Il y a des mécanismes chimiques, neurologiques, involontaires, quasi universels, qui court-circuitent la conscience et deviennent autant de procédés faciles "qui marchent" indépendamment de la qualité du reste. Énormément d'expériences les ont révélés et l'industrie du divertissement les connaît sur les bouts des doigts, c'est comme les vidéos ou les attrapes-nigauds où tu sais qu'un visage qui fait peur va surgir, même si tu le sais et que tu l'as déjà vécu, ça marche, c'est un truc de survie qui est codé en nous et c'est très dur à contrôler, c'est de la neuroscience.

De plus en plus, l'industrie du divertissement utilise ces trucs, où l'intrigue est juste un prétexte pour faire tenir des bouts de séquences qui servent de distributeur d'hormones chimiques où on souffle le chaud et le froid de façon savante, où un passage triste le sera d'autant plus qu'il suit un passage euphorique, etc.
Bref: ce qu'est devenu "Docteur Who" ou "Sherlock" depuis que Steven Moffat a mis ses griffes dessus: tu réfléchis dix secondes et tout s'effondre, mais tu n'es pas censé faire ça et c'est pas le but, alors...

Je ne sais pas si tu connais cette histoire d'Isaac Asimov (je ne connais pas le titre, je l'ai lue il y a plus de quinze ans) où un gars invente une machine à écrire des livres: ça ressemble à un piano avec des touches et des pédales, et on "joue" juste les sensations qu'on veut causer chez le lecteur: joie, tristesse, choc, euphorie, excitation, etc. et la machine matérialise tout ça sur fond d'intrigue bidon.
... ça devient un succès incroyable, et ça finit par tuer toute l'industrie classique, au point que plus personne n'écrit de livre à la main pendant des années, on change simplement les partitions, les doses et les réglages des machines pour les rendre plus performantes, parce qu'à force on s'accoutume alors il faut augmenter et affiner l'impact.
Et puis un jour, quelqu'un écrit un livre à la main, et ça cause un tel choc sur un public sur-habitué aux ficelles des machines que ça remet en cause toute l'industrie.

Là c'est pareil. On fait de la fiction (et, hélas, de l'information) qui parle de moins en moins à la raison et de plus en plus aux émotions parce que c'est plus facile à produire, il n'y a qu'à comparer "La Machine à Explorer le Temps", le livre, le film de 1960 qui l'adapte très bien, et la chose innommable qui porte ce nom qui est sorti en 2002 et est une suite de recettes modernes mises bout à bout qui vident totalement l'histoire de son sens et de ses personnages.

La publicité qui te montre le mec un peu âgé avec des fringues ringardes et qui n'est pas un top model, ridiculisé par le mannequin à la mode avec la belle nana qui lui choisit le bon produit, ne parle ni à la culture ni même à la conscience. Ton soucis c'est que tu nies les bases animales de l'humain.

MTF
Modérateur groovy
Maintenant que j'ai pris le temps de lire les autres posts ainsi que d'autres (comme celui-ci), d'autres vidéos (comme celle-ci), des flopées de commentaires, je puis préciser mon point de vue sur ces questions et en prenant en compte, je l'espère, l'intégralité des réactions, arguments, contre-arguments, problèmes de méthode etc. qui ont été soulevés depuis le début. Le post sera sans aucun doute long, mais le sujet brasse tellement d'éléments divers et pourtant interconnectés qu'il faut passer par là. Je vais le structurer malgré tout en entrées thématiques en essayant de centrer mon propos et ne pas trop me disperser.

Concernant la "communauté geek"

L'un des points qui revient régulièrement lorsqu'on évoque le fameux article de Mar_Lard (rappel), c'est l'association et l'appel à une "communauté geek" dont la définition même n'est pas sans poser de nombreux problèmes.

Je ne ferai pas ici l'historicité du "geek" ou du "nerd" pour deux raisons : la première, c'est que celle-ci est connue voire a été abondamment rappelée lors des différents débats y compris ici même, la seconde, c'est que je considère, finalement, que cela a peu d'importance dans le débat présent. Cela a peu d'importance tout simplement car les mots, comme tout, ont leur propre vie, ils changent, évoluent et finissent pas se transformer du tout au tout : et si j'aime, et si je trouve que c'est un bon réflexe, revenir à l'étymologie pour comprendre certaines choses, cette question de la "communauté geek" est un fait d'actualité synchronique (ce qui ne sera pas le cas de tous les points que j'aborderai) et non d'histoire ou de diachronie. La question n'est pas de savoir si ce qu'on appelle les "geeks" a évolué au cours du temps ou non, mais s'il existe, aujourd'hui, une "communauté geek" globalisante et centralisée, quelles sont ses caractéristiques le cas échéant, comment peut-on la considérer ?

