Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par JPB (21 mars 2005)
Il y a quelques années, je me trouvais dans une salle d'arcade de Nancy - principalement pour voir les nouveautés - lorsque je vis un étrange appareil : un vélo devant un écran. Intrigué, je m'approchai pour comprendre la présence d'un tel engin : le jeu consistait à diriger une sorte d'ULM à travers des waypoints, sauf que la propulsion était assurée par les petites gambettes du joueur ! Ce jeu s'appelait Prop Cycle, de Namco, sorti en 1996. Mais bon, ce n'est pas le propos de cet article. D'avoir pédalé comme un fou pour diriger mon avatar à l'écran, ça m'a rappelé de bons souvenirs. De lointains souvenirs d'un autre jeu, bien plus ancien et beaucoup moins impressionnant... Mais le premier jeu vidéo que j'ai connu dans lequel c'étaient aussi les capacités physiques du joueur qui permettaient de diriger son personnage : Joust. Attention : j'entends bien "que MOI j'ai connu" : je ne sais pas si Joust est réellement le premier jeu vidéo au monde qui a proposé un contrôle "actif" de la part du joueur... Mais je sais que d'autres reprendront ce principe plus tard, notamment l'excellent jeu d'arcade Track'n'Fields / Hyper Olympics, ou Wing War sur Coleco... Mais revenons à Joust. J'ai découvert ce jeu sur la console VCS Atari d'un de mes amis, en 1983... il y a déjà 33 ans ! Seul, le jeu était sympa ; mais à deux, il devenait proprement diabolique, même si la VCS ne proposait pas de graphismes particulièrement impressionnants. J'avoue n'avoir jamais eu l'occasion de jouer sur l'original en salle d'arcade, mais j'ai fait de multiples parties sur la VCS, sur la version Atari 520ST, ainsi que sur M.A.M.E... Alors, je vais vous raconter tout ça.
Joust, comme son nom l'indique, est une joute. Une joute ? Avec des autruches ?Examinons d'un peu plus près la monture du premier joueur - sachant que celle du second joueur, la cigogne, ne diffère légèrement que par son apparence. Au départ, vous disposez de 5 volatiles. L'autruche se dirige vers la gauche ou la droite par l'intermédiaire du joystick. Quand vous la déplacez dans une direction, et qu'elle se trouve sur une surface plane, elle se met à marcher lentement au début puis court de plus en plus vite ; la faire changer de direction quand elle est lancée à pleine vitesse donne lieu à de superbes dérapages, crissement de pattes à l'appui. Eh oui : dans Joust, l'inertie joue un rôle très important, comme vous allez le constater par la suite. Quand vous appuyez sur le bouton de tir, l'autruche bat des ailes - une fois. Si vous appuyez plusieurs fois sur le bouton, l'autruche se met à battre des ailes autant de fois que vous avez appuyé, et du coup elle commence à s'élever. Ainsi, vous allez devoir contrôler l'altitude de l'animal en appuyant à répétition sur le bouton, lui faire battre des ailes à toute vitesse pour la faire grimper dans les airs ou au contraire battre doucement pour descendre en douceur - quitte à ne plus battre des ailes du tout pour tomber comme une pierre, sachant que l'autruche ne craint pas la chute. Du coup, il va falloir que vous arriviez à maîtriser d'une part l'inertie de l'autruche au plan horizontal, et d'autre part la gravité pour le plan vertical. Et je ne vous parle ici que du simple déplacement de votre monture : il faut impérativement que vous arriviez à aller là où vous voulez avant d'oser passer à la suite. Et ça se passe où ?
