Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Ce dernier, de nouveau produit par Eiji Aonuma, a d'abord été présenté en même temps que la Game Cube, à l'E3 2000, avec des graphismes similaires à ceux des deux opus N64, mais magnifiés par les capacités de la console. Mais quand le jeu sort deux ans plus tard, il a totalement changé de look au profit d'un style très épuré en cell-shading, avec un Link âgé d'à peine une dizaine d'années, ce qui surprend grandement les fans. Ce choix, ainsi qu'une certaine similarité entre Super Mario Sunshine et son prédécesseur, vont faire de ces deux titres des productions controversées alors qu'il s'agit de grands jeux figurant parmi les meilleurs de leur époque. Alors que jusqu'à la N64, tout ce que faisait Nintendo était acclamé sans réserve, sur Game Cube les productions du géant japonais sont un peu ringardisées par certaines erreurs de communication et une incapacité flagrante à tirer les leçons des réussites de la concurrence. C'est injuste, certes, mais Shigeru Miyamoto en vient à se remettre en question, se chercher. Un jour, il déclare que les jeux doivent être plus courts car les joueurs ne les terminent pas, et dans la foulée apparaissent des titres un peu légers en contenus comme Luigi's Mansion ou Super Mario Kart Double Dash (Miyamoto est crédité comme producteur pour les deux). Là encore, la réaction des joueurs est assez négative. Et comble de tout : le jeu le plus vendu sur Game Cube, et de très loin, n'est pas un développement interne de Nintendo mais Super Smash Bros Melee, signé HAL Laboratory. De toutes ces déconvenues plus ou moins sérieuses, et du fait que la Game Cube ne remplit pas les objectifs de Nintendo (qui n'est plus qu'un outsider sur le marché, après l'avoir outrageusement dominé dans les années 80-90), des conclusions vont être tirées, entraînant un changement significatif dans la démarche créative de l'entreprise et de son inspirateur Shigeru Miyamoto. Désormais Nintendo doit, sous l'impulsion de son nouveau président Satoru Iwata (qui a remplacé Hiroshi Yamauchi), affirmer son style alternatif, élargir sa cible, cesser de courir après la concurrence et adopter une politique conciliant prise de risque commerciale et sécurité financière. En d'autres termes : produire des consoles et des jeux extrêmement innovants mais bon marché et aptes à séduire une clientèle autre que les seuls gamers. La fin d'une époque est proche, un grand revirement commence et Shigeru Miyamoto, bien que très sceptique au départ, va finir par y jouer un rôle de premier plan. En 2004 est lancée la Nintendo DS. Il s'agit d'une console portable munie de deux écrans, celui situé au premier plan étant tactile. Bien qu'on y trouve une croix directionnelle et des boutons, l'idée est que le joueur utilise l'écran tactile avec un stylet pour que les jeux disposent de contrôles inédits et plus instinctifs que ce qui s'est fait jusqu'à présent. Miyamoto n'y croit pas du tout, il le reconnaîtra par la suite, mais il se trompe car c'est un coup de génie aussi fort que le lancement de la NES en son temps. En vérité les écrans tactiles sont appelés à devenir une composante indispensable de tout gadget électronique qui se respecte et le public, surtout au Japon, est très demandeur de cette manière de jouer, au point qu'on parlera de Touch Generation. Le chef-d'orchestreLa DS connaît dans un premier temps un gros succès qui se convertit très vite en triomphe quasi-sans précédent dans l'histoire des consoles portables. Et bien qu'elle soit totalement capable de faire fonctionner d'excellents titres dans la veine des Mario, Zelda ou Castlevania, une grosse part de ses acheteurs sont des joueurs occasionnels attirés par la rupture qu'elle peut représenter vis-à-vis de ce que le jeu vidéo est devenu, et séduits par toute la gamme de softs tenant autant du jeu que de l'utilitaire qu'elle propose. La prochaine console de salon de Nintendo sera donc conçue dans le même esprit. Annoncée en 2005, elle porte le nom de code Revolution, car Nintendo prétend que son système de contrôle va bouleverser les habitudes. En fait, il s'agit (pour faire simple) d'une Game Cube overclockée, miniaturisée et équipée d'un lecteur de DVD standard, ce qui en fait une console peu coûteuse à fabriquer. La fameuse manette est révélée en 2006 : il s'agit d'une télécommande (appelée Wiimote) à laquelle est relie par un fil un appendice muni d'une petit stick, et l'ensemble inclut des accéléromètres afin que le joueur puisse imiter les mouvements du personnage qu'il dirige comme s'il tenait le même objet entre le main, qu'il s'agisse d'une raquette de tennis, d'une épée, ou d'une baguette de chef d'orcheste. Parmi les jeux disponibles au lancement de la Wii, son appellation finale, on trouve en particulier l'imposant nouveau Zelda, The Twilight Princess (sorti conjointement sur Game Cube et Wii), conçu sous la direction de Shigeru Miyamoto et Eiji Aonuma. Mais là où Miyamoto est le plus visible, c'est quand il s'agit de jouer les porte-paroles pour la Wiimote et la nouvelle manière de pratiquer, concevoir et vendre le jeu vidéo qu'elle implique. Il se met également au travail sur un nouvel épisode de Mario, totalement original dans son concept, prenant cette fois tout son temps. Ce nouveau titre-phare sera Super Mario Galaxy, dans lequel Mario parcourt un monde constitué de petites planètes qu'il peut arpenter sur toute leur surface, quitte à se retrouver la tête en bas, ce qui permet un level-design très intéressant. Alors que Super Mario Sunshine privilégiait l'exploration et proposait de multiples missions dans des niveaux de grande taille, Galaxy revient à une