Les problèmes de la "communauté", terme qui est d'une incroyable popularité depuis quelques années à présent (communauté religieuse/citadine/fans de x, etc.), sont multiples. C'est un terme globalisant et qui doit être pris ici dans son sens premier de "caractère de ce qui est commun à plusieurs personnes" et non dans son sens politique de "caractère de plusieurs personnes se regroupant derrière une organisation régulée" (il est alors synonyme de "collectivité"). La création du terme "communauté x" peut être de l'initiative des membres mêmes de celle-ci, ou bien de l'initiative des personnes extérieures à ce groupe : dans le premier cas, si je me pique à faire un peu de sociologie de base, cela a une vocation de discrimination - il s'agit de définir avant tout celui qui n'appartient pas à la communauté -, dans le second cas, cela une vocation d'assimilation - il s'agit de prendre un paramètre très large pour englober le plus grand nombre possible.
Autrement dit, le premier cas cherche à créer une différence, le second de la ressemblance ; je pense alors que vous voyez où je veux en venir.

Il y aurait alors selon moi une incompréhension fondamentale entre ceux qui forment une communauté autour du jeu vidéo ou du comics et qui vont se définir selon certains critères spécifiques (la communauté du JdR, celle du rétrogaming, celle de Nintendo, celle de etc. avec autant de séparations que possible) et la représentation qu'en ont, ainsi, les acteurs capitalistes du média qui veulent englober cela de la façon la plus large possible en la baptisant "communauté geek". L'une des traces de ceci, selon moi, c'est l'engouement depuis quelques années autour du "rétrogaming", des remakes (comme l'annonce récente de Duck Tales), des appels du pied de certains jeux (I Wanna be the Guy, Super Meat Boy...) etc. Même si ces jeux coûtent bien moins chers à produire qu'une production "Triple A", les développeurs les font car ils savent qu'ils vont toucher un public qui a certes toujours existé, mais qui est devenu brutalement bien plus visible depuis l'Internet. Les initiatives se multiplient alors et sont alors "englobées" dans la "communauté geek" fabriquée de toutes pièces, et les jeux deviennent alors transversaux et touchent des personnes qui, initialement, auraient pu ne pas être intéressés par ce produit-typé. C'est d'ailleurs là tout le génie du marketing, parvenir à faire d'un produit de niche une nécessité absolue pour et à chacun, l'Iphone et les produits Apple en règle générale sont les exemples les plus frappants de la chose.

Aussi, il y a bien, selon moi, une "communauté geek". Mais elle concerne, en réalité, l'intégralité de la population ayant un accès à ce qu'on appelle la "pop culture", des personnes de 8 à 55 ans, hommes et femmes, blancs comme noirs, qu'ils jouent au jeu vidéo sur PC, sur consoles, sur Facebook, qu'ils soient des férus de leurs téléphones portables, qu'ils jouent à Call of Duty, etc. etc. Pour les sociétés, tout ça, ce sont des "geeks", de la même façon que MacDonalds considère que si vous êtes allés dans un de leur restaurant il y a moins de deux mois, vous êtes un "consommateur régulier".

Revenant alors à l'article initial de Mar_Lard, sa compilation de faits - plus qu'une comparaison - me semble particulièrement révélateur de cet état de fait. Qu'on le veuille ou non et malheureusement ou heureusement peut-être, nous sommes tous ici, et ce même si vous ne faites que lire ce forum, que vous utilisez un ordinateur ou un smartphone, des geeks. L'on peut toujours arguer bien entendu que le terme est ridicule et qu'il ne veut plus rien dire, mais ce serait précisément cela l'objectif : faire une étiquette où le plus grand nombre se rencontrerait, toucher un maximum de monde pour vendre au plus grand nombre. Aussi et c'est là le malheur de son article, et je rejoins ce qui a été dit ici régulièrement, ce n'est pas seulement "les geeks" qui seraient sexistes. C'est la société entière qui libère une parole étrange et qui, ici, s'exprime par l'intermédiaire d'un média en particulier.

Je pense qu'il faut prendre l'article de Mar_Lard non pas comme un "portrait-charge contre la communauté geek" (ce qu'il est cependant, mais je viendrai à cela par la suite), mais aussi comme la possibilité, si voulue - et les commentaires vont souvent vers cela - d'aller à l'encontre de cet argument marketing pour se "réapproprier" le média ou, du moins, de ne plus être attiré par les sirènes des sociétés. La "communauté" est malade certes, mais le sexisme n'est encore qu'un symptôme d'une maladie autrement plus grave.
Aussi, je pense qu'attaquer cette réflexion sous l'angle du "il y a eu assimilation hâtive de profils fondamentalement différents sous l'appellation "communauté geek"" est inopérante et balaie surtout les questions intéressantes qui sont soulevées, renvoyant à un problème de forme et non de fond, ce qui empêche alors de parler de ce fond qui peut se diviser en deux moments, que je développe ci-après.