Votre monture va évoluer dans un environnement bien spécifique, je vais vous expliquer en quoi il consiste. Heureusement, dans les premiers tableaux, un pont horizontal couvre toute la largeur de l'écran, ce qui empêche de tomber dans la lave. Mais comme vous vous en doutez, ça ne va pas durer ! Au niveau 3, le pont sera supprimé, puis... mais je vous en parlerai plus tard. L'arène contient quelques plates-formes de pierre suspendues dans les airs, qui disparaîtront progressivement au fur et à mesure que vous progressez dans les niveaux. Sur certaines, une dalle de téléportation est présente : c'est de là que tous les protagonistes apparaissent et se lancent dans la joute (ce sont les « points de respawn », si connus des joueurs online). Ces dalles sont prévues pour ne pas fonctionner en cas de présence de l'un des joueurs, donc ce n'est pas la peine de les squatter en espérant éliminer un de vos adversaires au moment où il apparaît, ça ne fonctionnera pas. Qui dit joute...... dit au moins deux participants. Je reviendrai plus tard sur le jeu à deux joueurs, pour le moment restons-en au jeu à un seul joueur si vous le voulez bien. Le but du jeu est de gagner les manches, l'une après l'autre. Dans chaque manche, vous êtes opposé à un certain nombre d'ennemis, qui eux aussi sont armés de lances et chevauchent un volatile - un vautour pour être précis. Leur but est de vous détruire, mais on ne peut pas dire que ce soit chacun pour soi : ce serait plutôt tous les autres contre vous. Les adversaires traditionnels sont de trois sortes : trois niveaux d'aptitude parmi les chevaliers ennemis qui chevauchent tous des vautours. Les moins dangereux sont les rouges (Bounders), mais les blancs (Hunters) sont bien plus coriaces ; quant aux Shadow Lords de couleur bleu nuit, ce sont des maîtres en joute et les vaincre est très, très difficile. Pour gagner une joute, il faut toucher un adversaire par le dessus. Peu importe qu'on aille dans le même sens que lui ou dans le sens contraire, la seule chose importante c'est de fondre sur lui et d'être plus haut au moment de l'impact - ce qui sous-entend que votre lance est plus haute que la sienne. Tous les adversaires sont soumis à la même règle. Pan dans les dents !À présent, voyons d'un peu plus près ce qui se passe lors d'un combat. Premier cas : supposons que le joueur - vous - se soit fait éliminer malencontreusement par un adversaire : c'est dû au fait que l'ennemi volait plus haut que vous au moment de l'impact. Dans ce cas, vous êtes immédiatement anéanti, et vous allez réapparaître avec votre monture, sur l'un des téléporteurs de l'arène. Vous avez environ dix secondes pour décider de réapparaître en appuyant sur le bouton de tir, passé ce délai vous vous reformez que vous le vouliez ou non. À vous de choisir au mieux l'instant précis où vous vous relancez dans la bataille.
Deuxième cas : supposons cette fois que le joueur - toujours vous il me semble ? - ait réussi à fondre sur sa proie, la lance en avant. Votre adversaire se transforme en œuf,
et vous êtes repoussé, sans vous retourner, de façon proportionnelle à la vitesse à laquelle vous l'avez percuté. C'est là qu'il faut faire attention car pendant un petit instant,
vous ne contrôlez plus votre trajectoire, et vous risquez de vous retrouver projeté sous un autre vautour. Petite remarque : si vous arrivez à attraper un nouvel œuf avant qu'il ait touché le sol, vous obtenez des points bonus. Troisième et dernier cas : supposons que vous et votre adversaire voliez l'un vers l'autre, rigoureusement à la même altitude : ceci entraîne un choc qui vous fait rebondir tous les deux (aucun d'entre vous n'est éliminé) en vous retournant, prudence ! Vous regardez désormais dans l'autre sens, attention à ne pas vous faire surprendre. Voilà, nous avons fait ensemble le tour de ce qui peut arriver lors d'un combat « loyal ». Il nous reste maintenant à regarder ce qui se passe quand d'autres participants entrent en jeu. Parce qu'il y en a encore d'autres ?
Le premier ennemi qui vous donnera du fil à retordre est le ptérodactyle. Il est possible de le détruire, mais attention : ce n'est pas facile. Pour ça, il faut arriver à vous positionner en face de lui, et lui enfoncer votre lance dans la gueule au moment où il fonce sur vous. C'est faisable, mais vraiment pas facile.
Le second personnage que vous aurez peut-être le malheur de rencontrer est le Troll de Lave. Chose agréable, le Troll de Lave est neutre. Il s'en prend à n'importe quel chevalier, ce qui fait que vous pouvez en tirer avantage, par exemple en vous plaçant sur le rocher en bas, et en laissant arriver les vautours... Il y a des chances que quelques-uns soient sinon tirés dans la lave, du moins attrapés et immobilisés. C'est tout ?Dans le jeu à un joueur, il y a quelques manches qui proposent un challenge spécifique. Ainsi, « Survival Wave » qui donne un bonus si vous ne vous êtes pas fait éliminer. Pour faire retomber la pression, régulièrement vous serez amené dans une manche bonus, appelée « Egg Wave ». Dans cette manche, les blocs de pierre sont couverts d'œufs, et vous devez les détruire avant qu'ils n'éclosent. En général, cette phase est facile et il est rare de se faire tuer, mais il est toujours possible de tomber dans la lave... Et si vous perdez trop de temps vous serez submergé par les vautours. À deux c'est mieux !Venons-en maintenant au jeu à deux joueurs.
