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Greendog : the Beached Surfer Dude !
Année : 1992
Système : Megadrive ...
Développeur : Interactive Designs
Éditeur : Sega of America
Genre : Plate-forme


INTERVIEW de MICHAEL LATHAM

Après un court passage chez Activision, Michael Latham rejoint Sega of America en 1991. Il travaillera en tant que Producer et Game Designer sur le projet Greendog: The Beached Surfer Dude!, l'une de ses premières productions au sein de la compagnie. Il quittera Sega sept ans plus tard, en 1998, après être apparu au générique d'une cinquantaine de jeux de cet éditeur. Aujourd'hui, Michael Latham est surtout connu pour être l'homme à l'origine de la série Eternal Champions. Il fut ainsi à la tête du développement de Eternal Champions sur Megadrive, de sa suite sur Mega-CD intitulée Eternal Champions: Challenge from the Dark Side, et enfin du « spin-off » X-Perts (Abalone, 1996) sorti également sur Megadrive mais exclusivement aux États-Unis.

Eternal Champions est assurément l'un des plus grands succès de Michael Latham et du studio Sega Interactive (plus de 2 millions de copies vendues pour ce premier opus). Pour l'anecdote, sachez qu'un troisième volet intitulé Eternal Champions: the Final Chapter était initialement prévu sur Saturn. Le jeu fut finalement annulé suite à une décision de Sega of Japan craignant que la série Eternal Champions ne fasse trop d'ombre à Virtua Fighter aux États-Unis.

Nous avons eu la chance de nous entretenir avec Michael Latham à propos du développement de Greendog: The Beached Surfer Dude!

  • Grospixel : Comme nous l'avons vu, la franchise Greendog n'appartenait pas à Sega. Cette licence appartenait à Ric Green et à sa femme, Ana. Michael, vous rappelez-vous comment le projet « Greendog, le jeu vidéo » est-il né ?
  • Michael Latham : Greendog fut le premier projet original sur lequel j'ai travaillé après avoir rejoint Sega. J'ai signé chez Sega juste après que le Activision historique soit fermé et délocalisé à Los Angeles. Chez Activision, j'ai travaillé sur un jeu destiné à la Megadrive juste au moment où la machine était lancée. Du coup, en arrivant chez Sega, j'avais déjà de l'expérience en tant que développeur Megadrive, mais j'étais toujours le petit nouveau... C'est pourquoi on m'a refilé beaucoup de projets qui consistaient à bosser avec Sega of Japan, soit pour sortir leurs titres aux États-Unis, soit pour suivre des jeux déjà en développement depuis un moment.

    Quand j'ai rejoint la compagnie, les différents producteurs en place m'ont prévenu qu'on allait me présenter plusieurs licences que Sega avait récupérées et que pour certaines d'entre elles, faire un jeu à partir de ces licences allait être très compliqué. Comme convenu, on m'a alors présenté pas mal de titres et le seul qui m'ait vraiment tapé dans l'œil fut Greendog. Le problème, c'était que Greendog était à la base un jeu de plateau et du coup, le département licensing croyait qu'on ferait une version « jeu vidéo » de ce jeu de plateau. Cette idée ne fonctionnait pas du tout, et c'est pourquoi mes collègues avaient refusé ce projet.

    Du coup, j'ai contacté Ric et je lui ai dit qu'il n'y avait pas moyen que l'on fasse un truc cool avec cette idée de « jeu de plateau/jeu video ». Cependant, je lui ai aussi demandé s'il me laissait lui proposer un design original plaçant son personnage dans son propre univers. Ric accepta à condition qu'il ait son mot à dire, chose qui me convenait totalement puisque je voulais qu'il prenne part au développement. D'un point de vue personnel, être capable de créer un jeu original était très important dans le but de m'imposer au sein de Sega alors que j'étais le petit nouveau. Si je me débrouillais bien, je savais qu'il y aurait moyen pour moi de récupérer d'autres projets par la suite.
  • Quels étaient vos objectifs pour le game design de Greendog: The Beached Surfer Dude! ? Sur quelles parties du jeu vous êtes-vous le plus concentré ?
  • Sur ce jeu, j'ai travaillé sur à peu près tous les sujets du design mais bon, je travaillais avec Interactive Designs, un studio de développement en qui j'avais une totale confiance. J'avais déjà bossé avec eux du temps d'Activision sur un jeu fondé sur une licence Sega appelée Power Drift. Pour Greendog, on a vraiment travaillé en équipe et du coup, on a pu aller au bout de nos idées. Une des raisons pour lesquelles j'ai voulu collaborer avec eux, c'est que leurs patrons avaient tout fait pour qu'il n'y ait pas de guerre d'egos dans l'équipe, et pour que tout le monde puisse avoir un impact direct sur le jeu. Et ça, c'est plus rare que ce que vous ne croyez...