formule plus proche des Mario en 2D : les niveaux sont très nombreux, courts, assez abstraits dans leur design, et le maître-mot est variété. La Wiimote est mise à contribution mais ses accéléromètres ne jouent pas vraiment un rôle central dans le gameplay : on dirige toujours Mario à la croix et aux boutons et il faut exécuter des mouvements de poignet pour réaliser certaines actions, en particulier l'attaque tournoyante de Mario. Démarrée en 2004, la gestation de Galaxy s'achève fin 2007 avec un an de retard sur les prévisions. Entre temps, tout le monde s'est rendu à l'évidence : le pari de Nintendo est totalement réussi, la Wii se vend trois à quatre fois mieux que ses deux concurrentes, c'est presque un phénomène de société. Pourtant, même si Super Mario Galaxy est salué comme un des meilleurs jeux de l'année et enregistre d'excellentes ventes, le plus gros des chiffres enregistrés par Nintendo provient des purs produits "casual" que sont la Wii Balance Board (une balance électronique que l'on branche à la Wii en même temps que la Wiimote pour utiliser WiiFit, un programme de culture physique), Wii Play (compilation de mini-jeux vendue avec les Wiimotes additionnels) et le titre le plus représentatif de la console est Wii Sports (suite d'épreuves sportives livrée avec la console, entièrement basée sur le fait d'agiter la Wiimote). Dans de tels jeux ne figurent aucun des personnages et univers habituels de Nintendo. On ne fait qu'y diriger des Miis, petits avatars que la console permet de façonner entièrement (de préférence à son image), le tout dans des décors génériques. Séduit par l'idée que des gens qui jusqu'ici ignoraient les jeux vidéo s'y mettent, en particulier les personnes âgées et dans une moindre mesure les femmes, plus que jamais désireux de rassembler le plus de monde possible autour d'une télévision et d'une console, Shigeru Miyamoto va consacrer l'année 2008 au développement d'un jeu totalement en phase avec le public dit casual (le terme ayant entre temps changé de signification, passant de "joueur occasionnel" à "joueur qui se méfie des jeux vidéo"). Ce sera Wii Music, titre qui a priori semble se situer dans la tendance des jeux musicaux dont Guitar Hero (d'Activision), Guitar Freaks (de Konami) ou Rock Band (de Electronic Arts) sont les représentants les plus connus, mais qui est en fait bien différent. Il s'agit ici d'utiliser la Wiimote et la Wii Balance Board pour simuler la pratique d'instruments de musique, dans le cadre d'un jeu mettant en scène les Miis et dans lequel on doit reproduire des airs musicaux célèbres en faisant les bons geste, en rythme. Sauf que si les titres précédents s'appuient sur des chansons enregistrées (des standards du rock repris ou en version originale), Wii Music utilise des fichiers MIDI joués par la console, donc modifiables en temps réel. Ce qui veut dire que les joueurs peuvent improviser, voire se montrer créatifs. L'idée est brillante mais sa mise en pratique est controversée : les musiques ont une qualité sonore décevante, elles ne proposent que des airs classiques libres de droits, et en définitive le joueur n'est jamais vraiment sanctionné, des notes justes étant jouées quoi qu'il fasse. Wii Music fait l'objet de commentaires assez mitigés, et se vend beaucoup moins bien que les standards de la Wii. Miyamoto ne cache pas sa déception dans les interviews qu'il donne, la musique étant une de ses premières amours. Pendant ce temps Nintendo, sentant que les gamers risquent à se désintéresser de la Wii à force d'être abreuvés de Miis et de jeux aseptisés (surtout ceux provenant des éditeurs tiers), annonce qu'un nouveau Mario et un nouveau Zelda sont en cours de développement... À suivre... ConclusionÀ l'époque de ses débuts chez Nintendo, Miyamoto rencontra une jeune fille nommée Yasuko, secrétaire, dont il tomba amoureux. Les deux tourteraux s'installèrent dans une petite maison de campagne non loin des quartiers généraux de Nintendo. Depuis cette époque, Miyamoto, bien que devenu très riche, ne se rend au travail tous les matins qu'à pied ou sur une petite moto. Yasuko, qui a arrêté de travailler après leur mariage, lui a donné deux enfants avec lesquels il adore jouer à ses propres jeux. Bien que quinquagénaire, Miyamoto continue de porter (lorsqu'il n'est pas convoqué pour qu'on lui remette une décoration, ce qui lui arrive régulièrement) des vêtements ordinaires et des montres en plastique jaune achetées dans des magasins de jouets. Ce n'est que depuis quelques années, et à contrecœur, qu'il a fini par abandonner la coupe de cheveux au bol (style Beatles des débuts), parce qu'elle ne correspondait plus à son âge, mais certainement pas parce qu'elle était démodée. Le fait de travailler, à son âge, sur des jeux vidéo ne lui pose pas le moindre problème, et l'argent rapporté ne représente pas pour une lui une justification de ce qu'il fait. Terminons ar une petite parenthèse sur Hiroshi Yamauchi, président de Nintendo de 1949 à 2002. Bien que s'inspirant des méthodes Disney, Yamauchi n'a jamais cherché, comme cela se passe chez le géant américain, à éclipser la personnalité des créateurs les plus inspirés qu'il employait. Jusqu'à sa retraite il n'a jamais manqué une occasion de rendre hommage à Miyamoto et de souligner son rôle déterminant dans le maintien de Nintendo au sommet. Du reste, il semble que les deux hommes partagent la même ouverture d'esprit. Sans la propension de Yamauchi, et donc de Nintendo, à se lancer dans la commercialisation de produits complètements nouveaux, Miyamoto n'aurait peut-être jamais pu s'exprimer aussi pleinement.
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