La représentation des genres dans le jeu vidéo

On a surtout parlé de ceci dans le topic, aussi je ne répéterai que très succinctement ma position que Sim a bien résumé plus haut. Si je dois faire cependant un "résumé du résumé", je mettrai en avant trois phénomènes qui s'interpénètrent fortement :

- La représentation symbolique ;
- La représentation culturelle ;
- La représentation sexuée.

Par "représentation symbolique", j'en appelle à ce que je disais plus haut sur le mythe de la "demoiselle en détresse", c'est-à-dire que les rôles sexués ne sont pas à considérer en fonction de leur genre mais des qualités qu'on leur prête à un moment donné de l'histoire humaine. C'est une représentation temporelle, diachronique que l'on ne saurait interpréter autrement qu'en prenant en compte l'organisation de la société d'alors et ce indépendamment des raisons culturelles ou extérieures, et surtout pas en prenant en compte nos grilles de lecture contemporaines.
Cela englobe notamment, dans un exemple comme Double Dragon, que ce soit la petite amie qui soit enlevée car :

- l'histoire est relatée en moins de dix secondes du fait de certaines contraintes techniques ;
- secourir les faibles (quel que soit leur sexe, Mario sauve également les Toads dans Super Mario Bros.) fait partie de l'éthique classique de nos sociétés occidentales ;
- on sauve l'être aimé.

Parler de sexisme à ce niveau-ci me semble alors déplacé pour ces raisons.

Par "représentation culturelle", je déplace ces données dans notre monde contemporain et dans l'histoire que nous vivons. Cela revient à prêter aux différents genres - mais également aux différents âges - des caractéristiques globales qui font fi de l'analyse de détail. Ces caractéristiques peuvent se répartir en deux catégories, des caractéristiques "positives" et des caractéristiques "négatives", mais je ne considère ici que ce premier versant "positif" pour ma catégorie. Ainsi, on prêtera préférentiellement la force physique aux hommes, l'innocence aux enfants, la sagesse aux personnages âgés, la compassion aux femmes. Il ne s'agit pas de dire que les femmes ne peuvent pas faire montre de force physique, que les enfants ne sont pas compatissants et ainsi de suite, mais on a tendance à s'orienter dans cette direction généralement.
Cette représentation culturelle est la même que celle qui peut toucher les couleurs par exemple : le noir est une couleur lugubre et digne, le blanc une couleur de pureté et ainsi de suite. Dans le jeu vidéo ainsi :

- les personnages jouables sont dans la grande majorité des hommes car il va s'agir souvent d'agir et de faire parler la force ;
- les adjuvants seront des femmes car pouvant apporter l'aide psychologique nécessaire au déroulé de la quête ;
- le méchant sera un monstre ou une créature difforme car étant "hors de l'humanité" et avec laquelle, par là, on ne saurait raisonner.

À nouveau, je ne sais si l'on peut parler de sexisme ici. Ces caractéristiques, positives comme je l'ai dit, agissent davantage dans une relation de complémentarité fondamentale qui permet à la société de tirer profit des qualités et des talents de chacun. Je ne cherche pas ici, cependant, à expliquer les raisons d'être de cette représentation : si je suis intimement persuadé qu'il s'agit avant toute chose d'artefacts culturels (d'où mon appellation) influençant, dès l'éducation, la direction globale de ces caractéristiques, cela peut également venir de choses plus profondes encore et "naturelles". Je ne rentrerai cependant pas davantage dans la réflexion ici.

Par "représentation sexuée", j'évoque alors ici les pendants "négatifs" de ces choses : les hommes sont des obsédés en puissance, les femmes des créatures artificieuses, les enfants des tortionnaires en culottes courtes, les personnes âgées des gueulards imbéciles. C'est tout ce qui peut y avoir de stéréotype, et ces stéréotypes concernent, surtout, tout ce qui attrait non pas à un caractère "naturel" mais à un habitus quelconque, une pratique sociale ou professionnelle qui serait handicapée ou, au contraire, favorisée par sa biologie. Cette représentation peut également survenir "par contraste", lorsqu'un personnage qui, jusqu'à présent, était représenté symboliquement ou culturellement, est brusquement sexué et, de là, soumis à ces qualités dépréciatives.
C'est ici alors, je pense, que le bât blesse parfois dans les jeux vidéo et dans les autres média. Dans le jeu vidéo, citons :

- Le cas de Zelda dans Ocarina of Time, qui a été discuté ici.
- Le "fan service", les personnages féminins (ou éventuellement masculins) qui sont considérés comme des objets de désir sans profondeur psychologique alors que d'autres personnages ont fait l'objet d'un développement, même minime.