    Ric avait une vision assez claire du personnage de Greendog. D'ailleurs, en réalité, Greendog, c'était lui : il était la vraie incarnation de Greendog, mais lui, il avait un visage. En partant de ce personnage, j'ai dû créer le monde dans lequel il vivait. J'ai choisi de partir sur les îles des Caraïbes pour deux raisons : d'une part parce qu'il n'y avait pas beaucoup de jeux utilisant les légendes de ces îles, et d'autre part parce que cette partie du monde est vraiment pleine d'énergie, avec toutes ces couleurs et cette musique.

    Quand j'étais chez Activision, j'avais eu à travailler sur la suite du jeu Ghostbusters (NdGP : à savoir Ghostbusters 2 [Dynamix Inc., 1989] sur DOS). J'ai vraiment un profond respect pour ces vieux titres, en particulier pour un jeu comme Pitfall (Activision, 1982). D'une certaine façon, Greendog est nettement plus inspiré de ce vieux « side scroller » que des autres jeux de plateformes du début des années 90.
Les lianes à attraper, les pièges en pleine jungle, l'aspect très horizontal des niveaux... Il est vrai que les similitudes entre Greendog et Pitfall peuvent sembler évidentes quand on y prête attention.
  • Y avait-il de la compétition entre tous les jeux de plateformes/action sortis sur Megadrive par Sega (Greendog, Kid Chameleon, Sonic the Hedgehog, Chakan, etc.) ? Quelles étaient les relations entre les différents studios internes à Sega à cette époque ?
  • En fait, pour être honnête, il y avait Sonic et puis le reste du monde. Bien sûr, nous voulions tous que nos projets cartonnent. Mais des titres comme Greendog ou Chakan avaient des budgets, des équipes et un marketing très limités par rapport à ce qu'avait Sonic. Ceci dit, il y avait beaucoup de titres venant de Sega of Japan pour lesquels une localisation américaine ou européenne n'avait aucun sens. Du coup, il était primordial pour Sega of America à cette époque-là de proposer des jeux occidentaux pour ces marchés-là.
  • Greendog: The Beached Surfer Dude! s'est-il bien vendu ? Quel fut l'accueil des critiques ?
  • Je crois qu'on peut dire que les attentes de Sega vis-à-vis des ventes de Greendog étaient assez basses, parce qu'en fait la plupart des gens ne savaient qu'une seule chose du projet : ils savaient qu'il s'agissait de l'adaptation d'un jeu de plateau que personne ne connaissait. Du coup, même si le jeu n'a pas fait un énorme carton, les ventes furent bien meilleures qu'escomptées. De plus, les tests étaient généralement plutôt positifs. Les graphismes et les musiques étaient toujours reconnus comme un point fort du titre. Certaines personnes trouvèrent également que le jeu était un peu trop difficile par moment. Bizarrement, l'un des reproches qui revenaient souvent à propos du jeu, c'est que les gens ne comprenaient pas pourquoi le héros n'avait pas de visage. On a également eu pas mal de gens qui prenaient les cheveux blonds ébouriffés de Greendog pour un chapeau de paille...
  • Quelques mois après le jeu Megadrive, une version Game Gear de Greendog: The Beached Surfer Dude! fut commercialisée. Que pensez-vous de cette version portable ? Est-ce que l'équipe a travaillé à un moment sur une version 32X ou Mega-CD du jeu ?
  • J'étais très fier de cette version Game Gear. À cette époque, l'équipe qui s'occupait de la Game Gear avait beaucoup de difficultés à avoir des développements en interne pour cette plate-forme. Encore une fois, en tant que nouvel arrivant chez Sega, j'avais très envie d'apprendre et de travailler avec toutes les équipes internes de la compagnie. En revanche, il n'y a jamais eu de version 32X ou Mega-CD de Greendog en développement.
  • Savez-vous ce qu'il est advenu de la licence Greendog après le jeu vidéo sur Megadrive ? Avez-vous travaillé sur une suite à Greendog: The Beached Surfer Dude! ?
  • Après avoir fini Greendog, j'ai commencé à travailler sur d'autres projets, que ce soit des jeux à licence ou des projets originaux comme Eternal Champions. Du coup, j'étais vraiment trop occupé pour imaginer travailler sur un Greendog 2. Je me souviens que Ric m'avait contacté pour savoir si Sega souhaitait acquérir l'intégralité des droits de Greendog, mais Sega avait refusé l'offre car nous avions déjà beaucoup de jeux à licence et de projets originaux en développement à ce moment-là.
  • Michael, merci pour votre gentillesse et pour le temps que vous nous avez accordé.
  • Merci à vous pour ces questions. Greendog, ça commence à remonter à pas mal d'années en arrière, et du coup, je suis sûr que j'ai oublié plein de petites choses. Ceci dit, j'ai beaucoup de souvenirs du développement de ce jeu, et j'espère que beaucoup de gens ont aimé y jouer.
Jika
(29 avril 2013)
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