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Les jeux électroniques (1980-1983)
Avec les Game&Watch de Nintendo, les jeux électroniques ont connu un succès fulgurant dans les années 80. Puis, face à une concurrence acharnée et pas toujours très loyale, Nintendo a fait évoluer sa gamme de jeux LCD en s'inspirant des bornes d'arcades et jeux consoles...
Game&Watch : Squish

Avec Nintendo et Bandai au coude à coude, la bataille promettait d'être rude. Bandai, avec une gamme de jeux toujours plus innovante, s'apprêtait à détrôner le géant du jeu vidéo nippon qui s'était jusque là cantonné aux jeux de poche LCD. On l'a vu: tout -ou presque- avait été fait dans le domaine des cristaux liquides. Ecrans simples, doubles ou triples, tableaux multiples, énergie solaire, compacité des boîtiers... Les ingénieurs japonais commençaient à sérieusement tourner en rond, et les joueurs que nous étions montraient quelques signes d'impatience. Nintendo n'avait plus le choix: il fallait que la firme s'engage sur la voie des jeux portables. Plus encombrants que leurs confrères de poche, les portables permettaient aussi de travailler sur des technologies d'affichage différentes, à l'image de la gamme "FL" de chez Bandai. Le renouveau Nintendo pouvait commencer.

Nintendo voit grand.

Deux gammes majeures allaient voir le jour en 1983: la gamme 'Table-Top', et la gamme 'Panorama'. Bien moins riches en titres que les incontournables 'Widescreen' et 'Multi', ces deux nouvelles collections ouvraient de nouveaux horizons à la compagnie nippone. Tout d'abord, fini le noir et blanc: bonjour la couleur. Nintendo, qui jugeait le procédé VFD employé par Bandai trop peu performant à leur goût -et qui, surtout, mettait un point d'orgue à se démarquer des autres-, lança le CLCD, comprenez: "Color Liquid Crystal Display" -du jamais vu. Des couleurs plus vives et une qualité d'affichage impeccable, tels étaient les progrès apportés par le CLCD qui faisait enfin apparaître des décors et des personnages aux multiples teintes, égayant considérablement l'aire de jeu. Ensuite, les traditionnels 'bip-bip' des modèles de poche laissaient la place à de véritables mélodies que le joueur fanatique allait pouvoir fredonner en boucle pendant toute la journée. Enfin, l'écran, qui avait gagné en taille, permettait aux concepteurs d'enrichir leurs titres de parcours plus vastes et plus variés (à comparer: les versions 'Widescreen' et 'Table-Top' de "Donkey Kong Jr.").
En fait, le parallèle entre le jeu électronique et le jeu vidéo devenait de plus en plus inévitable, tant le fossé qui semblait les séparer début 80 semblait s'amenuiser au fil des années. Il ne restait plus à Nintendo qu'à concrétiser cette idée en imaginant un boîtier ressemblant à s'y méprendre à une véritable borne d'arcade miniature: le 'Table-Top' était né.

Donkey Kong JR, les deux versions.

Un choix limité.

Aussi beaux soient-ils, ces jeux n'eurent hélas pas le succès escompté. Sans doute était-ce dû à la féroce concurrence des jeux vidéo qui, déjà à l'époque, commençaient à faire fureur dans des salles d'arcade et surtout, dans de nombreux foyers -les monstres de consoles que furent les Atari VCS, Intellivision et autres Colecovision apparurent en 82-83. De plus, il fallait bien admettre que, tous proches des jeux de café qu'ils étaient, les 'table-top' accusaient toujours cet horrible problème d'affichage qui les empêchait de proposer plus d'un tableau au joueur. Et puis, de telles machines avaient un coût: entre 400 et 600F selon les modèles! Dans de telles conditions, le consommateur lambda avait tôt fait de se rabattre sur la dernière cartouche de jeu à la mode, souvent vendue à des prix inférieurs à 400F, quelque soit sa console.

Popeye

La gamme 'Panorama', qui reprenait à peu de choses près les titres 'Table-Top' sous un format plus à même de tenir dans la poche, avait beau réduire le prix de vente à 350F: le résultat fut le même -médiocre. Devant un tel essoufflement, beaucoup considérèrent la mort du jeu électronique imminente.