La borne upright (debout) propose les deux manettes l'une à côté de l'autre (normal) : on y voit, pour chaque joueur, une manette pour aller à
gauche ou à droite (pas de direction verticale), et un bouton judicieusement indiqué "flap" pour donner un coup d'ailes. Et concernant le jeu lui-même ? Premièrement : les deux participants humains disposent exactement des mêmes caractéristiques. Le vol de l'oiseau est identique, ainsi que les règles de combat. Comme je l'ai dit plus haut, la seule différence consiste en l'apparence entre l'autruche (petit bec jaune, tons beiges et bleus, chevalier jaune) et la cigogne (long bec rouge, tons blancs et rouges, chevalier bleu). Deuxièmement : c'est aux joueurs de décider s'ils veulent coopérer ou se battre. La coopération est efficace pour espérer avancer dans les niveaux, la bagarre ne dure en général pas longtemps ! Certaines manches proposent des bonus qui demanderont aux joueurs de se mettre d'accord sur l'action à effectuer (voire de trahir l'autre !) : ainsi, « Team Wave » ou « Gladiator Wave » offriront des points aux deux participants s'ils collaborent ou s'ils se battent. Ambiance assurée ! Attention tout de même : la coopération n'est qu'un accord tacite entre les deux joueurs, par défaut lorsqu'ils se touchent, la règle du combat s'applique toujours. Évidemment, avec un volatile supplémentaire, ça fait encore moins de place pour voler. Les combats sont déjà difficiles, et on se rend vite compte que deux joueurs humains ont plus de facilité pour combattre mais en contrepartie, plus de difficulté pour se diriger sans se cogner l'un l'autre... La dimension « deux joueurs » apporte un véritable plus : la plupart du temps, les joueurs collaborent pour arriver à aller le plus loin possible ; les fois où l'un d'eux se fait éliminer par l'autre, alors que ce n'est pas fait exprès, transforme un jeu déjà fort bien pensé en une véritable bagarre - du moins verbale. Les parties deviennent vite effrénées, et la joute risque de se poursuivre bien après le jeu lui-même ! Il est impossible pour un second joueur de rejoindre une partie à un joueur, pas plus qu'un des deux joueurs qui n'a plus de vies ne peut revenir dans l'arène avant la mort complète de l'autre. C'est peut-être le seul défaut : quelques vies supplémentaires en atteignant des scores prédéfinis, mais pas de mode "Continue". D'un autre côté, ça oblige à se concentrer davantage ! Et à la maison ?Joust a été porté sur les supports suivants :
Il a existé un prototype sur la version Coleco, qu'on peut trouver sur le net, mais sans sortie officielle. On retrouve Joust par la suite dans des compilations Williams ou Midway, sur la plupart des machines sorties des années plus tard. Visuellement, il est clair que la machine sur laquelle le jeu est porté déterminera la qualité des graphismes. La conversion la moins attrayante graphiquement est la VCS ; malgré tout, on s’amuse toujours autant. Le concept de la joute n’a pas besoin d’une profusion de pixels pour être porteur – mais ne me faites pas écrire ce que je n’ai pas écrit : l’original d’arcade est quand même plus joli à regarder ! J'ai des souvenirs émus de la version VCS, quand je jouais avec mon pote... Je ne vous raconte pas les parties d'enfer ! En revanche, quand j'ai retrouvé le jeu sur Atari ST, autant j'ai apprécié les graphismes bien plus fins, autant j'ai regretté de n'avoir personne pour jouer avec moi. L'astuce est de voler le plus possible au centre de l'écran pour ne pas se faire surprendre par des ennemis arrivant de l'autre côté. Autre tactique, voler juste au-dessus d'un bloc de pierre pour espérer piéger un ennemi qui lui vole dessous... Mais vous vous ferez vos propres astuces. Et ensuite ?JOUST 2 - Survival of the Fittest (Williams, 1986)La suite, mais le jeu n'innove pas énormément. De nouveaux décors, de nouveaux ennemis supplémentaires... Par contre, le moniteur placé verticalement gâche le plaisir, impossible de prévoir autant ses attaques que dans le premier volet. Au final, le jeu n'attirera pas grand monde, tous les joueurs préférant l'original. Du coup la borne ne fut produite qu'à un millier d'exemplaires... Peu d'intérêt donc, cette suite ne restera pas dans les annales du rétrogaming. Flipper JOUST (Williams, 1983)Hé oui, Joust fut même "adapté" en flipper. Particularité : deux joueurs s'affrontent ! Voyez plutôt cette image : Je préfère ne pas trop parler du sujet, je voulais simplement mentionner qu'on a décliné le thème dans ce genre. En vous rendant sur cette page, vous aurez tous les renseignements que vous souhaitez. Voilà, vous savez tout sur ce jeu mythique qu'est Joust. Ah non, une dernière chose : sachez que le record est détenu par Brett Watt, qui a réalisé 1 537 050 points le 02/07/1985... Nul doute qu'il n'est pas aussi connu que des stars comme Pac-Man ou Donkey Kong... Mais il n'en reste pas moins que les personnages du jeu font partie du film Pixels, et surtout, que Joust a un rôle décisif dans Ready Player One, le livre d'Ernest Cline, dont on attend une adaptation cinématographique par Steven Spielberg pour 2017. Un avis sur l'article ? Une expérience à partager ? Cliquez ici pour réagir sur le forum (24 réactions) |