Cependant, je serais enclin à ne pas considérer qu'un personnage féminin (ou masculin) dessiné de façon "sexy" soit nécessairement un stéréotype sexiste ou une représentation sexuée selon ma classification. Il pourra le devenir si jamais il fait l'objet de scènes à caractère sexuel parfaitement "gratuites" dans le mesure où il ne cherche pas à développer un trait de personnalité à faire avancer l'intrigue.

À nouveau, nous avons beaucoup parlé de cela ici avec exemples et contre-exemples, et je suis admiratif du déploiement d'arguments dans un sens comme dans l'autre dans un esprit très respectueux de la discussion Je ne ferai que répéter des choses, aussi je passe rapidement.

Je reviendrai cependant sur l'argument de "les sociétés font cela pour faire du profit, et ils utilisent les recettes qui fonctionnent". C'est un argument valable, vérifiable et sans aucun doute pertinent, mais je le trouve captieux pour plusieurs raisons.

- La première, et je rejoins Sim sur cette question, c'est que les sociétés faisant cela exploitent des parts pulsionnelles de notre individu profondément primitives et activent un interrupteur nous rabaissant même dans notre condition d'êtres humains civilisés. Mais, de là, dire ceci revient à accepter de n'être pris que comme des Hommes préhistoriques, ce qui est bien dégradant. Je rappelle alors, comme cela a été fait, que rabaisser la femme dans les jeux vidéo, c'est aussi rabaisser l'homme par miroir ; de là, la réaction naturelle devrait d'aller à l'encontre ce phénomène.
- La seconde, c'est que je tends à considérer cet argument comme un "anti-argument" prompt à fermer toute discussion : c'est presque une "astuce d'autorité" cyclique, revenant à dire "ils font ça parce que ça marche, et ça marche parce qu'ils le font".
- Enfin, en acceptant cette idée, on empêche toute remise en question profonde comme superficielle de ces phénomènes divers, et l'on accepte une forme d'immobilisme étrange.

Or cet immobilisme est malheureux. Il est malheureux car le jeu vidéo a profondément changé depuis sa création, évoluant dans sa puissance, dans sa force narrative, dans son public. L'on ne saurait faire un jeu vidéo comme on le fait aujourd'hui, car sa portée globale a évolué et que son statut en a fait un puissant objet de réflexion et de représentation du monde : autrement dit, l'on ne saurait faire exactement les mêmes jeux, avec les mêmes personnages et les mêmes histoires, car l'interprétation qu'on en fait a évolué. Nous avons nous-mêmes vieilli, le jeu vidéo s'est immiscé partout autour de nous, il n'est plus cet objet un peu fascinant et symbolique qu'il pouvait être : et c'est non seulement aux joueurs, mais aussi aux développeurs, de s'adapter à ces changements.
Je pense ainsi qu'au-delà de la "blague", la fin de Double Dragon Neon (à compter de 3:30 ci-dessous) est une représentation de cette idée : il lui faut ainsi être davantage montré, mais l'idée est là.



Tout comme, aujourd'hui, un cinéaste ne saurait, par exemple, tourner un film d'action quelconque où un héros américain blanc combat des communistes/des arabes/des nazis de façon unilatérale avec le plus grand sérieux (il lui faut soit un recul esthétique, comme Indiana Jones ou Inglorious Basterds, ou une réflexion politique quelconque), le jeu vidéo ne peut plus revenir à l'époque des épopées manichéennes et du blanc et du noir : l'on finirait par l'interpréter différemment et ce quelles que soient les intentions du développeur.
Pour reprendre une formule consacrée, c'est la fin de l'innocence : le jeu vidéo a chanté le monde, il doit maintenant le remettre en question et s'émanciper de tout.

Le sexisme en milieu "geek"

C'est là la deuxième grande partie de l'article de Mar_Lard, qui a été occultée ici de fait puisque le topic n'abordait pas cette question. Aussi je ne fais que rappeler l'existence de ce point particulier, plus représentatif, sans doute, de l'état de la condition des femmes dans la société qu'autre chose, mais le débat n'est pas ici.

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Voilà, j'ai réussi à mettre mes idées au clair. Le sujet est passionnant en tous cas, et il mérite que l'on s'y arrête. Polémique ou pas polémique, cela permet toujours de se situer quelque part, et c'est bon à prendre.

Shenron
Pixel visible depuis la Lune
Il est formidable ce jeu. Je ne sais même pas comment le prendre, ce n'est pas de la misogynie, ce n'est pas de la misandrie, c'est carrément de la misanthropie.

mickmils
Gros pixel
Je confirme.




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