Un dernier élan.

Il ne restait guère de choix aux concepteurs de jeux électroniques pour espérer encore engranger les dollars: soit ils persévéraient sur la voie des adaptations d'arcade en espérant développer *le* titre phare qui serait pour eux synonyme de jackpot, soit ils jouaient la carte de l'originalité en proposant des jeux suffisamment novateurs pour se démarquer de la production habituelle de l'arcade.
De ces deux voies résolument opposées, Coleco choisit la première. Cette compagnie américaine, qui allait vite se faire connaître grâce à LA Rolls-Royce des consoles de l'époque, le CBS Colecovision, lança une gamme de jeux électroniques basés sur le principe des 'Table-Top' Nintendo, mais dont la qualité de finition fut poussée à l'extrême. Le look de ces machines, franchement réussi, en fit baver plus d'un. Jamais l'impression d'avoir en face de soi une vraie borne d'arcade, certes de taille très réduite, ne fut aussi grande. Pour une fois, l'esthétique de ces machines représentait à elle seule une raison valable d'achat. Quant aux titres proposés, ils comptaient parmi les licences les plus juteuses du moment: "Pac-Man", "Donkey Kong" ou "Galaxian"; les adeptes des salles d'arcade étaient aux anges, d'autant que chacune de ces adaptations était d'une rare qualité. Hélas, tout comme les 'Table-Top', ces petits bijoux coûtaient si chers que beaucoup durent se contenter de les admirer dans les vitrines: à 800F le jeu (...en 1983, c'était quelque chose), il y avait en effet de quoi réfléchir...

Pac Man, Donkey Kong et Gakaxian

Toujours plus d'idées.

Ceux qui avaient choisi la deuxième voie -la voie de l'originalité- innovèrent à plus ou moins bon escient. Certaines firmes, comme Tomy, apportèrent un réel plus en donnant la possibilité à deux joueurs de s'affronter simultanément -c'était le cas de "Tennis", une simulation sportive plutôt sympathique malgré un écran de jeu très petit, ou de "Tron", titre très à la mode suite à la sortie dans les salles du film du même nom fin 82. Mais ces mêmes firmes étaient capables du pire: avec "Thundering Turbos" ou "Shark Attack", Tomy inventait les premiers jeux en '3D'. Dans la théorie, l'expérience d'une immersion totale dans le jeu (... fallait le dire vite) était tentante; dans la pratique, hélas, cette immersion se terminait immanquablement par un mal de tête infernal n'incitant guère à renouveler l'expérience. La prise en main peu aisée de l'appareil -il fallait constamment tenir l'engin en face de ses yeux, à la manière d'une paire de jumelles- finissait d'anéantir un concept décidément bien bancal.

Tennis, Tron, Grand Prix

Dans la série des jeux vraiment à part, il serait injuste de ne pas citer le "Long Beach Grand Prix", de Kenner Electronics, qui, en 82, mettait dans les mains du joueur un volant de voiture de course. Ici, pas de manettes: simplement quelques boutons censés gérer la boîte de vitesse et les pédales d'accélérateur ou de freinage. Un circuit, symbolisé au centre du volant, indiquait à tout moment la position du bolide et les différentes vitesses limites à ne pas dépasser, sous peine de crash. L'idée était originale, mais le fait de ne contrôler que la vitesse de la voiture limitait grandement l'intérêt d'un jeu qui, à l'époque cependant, fit grand bruit -dans tous les sens du terme.
La meilleure innovation vint sans doute de Milton Bradley qui inventa le principe de la console portable - carrément! Vues les faibles possibilités techniques de l'époque, on était encore bien loin d'une GameBoy, mais l'idée était là: avec le "Microvision", le joueur avait la possibilité d'interchanger les titres comme bon lui semblait. Le principe de la cartouche étant encore réservé aux consoles de salon, chaque jeu "Microvision" se présentait sous la forme d'une façade assez volumineuse que l'on plaçait sur le face avant du boîtier principal. L'intérêt était double: chaque écran était accompagné d'illustrations différentes, et les boutons disponibles variaient en nombre selon les besoins. Un principe intéressant donc, mais gâché par la faible qualité des jeux proposés.

La console Microvision et ses cartouches

Et après?

Après la mort du jeu électronique dans le milieu des années 80, certains persévérèrent à sortir quelques nouveaux titres -de façon très épisodique, toutefois. Nintendo, notamment, lança deux nouvelles gammes, dont une dédiée en 88 à l'adaptation de grands hits tirés de sa console phare, la NES. Cette gamme avait pour nom 'Crystal', et proposait des titres aussi célèbres que "Super Mario Bros", "Balloon Fight" ou "Climber".

Crystal

Plus tôt, en 84, la gamme 'Micro VS' avait vu le jour: grâce à deux pads totalement indépendants, deux joueurs pouvaient s'amuser à vaporiser des insectes dans "Donkey Kong 3", ou à se taper dessus dans "Boxing". Malgré leur succès plus que mitigé, les 'Micro VS' allaient laisser des traces quant au look de la future console de salon que Nintendo préparait alors dans le plus grand des secrets. En particulier, le pad, compact, robuste et économique, allait définitivement prendre la place du joystick dans le cœur de nombreux consoleux.
Quelques 'Multi' sortirent encore des usines du géant japonais jusqu'à la fin des années 80, notamment une sympathique version de "Zelda", assez proche du concept original du titre phare de la NES.

Micro VS et Game&Watch Zelda

"Je veux jouer à ces jeux!"

Alors ça ne va pas être facile. La mode étant passée depuis maintenant plus de 15 ans, il serait ridicule d'espérer trouver la plupart des ces classiques du jeu électronique dans les magasins de jouet où, pourtant, ils abondaient début 80.
Seuls quelques titres ont été récemment réédités sous la forme de porte-clés (!) par Nintendo. De formats très réduits, ils reproduisent à l'identique le jeu original. Disponibles dans la plupart des grands magasins français, la dizaine de titres choisis par Nintendo ont, pour la plupart, été tous des hits. Profitez-en: chaque jeu, simple ou double écran, ne dépasse pas les 100F.
L'occasion est également une piste à privilégier. En cherchant un peu, vous trouverez rapidement sur le Oueb quantités de sites proposant à la vente ou l'échange nombres des jeux électroniques décrits dans notre dossier. Attention toutefois aux prix qui peuvent atteindre des sommes astronomiques!
Si vous possédez une Game Boy, jetez-vous sur la collection "Game and Watch Gallery". Ces compilations d'anciens titres phares made in Nintendo regorgent d'informations et de jeux cachés! En plus de leurs versions originales, des versions refaites de chaque titre ont été réalisées afin d'allonger encore la durée de vie de ces cartouches. Il existe sur le territoire français 3 volumes de cette série, mais sachez qu'il existe au Japon un volume totalement inédit, conçu avant les 3 volumes français. Ce volume "0", intitulé "Game Boy Gallery", comprend des versions à peu près refaites de "Ball", "Vermin", "Flagman", "Manhole" et de "Cement Factory". Pas de panique toutefois, car les versions de ces mêmes jeux, inclues dans les volumes supérieurs, furent infiniment supérieures. Pour information, le volume 1 comprend "Manhole", "Fire", "Octopus" et "Oil Panic"; le volume 2, "Parachute", "Helmet", "Chef", "Vermin", "Donkey Kong", et "Ball"; le volume 3, "Egg, "Green House", "Turtle Bridge", "Mario's Cement Factory", "Donkey Kong Jr.", "Flagman", "Judge", "Lion", "Spitball Sparky", "Donkey Kong 2", et "Fire" dans sa version originale.
Enfin, il existe une solution simple et peu coûteuse: l'émulation. Illégaux mais tolérés du fait de leur statut de divertissement préhistorique, quelques programmes, conçus par des fans, vous permettront de goûter aux joies du jeu électronique à l'ancienne. L'un des meilleurs sites du genre, http://madrigal.retrogames.com, propose un certain nombre de ces programmes, entièrement réalisés par le maître des lieux. N'hésitez pas à le féliciter pour ses productions, toutes d'une qualité si extraordinaire que vous pourrez même ouvrir les boîtiers virtuellement !

Sur ce, bon amusement à tous.

David
(19 février 2002)
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